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 Musique

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Naflin

Naflin


Masculin Nombre de messages : 24
Age : 34
Date d'inscription : 22/07/2008

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MessageSujet: Musique   Musique Icon_minitimeLun 28 Juil - 11:59

C'est étrange comme une nuance peut tout changer....
Le soleil ne va pas tarder à se coucher, les autres doivent en faire autant. Il n’y a que moi qui soit assez bizarre pour ne pas me coucher quand il fait nuit, quand la visibilité baisse et qu’on ne peut plus rien faire sans allumer un feu. Mais j’aime bien la nuit. C’est beau.

Sans être foncièrement différent, je ne suis pas pareil à eux. Je n'entends pas comme eux. Pour eux, ce qu’ils entendent, ce sont des bruits. Pour moi ..... autre chose.

Les bruits s’enchevêtrent, ils se font entendre comme si il n’étaient pas dus au hasard, mais placés les uns par rapport aux autres. Parfaitement à leur place.

Le bruit de la pluie, composé des centaines de petits sons causés par les gouttes d’eau tombant sur le sol, tout çà forme un ensemble que j’adore écouter.

Par contre, pour les autres, tous ceux que je connais en fait, lorsque j’entends ces sons en harmonie, dans un ordre parfait, ils n’entendent que des bruits désordonnés et chaotiques.

C’est pour çà que je me prépare à partir. Je ne sais ni où, ni combien de temps, et j’ai de sérieux doutes sur le pourquoi. Il y a moins d’une heure, j’avais entendu le vent s’engouffrer dans une souche morte, produisant ces sons, et alors j’étais sûr. Sûr de devoir partir. Sûr qu’à travers le monde, cette anomalie pouvait être importante.

Et maintenant, cette conviction s’estompe. Je doute. Qu’attendre de ce pèlerinage ?

Dans le doute, je me dis que mon voyage peut attendre demain, que fatigué comme je le suis, je ne ferais pas long feu. Je m’allonge quelques instants, et les rêves viennent m’emmener dans leur monde. Là-bas, la réalité n’a plus de force, et mon esprit vagabonde. Je vois un marrais, avec des roseaux battus par le vent. L’un d’eux est arraché du sol et vole à ma main, quand je m’en saisis, il tombe en poussière, sauf un bout, creux, plissé à une extrémité. Je le porte à mes lèvres et souffle dedans. Un son clair en jaillit et se répand autour de moi. Dans mes mains le roseau se transforme, de nouveaux tubes s’ajoutent au précédent précédent, certains plus courts, d’autres plus longs. Chacun émet un son différent de ses voisins. Je souffle dedans de manière à faire ces sons, ces sons qui forment une harmonie, une beauté. Et je disparais, submergé par cet beauté.
Depuis quelques jours, je fais chaque nuit ce même rêve et chaque matin, je me réveille persuadé que ce n’en était pas un. Que cet objet, je peux le faire. Mais l’ancien marais s’est asséché, et les roseaux on disparu. Tout comme cette impression, quelques minutes après.

A mon réveil, la certitude est revenue. Je sais que je dois partir. Mes affaires sont prêtes, et m’attendent dans leur sac. Je les prends, laisse un mot d’aurevoir, et je m’élance vers l’horizon.

Je sens comme un poids qu’on m’enlève. Avec eux, j’étais bizarre. Seul, sur les chemins, il n’y a pas d’autres personnes, pas de ‘‘normaux’’ et donc pas d’anormaux.

Mes pieds me portent et me guident. Ma tête ne sait pas où aller, mais j’y vais, j’avance vers l’horizon, et une fois arrivé, vers un nouvel horizon.
Des plaines défilent, et j’arrive dans une forêt. J’entends le son de mes pas sur les feuilles mortes. De nouveau extasié par le son, je marche d’une certaine manière, un pas rapide, un pas lent, un saut, chaque pas différent fait un son différent. Alors, je fais de mes pas cet ensemble magnifique de bruits. Peu à peu, une chaleur gagne tout mon corps, et au rythme de mes pas, mes bras s’agitent, je tourne, virevolte, remue.

Après un certain temps, la fatigue commença à ralentir mes mouvements, et je m’écroule sur le tapis de feuilles et d’humus, la respiration haletante et le sourire aux lèvres.

J’ai envie de partager ce sentiment, cette joie que m’ont procuré ces mouvements sur les sons. Mais comment les partager ? Je ne sais même pas exprimer çà !

Et pourquoi je n’y remédie pas ? Pour commencer, je leur donne un nom. L’ensemble des sons, quel nom leur donner ? Il faut un nom qui sonne bien, qui soit agréable … Fijao ? Non … Musique ! Oui, j’aime bien, ce sera donc Musique. Et l’objet de mon rêve ? Flûte, c’est proche du son qu’il émet. Tous les objets qui ne servent qu’à faire de la musique comme la Flûte, je les nommes instruments.

Continuant sur ma lancée, je nomme chaque chose qui fait de moi un être étrange: Tempo, rythme, note, mélodie …. Je donne un nom à tout çà, puis je repars.

Les arbres défilent jusqu’à ce que je quitte la forêt. Je croise un ruisseau et je le longe. Le clapotis de l’eau m’évoque une autre musique, plus calme, et elle se mêle au fond sonore. Le vent dans les branches, le chant des criquets, les clapotis du torrent, tous ces sons forment une musique … La musique de la nature.

La nuit tombe, et je m’installe sous un Saule pleureur. Ses branches jouent avec la lueur des étoiles. C’est la première fois que je dors hors du village, et pourtant, je n’ai pas peur. Je suis confiant. Lorsque je m’allonge contre le tronc, je sens la fatigue m’envahir et je sombre dans un sommeil réparateur.

Au lever du soleil, j’entendis des bruits de pas. Je sursaute, me lève. Je suis caché par les feuilles de l’arbre, je bouge une branche et je regarde. Une femme longe le ruisseau, dans le même sens que moi la veille. Elle est seule. Je m’interroge. Que fait-elle là ? D’où vient-elle ?

Mon torrent d’interrogations s’arrête lorsqu’elle se met à faire ce que j’ai appelé ‘‘chanter’’. Une série de mots, dont l’intonation, la manière de les dire forme un ensemble envoûtant.

Je jaillis de ma cachette, elle s’arrête instantanément. Sa voix, qui était pure et cristalline quelques secondes auparavant avait maintenant des notes de crainte et d’angoisse clairement perceptible lorsqu’elle me demanda :

- Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ?

Je ne sais que lui répondre, moi aussi, c’est la première fois que je vois un étranger, et on m’avait raconté de terribles histoires à leur sujet, le soir avant de s’endormir.

- Je ne vous veux aucun mal. J’ai quitté mon village parce que je suis … bizarre ….

Je cherchais que lui dire, quand, sur la rivière, un mouvement attire mon attention. Des roseaux ! Ils sont exactement comme dans mes rêves. Et, lorsqu’elle me demanda en quoi j’étais bizarre, j’en cueillis quelques uns.

- Je vais vous montrer ….

Je sors une petite lame de mon sac, et entreprends de tailler les roseaux pour en faire l’instrument de mon rêve. La lame glisse toute seule, guidant mes mains, taillant les roseaux exactement comme il le faut, avec une dextérité qui me surprend. La dernière fois que j’ai sculpté un objet, je me suis retrouvé avec les doigts sanguinolents, mais là, avec une grande facilité, j’ai sculpté mon instrument.

Je le porte à mes lèvres et me met à souffler, comme dans mon rêve, une note claire en jaillit. Je fais de la Musique !

Elle était restée à m’écouter pendant quelques minutes, puis elle se mit à chanter et nos musiques s’entrelacent, formant un ensemble encore plus beau que dans mes rêves.

Puis, sans que nous nous soyons concertés, le morceau arriva à son terme. Prenant la parole, elle me demanda :

-Toi aussi ?
- Oui
- Et tu sais pourquoi tu es parti ?
- Pas vraiment, je pense que je dois faire quelque chose.
- Autant pour moi. Je propose que nous fassions route ensemble …. Qu’en penses-tu ?

Voilà, on est deux. Et on marche, vers l’horizon, les jours passent, et d’autre personnes se joignent à nous lors du voyage. L’une d’entre elles, avec un pot dans les mains, en le frappant, elle fait de cette harmonie de sons que tous acceptèrent de nommer comme je l'avais imaginé : Musique. Le suivant en fit avec un genre d’arc à plusieurs cordes. Le troisième en remuant des cosses remplies de graines.

Et ainsi de suite, au début, j’étais seul, maintenant, nous sommes une dizaine, une vingtaine. Chaque jour, notre chemin croise celui d’autres personnes qui parties en pèlerinage vers l’inconnu, se joignent à nous. L’inconnu, la peur qui en découle est moins effrayante quand on a des gens avec nous.

Et chaque soir, nous nous installons et jouons, la musique nous envahit et s’entend à des kilomètres à la ronde. Nous faisons de chaque nuit une fête, mais aussi une étude. Nous nommons ce que nous découvrons dans la musique, les formes de musiques, les types d’instruments, un nouveau langage jaillit de nos instruments avec la musique. Et chaque chose, qui nous isolait des autres, nous réunit. Nous partageons cette différence, et nous la jouons.

En retour, l'univers reconnaissant de l'avoir fait vibrer jusqu'au tréfonds de sa réalité, d'avoir tissé avec nos voix et nos instruments une parcelle d'harmonie en lui, nous offre l'abondance. Sur le chemin de notre procession, les végétaux se développent et fleurissent à vue d'œil, si bien que si la faim vint à entraver notre voix, il suffit de tendre la main pour cueillir le fruit offert par l'arbre, qui avant notre passage n'était qu'une graine.

Durant notre périple, nous passons souvent à proximité de villages et de villes, à chaque fois, nous répétons le même rituel, un chant auquel chacun de nous participe, composé de milliers de voix, qu'elle soient les nôtres ou celles de nos instruments, il se répand sur toute la superficie du village, c'est un appel, qui invite chaque personne capable d'entendre la musique à nous rejoindre. C'est une vielle femme qui en a eu l'idée, et malgré son âge avancé, elle est l'une des meilleures cantatrices. Dès qu'elle commence à entonner quelques notes, tout le monde se tait, ou accompagne sa voix. Elle chante des histoires, celles qu'elle a vécu aussi bien que celles qu'on lui a raconté.
Le chant qu'elle a imaginé est très astucieux : le chant incite ceux qui l'entendent comme tel à venir, tandis que pour les autres, les voix sont couvertes par le tintamarre des instruments.

Les mois passèrent, et toujours sur notre route, de nombreuses personne nous rejoignent. Nous sommes maintenant des millions, répartis en centaines de groupes dispersés à travers le monde. C'est ainsi que la mort joignit sa voix macabre à nos chants.

C'est étrange comme une nuance peut tout changer …

Plus nous progressons, plus nous rencontrons une opposition, toujours plus forte. Ils ne nous comprennent pas, pour eux, nous sommes étranges. Mais de l'inconnu, on peut tirer deux choses : la sagesse ou la peur, mais c'est beaucoup plus facile de craindre. C'est pourquoi, ils ont eu peur de nous. Et de la peur, est née la colère, la haine et la jalousie. Nous ne demandions qu'à faire partager la musique à travers le monde, mais ils nous virent comme des parasites, ne travaillant pas la terre pour en tirer notre subsistance comme eux, ils ont cru que nous leur volions leur nourriture.

Et puis à chaque fois que nous passions, quelques membres du village repartaient avec nous. Mais ils se sont d'abord imaginé que nous les kidnappions, puis, voyant que c'était de leur plein grès qu'il se joignaient à nous, ils en est ressortit autre chose. Ils disaient qu'ils aimaient ceux qui venaient avec nous, mais si c'était effectivement le cas, pourquoi les empêcheraient-ils de vivre l'extase que procure la musique ? Pourquoi les priver de cette beauté pour les maintenir dans la grisaille de leur village ? Non, ce n'était pas de l'amour, mais de l'égoïsme. Ils ne volaient en rien le bonheur de ceux qui répondaient à notre appel, mais le leur uniquement : et pour cela, il leur fallait garder auprès d'eux ceux auxquels ils tenaient.

Jalousie, égoïsme, peur, il n'y a qu'un pas à franchir pour pénétrer dans le domaine de la haine, et il fut allègrement passé.

Cela faisait un an maintenant que tout avait commencé pour moi, et maintenant, des rumeurs nous parviennent, transmises par les nouveaux-arrivants. Elles racontent qu'une armée est en train de se former. Une armée contre nous.
Ils veulent nous tuer, et pas un seul d'entre nous n'a la moindre idée pour nous sortir de cette mauvaise passe. Alors nous reculons. Nous décidons d'un commun accord de retourner dans les lieux où les gens ne nous étaient pas aussi hostiles, mais à notre retour, nous découvrons avec stupeur qu'eux aussi nous haïssent.

Le premier mort fut un jeune homme qui avait essayé de calmer les gens du village d'où il provenait. Il fut lynché sur la place centrale.

Des incidents tels que celui-ci s'entaient alors, au début, ce ne sont que des incidents isolés, mais çà ne tarde pas à devenir plus général. Et maintenant, des rumeurs d'armés nous parviennent de partout.

Ils nous tuèrent tous.

Pourtant, la musique a tout de même survécu. Nos tueurs, l'ont découvert d'une autre manière. Ils furent extasiés d'entendre le son de leurs lames pénétrant dans nos chairs. De nos os se brisant sous leurs pierres. De nos râles d'agonie. Notre souffrance fut pour eux une chose magnifique, la beauté de la musique de la mort.

C'est ainsi que s'achève notre Odyssée de la musique. Chacun de nous était capable de créer une beauté incomparable, et nous fûmes décimés par ceux qui ne purent accepter que le monde dans lequel ils vivaient pouvait être plus beau. Et dans la mort, notre don se transmit à nos tortionnaires, et bridé par la souffrance de notre mort absurde, il put se répandre dans le monde entier.

Maintenant, nous entendons tous la musique, mais nous continuons de traquer et de tuer à notre manière ceux qui nous font comprendre que nous ne sommes pas dans la vérité. Après tout, il en est ainsi depuis si longtemps : pourquoi laisser tomber notre vie stable pour un idéal plus beau ? La bonté ? La sagesse ? L'amour ? Quel besoin en avons-nous ?
La musique ne sert à rien, pas plus que l'oxygène, ni que la vie.


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