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 Réminiscences (Union IV)

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Syllas

Syllas


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MessageSujet: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeVen 12 Sep - 20:01

[HRP]Par quoi commencer, si ce n'est un bonsoir à mes lecteurs (même si j'en doutequ'il y en ais légion ici pour l'instant, étant donné que tout mes précédants RP, même avant Aëringor, étaient postés sur le Board par commodité par rapport à l'éditeur de forumactif, mais heureusement, celui-ci s'est fait améliorer recemment, rendant possible un travail propre....bref). Ceci peut être à la fois considéré comme la seconde/quatrième partie de ma dernière grande oeuvre en date, Union, et des personnages, des lieux. tout comme le background seront repris. Les lecteurs pourront au choix parcourir un peu icelui, pour se familiariser avec le fond, mais au final, la lecture directe de l'oeuvre ci-dessous que je considère comme plus aboutie sera quand même préférable. Ceci est bien entendu une avant-première par rapport au board.

Malheureusement, elle n'est pas terminée, et les vacances passées, mon rythme d'écriture se fait très lents à cause des courtes plages horaires. 246 pages existent déjà, mais je pense que le total dépassera éllégrement les 300. D'habitude, j'attends d'avoir terminé tout, relu, et fait des ajustements, pour poster l'intégrale, cette méthode me convient mieux car laisse davantage de fléxibilité. Mais là, dans notre idée actuelle d'(ré)introduire cette bonne vieille science-fiction sur Ter Aelis ( et aussi à me forcer à le terminer!), je vais commencer tout de suite par les deux premeirs chapitres, éventuellement plus tard le troisième. Mais la suite...après la toussaint certainement, sauf miracle. Pour ajuster, rajouter des détails, faire des modifictations nécessaires, il n'est pas exclu que j'édite plus ou moins ce qui va suivre lorsque je vais poster l'intégralité. Je vous prie d'escuser le désagrément et vous souhaite un agréable vol avec Unionnian Spacelines (^^).
Bonne lecture donc, et bienvenue en Union.

Votre dévoué Amiral.[HRP]



Union IV
Réminiscences


Он Будущее*

« Briser l’ennemi: La terreur et le désarroi »

(Amr. N. Syllas d’Acre, « La Guerre Moderne »)




Le mécanisme de fonction universel primaire. En fait, c’est le néant. Il n’y en a pas. On commence par un état primitif, qui soit s’affecte lui-même, soi est affecté par un facteur qui forcément provient d’une autre strate. Cela entraîne une évolution géométrique. Une avance inéluctable. Chaque action aboutit à une réaction, qui est elle-même affectée et évolue. Sans être le fruit du hasard, les mécaniques qui semblent tout contrôler en sont en fait le fruit. Le fait que le mécanisme affecte tout l’univers, y compris les hommes, rend icelui inenvisageable pour nous. Le temps, la matière, l’évolution universelle et humaine, tout cela ne fait qu’un tout qui est relié par des liens que nous n’arriveront jamais à appréhender entièrement. En fait, nous pouvons tenter cela, et pour la population, il est vitale qu’elle ne perde pas une chose: l’espoir.
L’espoir est-ce qui la pousse à croire en ce qui est au dessus d’elle, que ça soit un dieu, matérialisé par une religion, ou juste une spiritualité individuelle…ou alors un système politique. Tant que ces facteurs sont maintenus, elle agira de façon prévisible et canalisable, nous permettant d’expérimenter et d’agir. Elle n’est pas prête à ces révélations. Nous ne serons jamais parfaits, mais nous devons maintenir d’effort d’expansion, dans la lignée de l’univers qui grandit, nous devons nous propager, franchir à chaque fois de grands pas dans notre devenir humain et technologique: la technologie est en effet l’outil et le prolongement des rêves de hommes.

Communication interne de la cellule 11, rattachée aux Départements non-organisés du gouvernement central de l‘Union. Niveau de sécurité SG.




An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Tsarysyn, Union des Galaxies Eloignées
Quartier Résidentiel n°348



-« Il est certain que la cérémonie d’intronisation du nouveau doge a été le point fort de la vie culturelle et politique de cette année sur Christiansa. En effet, ce magnifique événement s'étant déroulé pendant la matinée au Palais Ducal de la planète a été relayé partout dans l’univers, et de nombreux chefs d’états étrangers y ont étés vus, entre autre les présidents Jadéens et Kwajeliens, le Grand-Duc d’Empire, les principaux chefs des nations de Galaxie 6, ainsi que d’autres ministres et ambassadeurs, preuves que la Sérénissime République n’a rien perdu de sa renommée sur la scène internationale, malgré son incorporation plusieurs millénaires en tant que membre fondatrice de l’Union. L’intronisation de Constantin III Ange à la charge suprême a eut lieu devant le Grand Conseil entier réuni en habit traditionnel, dans la Salle des Marbres du Palais, en présence des membres de la Quarantia, et des dignitaires du gouvernement central de Tsarysyn. L’émouvante cérémonie a été suivie du survol de la planète à bord de la nef des air Ducale, le Buccentaure, dont le faste est unanimement reconnu comme inégalé. Cette croisière des airs—qui durera encore cinq jours—se fait en compagnie de tout les patriciens des Casa Vecchies, Komtarques et Fullakontarques de la République. Ainsi, on retrouve à bord, en plus de l’Amiral Von Heigins qui y est naturellement invité du fait de sa charge de Chef de l’Etat fédéral, les célèbres Amiraux Law et Syllas, et les nobles Kenserl, Erwin, Von Zwueid, respectivement Fullakomtarques d’Assedo et d’Acre, de Rhode, de Tenar et de Zwueid. Viennent ensuite les Kontarques D’Asteigno, Junova, Zen, Zustinian, Aleksandrov, Falier…Mais quand est-il du doge dans tout cela? Son Eminence Constantin III Ange n’a pas été jusqu’ici remarqué par sa fouge et son expansivité, certes, mais il est considéré comme l’un des meilleurs administrateurs et diplomates du Grand Conseil, qui l’a élut à une écrasante majorité contre son concurrent Hens Tersa. En effet, dès son entrée en fonction comme membre du Sénat, Constantin s’est fait remarquer dans la crise… »

Encore ruisselante, enroulée dans un long et ample vêtement barbare comme on les faisait de nos jours sans qu'elle sache vraiment qui avait eut cette idée absurde, Hel avança d’un pas hésitant, répandant une immense mare d’eau pleine de savon chimique à l’odeur douceâtre issu toute droit des usines d’Assedo, qui lui donnait parfois la nausée quand elle en imaginait les ingrédients, sur le sol de matière plastifiée d‘où émanait une douce chaleur, désastre qu’un automate gris, jaillissant de son abri, s’évertua immédiatement à réparer à grand renfort d’ustensiles tordus, alors que la maîtresse des lieux donnait un coup du bout du pied dans le contrôle d’énergie du poste holographique, qui coupa immédiatement la retransmission du voyage de l’immense aéronef doré qu’était le Buccentaure dans les cieux de Christiansa, pendant que le commentateur exaltait les mérites du nouveau Doge lors de la crise du secteur 5. La jeune femme poussa un petit cri de victoire, avant de battre en retraite vers le carrelage de la salle de bain, entre deux caisses d’effets personnels traînant dans son nouveau chez soit qu’elle n’occupait que depuis quelques jours. Après une adroite acrobatie pour éviter que l’ample vêtement — qui plus est pour l’instant plus que mal ajusté, même si normalement porté, il n'était guère plus pratique — ne fasse tomber la lourde mitraillette FW2 traînant sur une tablette, tout à fait déplacée dans cet environnement, suivie d’une élégante vrille esquivant à la perfection l’habituel tas de vêtements, de porteurs de données et de feuilles tout juste déballés qui s’était formé, elle revint dans la salle de bain. Plus tranquille à présent qu’avec cet infect bruit de fond, elle commença par activer le système d’aération fin de chasser la vapeur de sa douche à réchauffement ionique, puis put s’habiller convenablement, mettant enfin correctement la complexe pseudo-tunique bleue marine sur ses épaules, qui, heureusement, était constituée de matières adaptées pour ne pas prendre l‘eau. Pas qu’elle se sente laide là-dedans d‘ailleurs, mais elle n’aimait pas devoir se casser la tête pour enfiler ce genre de pièces compliquées qui limitaient ensuite sa liberté de mouvement. Elle préférait de loin ses vêtements simples pratiques avec leurs multiples poches, ce qui était bien plus utile pour aller au fond, et même se mouvoir dans la vie quotidienne de façon générale. Mais bon, il était bien nécessaire de se conformer à la masse de temps en temps, surtout quand on compter se plonger dans celle-ci. Elle n'avait pas vraiment de le choix de toutes façons aujourd'hui, mais elle ne voulait pas apparaitre trop « vulgaire » pour la rencontre du midi. Depuis le temps…
Hel secoua sa tête pour se forcer à arrêter de penser, et sortit de son étuis un petit appareil gris-blanc aux multiples boutons complexes qui, une fois allumé, se mettaient à luire d’un jaune pâle. Elle effectua quelques réglages, et tourna encore d’un demi tour le bouton d’allumage. Un petit rayon rouge apparut dans la continuité du petit cylindre, et elle se le passa doucement sur la peau de son visage, y créant quelques contrastes, en guise de maquillage simple et pas trop surchargé... de toute façon, ayant perdu l'habitude, elle n'avait pas envie de s'escrimer à en faire plus. Les traits de son visage, quoiqu’un peu anguleux, étaient réguliers et agréables à voir, entre deux yeux d‘un bleu-vert très clair et fascinants et une bouche qui pouvait passer de la simple fente au grand sourire. Satisfaite, elle fit quelques petits soins à sa peau avec un produit originaire des mêmes usines d'Assedo, et passa sa main dans sa chevelure d‘un air sceptique. La crinière brun sombre finissait tout juste de sécher. Avec une nouvelle moue toujours aussi incertaine, elle termina le boulot à l‘aide d‘un séchoir à ondes, et les brossa consciencieusement. Ayant définitivement terminé, elle rangea les vieux vêtements, et revint dans la pièce principale, où l’automate continuait de sécher des flaques imaginaires. Les lèvres de la jeune femme eurent un petit pincement, et puis soudain un grand sourire, quand elle commença à s’arquer, et faire prendre à sa jambe droite du recul. Mais, alors même qu’elle la lançait en avant avec pour objectif d’effectuer une frappe chirurgicale en plein milieu de ce machin qu'elle ne conservait que pour éviter la corvée, elle s’emmêla dans l’ample vêtement dans lequel elle n'était définitivement pas à l'aise, et manqua de tomber sur sa victime, qui se retira prestement dans son rangement, dans un mur, au niveau du sol, alors que Hel, furieuse, se redressait et lui lançait un regard noir. Un petit rideau holographique reprenant les motifs du mur dissimula l’instant d’après la cachette à ses yeux. Hochant toujours la tête avec énervement, elle alla à sa tablette où se trouvait toujours l’arme de guerre. Il ne valait mieux pas laisser traîner ça comme ça pendant son absence. Enfin, on n’allait pas tout de suite trouver son nouveau lieu d’habitation, mais malgré tout, elle ne commettait pas ce genre d’imprudences. Elle glissa le long canon dans un tiroir, et recouvrit le tout des vieux porteurs de données informatiques, avant de fermer. Puis, elle s’empara du couteau télescopique qui restait en haut, et de sa petit boucle servant à l’attacher. Elle examina son habit une seconde, puis releva les deux épaisseurs au dessus de son bras droit, et y installa le dispositif, qui, l’arme repliée, devenait invisible. Elle ne sortait jamais sans, depuis Kamensk, où elle n'avait échappée une fois belle. Avec le métier, on devenait parfois un peu parano, mais mieux valait ça que de finir se vidant de son sang dans une benne à ordures quelque part au fond, avec éventuellement une Epave lui grignotant les doigts de pied. A cette pensée, un petit sourire naquit sur ses lèvres, et elle eut un rire intérieur. Que je suis bête, se dit-elle.
Ayant terminé de réenrouler son complexe vêtement selon un motif qui n'était qu'à moitié certain, elle prit encore quelques petites choses — créditeurs, com., clé informatisée, pendentif au bout duquel se trouvait son bloc—, avant de jauger une dernière fois son habitation d’un bref coup d’œil, puis de passer la porte.
Dans la cage d’escalier, l’ascenseur gravifique s’apprêtait à repartir, à vide. Elle fonça, et passa de justesse avec une nouvelle torsion, nous sans craindre de coincer un des pans de son vêtement dans la porte à triple battant, mais heureusement il n’en fut rien. Le bouton de descente enfoncé, et l’appareil fila vers le niveau zéro à toute la puissance de ses dispositifs à répulsion, avant de s’arrêter en douceur. Hel quitta la cabine d’un saut, et jeta un coup d’œil circulaire dans le garage. A l’autre bout, une large partie était ouverte et donnait sur la branche d’hyperhighway qui slalomait entre les tours. Dans la lueur bleu pale des projecteurs qui éclairaient la voie, elle finit par repérer son véhicule, rangé discrètement sur le côté. Elle s’en rapprocha, et commença par retrousser sa tunique afin de pouvoir activer son bloc correctement. Une fois la cuirasse d’Hexanox stabilisé couvrant son corps, elle enfourcha la puissante machine, et prit la direction de l’hyperhighway.
Dans le 348, on était encore au beau milieu de la nuit, mais de toute façon la planète n’avait plus d’heure réelle en dehors de celle du quartier du gouvernement, où il était seize heures trente HGS à cet instant. Ainsi, le trafic routier était souvent le même, relativement chargé, même si cette bretelle restait très fluide. Après quelques minutes à triompher de la circulation, entre les magnétrains sur réseau, les hordes de véhicules plus ou moins individuels, et les gigantesques canalisations aériennes courant toujours sur le côté des voies, elle plongea dans un tunnel translithospherique uniquement éclairé par des projecteurs orangés et par les tubes qui plongeaient dans le manteau planétaire. Ici, il y avait un peu plus de monde, étant donné que ces axes étaient des raccourcis très pratiques. Un massif semi-remorque monopolisait une voie à lui seul, et le chauffeur, vu les écarts réguliers effectués par le monstre, ne devait pas être frai. Le petit jeu se poursuivit encore pendant quelques instants, avant qu’il ne quitte le souterrain au grand soulagement de tout les usagers, pour aller causer des accidents ailleurs.
Après cette brève traversée, elle prit à son tour une rampe latérale, passa en dessous du panneau « Secteur 106 » et émergea dans le soleil levant de la zone « Aube » de la planète, selon la convention météorologique.

Note: (*) Le futur, en russe. Petite touche exotique.


Dernière édition par Syllas le Ven 12 Sep - 21:39, édité 1 fois
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Syllas

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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeVen 12 Sep - 21:18

Le secteur 106 était une zone tout à fait plaisante. Formée de parcs et de jardins traversés par de belles avenues au trafic clairsemé, on n’y retrouvait aussi bien des enfants jouant dans les grands vergers que des vieillards bardés de médailles qui, installés sur des bancs à observer la jeunesse, se remémoraient leur temps, quand ils avaient participé à la pacification des contés de galaxie 8.
Hel laissa son propre moyen de transport à la consigne et désactiva le bloc qui rejoignit de nouveau son petit logement au bout du pendentif, avant de tapoter un peu sa tunique afin qu’elle ne paraisse pas trop froissée et pliée, mais heureusement, celle-ci était de bonne qualité — la moindre des choses pour le prix où elle n'avait payée! — et rien n’y paraissait. Satisfaite, elle quitta le souterrain s’engagea sur le trottoir. Ici, il n’y avait pas d’insondable abyme des deux côtés de la voie, c’était d’un seul tenant, même si on se trouvait toujours en altitude. On se serait presque cru sur un monde de province…
Profitant avec délice de la caresse de la lumière d’un blanc éclatant et pur de l’étoile de Toula sur sa peau, la jeune femme marcha tranquillement, sans se presser, en laissant vagabonder son regard dans les espaces verts. De toute façon, elle avait le temps, encore vingt minutes au moins. Ignorant le soudain remue-ménage de l’autre côté de la rue — un groupe d’adolescents manifestement paniqué, lui apprit néanmoins un regard machinal du coin de l’œil, réflexe de protection du fond, où il fallait toujours être sur le qui-vive. Elle poursuivit encore un peu, puis se décida à s’installer sur un banc. A peine assise, sous l’ombre trouée de raies lumineuses d’un grand peuplier de Sirius, son esprit vagabondait déjà, la douce chaleur aidante.


Certaines actions amènent certaines situations. De même, certains situations amènent certaines actions. Nous sommes en droit d’être perplexe en se posant la question de la mise en réseau desdites relations logiques. Aboutirions-nous ainsi à l’infini?
Guuis Quyndla, Philosophe renommé.


-- -- --

An 3857, E.d.U (Eon de l’Union).
Acre



Ce jour là, la mine de l’Amiral Von Heigins était clairement contrariée. La dernière fois qu’il avait été vu avec cet air là ici, c’était après que son véhicule antigravitationnel ait eut une panne à trente kilomètres du manoir, et qu’il ait du attendre trois quart d’heure sous une pluie diluvienne qu’une jeep de l’armée vienne le chercher, et l’amène dans des conditions déplorables, à savoir force cahots, détours, perditions, flaques de boue, etc... Il n’avait même pas pu avertir son hôte, qui lui aurait évidemment envoyé sa propre RR T-44 « F.uls ». Toute la soirée, Horatius fut bougon, sans clairement en vouloir aux Syllas, mais le lendemain c’était oublié.
Aujourd’hui, il jetait à sa tasse de thé — pourtant délicieux, il n’y avait pas à dire, Rea s’en sortait tout à fait — un regard plus que méfiant , tout en se tassant dans son fauteuil, tapotant nerveusement le pommeau de sabre de parade réglementaire, posé immédiatement à côté. En face, son collègue et ami de longue date, l’Amiral Syllas, était quant à lui installé dans un profond sofa, sa tasse également entre les mains, la casquette posée à côté, le regard un peu fatigué. Il passa sa main gauche dans ses cheveux d’un noir d’ébène tout en buvant un peu du bouillant liquide qui lui réchauffa instantanément les boyaux refroidis. En effet, ils avaient auparavant marché pendant deux bonnes heures sur le sentier le long de la côte, et auraient pu continuer, si l’habitude n’avait pas avertit l’hôte qu’un coup de vent se préparaient. Ils avaient bien fait, car ils n’étaient même pas encore passés sous le porche, qu’une pluie fine et intense s’était abattue sur la lande que dominait le manoir. Fourbus, les deux militaires s’étaient installés dans le salon où trônait également le magnifique siège du patriarche que Anastas, tenant du titre, n’occupait plus que très peu, pour lui privilégier le lit informatique d’assistance de sa chambre, qu’il ne quittait plus que rarement. La ravissante Rea qui était, une fois n’est pas coutume, présente, leur proposa immédiatement à leur rentrée un thé, qu’il acceptèrent avec joie. Mais à peine la femme de Syllas était partie que l’Amiral de la flotte de Tsarysyn reprenait son air courroucé, et entrait dans le mutisme des mauvais jours.
Finalement, il bailla, et déclara simplement:

-Tout cela est sacrément contrariant.
-En effet. Enfin, le temps est ici souvent pendant cette période, ajouta-t-il avec un sourire devant la tête que fit Horatius en entendant cela, avant de dire: quant à ce qui se passe en métropole… ça ne m’étonne même plus.
-Ca ne vous étonne plus, ça ne vous étonne plus, Nikolaï, certes, mais si on n’y fait pas attention, on pourrait y laisser des plumes. Vous connaissez tout aussi bien que moi les antécédents du bonhomme.
-Oh oui, je les connais. Enfin, si notre action se passe comme prévu, nous n’aurons plus à nous faire de soucis pour lui. Ni pour les autres d’ailleurs.
-Prions pour que cela se passe comme vous le dites. Il vaut mieux rester prudent jusqu’au dernier moment. Enfin…

Horatius commençait tout juste à se détendre, et s’étira un peu dans son fauteuil, avant de prendre à son tour une gorgée, et de poser la tasse sur la table basse, à côté de celle de l‘Amiral. Celui-ci tendit le bras vers une petite télécommande traînant dans un vide-poche, et enfonça un bouton. Quelques notes douces s’élevèrent dans l’espace autour d’eux, et il continuèrent de parler tranquillement, prenant de temps à autre un peu de thé. Cinq minutes plus tard, Rea les rejoignit, et s’installa dans un troisième fauteuil, s’étant faite elle-même une tasse aux aromes d'El-Eerip. La discussion s’engagea sur elle, qui répondait volontairement aux interrogations profanes de l’Amiral de la Flotte, homme galant et agréable avec les femmes. Il trouvait l’idée à la fois fascinante et cocasse de rester la moitié de l’année à gratter des fonds terreux des planètes les plus isolées de l’Union, et l’autre dans les fonds tout aussi terreux des bibliothèques universitaires, isolés de toute présence humaine, même au cœur des métropoles nationales.
D’ailleurs, il ne se remettait toujours pas de la façon dont son collègue l’avait connue. Une vraie épopée! Il imaginait tout à fait Nikolaï, vingt ans de moins, en uniforme d’ officier de l’infanterie de marine — avantageux, ajouta-t-il tout de même avec un grand éclat de rire—, serré sur un minuscule siège de transporteur civil aérien, écrasé par le matériel militaire sur ses épaules, sur ce trou majuscule qu’était Ressirgo, et quelques rangs derrière Rea Venes, jeune femme exotique et fraiche comme une fleur, et prête à commencer son travail de taupe industrieuse avec une trousse pleine de brosses magnétiques dont le calibre ne variait que d‘un millimètre de l‘une à l‘autre. Et bien sûr ensuite l’accident, leur cercueil volant s’écrasant, et les deux faisant partie des rares survivants, se retrouvant empilés les uns sur les autres dans la carlingue en feu, dans une position assez…proche — nouvel éclat de rire, décidemment Horatius s’animait—, pour ensuite se retrouver pendant une semaine chez les nomades. Et c‘est que la Rea devisait avec eux, et faisait même de leurs machins chamaniques biscornus qui n‘auraient pas du tout plu à l‘évêque d‘Eupatoria. Finalement un vieux fou d’religieux étant sur les traces du démon quelconque qui serait apparu à des touristes—qui avaient eut des problèmes une isolation et non pas vus les braises de l’enfer—, les avait trouvés, à l’ombre d’une falaise sur la côte, essayant de réparer la com. de leur transporteur sous l’œil méfiant de ces bestioles d’indigènes.

-Voyons Horatius, ce sont des gens fascinants! Protesta avec un sourire l’archéologue, sans pour autant couper véritablement l’amiral.

Et ensuite nos deux clients avaient correspondus pendant des mois, avant de se marier. Ah, la belle affaire Nikolaï; sa femme est absente onze mois dans l’année, et lui également! —hilarité prolongée— et c’est'ce bon vieux Frederick qui prend possession du manoir, pour pouvoir faire tranquillement ses gammes, jusqu‘à en rendre folle sa malheureuse progéniture exposée à ce traîtement inhumain.

-C’est vrai que Frederick est un virtuose, reconnu néanmoins le soudain jovial Amiral, avant d’associer cela à un de ses goûts…et une de ses perpétuelles préoccupations en même temps: je me demande si, une fois sa nomination à l’orchestre National d’Acre, il pourra faire jouer quelques opéras de la tétralogie de Wagner…il y gagnerait mon éternelle reconnaissance.
-Bah, déjà il doit acquérir cette nomination, et je ne veux pas être accusé de népotisme. Même s’il est un excellent organiste, il y a toujours des éléments subversifs qui pourraient l’en empêcher. Mais je suis confiant, le chef d’orchestre, Gunchien Yao, en plus d’être selon moi un des meilleurs joueurs de cor d’harmonie de son époque, est quelqu’un de très intelligent, et a sûrement su déceler le talent de mon frère.
-Oui, certainement. D’ailleurs, où se trouve votre frère? Il n’était pas dehors, ni avec nous, et j’entend encore moins de piano dans l’air.
-Il devrait être parti en début d’après midi en ville faire une course, puis passer à l’académie. Même s’il n’assume que peu de cours, le rectorat lui prend beaucoup de temps, et il doit également faire acte de présence pendant les périodes quasi-vides. D’ailleurs, Constanta est également absente. Franck disait que leur régate sur Assedo devait, comme tout les deux ans, rassembler toute la famille…
-Cela doit être fort beau, dix mille navires en mer tropicale. Enfin, c’est ma seule semaine au manoir, et je n’ais même pas vu Nikolaï depuis des mois bientôt.

Ils échangèrent un regard en souriant, puis prirent tout deux une gorgée. Von Heigins, nullement gêné, il faisait presque partie de la famille, hocha la tête comme pour confirmer qu’il fallait mieux rester chez soit quand on le pouvait de la façon, avant de boire à son tour.
On entendit soudain quelques cris étouffés et rires dans le couloir adjacent. Horatius lança un regard intrigué à ses hôtes.

-Ce sont les enfants. Constanta nous les a laissés pendant qu’elle est là bas, explique Rea, tout en se levant. Ils font du bruit! Il ne faut pas qu’ils réveillent Anastas, il est d’une humeur terrible quand il ne peut dormir à son aise!

Elle quitta rapidement la salle. Von Heigins s’était levé à son tour, par réflexe, et jeta un coup d’œil à Nikolaï, qui haussa les épaules, posa sa tasse, pour se redresser lui aussi, et ils suivirent le chemin qu’avait prit la maîtresse des lieux.
Le couloir était assez large, et normalement très bien éclairé par de multiples miroirs, mais le ciel nocturne couvert d’où jaillissaient des trompes d’eau contre la verrière du toit ne laissait guère entrer de lumière, qui provenait uniquement de la porte entrebâillée du petit salon qu’ils venaient juste de quitter. Dans l’obscurité, Horatius butta contre une commode—sans rien briser, heureusement, il ne se serait pas pardonné de casser les objets parfois millénaires de la collection familiale son ami.
Ils rattrapèrent la femme de Syllas qui examinait systématiquement les pièces de part et d’autre du couloir, et finirent par grimper les marches de marbre de l’escalier du hall central. Sur la plus haute, le groupe rencontra un petit garçon assis, tenant dans chaque main un petit vaisseau spatial jouet en duracier, et les faisant voler du bout des bras autour de lui. Rea s’agenouilla, et demanda de sa voix lente et douce:

-Alexis…où est ta sœur?

Le garçon posa le gros astronef bleu-gris de sa main droite, et désigna le couloir se dirigeant vers l’aile droite en expliquant sur un ton très sérieux:

-Elles sont parties par là.
-Elles? Demande Rea, toujours gentille.
-Oui, Cass et Kerstin, répondit Alexis, retournant à ses jouets.

Immédiatement, sa tante repartit dans la direction indiquée, suivie de son oncle. Von Heigins lui glissa, un sourire sur les lèvres:

-Il est lentement tard, tu ferais bien d’aller te préparer, bonhomme. Tu dois bien avoir un ou deux livres avec des histoires de vaisseaux spatiaux pour lire au lit, non?
-[colo=myOui, amiral! [/color]Fit le bambin en se redressant et imitant maladroitement le salut militaire qu’il avait vu exécuté par de nombreux officiers devant son oncle lorsque celui-ci les recevait chez lui.
-Et bien, tu sais déjà reconnaitre un amiral petit, t‘as du sang d‘on oncle, dit paternellement Horatius en lui passant la main dans les cheveux avec un grand sourire, allez, repos et vas-y.

Reprenant ses astronefs miniatures, Alexis tourna les talons et alla jusqu’à sa chambre, tandis que l’Amiral, encore souriant prenait la direction opposée, à la suite que Syllas et de sa femme. Il les retrouva un peu plus loin, dans une chambre d’amis vide. Là, deux filles habillées de couleurs chatoyantes s’étaient installées sur un lit avec de nombreux magazines et porteurs de données holographiques, dont le sujets allaient de larges photographies des monts de Lafonia et de Rhode aux dernières modes féminines, en passant par des autres choses aussi diverses et variées que les actualités de Kamensk, un magazine d’armes, et des ustensiles de Motograv—elles étaient à l’instant en trait de regarder, fascinées, un Bloc-armure de nouvelle génération—ou encore l’enregistrement des meilleurs moment du festival annuel de la musique Country de Tsarysyn sur suprabande. Une institution.

-Bon les filles, c’est pas tout, mais si ton grand-père, Cassandre, se réveille, ça ne va pas être marrant, lança en voyant cela la maîtresse des lieux.

L’interpelée lança à sa tante un regard assez hostile, mais commença à obtempérer, rangeant plusieurs de choses traînants. Quand elle eurent terminé leur tache ingrate en mettant tout dans un gros sac de toile, Rea s’accroupit, et leur propose de venir avec elle à la cuisine prendre un chocolat chaud. La proposition fut applaudie, et bientôt seuls restèrent les deux amiraux, qui quittèrent également la pièce.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeVen 12 Sep - 21:18

Traînant encore un peu la patte, Cassandre suivait sa tante, qui le mena prestement jusqu’à la cuisine à travers la maison obscure. Elle aimait bien tante Rea, mais il ne fallait pas qu’elle soit trop différente non plus de d’habitude pour la simple raison que ses parents étaient absents. De plus d’être gentille et tolérante, elle les laissaient souvent faire des choses qui auraient fait grimper sa mère au plafond. Quand à son oncle Nikolaï, quand il n’était pas dans un océan de papiers et porteurs de données ou en grande conférence avec d’autres marioles en uniforme—comme celui du jour, le bonhomme à la carrure d'ours de cirque; elle se demandait bien comment un pareil clown avait pu devenir Amiral, franchement…—, il brillait par son absence, et la baraque était à eux. Dieu sait que Kerstin et elle y avaient déjà fait des conneries monumentales, juste rafistolées avec soin pour qu’on ne les remarques pas, comme la fois ou un large pan de la rambarde de bois de l’escalier de service s’était détachée, et que les deux filles s’étaient débrouillées pour chercher une paire d’attaches magnétiques et un applicateur automatique de torsion dans la cave afin de réparer cela. C’était clair que ça ne tiendrait plus aussi bien — elle évitait soigneusement cette rambarde à présent—mais ça en avait l’air, et c’était ce qui comptait.
Rea sortit deux grands tasses de chocolat chaud du synthétiseurs, et les mit dans les mains des filles en leur disant de souffler dessus car c’était très chaud. Avec un sourire angélique, elles quittèrent la cuisine, alors que leur tante retournait parler de choses ennuyeuses avec les bonhommes—la discussion tenant la palme avait eut lieu un an plus tôt, ayant fait intervenir une certaine Brenda, le pédisent Rumilus, et le grand championnat galactique de galoche sur piste. Pouffant de rire en se rappelant de ce haut moment d’ennui et de ridicule, elle s’engouffrèrent dans leurs chambres respectives.


Rea retrouva les deux amiraux déjà pris dans une très grave conversation, les visages fermés. Les tasses avaient étés promptement vidées, et reposaient sur la table basse, à l’abandon, le domestique de la maison, François, ayant reçut sa soirée de libre. Tout deux étaient installés dans des fauteuils confortables à sustentateurs qui flottaient à quelques centimètres au dessus du sol, et discutaient par-dessus une petite tablette sur laquelle des porteurs de données et des feuilles imprimées diverses. Un petite écran holographique fluctuait également, changeant toutes les secondes de chaine holovisuelle, sans bruit, manifestement placée en attente qu‘on la consulte. Von Heigins avait un journal posé sur les genoux, une grande publication de métropole, "La Galaxie", tirée chaque jour à des milliards d‘exemplaires. Le gros titre ce jour là annonçait en grosse lettres, noires et grasses: « IL EST MORT », ce qui concernait probablement le décès des chefs d‘états—plutôt tyrans—des galaxies centrales, ce qui, dans l‘immédiat, ne semblait pas intéresser les deux hommes.

-Relégué à la toute fin de l’enregistrement, un scandale! S’exclama leur invité, en frappant du bout des doigts le papier de la page intérieure en un geste violent et scandalisé.

Les informations défilant par application moléculaire se tordirent un instant, puis reprirent leur place. Le papier informatisé permettait de réduire le volume employé, et donnait une interface électronique à la lecture du quotidien s‘adaptant au rythme du lecteur, ne laissant que la couverture et le dos en imprimé normal. La mesure avait mis longtemps à se généraliser, et ne s’était entièrement imposée que depuis peu.

-Effectivement, tout est contrôlé, approuva Syllas, tout en relevant la tête d’une épaisse liasse de feuilles qu’il avait sur les genoux, puis releva la tête en percevant un mouvement, et découvrit sa femme sur le pas de la porte: Oh, c’est toi, tu a réussit à ranger les filles. Nous parlions de l’histoire du quartier 245 de Tsarysyn. Tout à fait sordide.

Rea s’empara un des fauteuils à sustentation des abords de la table basse où ils avaient auparavant prit le thé, et l’envoya en une faible détente, parfaitement contrôlée, léviter jusqu’à Syllas, qui l’arrêta du bout du pied sans même avoir à bouger. En un bond, elle était auprès de lui, et s’installait aussi.

-Quelle histoire sordide?

Von Heigins, en face d’eux, hocha la tête, et résumant les faits de sa voix puissante coulant comme un fleuve, grondant, impressionnant:

-Effarant, on croirait rêver. Tsarysyn, un des mondes le plus évolués de la galaxie, qui devrait être un des plus contrôlés et sûr, mais non. En fait, ça a commencé il y a près de cinq ans, et n’a fait qu’enfler: des infâmes crapules, ayant des contacts hauts placés, ont pu, en toute impunité, réellement enlever des patients de l’hôpital Universitaire de Tsarysyn, en les faisant passer pour perdu, sans aucune difficulté! Ils entassaient les civières de leur prisonniers bâillonnés dans un gros semi-remorque antigravitationnel, et partaient comme ça.

L’hôpital Universitaire de Tsarysyn était effectivement le plus vaste centre hospitalier connu en matière de superficie et de lits, avec la taille d’une vrai grande ville, et les cas de personnes s’étant perdues, parfois même parmi le personnels, étaient fréquents et de notoriété publique. Mais généralement, on n’y enlevait pas les patients, songea l’archéologue, avec un frisson, contente de n’avoir jamais eut à y aller.

-Bien sûr, comme d’habitude, personne n’a réagit, et on a dit aux proches des disparus d’aller se rhabiller. Une honte!
-Sauf que cette fois, ça n’a pas si bien marché, ajouta Syllas, en fouillant dans ce qui était manifestement un rapport d’une épaisseur impressionnante, sans même relever la tête.

Rea se tourna de nouveau vers Von Heigins, qui, adoptant une attitude ample et toujours aussi puissante, poursuivit:

-La fille d’un des lieutenants de San Ferdino avait été enlevée, et le bonhomme a remué ciel et terre pour la récupérer. Son patron y a vu un bon moyen de faire une campagne pour son parti, et a lancé sa Phalange des Combattants dans l’tas.
-Et comme d’habitude, les gens n’ont pas tardé à être mitraillés à tord et à travers, intervint de nouveau l’amiral Syllas, comparant à présent le rapport sur ses genoux avec quelque chose sur l’écran tridimensionnel qu’émettait un des porteurs de données.

Leur invité eut un grand rire en songeant aux chemises-grises, et laissa retomber quelques instants, avant de continuer, tançant le journal dans les règles de l’art à gros coups du tranchant de sa main gauche pendant que la droite s‘élevait, presque théâtralement:

-C’est ça. Manifestement, la police n’avait pas été très pressée de savoir qui participait à ce trafic, car les hommes de la Phalange ont retrouvé les coupables sans difficultés, eux…Et l’endroit où aboutissait les malheureux enlevés dans la foulée. Une trentaine de médecins impliqués, la moitié du personnel auxiliaire de la section, des gardes des entrées, de quoi remplir des cellules entières de prison! Et que de rapports faux, d’enregistrements informatiques réécrits ou supprimés, d’ambulances détournées, des mensonges, des mensonges, toujours des mensonges, patronnés aussi bien par le petit employé que par le chancelier lui-même, j‘en suis certain! Y avait du monde. D’autant plus que la plupart des médecins crapuleux travaillaient également à la clinique pirate, où ces gens malfaisants avaient noués de drôles de contacts pour mener des transplantations neurales sur des clients qui avaient les moyens de se le payer.

La maîtresse de maison fronça les sourcils depuis son fauteuil, tout en jetant distraitement des regards sur la pile de documents de la tablette que consultait régulièrement son mari, tout en effectuant des corrections sur les papiers avec un stylo magnétique rouge.

-Des transplantation? Interrogea-t-elle, intriguée, en revenant subitement à Von Heigins.

Ce dernier opina.

-Oui, ça a été interdit depuis bien longtemps. C’est une procédure longue et difficile qui a pour objectif de remplacer une conscience et un bloc de mémoire par une autre dans le corps d’un individu. Ca a été envisagé en premier pour les victimes d’accidents et de blessures de guerre incurables même pour les régénérateurs cellulaires et les prothèses biomécaniques actuels, mais immédiatement le problèmes des « hôtes » s’est posés . Les bénéficiaires du « traitement » n’étaient pas beaucoup, mais le Grand Archidiacre a fait un tel remue-ménage à ce sujet, et les milieux de droite y étaient généralement opposés… tout ça fait qu’on a jeté l’idée à la poubelle, en prenant soin de l’interdire pour le privé. Car, bien entendu, il y a aussi d’autres gens qui souhaitent faire peau neuve pour des raisons bien moins louables. De toute façon, ça n’était pas gérable. Bref.

Il fit un petit geste de la main droite, un bref tourniquet, une manie chez lui.

-Ici c’était donc une clinique clandestine qui servait à permettre à de grands criminels et divers individus qui sont la lie du peuple d’échapper au châtiment, même si de nos jours, il n’est plus ce qu’il était dans le temps. Plusieurs immenses entrepôts transformés en salles d’opération, avec du matériel très sophistiqué, et des caissons cryogéniques pour recevoir les personnes enlevées. Car elles devaient rester en vie jusqu’à ce qu’elle servent de nouveau corps pour un individu lambda ayant payé une forte somme afin de disparaitre, lui aussi, mais au sens positif du terme. Lorsque les gens de la Phalange, le type qui a perdu sa fille dans l'histoire en tête, on découvert le coin, ils se sont déchaînés, un vrai massacre.

La Phalange des combattants était quant à elle renommée pour sa violence et ses actions quasi-terroristes, qui avaient déjà conduit nombre de ses membre en prison, mais généralement, ils en étaient rapidement sortis grâce à l‘intervention de l‘indomptable chef politique de l‘organisation, San Ferdino. Ce qui inquiétait surtout les gens de la classe moyenne, c’était le fait que ces extrémistes étaient armés—très bien armés. Trop même pour être honnêtes dans l‘obtention de ces machines à tuer qu‘on les voyait trimballer—et utiliser: Les forces de l’ordre étaient souvent submergées de rapports indiquant des groupes de centaines de ces militants, portants des fusils d’assaut ou des pistolets à impulsion lourds, qui se réunissaient un peu à l’écart, et s’entraînaient comme des paramilitaires, sur des cibles d’entraînement holographiques qui ne laissaient aucun doute sur leur équivalent dans la réalité. Et ils ne tardaient pas à être imités par certains groupes ouvriers aux méthodes semblables. De larges parties des grands mondes étaient ainsi confrontés à des violences incontrôlables, auxquelles se joignaient gaillardement les forces sensées assurer l’ordre, sous le regard aussi impassible qu’impuissant des militaires comme Syllas et Von Heigins.

-Ce qui devait arriver arriva, continua ce dernier: Ils ont tirés sur presque tout ce qui avait forme plus ou moins humaine sur place, sans distinction pour les corps, les médecins, les mafieux, ou encore les porte-manteaux, autres Phalangistes, et consoles informatiques. Finalement, lorsque forces de sécurité sont arrivées, ils n’ont pu trouver que trois rescapés, cachés dans un minuscule réduit sous un escalier, au milieu d‘un complexe ravagé et atteint par un début d‘incendie. Tous étaient lourdement impliqués, semble-t-il, et ont étés mis en détention provisoire, tandis que la justice locale tentait de les coincer une bonne fois pour toute et de les envoyer à Juzno-Litann. Mais, hier, ils ont été graciés, par le Conseil D‘État.

Rea fut abasourdie.

-Comme ça, au vu et au su de tous? Interrogea-t-il, scandalisée, qui n’aurait même pas pensé ce genre de trafic possible.
-Non, bien sûr, les gens de Ferdino n’attendraient que ça pour en découdre. Ce que je viens d’vous dire, Rea, je ne le sais pas de ces feuilles de choux—il tapota brutalement son journal, où les informations défilèrent frénétiquement, comme craignant de ne pouvoir tout afficher avant que Von Heigins n'ait totalement démoli le papier.—, mais de mes relations tout en haut. Heureusement, j’en ais beaucoup, sinon, nos connaissances de l’actualité, la vrai, se limiteraient à la date du championnat de galoche de l‘année qui vient!

Syllas releva le nez de ses notes, et déclara, montrant qu’il suivait tout à fait la conversation malgré ses airs concentrés et occupés:

-Je connais personnelle le Procureur Général du quartier 245, le magistrat Kascenda Flamin, et son collègue, le préfet de Police Giacomo Jiamone. Le second est un flic de qualité, digne de confiance, mais sans moyens dans cette univers de fous, le premier un magistrat opiniâtre et combattant: il est originaire d‘Acre justement. Ce Flamin m’a donc envoyé un courrier indigné au sujet de ce qui est arrivé aux trois rescapé du lynchage. Je ne pouvais que lui répondre que de ce qui était arrivé, nous étions contraints de considérer que l’action des phalangistes a été plus équitable que celle du pouvoir judiciaire extérieur. Lui qui s’était donné tant de mal pour envoyer ces infâmes au bagne!

Von Heigins hocha violemment la tête.

-Une honte. Des gens très haut placés devaient être compromis dans l’histoire. D’ailleurs, quand on lit leur article—petit et presque caché—, on s’en prend davantage aux gars d’la Phalange qu’aux crapules de soi-disant médecins! On croit rêver, comme je disais tout à l‘heure!

Finalement, le chef de famille posa de côté ses paperasses, en se disant que Zikosler se chargerait de cela en temps et en heure voulue, et que lui-même avait griffonné assez de notes en marge pour lui indiquer la marche à suivre, pour dire, très grave, en levant un doigt en l’air, solennel:

-Ce n’est pas un cas isolé. Nos connaissances nous rapportent chaque jour des faits divers pareils, c’est dramatique. Ca ne peut pas continuer comme ça.

L’Amiral Von Heigins, affichant un masque d’implacable détermination, se levant presque, brandit son poing droit refermé en direction de l’océan ténébreux et déchaîné dans la tempête à travers la baie vitrée, tout en renchérissant:

-Oui, il est temps que les choses changent!
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Syllas

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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeDim 14 Sep - 1:40

Nous pouvons clairement distinguer la pensée créatrice divine et la pensée créatrice humaine. En effet, celle de Dieu est une pensée abstrait, objective, exacte, infaillible même. Celle de l’homme est corrompue d’expériences personnelles, de subjectivité. Or, Dieu est partout, il a tout vu et tout vécu: sa vision et sa pensée créatrice s’en ressentent, et forment la différence fondamentale entre l’essence divine et l’essence humaine.
Antiochos III Comnème ( 1489-1571 [E.d.U]), Grand Archidiacre d’Hagia Triada


-- -- --

An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Tsarysyn, Union des Galaxies Eloignées
Quartier 106



Secouant fermement sa tête, Hel se leva. Certes, elle n’était pas encore en retard, mais cela ne saurer tarder si elle restait plantée là à laisser cet infâme courant d’air qui avait remplacé la lumière — à présent entièrement cachée par l’arbre d’en face —et qui se glissait partout dans son inconfortable vêtement. Regrettant vaguement ses habits qui lui assurait du confort malgré les températures parfois négatives du fond, elle reprit la route. Avec la journée, l’animation gagnait également du terrain. Aux enfants jouant au ballon, des couples, des groupes d’amis, des retraités, et d’autres personnes venues se promener seules disputaient la primauté sur le gazon. Même un joueur de limnet, petit instrument à vent tenant à la fois de la trompette et de la bombarde mettait quelques notes agréables dans l’air de ce jour férié. En effet, trois jours auparavant, il y avait eut la fête Nationale, celle du 27 Mai, célébrant la victoire du Botmélie, comme le disaient les livres d’histoire, et étant accessoirement également la date du seizième anniversaire de la Révolution Militaire qui avait placé la Junte au pouvoir, celle de ces ombres froides et rigides des amiraux qui présidaient à la destinée de la nation depuis ce qui semblait être des siècles. Les confettis et serpentins traînant un peu partout au sol dans cette zone qui avait été un grand lieu de fête en témoignaient, malgré les efforts des robots nettoyeurs et des véhicules aériens de l’administration de la voirie et de l’entretient. C’était le dernier jour chômé; demain la majorité des gens reprendraient leur travail morne, avec pour unique délice de se retrouver le soir devant un programme holovisuel récréatif. Mais pour Hel, le « travail » au sens habituel du terme était interrompu encore pour quelques temps. Enfin, déjà…
Elle bifurqua dans une allée latérale qui s’enfonçait dans la partie forestière du vaste parc. Même quelques ruisseaux zigzaguaient entre les conifères et bouleaux séculaires, qui donnaient dans les lueurs matinales à l’endroit un aspect presque sauvage et feutré, si les immenses édifices en arrière-plan ne venaient pas crever la perspective.
Après quelques instants de promenade, la jeune femme arriva à un petit abri en bord de chemin. C’était une construction simple en bois, fermée. Autour, sur une petite terrasse donnant sur les clapotis du ruisseau. Soudain un peu hésitante, elle s’engagea dans l’espace vide, pour passer derrière la cabane. Là, les tables étaient plus éparpillées, et seule une occupée. La gorge un peu serrée, elle s’avança vers la silhouette qu’elle ne distinguait que mal, la lumière de l’étoile de Toula traversant à cet endroit le branchages qui formaient ailleurs comme une voute. La silhouette, d’une taille et d’une corpulence tout à fait normale, comme elle le remarquait à présent, se leva à son tour, et s’avança dans le faisceau, de façon à ce qu’elle puisse la voir nettement.
De la femme qui était devant elle, Hel sentait immédiatement une aura étrange, comme celle d’un sérieux, dune gravité étrange. Pourtant la femme, du même qu’elle, en face n’avait rien dans son apparence qui justifiait un pareil sentiment. Un vêtement gris-noir étroit lui serrait le haut du corps, contrastant avec le bas de tunique ample plus proche de la mode, donnant au tout un aspect un peu décalé sautant tout de suite aux yeux, avant que le visage allongé aux grands yeux marron n’apparaissent au dessus du tout. C’est à ses yeux qu’elle eut la certitude, et s’apprêta à dire quelque chose. Mais l’autre la coupa:

-Hel! Tu es venue!…
-Kerstin! Pas possible! L’interrompit la jeune femme.

Elle s’étreignirent vigoureusement comme cela se faisait entre vieilles amies à Kamensk, avant de s’installer à la même table, sans rien ajouter. Ce fut de nouveau Kerstin qui parla la première, comme anticipant:

-Honnêtement, si je ne savais pas qu’c’est toi, j’aurais rien vu…c’que t’a changée!
-Faut dire que toi non plus t’est plus tout à fait la même, fit son amie, en passant son créditeur au dessus de l’œil électronique de la table, afin d’avoir deux boissons, qui furent synthétisées l’instant d’après.

Elle sirotèrent leurs verres quelques instants, se contemplant toujours, essayant de comparer avec de lointain souvenirs.

-Mais, comment est-c’que t’m’as retrouvée? Continua Hel, fixant de nouveau les yeux de son interlocutrice, avec un sourire de bonheur réservé comme seule elle savait les faire.
-Pour être honnête, je n’ais pas cherché, je vraiment occupée faut dire. Toi non plus, d’ailleurs, je pense, ma vieille. C’tait du pure hasard; je travaillais sur une base de données, et j’ai vu ton nom, avec adresse et indice de communication. Ca a été dur d’te retrouver à partir de ça, car t’vais changé cinq fois d’baraque entre temps, sans laisser l’adresse…

Fronçant les sourcils, Hel l’interrompit, sous en dégageant machinalement sa main droit d‘un fouillis de tissus de son vêtement:

-Sur quel base de données? Car, d’après c’que j’ai su d’toi après, t’est entrée dans la Famille, non?
-Ouais’, j’suis pas là maintenant. Mine de rien, c’est un bon boulot, payé convenablement. Fin’ bon, t’diras qu’je me suis rangée, mais j’prends toujours d’temps en temps le plaisir d’une petite bringue, ça fait enrager les patrons.
-Quelle base de données? Répéta la jeune femme, devenue rigide.
-Bah, au bureau on en a des centaines. Celle-là c’était une sur les douanes — t’es toujours dans le boulot toi par contre, j’ai r’marqué —, mais après recherche j’ai trouvé deux « Cassandre » pour détournement, une Hélène chez les transports, et une bonne demi-douzaine de « Hel » ici ou là. Enfin, c’est discret, y en a qui ont leur nom inscrit des centaines de fois un peu partout de toute façon, un ordinateur n‘f‘rait pas l‘rapprochement…

Elle fit une moue dubitative devant la réponse de son amie, pesant le pour ou le contre de foutre immédiatement le camp. Finalement, elle décida de rester.

-Et tu m’as sonné?
-Et je t’ais sonné, confirma Kerstin, avec un soudain petit sourire. Ca fait une éternité, non? Combien? Dix ans?
-Neuf, n’exagère rien non plus. On n’a vachement fait d’chemin entre-temps…moi j’vivote comme t’l’aura remarqué.
-Ouais, j’ai r’marqué. L’patron du 7 l’a remarqué aussi.
-Le 7?
-Secteur 7, Sûreté de l’Marine. T’connais l’autre Custer, non?

Hel eut un petit rire:

-C’est peut dire qu’je l’connais, le sacré portrait. On dirait un ancêtre, avec sa clope vissée au bec..
-Clair, y a beaucoup de gens dans la famille qui ne le supportent pas, mais l’est bigrement efficace le Vieux. Le dernier qu’lui a dit ses quatre vérités a fini quelque part douanier en galaxie 9, à c’que sache.
-Ah ouais…enfin, j’en ais déjà eut un bel échantillon tout de même. De ton côté, ça marche, coincer mes malheureux clients?
-Bah, ça marche comme ça marche, j’tacherais d’épargner les tiens à l’avenir.
-T’a intérêt, ma vieille!

Elle eurent un bref instant d’hilarité en entendant de nouveau cette expression à enterrée depuis une décennie presque. Kerstin redevint la première sérieuse, et tira quelques objets de sa poche, qu’elle posa sur la table. Il y avait là trois porteurs de données, une plaque de platine gravée, et un papier froissé.

-Toi t’a quelque chose à me dire qui n’a rien de la rigolade, déduisit Hel.
-Non, confirma Kerstin, mais j’pense qu’j’ai besoin d’toi. J’ai…
-Attends une seconde. Si tu m’as cherché, c’est pour ça? Pour qu’je dise quoi?
-Calme toi! J’te jure que j’ai commencé l’histoire que je vais t’exposer qu’après que j’ai trouvé ton adresse et t’ais envoyé le message. Je te le jure, fais moi confiance, j’te dis!

Toujours un peu sceptique, la trafiquante consentit d’un mouvement de tête, en fermant à moitié ses paupières aux longs cils majestueux, tout en retroussant par endroit son habit avec des mouvement imperceptibles, pour foutre le camp le plus vite possible en cas de problème, sans s’emmêler les pinceaux dans cette peste.

-Bon, merci la vieille. Dans la Famille, y a trois jours, on est tombé sur un truc. J’pense que c’est plus gros qu’on ne le pense, mais sont pas d’accords. L’patron, notre gars dans l’21, m’a dit qu’j’avais carte blanche pour suivre cette histoire, étant donné qu’on n’a pas trop d’boulot ailleurs c’t’an ci. Mais j’suis seule. J’ai fouiné un peu, et j’suis tombé sur un truc suspect.

Elle n’entrait dans aucun détail, mais Hel écoutait néanmoins avec beaucoup d’attention, ses yeux brillants derrière la barrière de puissants cils hérissés, faisant abstraction de la lumière matinale et du clapotis de l’eau.

-Et?
-Et le machin n’se limite pas à c’coin ci. Ca se développe ailleurs. Sur Acre, entre autre. Les Hunsa, et c’te vieille branche de Falco.

Sans y paraitre, la jeune femme resta interdite, et dit lentement:

-Et t’voudrais qu’on y aille à deux?
-Exact, ma vieille. T’connais mieux l’bled où je veux aller qu’moi, et c’est d’fficile d’avoir une couverture potable là-bas. En plus, on pourra faire un saut dans les environs du manoir…incognito…après l’histoire.
-Hum… en temps normal t’aurais envoyé balader, c’est qu’j’suis vachement occupée, mais là justement je devais faire un tour là-bas; t’a d’la chance…une chance insolente. J’dois aller à K'mensk. C’est bien là que tu vas aussi?

Kerstin répondit par un signe affirmatif.

-Ouais. Généralement, c’est pas notre ancien coin qui fait l’plus parler d’lui, ajouta-t-elle en ricanant.
-Et qu’est-ce qu’c’est concrètement c’que tu dois y faire, si c’est pas trop secret? Continua sérieusement Hel, malgré la petite pointe d’ironie à la fin.

En guise de réponse, son amie poussa de côté sa laque platinée—garnie d’une suite de chiffres et de codes alphanumériques incompréhensibles—, pour s’emparer d’un des porteurs de données.

-A la base, j’ai un client suspect. Son comportement a éveillé la curiosité de plusieurs indics, et du Réseau. Rien de bien terrible. Là où sa commence à capoter, c’est dans son passé.

Elle reste encore silencieuse quelques instants, et dit:

-Rien. Ce gars sort de nulle part. Aucun dossier, ni rétinien, ni biologique, ni même de signature neurale. Pas d’enregistrement d’arrivée, ne révérenciel de créditeur. On croirait qu’il est juste né la veille. Sauf une chose; trois informateurs sont prêt à jurer que ce type est Syagrius Hunsa.
-Donc, il a ressuscité hier, et dès le lendemain, vous étiez au courant? Déclara, ironiquement, Hel.
-Non, mais attend. Après quelques temps de surveillance, il est ressorti que ce gars disparaissait de temps en temps. On a beau essayer, il nous file chaque fois entre les doigts, pour réapparaitre dans sa baraque. La baraque, c’était ça la clé, le coin où il revenait toujours. Après quelques recherches, on a fini par trouver qu’elle était au nom d’une société de matériel médical et de robotique Christianienne qui a ses usines sur Acre.
-De robotique et des lits d‘hôpitaux? Et pourquoi au nom d’une société?
-Ouais, j‘étais comme ça aussi au début, mystère total. Fabriquent des médibots et autres manutentionnaires, en plus de quelques implants cybernétiques; rien de bien terrible. L’a fallut chercher assez loin pour découvrir que cette société avait comme Co-actionnaire majoritaire un holding Christianien également. Dans ce holding, j’ai découvert notre seul indice probant: le nom de la famille Hunsa, encore.
-Hunsa? Quand même pas les Hunsa.
-Si. Honnêtement j’étais vraiment étonnée là, et intriguée, mais c’est pas tout. Pendant qu’j’étais là-dedans, notre client a encore fait parler de lui. Il a rodé pendant plusieurs heures dans le quartier gouvernemental. Il nous a été signalé une bonne demi-douzaine de fois par la Sûreté locale, ce gars est très suspect. Enfin, y a tout juste deux jours, il s’est enregistré une place dans le prochain astronef pour la galaxie 8. Acre. A un faux nom, une place en transporteur continental était réservée, pour Kamensk. Y avait trop de suspicions, j’ai décidé d’aller jeter un coup d’œil là-bas, et d’aller sonner Falco, voir s’il en sait davantage. T’es avec moi?


C’est une Hel mystifiée qui, après avoir regardée Kerstin s’éloigner, se leva à son tour, et commença à marcher doucement le long du chemin du retour. Malgré les assurances de son amie, et le rendez-vous de celle-ci au spatioport galactique, elle demeurait sceptique. Elle n’était pas sotte au point de se jeter tête baissée là-dedans, non! Mais de toutes façons, elle devait se rendre sur Acre, donc elle pouvait joindre les deux choses. Et voir sur place si elle jouait toujours le jeu.
Elle aurait aimé faire sa propre petite enquête sur le gars dont parlait Kerstin, mais manifestement, celle-ci ne voulait pas; aucun renseignement excessif sur le portrait. Le nom de Syagrius Hunsa était légendaire à Kamensk, avait coûté la vie à beaucoup de monde à la prononcer au mauvais moment.
Il ne lui restait plus qu’à rentrer chez elle, et enfin se rhabiller convenablement.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeDim 14 Sep - 1:40

Second Concile Macabre ou La Sédition des dix-sept Prélats: Cet épisode est le point culminant de la crise institutionnelle et théologique que traversa la Sainte Eglise en 2541 E.d.U. Dix-sept clercs iconoclastes, membres de la Curie Hagiennne, forcèrent le Grand Archidiacre Konsaln IV à intenter un procès en Primedéiité à feu le Grand Archidiacre Honorius II, mort quelques années plus tôt, avec pour principaux chef d‘accusation des « Actes contraires aux commandements de l’annexe de la Bible selon Saint Raphaël » , des excommunications sans fondements, et des meurtres perpétrés au nom de l‘Eglise. Cet événement intervient pendant les querelles religieuses opposant le parti Traditionnaliste à celui des Iconoclastes. Après la longue période de l’Anti-Diacre de Cossiger, ces derniers étaient tout juste réadmis à la Curie, et leur influence encore grande. Le Grand Archidiacre Honorius, et ses actes, avait toujours été très contesté par les Iconoclastes du fait de la fermeté exceptionnelle de sa politique pour l’époque. Le Concile, à l’occasion duquel on avait tiré Honorius de sa tombe, l’avait revêtu des attributs Pontificaux d’Archidiacre (Voire « Attributs Pontificaux»), et assis sur un trône de Saint Pierre, avec un clerc pour répondre à sa place, fut le théâtre d’affrontement verbaux extrêmement violents entre les membres des deux partis. En fait, personne ne sait qui tira en premier, mais le fait est que plusieurs salves de fusil laser ont fusé, causant une panique considérable et plusieurs dizaines de morts. La légende raconte que la dépouille en partie putréfiée d’Honorius se soit elle-même levée pour s’emparer d’une arme. Suite à cet épisode tragique, les iconoclastes perdirent une bonne partie de leur crédit, et après dix ans, le mouvement s’éteignit de lui-même, sous Konsaln V.

Dictionnaire Universel. Edition n°54.8.14. Livre IX, page 47. Extrait de l’Article « Second Concile Macabre ».



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An 3859, E.d.U (Eon de l’Union).
Acre




Trépignante de rage, Constanta, pourtant si terne dans ses vêtements proprement dit banals, hurla:

-Personne ne m’a rien dit! Tu t’en rends compte, j’espère? Nous allons pourrir empalés ici, par votre faute!

Hochant avec vigueur la tête, Frederick objecta:

-]Mais non! Cesse d’être aussi sotte, et calme toi.

Comme si chaque mot de son mari la mettait encore plus en colère, elle rugit, et continua:

-Mais te rends-tu seulement compte de la folie que ton frère va tenter? Tu crois quoi? Qu’il va réussir? N’es-tu pas fou!

Frederick se leva lentement de piano, tout en refermant le livre contenant ses partitions de Rachmaninov qu’il tentait de jouer depuis bientôt une heure afin de se calmer. Déjà, le fait qu’il ait appris ce que faisait Nikolaï en métropole l’avait troublé, mais lorsque Constanta l’a compris, la fureur de celle-ci n’a plus connu de limites. Heureusement que les enfants étaient en ville aujourd’hui…
D’un geste sec devant un œil électronique, il désactiva le métronome, et s’avança vers sa diablesse de femme.

-Veux-tu cesser! Il ne va rien nous arriver. Nomme moi une personne à trente kilomètres à la ronde qui oserait lever la main sur nous!

Constanta se tut. Elle était ici depuis près de quinze ans, mais ne s’était jamais intégrée au pays, et regrettait un peu la vie trépidante d’Assedo, à côté desquelles les plus belles fêtes d’Acreopolis paraissaient pâles et tristes comme si il s’agissait de deuils. Aussi, elle ne se sentait pas en sécurité au milieu de cette population qui pourtant avait protégée avec l’énergie du désespoir le manoir lors de la Grande Révolte, population en laquelle la famille avait une confiance totale depuis. Il fallait dire que la famille était très ancienne, et le Seigneur Eudes IV Syllas avait, à la tête de cinq mille soldats, également mené le plus dure des combats sous les murailles d’Acreopolis contre les envahisseurs barbares qui, des galaxies centrales, étaient tombés, innombrables durant le premier millénaire, et qui avaient presque submergé la nation, afin de briser le siège et rejoindre la cité. Mais manifestement, cette histoire ne s’appliquait pas à la famille Law, dont descendait Constanta, sœur de l’Amiral Franck Law, lui aussi membre de l’Amirauté centrale, et commandant de la flotte des marches.

-Cela ne change rien! D‘autres viendront, et nous enverront en prison dans la meilleur des cas! J‘ai déjà dit à François de faire mes bagages, je m‘en vais!
-Tu ne peux pas t’en aller! S’écria Frederick, scandalisé, cesse de ne penser qu’à toi! Que deviendrais-je, avec les enfants, avec Silva qui ne vaut pas mieux? Et ce malheureux Anastas, qui n’est même plus capable de se lever sans son médibot? Que pensera-t-on de nous!?

La femme eut un rire méprisant:

-Ce qu’on pensera de toi en prison, je m’en contrefiche, moi je m’en vais. Si t’as encore assez de bon sens, embarque Cassandre et Alexis, et suis-moi, sinon, attends que les meurtriers viennent sonner, je ne regretterais pas d’être partie, moi.

Sans attendre la réponse de son mari à présent furibond, elle tourna les talons, et quitta la salle de musique. Après de longue secondes, il frappa violemment le plancher du pied, et courut à sa suite.
Hors d’haleine, il arriva dans le Grand Hall, magnifique pièce vitrifiée, pour y découvrir leur vieux majordome, poussant une valise antigravitationnelle bien trop lourde pour lui, à côté de Constanta, plus rouge et déterminée que jamais.

-Je prends mon antigrav. Vu que tu n’as toujours pas l’air de vouloir me suivre, soit, reste ici, je t’aurais proposé. Les enfants souffriront à cause de ton aveuglement!
-Ne commence pas avec ça. De toute façon, je ne laisserais pas mon père, même si je voulais m’en aller. Maintenant, François, ramenez cette valise dans la chambre de madame ma femme, déclara fermement Frederick en utilisant cette tournure pour souligner son autorité, elle ne pars pas.

Comme le vieux serviteur eut un geste pour ramener le bagage d’où il venait, Constant eut un cri étranglé, et, avec une vivacité incroyable, s’empara elle-même de la poignée de métal, et commença à se diriger vers l’entrée, laissant les deux hommes derrière, sans un mot. De nouveau, le musicien mit quelques instants à réagir, ne croyant pas qu’après quinze ans de vie commune, sa femme pouvait partir comme ça, au premier vrai orage. L’ancien recteur de l’académie Navale d’Acre se planta juste entre le grand portail en fer ouvragé et vitrifié brillant des reflets blutés du champ de protection qui, à un millimètre du verre du côté extérieur, empêchait celui-ci de se salir.

-Tu resteras ici. Tu ne peux t’en aller comme ça.

Elle lui lança un regard assassin, et le contourna ensuite, détournant la tête, comme si ça vision la répugnait. La belle main aux longs doigts agiles du célèbre organiste lui prit l’épaule, mais elle se dégagea avec un mouvement félin. A peine elle s’était refermée sur le vide que la porte baillait déjà. Il se retourna promptement, tout juste assez vite pour voire disparaitre celle qui avait été sa femme dans la carlingue de son véhicule antigrav, un Tenska modèle moyen, tout ce qu’il y avait de plus banal, aussi. C’est seulement à cet instant qu’il douta. Autant sur l’avenir du coup de force de son frère que sur le sien. Et si les Acriens se prononçaient contre la famille qui les représentaient au Conseil du pays, le Sénat de la Sérénissime République de Christiansa, depuis maintenant presque trois mille cinq cent ans?
Mais ces années reprirent le dessus, et sa confiance en son frère revint. Il écraserait les misérables qui plongeaient l’Union dans la décadence, il en était certain. Par contre, il ne l’était pas de revoir cette femme un jour. Même si psychologiquement, elle n’était déjà plus là en lui, elle l’était encore physiquement, alors que le véhicule démarrait. Il descendit en trombe les marches du perron, et tendit son bras vers ce qui lui glissait entre les mains aussi brutalement., ouvrit la bouche, sans pouvoir en dire plus. Il restait coi, alors que le nuage de poussière soulevé par le courant d‘air du fuyard s‘élevait sur le chemin qui zigzaguait encore pendant cinq-cents mètres dans la forêt du domaine, jusqu‘à la grand-route.
Il sentit une présence derrière lui. Une main sur l’épaule, celle de François.

-Monsieur…fit la voix faible qui lui avait appris les joies de la musique sur son propre piano, acheté après des mois de privation.

Frederick s’apprêtait à dire quelque chose, sans vraiment savoir quoi, quand un nouveau bruit de moteur s’éleva dans le nuage lointain. Il ne put dire si dans son cœur montait de l’espoir — celui de revoir Constanta — , ou de la peur, — celle de découvrir une colonne de mercenaires Kamenskites achetés par l’actuel maire d’Acreopolis, un infâme roturier aux mœurs intolérables plongeant la planète dans la consternation, en particulier les Syllas, venus pour brûler le manoir —, mais il y avait comme une émotion lui serrant la poitrine. Celle-ci retomba quand il vit sortir du lointain une machine longue et étroite, bardée de tuyaux, manifestement souvent réparée de façon assez « artisanale », au guidon de laquelle se trouvait un homme bardé de plusieurs plaques d’Hexanox solides. Et derrière ce personnage pour le moins incongru, trois enfants, se tenant les uns les autres, riants.
Cet étrange convoi s’arrêta net au pied des marches, et les trois plus jeunes sautèrent à terre avec des cris gais et gaillards. Cassandre, les cheveux ébouriffés et l’air véritablement heureuse comme on la voyait rarement, sautait littéralement de joie. Finalement, après avoir assuré sa monture, l’homme descendit également, en ôtant l’étrange bout tordu lui servant de casque.

-B’jour m’sieur, j’m’appelle Kerl’, j’vous ramènes la p’tite et l’aut’ garçon d‘leur cours d’sport. J’suis un ami d’frère d’Kerstin.

Il tendit sa main, et il fallut à Frederick, que ce coup achevait après ce qui avait précédé, que François lui envoie un véritable crochet dans les côtes, pour qu’il serre la main du monstre. Finalement, ce fut Cassandre, encore un peu en sueur de son heure de sport de combat, qui « désenvenima » les choses:

-Dit, p’pa, c’était m’man dans la T’nska à l’entrée?

Le musicien se baissa vers sa fille, qui avait gravi les quelques marches la séparant de son père, et dit doucement:

-Oui ma petite…c’était ta mère…et…nous ne la reverrons plus avant…longtemps…

Ayant manifestement compris la vraie raison de l’état de son interlocuteur, le « pote à bécane » du frère de Kerstin afficha air à la fois compatissant et profondément gêné dans la mesure du possible avec son visage sale et grossier. Un geste discret du décidemment providentiel François lui fit baragouiner un salut avec une tentative — lamentablement avortée — de politesse soutenue, avant de faire quelques pas en arrière jusqu’à sa monture, d’intimer à Kerstin l’ordre de grimper — ce qu’elle fit après un bref salut de tête à son amie, promettant de remettre ça —, de monter lui-même en réajustant son morceau d’Hexanox de casque, et de mettre les gaz, fuyant une atmosphère aussi lourde que le bloc-énergie de ladite Motograv.
Cassandre aussi comprenait, et regardait la scène d’un air perplexe. Elle cherchait à faire le tour mentalement de la situation, autant des avantages que des inconvénients. Fallait dire aussi que sa mère c’était transformée peu à peu en véritable mégère dans les derniers mois, lorsque Frederick avait du s’absenter longuement pour plusieurs concerts en Galaxie 7. Elle n’avait plus vu Oncle Nikolaï depuis six mois, à l’enterrement de Tante Rea. Ca a été un moment très triste et pénible pour Cassandre, car elle aimait beaucoup sa tante, qui lui avait toujours été tellement plus sympathique que sa mère. Mais durant tout la cérémonie — qui s’était déroulée dans une chapelle de la petite ville d’Eupatoria, à une dizaine de kilomètres du manoir et du domaine — l’Amiral, entouré de presque quinze autres gradés, était resté marmoréen, le visage prit dans une sorte de souffrance taillée dans la pierre, raide, bougeant à peine les lèvres pendant les récitations de la Bible selon Saint Raphaël, se levant lentement, se rasseyant lentement, fixant le cercueil de sa femme, entouré de trois diacres, qu’aspergeait d’eau bénite le métropolite d’Acre en personne — la tradition, pour toutes les morts dans la famille, le plus haut prélat de la planète s’en chargeait —, cercueil vide, car dans l’éboulement généralisé du gigantesque mastabas précolonial découvert récemment sur Ressirgo V Nova dans lequel elle et son équipe effectuaient des fouilles, rien n’avait pu être sauvé, ou même tiré. L’immense complexe souterrain a été bâtit sous une montagne, et l’excavation se trouvait au fond. II aurait fallu deux ans de déblayage— si les crédits y avaient été affectés— pour retrouver le corps de tante Rea. C’est probablement cela, l’impossibilité de faire son deuil, qui avait rendu Oncle Nikolaï tellement lointain et taciturne pendant toute la période des cérémonies, jusqu’à ce que la bière se retrouve dans la section actuelle de l’immense nécropole familiale, sous un champ au nord du manoir, dans un dédale de caves reliées par des tunnels bétonnés. Du jour au lendemain, l’Amiral redevint comme avant, sans bonne humeur excessive néanmoins. Après une journée, il était de nouveau à parler politique avec Von Heigins, qui s’était montré pendant toute la semaine très bon, remontant dans l‘estime de Cassandre, notamment en se promenant seul avec elle, et lui expliquant certaines choses.
Ces derniers temps avaient donc étés durs pour elle, en théorie, mais son esprit calculateur faisait ses révisions, et cette gymnastique d’esprit qui lui assurait flexibilité et intelligence dans ses réactions la plupart du temps s’avérait très utile à présent pour ignorer la vague d’indignation et de tristesse qui se levait dans son cœur. Elle se contentait de lever ses grands yeux bleus-verts mystérieux vers le revers de la veste de pianiste grise de son père, qui s‘était redressé, sans rien dire.
Derrière Alexis, lui, avait mis plus de temps à comprendre, demanda étrangement:

-Mais, si maman est partie…qu’est-ce que nous mangerons ce soir?

La main de Frederick trembla un peu, et, abruptement, il fit volte-face, et passa de nouveau le portail orné d’incompréhensibles inscriptions gothiques. Cassandre lança à Alexis un regard interloqué, mais celui-ci paraissait toujours turlupiné par le dîner.

-Allons, il faut rentrer. Je saurais faire marcher le synthétiseur, n’ayez crainte, fit la voix douce et paternelle du brave François, qui, passant ses bras derrière eux, les poussa calmement à l’intérieur. A peine, après avoir refermé la porte, il était parvenu jusqu’à l’entrée de la cuisine avec les deux malheureux, que déjà retentissaient dans tout la manoir les notes mélancoliques de l’adagio du second concerto pour piano de Rachmaninov.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeDim 14 Sep - 1:40

Christiansa (Sérénissime République de): (…) Pendant huit-cent ans, la République a été une force à craindre dans la politique galactique. Avec une flotte puissante, une adresse diplomatique, et le siège de la Sainte Eglise sur son territoire, elle était sans conteste maîtresse d’un quart et demi de la galaxie 7. Sa principale institution était le Sénat, ou Grand Conseil, qui décidait des questions de politiques internationale et de fiscalité. Néanmoins, d’autres assemblées, comme la Quarantia ou encore la Seigneurerie, en plus du redoutable Conseil des Dix inquisiteurs, et de l’OberKommando des forces militaires, assuraient l’équilibre des pouvoir. Le chef de la République est la Doge, élu par le Sénat. Toujours entre ses anciennes dynasties patriciennes, qui jouent encore de nos jour d’importants rôles dans l’univers, et la population de cet état Libéral, la nation a prospéré. Seule la brusque invasion d’un partie de ses colonie par la monarchie esclavagiste Botmélienne l’a contraint à l’Union avec les autres états libres de la galaxie, notamment l’Etat de Tsarysyn, la Haute-République de Lüderitz, Le Commonwealth d’Eitso, ou encore l’Empire Khitaï moribond. Malgré le fait que les institutions de l’Union des Galaxies Eloignées soit à présent au dessus des siennes, la République conserve un grand prestige, et beaucoup se dise avant tout citoyens de la République.

Dictionnaire Universel. Edition n°54.8.14. Livre IV, page 974. Extrait de l’Article « Christiansa (Sérénissime République de) ».





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An 3855, E.d.U (Eon de l’Union).
Galaxie 9, espace profond
UFGS Kanopus



-Amiral sur le pont! S’écria, suivant la procédure, le second du Kanopus, le Commandant Setz, faisant se secouer l’équipage de la passerelle.

Emergeant de la porte automatique à double battant, le Vice-Amiral Syllas s’avança sur la passerelle avec un petit geste pour que les officiers retournent à leurs occupations. Le Kanopus était un croiseur encore relativement récent, et la passerelle assez réduite et ergonomique. Elle s’organisait en cercle dans le poste central où se trouvaient les sièges des plus haut officiers, le second, le timonier, les techniciens spécialistes, etc… Depuis l’entrée du couloir, un petit escalier y montait, avec au sol une moquette grise qui rajoutait à l’atmosphère de l’endroit, dont l’air était empli des grésillement des ordinateurs et des conversations à voix basse des opérateurs, dans la lumière légèrement bleutée et assombrie. Sur trois parois, de vastes écrans montraient le noir de l’espace, calme, apaisant.

-C’est bon Commandant, je prends le quart, fit Syllas en arrivant devant son subordonné, qui hocha la tête, et se leva de son siège, arrêtant l’ordinateur de celui-ci au passage.

Le Vice-amiral lança un coup d’œil circulaire; l’activité sur la passerelle n’était pas très nerveuse, tout au plus, sur les douze hommes et femmes ici, trois ou quatre travaillaient , les autres n’étaient vraiment là que pour la forme. C’était la fin de la journée, où ils fonctionnaient déjà en demi-effectif devant l’inactivité terrifiante dont-ils souffraient depuis des semaines. Une missions d’« exploration »! Autant dire tout de suite qu’on les envoyait au diable, avec pour seule distraction d’analyser des nuages de gaz. Tout un croiseur envoyé pour cela, alors que c’était la guerre à la frontière Alttorienne! Sidérant. Enfin, on avait voulu se débarrasser de lui, c’était certain, mais il savait qu’à la plus infime raison, il fera marche-arrière en cinquième vitesse, pas question de rester comme un misérable là. Enfin, pour l’instant, c’était le quart de la moitié de la nuit, il pouvait libérer la majorité de ceux qui étaient damnés à tenir le poteau pendant la journée. Un bref « c’est bon, bonne soirée » fut le signal d’une sortie en masse de la passerelle. Seuls subsistaient quelques uns qui devaient attendre qu’on vienne les remplacer, cela ne saurait tarder, mais il y avait récemment eut quelques retards. Personne n’était très enthousiaste à l’idée de rester la moitié de la nuit à demi-assoupi sur une console qui n’était pas faite pour servir d’oreiller, et il avait fallu que Syllas sévisse. Leur astronef avait un équipage total de près de trois cent personnes, et les stocks de livres et d’autres médias et distractions devenaient singulièrement bas, il faudrait, à leur prochain ravitaillement, également télécharger une bonne partie des données culturelles de l’ordinateur planétaire colonial, mais pour l’instant, ce qui avait le plus la côte, c’était le bar et l’espace de détente, où des gens passait parfois toute al journée entre petits verres, jeux de cartes et discussions animées. Il ne pouvait pas leur en vouloir, c’était naturel, vu qu’il n’y avait pas à bord vingt personne qui exerçaient une activité régulière. Quelques scientifiques analysaient le gaz, et l’astrométrie préparait les cartes holographiques qui viendront enrichir celles de la flotte au retour de mission—si ils revenaient un beau jour, telle était la plaisanterie qui courrait dans l’équipage—, mais du reste, l’inactivité était terrifiante.
Le Vice-amiral s’installa sur son siège, assez large et confortable, de biais , alors que les dernières gens du quart sortaient. Ils étaient quatre à présent sur la passerelle du Kanopus; Nikolaï Syllas, recommençant à travailler sur la réédition de son traité de stratégie, « La Guerre moderne », il stylo à la main, installé devant un gros paquet de feuilles en partie noircies, un lieutenant anonyme, installé sur le poste de timonier, et feuilletant ce qui était manifestement un roman à l’eau de rose, « voyage au pays des neiges », plus loin, une jeune sous-officier, renversée sur son strapontin, cherchant appuyée contre une console, le sommeil, dévorée du regard par un autre officier, que réprima du regard son supérieur. Un peu honteux, le polisson tourna le dos à la femme qui le fascinait, et fit mine de consulter les instruments.
Les écrans de contrôles montraient quelques rocs noires chauves et désolés, entourés de volutes de gaz presque translucide, les Astéroïdes de Stepenym, du nom du malheureux capitaine qui avait précédé le Kanopus ici. Un des endroits les plus sinistres que l’amiral avait connu en plusieurs décennies dans la marine, terrifiant, véritablement le seul et unique endroit dans l’Union où l’immensité de l’espace ne fascinait et n’attirait pas. Ils avaient bien choisi l’endroit où l’envoyer, vraiment.
Percevant à travers les petits bruits et grincement des ordinateur la respiration régulière de quelqu’un dormant, Syllas se plongea dans les subtilités de la stratégie militaire, entamant le chapitre « De la maîtrise de l’espace ».

« De la maîtrise de l’espace

La bataille classique
Elle est la préalable à toute action d’envergure à la surface, et la condition continue du succès de celle-ci. La perte de cette maîtrise, ne serait-ce qu’une heure, peut anéantir toutes chances de succès au sol, et ainsi nécessiter l’envoi d’une nouvelle force, qui n’est pas toujours disponible. C’est l’échec. Ainsi, un stratège avisé ne se permettrait pas d’envoyer ses forces au sol avant d’avoir acquis le contrôle de l’orbite, et avoir sécurisé solidement celui-ci contre des actions provenant aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur. Ce contrôle s’obtient à travers l’incapacitation de la marine adverse, de ses stations de défenses, et dans une moindre mesure, de ses défenses au sol. Il est fortement recommandé d’utiliser l’effet de surprise, de plus qu’une incursion sur la ligne de moindre attente et de moindre résistance, plutôt qu’une attaque de front des défenses adversaires là où elles sont les plus puissantes. Ou alors, cette offensive ne serait qu’une diversion, permettant à d’autres unités de monter le coup véritablement décisif. Traditionnellement, l’engagement dit classique, avec deux forces homogènes et équivalentes s’effectue par l’envoie des bâtiments tels que les torpilleurs ou les destroyers légers comme fer de lance en direction des unités lourdes en stationnement et des stations. Le temps de flottement entre la première salve et la mise en position de combat des ennemis pourra être utilisés par les bâtiments plus lourds tels que les vaisseaux de ligne, les cuirassés et les destroyers légers pour terminer d’incapaciter les unités lourdes adversaires et de commencer à frapper les astronefs intermédiaires qui se seront placés en formation. Selon les doctrines,… »


Un grognement vint couper sa concentration, et il releva la tête de la nouvelle feuille. Le timonier s’était redressé, et tournait une page du « pays des neiges », lorsque son mouvement s’arrêta subitement. Comme si il ne voulait pas réveiller ceux qui étaient atour— l’un était profondément pris dans le visionnage d’un holofilm, l’autre dormait toujours—, il tourna la tête vers l’amiral, et, voyant qu’il l’observait, fit à voix basse:

-Amiral, j’ai quelque chose sur le scanner.

Plus ou moins intrigué, à coup sûr gêné de devoir se lever, Syllas posa ses travaux sur la tablette, non sans faire tomber une des nombreuses feuilles, et avançant jusqu’au poste du timonier, dont il observa l’écran. Le doigt du lieutenant lui indiqua une petite trace que montrait le scanner.

-Ici, en grille 47-8. Je ne sais pas ce que c’est, mais…

Déjà les doigts de l’amiral pianotaient sur la petite console, tandis qu’un scan supplémentaire sur toutes les fréquences subspatiales était conduit , dont il afficha les résultats sur une autre écran holographique.

-Trois mille sept cent nœuds, vecteur 4-4-48-11 diamètre, quatre kilomètres, structure: silicium, signature subspatial: négligeable, récita doucement Syllas, avant de se tourner vers l’opérateur, en prenant de l’autre main « Voyage au pays des neiges »: Désolé pour vous, mais c’est encore une fausse alerte. Cet astéroïde a une forme assez peu commune, mais pas de doutes, ça en est un. Allez, il vous reste encore deux cent pages.

Avec une tape sur l’épaule de l’officier, alors que lui loin la fille émettait un grognement, l’amiral regagna son fauteuil, ramassa la feuille qui était tombée, et s’apprêtait à reprendre ce que disaient les doctrines sur l’engagement des unités intermédiaires, quand son regard s’arrêta sur le second hologramme. C’était étrange, il aurait juré que le vecteur avait été 4-4-48-11, et non 4-4-48-21, comme il s’affichait maintenant. Mais, avant qu’il n’ait pu se poser davantage la question, l’ordinateur annonça que l’objet était sorti hors de la zone de portée maximale des scanners.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMer 12 Nov - 17:34

Insignes Pontificaux: Ces insignes sont au nombre de sept. En premier lieu, la quadruple Tiare, représentant le Règne spirituel et Temporel sur chacune des deux communautés, ensuite les deux clés de Saint Pierre, puis la Bible selon Saint Raphaël Paléologue, ensuite le glaive, la représentation symbolique d’Hagia Triada, le costume du Grand Archidiacre, et enfin, les armes personnelles du tenant de l’office.

Dictionnaire Universel. Edition n°54.8.14. Livre V, page 410. Extrait de l’Article « Insigne Pontificaux ».



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An 3859, E.d.U (Eon de l’Union).
Acre



Son fusil à impulsion maintenu avec précaution en bandoulière, l’Amiral Law, malgré son lourd sac, fit un saut agile au dessus du petit ruisseau boueux dont le cours sinueux traversait la forêt de pins qui bordait la côte au sud du manoir, et atterri après une magnifique parabole sur le sentier, de l’autre côté. Il avança un peu pour libérer la piste, et se retourna. L’Amiral Syllas, sans cabrioles excessives, l’imita, et était bientôt également à côté, assis sur une souche à peu près propre. Gaiement, les enfants traversèrent à leur tour, Cassandre d’un long saut gracieux qui montrait que ses heures de gymnastique en apesanteur n'avaient pas été perdues, Alexis en sautillant par-dessus les rochers. Finalement, ce fut le tour de Frederick, sa grande arbalète rangée contre son dos, traînant un peu les pieds.
Tout le monde ayant passé ce lieu périlleux, la petite caravane se remit en route sur le sentier, dont le cour irrégulier, à l’ombre des arbres, était toujours un lieu de promenade charmant. Après encore vingt-cinq mètres de dénivelé, il rejoignait le petit chemin côtier qui faisait le tour de la presqu’ile entièrement occupée par les domaines familiaux des Syllas, et ayant en son centre le manoir. En tout, ce chemin devait bien faire dix kilomètres, et bien plus avec toutes les petites voies détournées et autres menant soit dans les forêts du sud, qui descendaient vers des plages où se mêlaient galets ronds et sable bleu et jaune, soit au nord, sur la lande occupant le sommet de la falaise. Ils suivraient donc le chemin pendant encore un bref kilomètre, avant de remonter vers le coin où l’on chassait depuis des générations, le champ du sépulcre, nom bien sombre pour un endroit qui était, pendant la saison estivale, un merveilleux pré plein d’arbre fruitiers et de hautes herbes richement fleuries, le tout autour d’un étang. Le gibier y abondait, et les chasseurs de la famille s’y rendaient à intervalles réguliers, à raison d’une à deux fois par an généralement, afin de garantir les réserves du territoire.

-Vous êtes bien silencieux, Nikolaï, remarqua Law, qui lui sifflotait joyeusement, à l’avant du groupe, cette partie de chasse ne vous enchante-t-elle dont pas?
-Bien au contraire, je suis convaincu que cette distraction bien n’étant pas ma préférée me fera le plus grand bien, répondit l’Amiral, qui avait bien du apprendre quelques rudiments avec son père, bien que manifestant pas un intérêt excessif, mais je ne parviens pas à me détacher des événements récents…
-Bah, ne vous en faits pas, nous aurons largement assez de journées à nous débattre avec des dizaines de réunions de collaborateurs, je trouve que ce moment de calme est excellent….C’est bien vous qui me l’avez proposé. Mon principal souci de toutes façons est le temps, ajouta-t-il en désignant le ciel, grisâtre, sans vraiment être menaçant, ni pour autant franc.
-J’aimerais bien partager votre état d’esprit…enfin bon, au moins les enfants s’amusent.

Il désignait les deux qui sautaient, en parallèle au chemin, de rocher en rocher, dans les sous-bois duveteux de mousse, tout en tachant néanmoins d’éviter les quelques buissons d’orties.

-Oui, cela leur fera du bien après les événements récents. A leur âge, on doit pouvoir conserver son innocence, et je comprends que, même si c’est nécessaire, les surveiller davantage ne doit pas leur faire plaisir, surtout après le départ de leur mère.

Syllas hocha la tête d’un air approbateur.

-D’ailleurs, Nikolaï, je tiens encore une fois à m’excuser pour Constanta, je suis le chef de Famille, et la faute retombe sur moi. Je suis impardonnable! Juste si je savais où ma gueuse de soeur se trouve…
-]Allons Franck, ça n’est absolument pas votre faute, vous n’avez pas à vous excuser, pas le moins du monde, ce qui est arrivé est arrivé, même si c’est un incident tout à fait regrettable.
-Mais regardez votre frère! Répliqua son collègue, en jetant furtivement un coup par-dessus son épaule vers Frederick, qui portait le peu d’attention qu’il avait encore vers ses enfants, il est brisé, et cela ne l’aidera pas maintenant qu’il est seuls avec les deux. Même ce bon François ne pourra plus les tenir bientôt! Cassandre à quatorze ans, et je ne me pardonnerais jamais si les héritiers de votre Lignée soit d’une quelconque façon corrompus indirectement par ma faute.
-Allons, cesser avec cela, Franck, maintenant c’est vous qui commencez à devenir sinistre. Ne vous inquiétez pas, je ferais tout le nécessaire, même si je crains ne pouvoir faire que peu de choses, mais ne vous sentez, je vous en supplie, pas coupable. Songez plutôt au gibier que vous comptez prendre!

Sur ces paroles, l’Amiral prit les devants, et tourna à gauche sur le tracé côtier qu’il venait d’atteindre. Derrière, Frederick tentait de calmer les enfants à proximité de la ravine qui descendait vers la plage. Mais il n’avait pas vraiment de succès, Alexis s’était à contrecœur rangé sur le bord du chemin, tapotant les cailloux au passage avec un bâton qu’il avait ramassé plus tôt. La jeune fille, elle, galopait encore dans les sous-bois, allant parfois jusqu’à disparaitre parfois sur des tronçons de plusieurs dizaines de mètres. Finalement, le musicien abandonna, et concentra toute son attention sur le mouvement de va et vient de la crosse de l’arbalète, ou encore sur le grondement des vagues en contrebas.
Après vingt bonnes minutes de marche dans l’air vivifiant du matin, ils arrivèrent finalement au Champ. On était en Octobre, les fleurs de l’été étaient fanées et tombées depuis longtemps, et une bonne partie des feuilles des arbres caduques s’en étaient allées, ne laissant plus qu’un maigre reste d’un jaune triste. Les seules touches de couleur était apportées par l’herbe, comme toujours sous ces latitudes grasse et verte, haute, pleine de vie, et les quelques conifères bordant la trouée à gauche et sur le fond, à côté du gros rocher granitique recouvert de mousse dont la forme a donné son nom au lieu. La légende populaire locale — celle là même qui disait qu’une bête affreuse, une chimère aux yeux oranges parcourus d‘éclairs, parcourait les plaine et forêts de la côte nord du continent— le donne comme lieu de repos d’un des guerriers barbares qui ont submergé les colonies faiblement peuplées de galaxie 8, après s’être heurtés à la résistance des grandes métropoles de galaxie 7, entre autre la flotte de la Sérénissime République. Même si les rares barbares ayant eut le loisir de s’installer sont totalement mêlés à la population d’origine, ce terrible moment de l’histoire locale quadrimillénaire restait très présent dans l’imagination populaire, et les prières devant la statue d’Eudes IV Syllas, présentant le célèbre représentant de la Lignée un long fusil laser à la main, baïonnette au canon, appelant à la charge les combattant, restaient quasi-quotidienne de la part des tenants de groupes bouddhiques les plus radicaux et de mouvements religieux tournés vers le passé de leur planète.
L’Amiral secoua la tête, et posa son arme sur un repli de l’imposante masse rocheuse qu’ils venaient d’atteindre après avoir traversé l'herbe encore humide, avant de s’asseoir-même. A côté, Law et Frederick, quelque peu ranimé par ce sport qu’il a toujours beaucoup apprécié, contrairement à son frère qui était là pour faire lui plaisir et l’aider, comparaient leurs armes de chasse. Le premier avait un fusil APG modifié pour l’usage, entre modernité et tradition avec sa crosse de bois très travaillée et le cœur énergétique à fusion, alors que le deuxième portait une arbalète à l'ancienne, avec un long prolongement balistique pour les puissantes flèches de carbone renforcé d'aluminium, le tout sur un support en duranium. Le rechargement était assuré par un dispositif informatisé sophistiqué, qui ne laissait au chasseur plus que le plaisir de la chasse avec cette arme à jet, sans ses inconvénient qu’étaient le long rechargement et le poids. Enfin, les enfants avaient entrepris l’escalade traditionnelle du rocher. En effet, à mi-hauteur, soit environ quatre mètres, se trouvait un assez large plateau garni d’herbes sèches. Leur père ne leur adressa même pas de protestation pour la forme cette fois-ci.
Cassandre arriva en première, et lança un regard circulaire. Ses yeux brillaient d’intérêt. Elle inspecta l’orée de la forêt en face du rocher, côté nord-est, jusqu’à ce que ses yeux accrochent une petite ouverture dans les taillis, où l’on distinguait la couleur beige à peine visible d’un sentier très peu fréquenté, serpentant entre les deux grands marais qui barrait à cet endroit la route, se confondant avec la forêt, des arbres poussant sur des îlets sablonneux au milieu de la végétation aux enchevêtrements rappelant les forêts tropicales d'Eitso. Relevant la tête, elle suivit son cours entre les arbres plus clairsemés au loin. Après un détour autour d’une colline, il arrivait à la grand-route. Environ un kilomètre, rien de bien terrible. Satisfaite de sa première impression, tout en terminant de peaufiner son plan, elle se retourna, voir ce qu’il en était.
Alexis, après avoir fait le tour de la plate-forme, redescendait à présenter. Il était un peu frêle, mais s’en sortait bien en course de fond, et montrait déjà des intérêts pour la carrière militaire. Sa sœur eut un petit sourire en l’imaginant à l’académie de marine, bien en rang, avec d’autres garçons comme lui. Enfin, elle-même, à quatorze ans largement passés, ne savait pas vraiment qu’elle profession elle allait embrasser, absolument aucune idée, et cela l’embêtait toujours quand on lui demandait. Les vieux étaient quant à eux regroupés autour des armes posées sur un rocher plat, et du sac de munition qu’avait porté Law, et effectuaient les derniers réglages. Déjà, au sol, la petite machine volante qui servait d’entraînement était là, prête à s'élever. Ce dispositif mystérieux lévitait d'entre deux mètres et dix mètres, et au moindre mouvement suspect débutait un ballet aérien qui le rendait impossible à toucher pour le tireur, dont l’objectif était de viser correctement tout en étant le plus discret possible. D'autres options permettaient de mettre en valeurs les différentes qualités du chasseurs, mais celle-là était la principale.
Ils chargèrent enfin l’APG, et Law enfonça le bouton central de la sphère, qui s’éleva immédiatement, pour ne s’arrêter qu’au milieu du champ, à hauteur des yeux de la jeune fille. Ce genre de machin ne lui étaient jamais vraiment revenu, et ça n’était pas prêt de changer. Elle revint au groupe en bas.
Alexis, entre-temps descendu, demandait s’il pourrait essayer un peu aussi. On lui assura cela, tout en le prévenant qu’il fallait être très prudent. Elle n’avait jamais vraiment apprécié Law, sans pour autant le détester — un peu comme l'étrange coucou plus loin. Cet homme était totalement inintéressant, avec ses quelques passions profondément chiantes, et sa personne même, également profondément chiante. D’après François, il s’occupait d’administration et de paperasse surtout. Ca lui ressemblait bien. Pourtant, l’homme ne lui-même n’était pas antipathique, mais juste inintéressant.
Après une bonne demi-heure à regarder les gens en dessous s’échiner à toucher la machine — seul oncle Nikolaï parvint, après s’être fait prier pour tirer quelques coups —, et Alexis faire ses premiers essais — relativement peu concluants, mais de toute façon il préférait les sports de combat, il avait bien commencé à un apprendre un, autre grand dam de Frederick. Histoire d’ennuyer ce dernier, elle essaierait peut-être aussi —, elle décida de descendre faire acte de présence, après avoir une dernière fois imprimé la vue de la forêt au nord-est, grimpa avec agilité et rapidité, et sauta finalement avec souplesse dans l’herbe dont l'humidité issue des orages de la veille commençait tout juste à se résorber. Après avoir inspecté les quelques cartouchières à énergie éparpillées, et un trait d’arbalète, pour la forme, et s’installa à côté du lourd fusil à impulsion de son oncle, qui était à une dizaine de mètres de là, sous un saule pleureur, un rameau dans la main au niveau de ses yeux, le contemplant d’un air mélancolique. Finalement, son bras retomba, et visiblement en soupirant, il revint vers le petit groupe, alors même que retentissait une clameur provenant de Frederick, qui venait de toucher pour la première fois le machine, manifestement activée en mode "très difficile". Celle-ci, à bout de batterie, revint lentement se poser à côté d’eux, ses petits sustentateurs latéraux se rangeant avec un petit bourdonnement à l’intérieur de la coque.


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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMer 12 Nov - 17:34

-Bon, nous nous préparons? Demanda gaiement Law, pour une fois avec un grand sourire d’homme comblé.
-Je suis prêt depuis bientôt un quart d’heure, fit oncle Nikolaï, plus maigre et grave que jamais.

Les deux compères parurent dans un premier temps un peu troublés, puis, dans leur élément, commencèrent à travailler sur leur armes en discutant avec animation. Ses longs cils cachant légèrement ses yeux — trait commun avec Cassandre quand elle fermait en partie ses paupières, dissimulant des couleurs semblables à celles de son oncle —, l’Amiral souleva son arme, et s’assit à la place qu’elle occupait, en la posant sur ses genoux, distraitement.

-Je peux la voir, oncle Nikolaï? Demanda assez timidement devant tant de gravité sa nièce.

Il parut comme se réveiller d’un rêve en entendant sa voie fraiche de contralto, tout à fait étrangère aux tons habituels qu’il entendait à l'amirauté, et dit lentement, en la dévisageant, tout en relevant sa main de la crosse:

-Mais bien sûr! Par contre, fait attention au cran de sécurité, ajouta-t-il en lui indiquant une petite roulette à aiguille lumineuse sur le côté.

Elle tendit la main, et souleva l’arme. Elle la trouva immédiatement bien plus lourde qu’elle ne l’aurait pensée. Pourtant, ils portaient tellement gaillardement leurs canons…Enfin, elle eut le soulagement que Alexis était dans la quasi-impossibilité de tenir l’APG de Law sans mettre les deux mains.
Elle posa celle de son oncle sur ses genoux, et commença à l’examiner, les yeux brillants de nouveau d’intérêt. Les formes à la fois trapues et puissantes de cette machine avaient comme un effet hypnotique sur elle qui n’échappa pas à Syllas, qui la fixait avec intensité. Il tendit sa main, et fit passer ses doigts dans les cheveux bruns lisses de sa nièce, comme hypnotisé, sans qu’elle ne s’en rende compte. Il se rétracta, ayant testé la concentration de celle-ci, qui en était à l‘examen attentif de la cartouche à énergie marquée du sigle « GEW » du fabriquant, puis au dessus du compteur holographique désactivé. Finalement, après avoir passé ses doigts blancs et longs comme ceux de son pianiste de père jusqu’au bout du canon en un mouvement presque sensuel, le dévorant des yeux, et jeté un coup d’œil dans l’âme de celui-ci, elle prit le fusil, se cala résolument la crosse sous le coude, la bandoulière sur l’épaule, et fit mine de viser.
A côté, son oncle continuait de suivre tout avec la plus grande attention. Il posa sa main sur son dos, et, rapprochant son visage de la tête de Cassandre, murmura en appliquant une petite poussée:

-Lève toi.

Elle obtempéra, sans changer sa position, fascinée par ce qu’elle faisait. L’Amiral la fit encore avancer de quelques pas, tourner en direction de la forêt, puis, elle sentit son bras se glisser sous le sien, passer à côté de sa main près de la gâchette, puis entendit le cran de sûreté se relever avec un petit cliquetis caractéristique qu’elle avait déjà entendu avec l’autre arme de son père. Elle sentit la machine émettre une quasi-imperceptible vibration, avant que le compteur holographique ne s’active. Une petite aiguille tridimensionnelle passa d’une zone rouge, lentement, à une zone verte. Un bref sifflement se fit entendre.

-Tu vois l’arbre mort là-bas? Essaye. Souffla-il simplement, se tenant toujours derrière elle.

Le poids de l’arme commençait à lui peser, mais elle n’y prêtait pas attention. Doucement, en passant sa langue sur ses lèvres, elle approcha son index de la gâchette, alors qu’elle plaçait son œil droit dans la ligne de viseur définie au dessus du canon. Après un instant de flottement, parfaitement alignée sur le tronc pourri de ce qui avait été un plutôt bel érable, elle appuya de toute sa force. Il y eut un éclair, alors même qu’elle sentait nettement le recul du FAM1 modifié, et qu’un trait de lumière jaune pâle allait frapper le tronc avec une étrange absence de violence. Une bonne partie de celui-ci fut alors désagrégé, sans flamme ni explosion. Elle releva la tête, l’œil plus brillant que jamais, fascinée.
Derrière, Frederick, qui avait d’abord sursauté se remettait tout juste de ses émotions.

-Ah! Vous m’avez pris au dépourvu, à comploter derrière mon dos!

Il l’examina un instant, en position, avec son air de concentration féroce doublé d’un intérêt étrange.

-Tu vois, quand c’est moi qui te proposais, tu n’as jamais voulu. Ah, Nikolaï, ces enfants!…

L’interpelé haussa les épaules.

-Ils voient chaque chose en temps et en heure en voulue. L’on ne peut pas tout forcer, Franck en sait quelque chose. N’est-ce pas?
-Certainement, répondit Law, souriant, qui venait tout juste de se retourner, un trait à la main, essayez de réformer l’organisation des politiques dans une ville de plus de cinq-cents habitants ne peut se faire que par deux façons: La première est un remplacement et une réorganisation progressive sur des années, la seconde un bon vieux bataillon d’infanterie de marine avec des joujoux comme celui que tu tiens dans la main, ma petite!

Cassandre eut un petit rire étrange en regardant l’arme, dont le petit compteur tridimensionnel avait son aiguille de retour sur la partie verte. Puis, brusquement, elle se repositionna, et tira une autre salve sur la souche, qui fut définitivement décapitée.

-Voilà un haut-fonctionnaire du bled que tu as définitivement recasé, fit avec un sourire l’Amiral Syllas en lui reprenant doucement le FAM1, en attendant, sommes-nous prêt? Franck?

Celui-ci hocha la tête en glissant le carreau dans l’arbalète du musicien, fermant le gros sac, et prenant son propre APG.

-Nous pouvons y aller.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeDim 4 Jan - 23:34

Avant la Révolution Militaire, la passion de l’amiral Von Heigins pour les opéras de Wagner était un sujet de dérision et de plaisanterie pour certains. A présent, ces mêmes personnes assistent allégrement à chaque représentation à laquelle Horatius est présent. Et applaudissent vivement.
Remarque de l’Amiral Wladimir Basil lors d’une conversation avec son collègue Syllas et la président Jadéen.

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An 3855, E.d.U (Eon de l’Union).
Galaxie 9, espace profond
UFGS Kanopus



Ishaa venait de s‘installer à son poste, et avait pris ses aises, posant les pieds sur le strapontin voisin inoccupé, ce qui, en temps normal, aurait déclenché les foudres de son supérieur, sans même parler du Vice-Amiral, qui était à quelques mètres d’elle, lui aussi installé de travers sur son siège, au milieu de ses notes. Il y avait encore cinq minutes jusqu‘à l‘exercice partiel, et, étant de septième du mois, la tension des premiers s‘était un peu relâchée. Car, au premier, l‘amiral avait été très exigeant, demandant le meilleur de chacun, aussi bien ceux du Kanopus que pour les deux escorteurs de ce dernier, les frégates Regulus et Steglitz. Mais avec le temps, pour éviter que les nerfs ne s’usent, il avait installé une occurrence de deux exercices de « moindre importances » pour un « d’importance » . Et cette nuit, on était dans le deuxième cas. Après avoir terminé toutes ses préparations et passé en revue le demi-équipage de la passerelle, il était retourné à son siège, au poste central, et avait reprit ses notes, pour travailler un peu en attendant que les autres stations du bord soit prêtes. Vu le temps depuis lequel il écrivait ce machin, il avait déjà dût disserter dans tout les sens. Enfin bon, au moins il n’était pas en train de faire la police de tout les côtés, et les gens du mess de l’équipage étaient tranquilles dans leurs jeux, conversations, et autres loisirs. La location de stimulateurs corticaux au magasin de bord avait explosé, et on se les arrachait pour quelques heures à peine passées loin des coursives d’acier à la lumière froide et drue. Elle-même n’y avait eut droit que deux ou trois fois. Magnanime, Syllas avait demandé aux officiers les plus gradés de l’imiter et de laisser leur tours au reste de l’équipage. Il faisait de son mieux pour maintenir le moral, mais l’idée de passer deux ans comme cela le sapait terriblement, et forcer lesdits officiers à se creuser la tête pour voir ce qu’on pouvait faire pour meubler le temps. La semaine dernière, indépendamment de leurs quelques épreuves sportives et autres tournois de cartes et jetons, la découverte d’une forte belle nébuleuse avait attiré du monde sur le pont d’observation, et permis de passer quelques jours à admirer les couleurs mystérieuses et non à se saouler des alcools faibles distribués avec parcimonie.
L’amiral s’était naturellement rapproché de ses hommes, et passait lui aussi des après-midi à parler relativement librement, installé dans les fauteuils moelleux et rembourrés du mess, dont deux côtés étaient de grandes vitres donnant sur l’espace, qui se sentait solidaire avec lui, dans les intrigues de politique qui avaient déjà empêchés bien des soldats et mariniers de recevoir leur solde, ou même les abandonnant parfois sur une planète autre que la leur, les forçant à payer le retour—ce qui n’était pas toujours possible. Depuis une cinquantaine d’années, tout allait de mal en pis, et l’invasion erikeane n’avait été que repoussée au prix de grands efforts, des deux côtés, quant à la guerre contre Alttoria, elle n‘était maintenue en faveur de l‘Union que par une série de miracles inespérés. Le récent scandale à la tête du parti démocrate avait sapé la base électorale de celui-ci, et, malgré la corruption et le trafic d’influence quasi-institué, les centristes avaient repris la barre, et ce n’était pas plus brillant. D’autant plus que l’indomptable Juan de Sans Ferdino, figure de la politique, et à la tête d’un parti ouvertement belliciste et extrémiste, ne se gênait pas pour rajouter au bordel terrifiant qu’était devenu l’état en lançant à tord et à travers des actions sur l’honneur auprès de la Haute-Cour de l’Union, en faisant des discours particulièrement menaçants très régulièrement, et, s’il y avait eut que lui, ça n’aurait pas été faire table rase, mais plutôt détruire celle-ci au couteau plasmique, puis fracasser le reste à la bonne vieille hache, et enfin l’incinérer. Mais ce personnage haut en couleur n’avait pas les même chances de réellement y parvenir que l’Amiral Von Heigins, notable ami personnel de leur Syllas, qui, entré dans le jeu depuis quelques mois uniquement, fédérait déjà 20% du parlement avec un programme d’union nationale, une certaine brutalité militaire, et s’était attiré le soutient à la fois de l’armée et de la population qui, lasse de l’inefficacité des autres gouvernements, songeait vaguement à voir ce que valait cet homme déterminé et étranger aux cercles habituels, qui avait acquis un certain renom pendant de la dernière guerre, qui n‘avait d‘ailleurs guère connus de succès notables avant l‘Opération Cascade.
Il y eut une série de signaux sonores, et des lumières s’allumèrent sur la console à côté du siège du commandant. Syllas y jeta un bref coup d’œil, pendant qu’un officier du quart à gauche du poste central annonçait d’une voix bien réveillée:

-Toutes les sections annoncent qu’elles sont prêtes pour l’exercice.
-Parfait; branchez moi sur la com. générale de la flottille, fit l’amiral, posant sur une tablette ses documents et se remettant correctement, lui aussi fin prêt.

Quelques touches enfoncées sur la deuxièmes rangées de consoles réglèrent cela; l’ouverture fut annoncée par une brève tonalité.

-Ici le Vice-amiral Syllas à l’escadre, déclara énergiquement l’officier, conformément aux plans mis en place, nous allons démarrer d’exercice Bleu. Le personnel affecté doit se rendre immédiatement à ses postes de combat. Le reste des équipages devra rester dans ses quartiers jusqu’à son terme, dans quatre heures.

L’exercice Bleu du jour simulait la prise en chasse du Kanopus par deux bâtiments adverses plus légers, mais néanmoins menaçants par leur travail de groupe. Il était élaboré en personne par le chef d’expédition, qui déplorait de n’avoir plus de moyens, comme lors de son action, quelques mois plus tôt, dans les rocs d’Elyora, où, arrivé à la tête d’un détachement réduit, il avait retrouvé la flotte mise en déroute, l’avait prise sous son commandement, était reparti à l’assaut, et l’avait finalement emporté de haute lutte. Néanmoins, ses succès avaient rendu nécessaire de l’éloigner pour…quelques temps.
Les communications audio en provenance des deux autres capitaines confirmèrent rapidement que leurs unités étaient prêtes. Syllas se tourna vers le commandant Setz:

-Qu’en est-il de nous? L’interrogea-t-il rapidement.
-Tout les ponts sont parés, le réacteur également, l’armement ne souffre d’aucun problème…je dirais que nous sommes prêts également.
-Parfait, répéta le vice-amiral, en observant d’un l’écran central les deux frégates s’écarter du croiseur par la droite. Il laissa quelques instants s’écouler, et bientôt les deux astronefs avaient disparus du visuel; Vous les suivez?

Le sonar gravimétrique venait d’être entré en phase active; l’opérateur, fixant l’immense champ tridimensionnel au dessus de sa console, annonça d’une voix égale:

-On les a toujours, vitesse, quatre-mille deux cent cinq nœuds, vecteur commun 5-4-74-11. Ils se dirigent vers l’astéroïde 45VC et ses six troyens.

Le vice-amiral posa sa tête sur une poing, réfléchissant rapidement à la façon d‘amorcer le tout, en fixant les quelques points blancs d’étoiles éparpillés dans les ténèbres visibles sur l’écran. Sa main libre serrait le bout de sa manche, au dessus du petit bouton doré ouvragé. Setz était à demi-tourné vers lui, et le jaugeait, comme pour le prendre de vitesse dans les décisions à prendre. L’opérateur sonar poursuivait:

-Quatre-mille cent nœuds, vecteur 5-4-44-11. Il entrent en orbite de 45VC I. Premier passage en zone d’ombre dans vingt-quatre secondes. Vingt-trois, vingt-deux, vingt-et-un, vingt…

Les yeux toujours rêveurs, Syllas continuait à contempler les étoiles en écoutant le décompte de l’opérateur; Sa main gauche, ayant lâché la manche, tapotait de temps à autres sur un gros bouton jaune installé dans l’accoudoir.

-Trois, deux, un, zéro. On les as perdu, conclut l’officier.

Soudain, la voix du vice-amiral perça le silence:

-Lancement général des moteurs; faite nous faire un microsaut en hyperespace. Je veux qu’on intercale le 45 entre eux et nous!

A toutes vitesse, Ishaa, qui avait quitté sa posture nonchalante pour reprendre fermement sa console en main, y enfonça plusieurs commandes, passa son doigt sur un sélecteur, et abaissa légèrement une manette virtuelle. En l’espace d’une seconde, chaque personne à bord du Kanopus avait ressentit comme une infinitésimale vibration dans ses os. Sur l’écran, sans aucune transition, la vue s’était transformée: le nez effilé du croiseur se tendait vers une surface grisâtre parsemée de quelques rares cratères.

-Composition interne? Rayonnements? Interrogea Syllas.
-Je fait scanner…dit lentement Setz, en suivant ce qui se passait sur l’écran holographique s’affichant à l’instant au dessus de son poste, masse métallique: 22%, silicium: 48%, glace: 30%. Quelques charges de rayons stellaires, très faibles émissions Tachyoniques.
-Hum…ça suffira, dit l’amiral, pensant à haute voix, avant de reprendre, avec plus de force: Chargez les systèmes d’armement, préparez la propulsion à hyperimpulsion. Engagez une trajectoire au plus prêt du planétoïde; on doit pouvoir utiliser son effet de fronde. Chargez de l’énergie dans les systèmes de boucliers.

Le Kanopus, comme l’indiquaient tout les instruments, piqua soudain du nez en direction de la surface aux couleurs sinistres du 45, pour ne se redresser qu’au milieu des plus hauts reliefs de celui-ci, les compensateurs gravimétriques ne faisant leur travail que péniblement sous la charge imposée à l’énorme bâtiment et la trajectoire dangereuse. Un des grands avantages de Syllas était sa tendance à manœuvrer les grands navires comme on le ferait pour le petits, les amenant au bout de leurs performances, et surprenant ses adversaires… même s’il tachait d’éviter les actions téméraires.
Soudain, la voix de l’opérateur Sonar s’éleva:

-J’ai les deux; ils sont en orbite haut et rapide, dans le sens. Ils nous cherchent. Je ne pense pas qu’ils nous aient remarqués; nous sommes protégés par la masse gravitationnelle de l’astéroïde, mais ça ne devrait pas tarder…
-On remonte, préparez une bordée de l’artillerie d’250 de bâbord sur le marqueur deux, s’écria Syllas, fixant l’hologramme tactique s’étant automatiquement activé à l’engagement, et qui trônait à présent au-dessus de leurs têtes, ensuite, manœuvre évasive.

Ishaa réagit au quart de tour, en concert avec les deux opérateurs de combat et celui des moteurs, ajustant la barre à une trajectoire abrupte de remontée en chandelle, que le massif bâtiment accepta sans broncher, tandis que les lourds boucliers de durane servant de sabord sur le flan gauche s’ouvrait, dévoilant les noirs canons, poussant l’exercice jusqu’au réalisme le plus extrême.
L’écran central montrait la petite formation de frégates s’éclater, pendant que celle sur laquelle ressortait un chiffre rouge « 2 » suivait un vecteur précalculé par l’ordinateur sur instruction directe de la console du vice-amiral, au dessus de la laquelle les doigts de se dernier étaient animés d’un mouvement constant sans qu’il n’ait même besoin de les regarder. Du point de vue de l’astéroïde, leur montée était presque verticale, et les gyrostabilisateurs faisaient leur boulot en concours avec les gravitationnels.

-Réseau de tir 7, arc 65-12, première salve parée, annonçant à une vitesse effrénée l’opérateur tactique bâbord, entraînant sans transition l’injonction du commandant de l’astronef:
-Feu!

Une série de tirs simulés de charges explosives et de faisceaux photoniques alla droit au but, du flan blindé du Kanopus vers celui de la frégate Regulus, qui, calcula l’ordinateur aurait dû être détruit à 79%, causant la décompression de quatre des cinq compartiments étanches du vaisseau, l’immobilisation de sa propulsion, et la mort des officiers de commandement de la passerelle. Hors-jeu.


Dernière édition par Syllas le Mar 7 Avr - 22:35, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeDim 4 Jan - 23:34

-Beau coup, bravo, commenta Syllas, statut du marqueur 1?

Un scan rapide donna que, suivant un vecteur atypique, il avait piqué à son tour vers la surface du sinistre planétoïde, et y louvoyait, manifestement pour attirer son adversaire, disposant à présent d‘une large supériorité en espace libre, dans une situation où cette-dernière serait annulée.
Un instant pensif, sa tête ayant retrouvé comme socle la paume de la main, le bras s’appuyant sur l’accoudoir, l’amiral observer les écrans secondaires. Finalement, il déclara:

-On descend. Maintenez-nous à une demi-altitude. Vitesse à deux mille sept cent nœuds, utilisez les relevés fait tout à l’heure de la topographie.

Quelques « oui, amiral » ponctuèrent le lancement de cette nouvelle manœuvre, tandis que, de nouveau, le Kanopus se dirigeait vers la surface balafrée et sombre du 45. Syllas examinait pendant ce temps attentivement la représentation topographique affiché sur un écran auxiliaire, en marge du principal, qui suivait tant bien que mal le marqueur 1 entre les reliefs absurdes et biscornus de l’astéroïde. Son regard s’arrêta sur un assez vague cirque formé par plusieurs cratères entourés de formations glacées de grande taille bloquant les sorties normales.

-Diminuez l’angle d’approche à 35%, on continue suivant le vecteur 2-1-57-09. Faite un crochet autour du grand relief en grille 8, puis foncez sur le cratère géant, ordonna fermement le vice-amiral, suivant de loin les mouvement de moins en moins bien discernable de sa proie.

Le croiseur fit une boucle autour d’une aiguille de glace noire se dressant en direction d’un ciel condamné à la nuit éternelle, puis descendit en dessous de la ligne des crêtes, profitant des profondes vallées qui reliaient entre eux les cratères, empêchant ainsi tout repérage par l’autre astronef, zigzaguant entre les aléas du relief, au gré du pilote automatique, pendant plusieurs minutes dans un total silence.
Ishaa suivit avec appréhension leur position sur l’écran se rapprocher de l’énorme cirque, mais restait calme et professionnelle sur les commandes. Néanmoins, c’était la première fois où ils faisaient cela dans un endroit pareil, qui était assez oppressant. Enfin, elle avait confiance en Syllas, et c’était ce qui comptait.

-Ouvrez les sabords de 500 sur tribord, et préparez le tir. Réseau de tir entre deux et quatre. Soyez prêts! Déclara subitement Syllas alors qu’ils étaient sur le point de déboucher, sûr de ce qu’il faisait.

Mais déjà le Kanopus émergeait en l’espace de quelques secondes de la vallée qu’il avait suivi sur une centaine de Kilomètres, découvrant le spectacle de cet énorme cratère, où, en dessous de la glace fondue et refoulée sur les bord, émergeait l’intérieur de roc et de métal du 45, formant un étrange contraste de couleurs. Mais, immédiatement, les détecteurs s’affolèrent: le marqueur 1 venait de sortir d’une vallée parallèle à la leur, sur tribord, en plein dans l’arc de tir cinq.

-Recalculez, et feu! Cria le vice-amiral, sans même attendre l’analyse de l’officier tactique de tribord.

Après quelques secondes de flottement, le flan du croiseur explosa virtuellement, envoyant une mort tout aussi factice vers la frégate, qui était, annonça l’ordinateur sur l‘écran de calcul des dommages, sérieusement amochée. Néanmoins pas mise hors de combat. Elle répliqua brièvement avec trois pièces de 250, et un canon photonique, sans pour autant faire de dégâts dignes de ce nom ailleurs que sur l’aileron tribord, qui limitait légèrement la manœuvrabilité du Kanopus, sans pour autant l’handicaper réellement, avant de rompre, remontant aussi rapidement que possible.
Pestant contre un virage pas assez bien ajusté par l’ordinateur à gauche du navigateur droit endommagé, que Ishaa s’empressa de corriger d’un grand coup de barre, Syllas ordonna :

-On remonte, je veux pas qu’il s’échappe!

Le croiseur amorça une montée, se dirigeant vers l’orbite que la frégate avait déjà atteinte.
Mais, à peine ils avaient fait la moitié du chemin que soudain les détecteurs s’affolèrent, les aiguilles oscillants avec une extrême violence, les chiffres tridimensionnels se bousculant sur les hologrammes, tandis que l’écran principal n’affichait plus rien.

-Qu’est-ce qui se passe!? S’écria le vice-amiral, se relevant d’un bond de son siège.

Mais avant que quiconque n’ait pu faire part de son ignorance, l’éclairage s’éteignit tout à coup, remplacé après de longs instants par celui de secours, d‘un bleu pâle. Entre temps, les rares compteurs mécaniques encore allumés retournaient à la normale—les hologrammes ayant rendu l’âme—, mais brusquement, des pertes d’énergies eurent lieu. Les lampes azur de secours clignotèrent, tandis que certaines conduites d’énergies montraient des signes de surchauffe, vibrant légèrement.
A peine l’amiral s’était précipité en avant, à droite de Setz, que soudain, la gravité artificielle lâcha. Syllas, qui s’était cramponné à l’épaule de son second, n’était retenu que par le fait que ce dernier tenait du bout des doigts l’étroite rambarde qui séparait le poste central des consoles d’opérateurs qui formaient une couronne autour de ce dernier. Les casquettes de marine des deux officiers s’en allèrent léviter à l’instant, de même que les feuilles du traité de stratégie, et une multitude d’objets qui n’étaient pas attachés. Heureusement que la passerelle en était relativement dépourvue, sinon cela aurait été autrement plus embêtant.
Mais déjà le commandant lâcha, et les deux hommes se retrouvèrent volant à mi-chemin entre le sol du poste central et le plafond garni d‘holoprojecteurs, à côté des tubes ioniques des éclairages de secours. Ils croisèrent Ishaa, qui se frottait les yeux, se demandant s’il était réellement possible que cet accident rarissime leur arrivait, l’opérateur sonar, qui essayait de faire des mouvements de nage pour avancer, et bientôt les six autres officiers de passerelle. Le dernier coin de celle-ci, le poste d’analyse, avait à présent vu se désactiver la gravité artificielle à son tour, transformant le centre de commandement en étrange salle de gym antigravitationnelle. Un instant, Syllas songea à sa toute jeune nièce, qui avait commencé à s’entraîner à ce sport l’année précédente. Enfin, lui-même avait été dans l’infanterie de marine assez longtemps pour savoir qu’il n’y avait rien à faire mis à part attendre de rencontrer une paroi.
Il dériva comme ça, se sentant profondément idiot et impuissant, au milieu d’un quart proprement dit stupéfié—les générateurs gravifiques étaient sensés êtres plus fiables que le soutient de vie, et même en tapant dessus avec une hache on n‘aurait pu en altérer le fonctionnement outre mesure—, tentant néanmoins par moment de récupérer la casquette portant l’insigne de son rang, qui flottait à quelques mètres de lui, mais toujours hors de portée. Finalement, lassé, il ouvrit la fermeture magnétique de sa veste, et, prenant les bouts de celle-ci, battit avec, avec l’espoir que cela le ferait bouger de façon plus prévisible avec le mouvement de l‘air. Ce fut le cas; la poussée n’était pas terrible—il ne voulait pas abîmer son vêtement—, mais suffisait amplement. Tout en faisant le détour pour récupérer son couvre-chef—qu’il fourra sous son aisselle—, il parvint à « redescendre » jusqu’à la frêle rambarde du poste central. Tenant solidement la superstructure que l’on avait jugé « sans utilité pratique, méritant d’être retirée sur les modèles plus récents » pour citer le rapport interne du comité du ministère aux ingénieurs du chantier naval, mais qui montrait pleinement à quel point elle pouvait être salvatrice, il avançant lentement en direction de la porte de la passerelle. Flottant selon un angle de 45° au dessus des consoles, il fit ainsi la moitié du chemin, jusqu’au bout du point d’appui, puis fut contraint, après une pénible remise en position, de réitérer sa technique de battement d’ailes pour avancer, au prix de gros efforts. Entre-temps, derrière, Setz essayait de l’imiter, avec un succès variable; Ishaa, quant à elle, tentait, en prenant appui contre les parois qu’elle rencontrait, de se propulser, ce qui lui donna une bonne bosse avant de pouvoir se raccrocher à la décidemment providentielle rambarde d’aluminium.
Enfin, Syllas parvint à la porte, qui, comble du malheur, était bloquée en position fermée. Sifflant de rage, le vice-amiral se porta péniblement de côté, et s’escrima à ouvrir le panneau de contrôle réglementaire, qu’il avait heureusement fait vérifier quelques jours auparavant, et qui s’était avéré être bloqué alors, mais avait été dûment réparé. Celui-ci ouvert, il raccorda le circuit d’ouverture à une batterie autonome de secours, et enfonça le bouton d’activation. La batterie vibra un peu, mais son témoin de contrôle clignota en vert. Avec un crissement montrant la faiblesse de l’énergie disponible, les trois battants s’écartèrent, l’un vers le haut, les deux autres vers le bas.
Dans le couloir aussi, les lumières d’urgence étaient allumées. Plus loin, on voyait quelques membres d’équipages flotter dans l’air, totalement pris au dépourvus, spectacle affligeant d‘absurdité. Le Kanopus était totalement immobilisé, de même que les trois cent hommes et femmes à bord.
Une main s’accrocha au pantalon de textile ultra-résistant du vice-amiral. Setz, péniblement, arrivait à sa hauteur.

-Ca s’étend à tout le navire? Demanda-t-il, en lançant un coup d’œil terrifié à l’extérieur de la passerelle.
-Je crains que oui, c’est une catastrophe. J’espère que les gars du Regulus et du Steglitz ne vont pas tarder à remarquer que le jeu est terminé, et nous porter assistance.
-Mais en attendant, que fait-t-on, amiral? Interrogea Ishaa, qui arrivait elle aussi, se tirant en glissant ses doigts dans des interstices des murs.

Tournant doucement sur lui-même, Syllas se laissa un temps de réflexion, cherchant un moyen de les sortir de cette situation ridicule. Finalement, il murmura:

-Ca vaut la peine d’essayer, avant de dire plus fort: L’armurerie, il doit y avoir des petits retropropulseurs pour les commandos d’abordage. Ca nous servira en attendant qu’on répare les systèmes. La prochaine est un pont en dessous, n’est-ce pas?

Le second eut un hochement de tête résigné à l’idée devoir se traîner—plutôt léviter péniblement—jusqu’à là-bas, et laissa échapper:

-Allons-y…
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMar 6 Jan - 19:15

Article Second:
(1) L'Emblème de la Sérénissime République de Christiansa avec la bannière de Saint Marc. Elle se compose d'une section gauche et d'une section droite, d'égales surfaces. La section gauche présentera, entouré d'un quadrilatère ouvragé, le Lion de Saint Marc sur fond rouge, tenant un ouvrage portant l'inscription "Pax Van Tibi Geli Mar Sta E Mevs". La section droite présentera six bandes ornementées ayant chacune en son centre une globe bleu représentant le monde et les six premières cités de Venezia, d'Himalia, de Kamensk, d'Acreopolis, de Ragusa et de Candie.

Constitution de la Sérénissime République de Christiansa, article second, première section, première partie.





-- -- --


An 3859, E.d.U (Eon de l’Union).
Acre



Avec un grognement de satisfaction, Law tomba sur un des sièges du grand salon du manoir. Celui-ci communiquait avec le corridor ouest partant du hall d’entrée par une double porte en bois ouvragé; Sur une quarantaine de mètres, plusieurs tapis anciens, des tables basses en verres, des sofas, meubles divers et autres fauteuils au coin du feu donnaient à l’endroit un aspect chaleureux et agréable, quoique un peu suranné. Le plus bel élément, en plus de l’immense fauteuil de patriarche que le vieil Anastas tenait à avoir là, était bien entendu l’immense miroir ouvragé garni d’or qui courrait le long du mur à main droite, faisant face à la fenêtre, et reflétant en moment le ciel clair du coucher de soleil. Le temps clément avait fait s’attarder le petit groupe dans les forêts entourant le champ au Sépulcre, mais heureusement François avait gardé la nourriture du synthétiseur au chaud, et même préparé trois tasses de thé pour les adultes, en plus des chocolats chaud habituels des enfants. Avec gratitudes, tous acceptèrent, et s’installèrent autour d’une table basse sur laquelle trônait une pendule en bronze représentant une victoire ailée, un cadeau du doge à l’arrière grand-père d’Anastas. Celle-ci sonna dix heures et demi quand il eurent terminés leur collation. Frederick, exténué, alla coucher Alexis, laissant les amiraux là. Cassandre ne tarda pas à monter, leurs histoires chiantes ne l’intéressant pas. De toute façon, elle trépignait intérieurement d’impatience. Après avoir prit soin de fermer la porte du salon où les deux autres n’avaient même pas remarqué son départ, perdus dans leurs discussions obscures, elle alla vérifier que son père se préparait également. En effet, après avoir mené son petit frère dans sa chambre, il s’était tout simplement affalé, épuisé, sur son matelas électro répulsif, et semblait déjà somnoler. Elle tenta un « bonne nuit p’pa » timide, avant de refermer doucement cette porte là également. La chambre de Silva, sa tante, tout juste revenue de sa semaine à l’académie, était fermée à double tour, et un rai de lumière provenait d’en dessous. Elle passait de nombreuses soirées à se documenter en lisant ou en visionnant, c’était encore plus profond que du sommeil. Les yeux grands ouverts d‘impatience, elle retourna au haut de l’escalier, et vérifia que François soit bien dans son office, lumières arrêtées. C’était le cas. Là-dessus, elle fila dans sa chambre, et ferma la porte. Un petit peu tremblante, elle repassa tout ce qui était prévu en tête. Ca avait été vu et revu avec Kerstin, ça devait marcher. Elle ouvrit son armoire, écarta plusieurs sacs rangés à l’intérieur, et tirant celui qu’elle cherchait. Elle en sortit un vêtement noir couvrant tout le corps, avec en plus une large capuche. Elle riait un peu à l’idée de la tête qu’elle aurait là-dedans, mais il faillait passer inaperçue, et pas non plus avoir trop l’air de qui elle était. Se calmant mentalement, elle fourra les deux dans ses poches — heureusement que les habits sportifs du jour en avaient de grandes—, puis prit une lampe ionique d’un tiroir, qu’elle mit à la suite du reste. Enfin, elle prit les ballots restants dans l’armoire, et les plaça sous la couverture de son lit répulsif, le défit un peu et enfin ferma les volets. Satisfaite de ses préparatif, elle prit soin de prendre son chronomètre, qui affichait à présent onze heures, et d‘arrêter la lumière. Sur le point de sortir, elle s’arrêta net.

-…certain que si Horatius tient à maintenir les relations avec Jadis, il faudra qu’il s’arrange pour que Basil lui…

C’était la voix d’Oncle Nikolaï. Sa main, sur la poignée se crispa.

-Vous ne souhaitez pas le bonne nuit à votre nièce? Demanda Law.

La respiration de Cassandre, de l’autre côté du battant, s’arrêta.

-Hum…non. Elle doit déjà dormir; il n’y a pas de lumière.
-Vous avez raison. Et nous en devrions pas tarder à l’imiter.

Leurs pas s’éloignèrent, et s’assourdirent après un « bonne nuit » réciproque, avant de s’arrêter définitivement. La jeune fille respira longuement, puis ouvrit doucement la porte.
Vide. Personne dans le couloir, qui était juste éclairé par un petit photophore décoré de motif orientaux offert quelques années plus tôt par Liung Wu. Seuls quelques éternuement périodiques de l’Amiral Syllas—manifestement enroué—venaient troubler le silence. A pas de loup, elle quitta sa chambre, et referma aussi doucement que possible sa porte. Toujours aussi prudemment, elle s’avança vers l’autre bout du couloir, l’aile où l’on trouvait les chambres d’amis—et celle d’Anastas, mais le vieux était tellement sénile qu’il n’aurait pas entendu si un éléphant avait joué du banjo directement sous son nez.—
Un peu plus en confiance, elle prit de la vitesse. Arrivée à la moitié du chemin, un bruit lui glaça le sang. Le grincement d’une porte. D’une détente souple apprise grâce à la gymnastique en apesanteur, elle s’engouffra dans la pièce ouverte fort opportunément à sa droite. Elle entendit des pas plus loin, suivit d’un éternuement violent.

-Qu’est-ce que tu fiche, oncle Nikolaï! Siffla-t-elle entre ses dents.

Les pays descendirent l’escalier, la porte du salon grinça dans le lointain, il y eut un silence, puis un nouveau grincement. Manifestement l’Amiral avait oublié quelque chose au salon. Avec un nouvel éternuement, il grimpa l’escalier à double révolution, rentra dans sa chambre, et ce fut l’extinction des feux définitive.
Toujours pas complètement rassurée, Cassandre quitta son abri, et reprit sa marche vers le bout du long corridor du premier, et ce fut avec un profond soupir de soulagement qu’elle y arriva, et avisa la porte de l’escalier de service. Ca n’est qu’une fois dans celui-ci qu’elle se sentit soulagée. Cet escalier, éclairé par une faible lumière de secours rouge, n’était même plus utilisé par François, depuis qu’il avait la permission d’utiliser le principal, ces traditions domestiques n’ayant rencontré que peu d’intérêt auprès de Nikolaï et Frederick, et personne d’autre qu’elle n'y venait. C’était à peine si on y envoyait une fois par an un robot de nettoyage. Plus tranquille, elle retira de sa poche le vêtement en tissu noir lisse sans aucune aspérité que lui avait procuré son amie, et entreprit de l’enfiler par l’ouverture qui était pratiquée au niveau du torse. Une fois cela fait, elle referma la fermeture magnétique, et plaça la capuche sur sa tête.
Ainsi parée, elle entreprit de descendre, la lampe ionique à la main. Après deux niveaux, elle arriva à la porte de l’extérieur. Un petit boitier cachant un clavier de code s’y trouvait. Elle tapa la clé, en espérant que personne en vérifierait les allées et venues pas ici. Avec un petit crissement, le battant se déverrouilla et coulissa de côté, laissant sortir l’adolescente.
En une heure et demi à peine, la nuit était tombée à l’extérieur; on n’y voyait goutte. Quand elle eut refermé précautionneusement la porte derrière elle, et s’être ainsi coupé la lumière rouge, elle ne distinguait plus que les étoiles du firmaments. Ses yeux mire une bonne minute à s’habituer, et finalement les choses ressortirent en noir foncé dans un monde bleu marine. Prudemment, elle commença à marcher le long du chemin de gravier qui menait à travers le parc jusqu’au sentier. Elle ne pouvait pas encore allumer sa torche, car l’on aurait pu la voir depuis les fenêtres ouest du manoir, ainsi ce fut avec soulagement qu’elle atteignit le couvert des arbres. Ici, la nuit se fit de nouveau très opaque, et seules quelques étoiles perçaient entre les branchages. Le ciel d’Acre, proche du centre galactique de la galaxie 8, était pourtant riche en astres, mais elle avait mal choisit sa nuit semble-t-il.
Après quinze mètres sur le sentier, buttant de temps à autre contre une racine, elle se résolut enfin à allumer la lampe, réglée à l’avance sur une lumière modérée. Le rayon perça les ténèbres, dévoilant le sol terreux. Revigorée, elle avança gaillardement, courant presque, de peur d’être en retard. Ce fut comme en un instant qu’elle passa le ruisseau et arriva au chemin côtier, chemin qu’elle parcouru si vite qu’elle fut particulièrement essoufflée à l’arrivée au champ du Sépulcre, et son champ de visions plein de petit points roses et jaunes à cause de l’effort. Elle resta quelques instants à se frotter les yeux, puis lança un coup d’œil circulaire en visant systématiquement avec la torche, dont elle avait augmenté la puissance pour l’occasion.
Elle comprit pourquoi une telle réputation entourait l’endroit. Le riant verger du jour s’était transformé en plaine funèbre, comme battue par de puissants vent, sans qu’elle ne perçoive de courant d’air, aux herbes pales et éparpillées, le tout dominé par la terrifiante masse du rocher, qui prenait des allures dantesques. Un instant, son cœur s’arrêta de battre presque, elle aperçu deux points orange à côté, et immédiatement l’image d’Alkaa, la légendaire chimère locale, lui traversa l’esprit, mais ça n’étaient que d’autres points de couleur créés par ses yeux fatigués. Elle se les frotta, et ça avait disparu.
A pas de loup toujours, longeant l’orée des bois, elle remonta en un clin d’œil le champ, et, en se repérant par rapport au rocher, retrouva l’endroit où débutait le sentier caché. En écartant les fougères, elle révéla le chemin, et s’y engagea.
Il était bien moins balisé et facile que ceux utilisés d’habitude; c’était tout juste si on voyait un endroit entre les herbes qui était dégagé, avec de temps à autre de la terre beige apparaissant. Par deux endroits, il fut même bloquée par une souche. Elle se demandait comment ça se faisait qu’il y en ait un d’ailleurs. Personne n’était sensé venir dans ces sous-bois, d’autant qu’un grand marais s’étendait de par et d’autre du chemin, qui formait un étroit passage. Mieux valait ne pas s’égarer, mais elle avait confiance en sa mémoire, et si la torche ne la lâchait pas pour une obscure raison, tout irait bien.
Les tourbières des alentours donnaient à l’endroit une atmosphère nauséabonde, fétide, malsaine, qui travaillait dur les nerfs de la jeune fille. Une fois, alors qu’elle s’était arrêtée après avoir entendu un crissement, et avoir jeté un regard dans cette direction, elle fut terrifiée par une lumière blafarde s’élevant comme une petite flamme, à vingt mètres d’elle. Une vague de panique et de peur dans laquelle se confondaient la peur d’être découverte, l’image de la chimère comme elle apparaissait dans les livres, et cette flamme comme une sorte de démon, la submergea, et elle commença à courir de toute la force de ses jambes déjà longues pour son âge. En quelques instants, elle devait avoir parcouru cent mètres, et quand, la peur au ventre, elle se retourna, la lumière avait disparu. Le lendemain, après s’être documentée, elle tenterait de se raisonner en se disant que ça n’était qu’un feu-follet, mais au fond, la peur la poursuivra encore pendant des années.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMar 6 Jan - 19:16

Enfin, elle sentit la pente remonter, et l’attaque avec une vigueur d’autant plus grande. La montée fut longue, malgré le fait que le dénivelé soit relativement peu important, car il y a avait régulièrement des vallons qui la faisait redescendre, mais cette fois, il n’y avait plus de marais.
Enfin, après cette traversée mémorable, elle aperçut à travers l’épais manteau des arbres la lumière jaune des projecteurs de la route. Comme si toute l’épuisante marche déjà derrière elle n’avait pas eut lieu, elle grimpa le dernier tronçon comme en une seconde, et posa le pied sur le bas côté d‘asphalte qui longeait la voie lisse et plate, comme un ruban au milieu de la forêt. Des deux côtés, les ténébreux arbres étaient opaques à la lumière projetée par des projecteurs accrochés au sommet des poteaux qui étaient eux-mêmes placés à intervalles régulière sur le côté droit, opposé à celui où la jeune fille venait d’émerger des taillis.
Elle eut un soupir de satisfaction, et après quelques instants à souffler, elle jeta un coup d’œil à son bracelet informatisé. Minuit 45 heure d’Acreopolis. Encore cinq minutes dans le cas extrême, mais ils devraient être là d’un instant à l’autre.
Elle eut encore le temps de se reposer, quelques minutes, avant qu’un faible grondement se fasse entendre. Instinctivement, elle fit quelques pas en arrière, se mettant à l’orée des bois. Après quelques secondes, des lumières apparurent sur la voie, et bientôt elle distingua une cohorte de véhicules. Une vingtaine de Motograv se rapprochant à tout allure. Elle fit de nouveau un pas en avant, en dégageant un peu sa capuche, sans pour autant le retirer compétemment, alors que les puissantes machines s’arrêtaient dans le bruit étouffé de leur moteur. Les motards étaient pour la plupart revêtus de bloc-armure comme elle en voyait souvent dans certains magazines et émission holovisées, au couleurs allant du gris uniforme au rouge criard strié de jaune et d‘orange, avec une décoration spéciale autour de la tête formant comme un dragon stylisé. Ce fut celui-là qui descendit de sa bécane, alors que la plupart restaient selle, un peu à l'écart du milieu de la route. Deux autres firent de même. Malgré la nuit, elle reconnu le premier, avec ses quelques plaques tordues, c‘était l‘ami du frère de Kerstin, un loubard certes, mais quelque qu‘elle aimait bien et qui était gentil avec elle. L’autre, plus frêle, après avoir appuyé sur le bouton de sa équipement jaune-blanc, se révéla être Kerstin. Elle s’approcha d’elle rapidement:

-Salut Cas’ ma vieille! S’exclama-t-elle avec une pointe d‘accent inhabituelle que Cassandre tenta d‘assimiler, c’est vachement bien qu’t’ais pu v’nir. Y a pas eu’d’problèmes?
-Non, j’allais pas r’contrer l’Alkaa, répondit-il le jeune fille avec ironie, imitant assez bien l’étrange parlé pour ne pas déclencher des rires— manquerait plus que ses parents lui aient inculqué un accent aristocratique.
-Ouais, tu ne risquais pas. Fin’ bon, avec tes vieux, n’sait jamais. Prête?
-Sûr!
-Okay, o’va s’arra’ger pour t’apprendre du concret, p’tite, dit Kerl, qui s’ était approché à son tour.

Les deux tournèrent les talons, et se dirigèrent vers celui avec les décorations de dragon. Celui-ci avait désactivé son casque, faisant apparaitre une tête de jeune homme d’une grosse vingtaine d’années, la peau très lisse et claire contrastant avec les cheveux d’un noir profond. Ses yeux bridés où l’on percevait une intelligence certaine et beaucoup de détermination et de force de caractère la contemplaient. Il échangea quelques paroles avec les deux autres, qui glissèrent quelques bon mots. Finalement, il hocha la tête, et s’approcha d’elle. L’ayant dévisagée une dernière fois, il dit d’une voix bizarrement aigue où perçait le même accent, quoique un brin plus prononcé:

-Si Kerl’, not’ Kers’ et son frère te font confiance, y’ pas’d raison d’pas t’faire confiance. T’peux venir avec nous. Par contre, faut aussi savoir tenir ta langue par m’ment, j’pense qu’t’es assez intelligente pour comprendr’, Okay?
-Okay, fit elle simplement, sans vraiment être intimidée, mais sans effronterie non plus, les bras croisés.
-Parfait, t’a tout compris.

Le hetman porta sa main à une des pochettes à sa taille, et en tira un petit pendentif au bout duquel était visible un cube vert foncé, et lui lança. Elle le rattrapa un peu vivement, étonnée qu’il n’y ait pas d’autres "test" où de bizutage.

-Grimpe derrière Tes’, ajouta-t-il simplement, sans autre explication, avant de retourner à sa machine, avec un petit geste à l‘intention de quelqu‘un dans le groupe.

L’espace d’une seconde, elle eut peur de ne pas savoir quoi faire, mais heureusement elle avait esquissé le geste de placer le pendentif autour du cou, qui l’empécha de rester bras ballants. Déjà une autre personne s’avançait, tout en blanc et argent. A travers sa visière ouverte, elle voyait un visage de femme.
Elle se planta devant la jeune femme, et dit doucement:

-C’est toi Cas? Bah, t‘est clean‘. J’suis Tes’. Allez vient, t’f’ra l’tour avec moi c’soir.

Déjà elle retournait à sa Motograv, un modèle effilé, mais assez simple et rustique en comparaison avec ceux d’autres. Après un instant à se poser la question, tout en emboitant le pas à la dénommée Tes, elle porta sa main à sa nouvelle acquisition, et enfonça l’unique bouton.
Ce fut comme un frisson lui parcourant le corps, en partant du cou et se propageant partout jusqu’aux extrémités qu’étaient les doigts et le sommet du crâne, lorsque les plaques à subduction d’hexanox solide dur comme du diamant la couvrirent en l’espace d’un instant. Elle s’immobilisa, un peu perplexe, ce qui n’étonnait pas les autres. La vision nocturne du bloc armure, probablement vert comme le cube, donnait un environnement beaucoup plus clair que sans, et un peu plus bleu aussi, ce qui perturbait un peu Cassandre. Ce qui qui l’étonna d’abord fut la facilitée de ses mouvement à présent, elle avait eut les jambes lourdes sur le rebord quelques instants plus tôt, à cause de la marche dans la forêt, mais là elle se sentait toute légère, aucunement chargée, presque comme si elle volait.
Elle rejoignit rapidement Tes, alors que les autres remontaient sur leurs Motograv aussi. Lorsque sa mentor fut installée, elle grimpa derrière elle. Les attaches magnétiques des cuisses et des tibias la lièrent à la machine, qu’elle sent bientôt vibrer sous elle. Soudain, la voix de la femme devant elle retentit dans son casque:

-Allez, c’est parti, t’va découvrir le monde p’tite!
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMar 6 Jan - 20:11

NSRC Buccentaure: Le Buccentaure est le vaisseau officiel du Doge de Christiansa depuis qu'il a remplacé le premier modèle, capturé et pillé par des pirates deux-cent cinquante ans auparavant. Mis en chantier en 751 Av. E.d.U et lancé en grande pompe le 19 Juillet 743 Av. E.d.U, il est depuis lors l'un des astronefs les plus luxueux connus. Plein de dorures, de soieries, d'un personnel attentionné, à la décoration extrêmement soignée, il possède plusieurs grandes salles de conférence, mais la plus magnifique est sans conteste la grande Salle de Bal à la proue, entièrement vitrifiée, permettant de voir la figure de proue du vaisseau, un aigle Christianien doublé d’un lion offrant un immense espace garni de mobilier de standing et de murs décorés des plus grands tableaux prêtés par le musée national, sans oublier le piano Pleyel original et l'orchestre, etc... Les fastueuses cabines peuvent accueillir près de deux-cent invités de marque dans des conditions exceptionnelles, des conditions dignes des plus grands palaces de l'univers. Ainsi, le Buccentaure a régulièrement été un point de rencontre diplomatique de choix. Les appartements du Doge se trouvent au pont le plus élevé, le vingt-et-unième.
Lorsqu'il n'accompagne pas le Premier de la Sérénissime République lors de ses voyages ou conférence, le magnifique astronef est à quai ou en entretient dans ses hangars attitrés, près des chantiers spatiaux d'Acre.

Dictionnaire Universel. Edition n°54.8.15. Livre V, page 1241. Extrait de l’Article « NSRC Buccentaure ».



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An 3859, E.d.U (Eon de l’Union).
Acre



La demi-heure de route fut pour Cassandre comme un voyage dans le ciel. Même si elle avait déjà fait plus ou moins légalement quelques tours sur la Motograv de l’ami du frère de Kerstin, ce qu’elle vivait là était pour elle comme une révélation, une émancipation. Elle savait que le groupe de motards était de Kamensk, et mettait à mal la tranquillité des habitants de ce coin depuis deux semaines déjà. Grâce aux relations du frère de Kerstin, toujours, les deux filles pouvaient venir. Ces délinquants ne devaient être que trop contents d’encanailler les gosses des locaux. D’ailleurs, d’après ce qu’elle avait appris, ils avaient fait une moisson d’une demi-douzaine de jeunes du coin, dont une bonne partie aller rester avec eux, et probablement les suivre à Kamensk. Telle n’était pas l’intention de Cassandre….pour l’instant. Dans l’immédiat, elle savourerait quelques sorties comme ça, et aviserait ensuite. Trop de choses la liaient encore au manoir, et aux dégénérés de sa famille.
Pendant qu’elle tenait ces réflexions, le groupe puissamment motorisé filait dans la nuit profonde, le long de la grand-route, dans la forêt, vers la ville voisine de Rozzet, également capitale de la province du Cap-Tonnerre où se trouvait le manoir, bien plus grande que celle d'Eupatoria, juste un peu plus loin, mais moins peuplée. Leur vitesse — largement supérieure à la maximale autorisée — leur permit de rallier les faubourgs tranquilles de la cité, dont le centre-ville, admirable reconstruction de celui des villes médiévales antiques, abritait une magnifique cathédrale gothique à deux flèches, fierté de la région. Les faubourgs offraient un violent contraste avec ce romantisme; ils étaient bien plus récents, et formés de rues arborées et proprettes, sur lesquels s’alignaient des bicoquettes modernes plus ou moins cubiques ou en pavé, aux nombreuses verrières et reflets de métal adoucis d’une peinture couleur chaud ou d’une polarisation. On trouvait ici à intervalles réguliers des boutiques et kiosques, des parcs, des écoles, une vraie banlieue de livre d’image en somme.
Lorsque Cassandre reconnu l’endroit, elle resta un peu désappointée. Que venait faire ces « durs » dans un endroit pareil? Troublée, fronçant un peu les sourcils, elle ne dit néanmoins rien, et les laissa s’engager dans les rues vides. Les habitants du quartier étaient d’ailleurs pour la plupart rangés, soit devant l’holovision, soit dans leur lit. Quelques uns ouvrirent leurs fenêtre et crièrent quelque chose derrière le groupe, que le bruit, quoique léger, des moteurs couvrit néanmoins.
Enfin, dans une rue de traverse, ils s’arrêtèrent. La Motograv de Tes s’étant retrouvée en queue de peloton, Cassandre ne vit pas pourquoi la majorité des motards étaient descendus de leurs bécanes, et s’avançaient vers une direction. Elle fit de même, et suivit, sentant Tes derrière elle. Par reflexe, elle porta sa main vers le bouton pour désactiver le bloc, mais la main de son mentor l’arrêta, sans que celle-ci ne dise quelque chose.
Un peu troublée, la jeune femme s’avança parmi l’attroupement qui s’était formé, et discerna derrière la muraille d’Hexanox des dos des blocs une agitation violente. A côté d’elle, Tes s’imposa par quelques coups de coude, et se retourna pour l’inviter à venir côté d’elle par un geste. Cassandre ne se fit pas prier, et prit place, quoique peu serrée par l’énorme loubard en bloc noir qui trônait à sa gauche, l’air menaçant.
Dans un premier temps, elle resta interdite, puis elle secoua la tête pour se ramener à la réalité. Au fond d’elle, elle s’y était attendue.
Au centre du cercle formé par les motards, le hetman, avec sa décoration de dragon, tenait par le col de son vêtement un homme d’une cinquantaine d’années, un peu barbu, dont la chapeau était tombé au sol, qui, les cheveux ébouriffés, respirait un mélange d’aplomb et de peur. Son veston avait été ouvert violement, déchirant du tissu et arrachant plusieurs boutons magnétiques, et c’est juste à ce moment là que la jeune femme remarqua le créditeur dans la main du chef. La voix de celui-ci, déformée par le casque, se fit entendre, bien moins aigue que sans:

-La clé, vieux con! La clé!

L’autre, les yeux écarquillés, avait la bouche grande ouverte, mais ne disait rien, se contentant de regarder d’un air terrifié la visière polarisée de son agresseur, l‘air puissant et terrifiant du dragon stylisé, la gueule ouverte, prête à cracher une déflagration. Celui-ci resta un instant immobile, puis parut être sur le point de la menacer de nouveau. Mais il se ravisa, et, en une seconde—le multiplicateur de réflexes du bloc fonctionnement bigrement bien—, son poing jailli, et aller frapper avec une extrême violence l’épaule du malheureux, qui fut propulsé en arrière comme un pantin. Le col par lequel l’autre main le tenait se déchira, et l’homme termina sa course dans le caniveau. Mais déjà le hetman était à côté de lui, un genou à terre. Sa voix, plus menaçante, sans crier, se fit entendre:

-La clé! La clé, connard!

La victime eut un dernier hochet, et cracha du sang. Puis, il articula lentement, si bas que seul le chef entendit. Celui-ci se dépêcha d’entrer la clé dans la machine, et de transférer d’argent, probablement vers les obscurs méandres de Kamensk, plutôt que sur son propre créditeur. Cela terminé, il se releva, et parut se retirer. Mais, soudainement, il fit volte-face, prit son élan en un éclair, et donna un puissant coup de pied dans le ventre de l’homme au sol qui se tordit de souffrance en une tornade de jaune et de rouge, d‘où seul ressortait la tête cruelle de reptile. Ce fut comme un signal. Un autre frappa, envoyant valser le malheureux à l’autre bout, d’où il fut renvoyé ailleurs encore. Un moment, il s’écrasa exactement devant Cassandre. Celle-ci ne réfléchit pas une seconde, la chose lui semblant normale, prit son élan, et lui assena un coup aussi fort qu’elle put. Manifestement, il était réussit, et déclencha un « hola ». Il y eut encore quelques « passes », puis leur jeu fut interrompu par un grand cri, suivi d’un claquement.

-On se tire! Cria le Hetman, en prenant les devant.

Au bout de l’impasse, deux hommes étaient sortis, fusils aux poings. Personne ne voulant risquer de dégâts pour sa bécane, ou pire, en cas de tir très bien ajusté, pour soi, tous montèrent rapidement sur leurs machines, et foncèrent loin du lieu du crime. En sortant de là, la jeune femme se sentait mystérieusement survoltée, comme si on lui avait injecté plus d’adrénaline qu’elle n’en avait eut durant toute sa vie. Cette fougue ne retomba pas, et elle alla encore jusqu’à prendre les devants et asséner un crochet à la troisième victime du groupe, pour lui arracher un code, et des bijoux. Cette tension se tassa seulement sur le chemin du retour, après avoir échappé de justesse à une patrouille de la sécurité civile, sur la grand-route. Déjà, loin, à l’ouest, sur la mer, les premières lueurs de la lumière du jour apparaissaient, et elle devait être de retour avant dix heures, heure à laquelle toute la maison risquait d’être levée.
Enfin, elle ne risquait pas d’être vraiment en retard. A six heures — sur la visière s’affichaient diverses informations—, leur groupe, après avoir déposé un gars dans un motel, s’arrêta à son coin en forêt. Tes et Kerstin la saluèrent, et même le hetman eut un petit signe de tête, avant de redémarrer en trombe.
Elle s’enfonça dans les sous-bois d’un pas rapide, amélioré par la puissance du bloc, qu’elle avait décidé de conserver pendant la traversée du marais. Elle avait bien fait, car cela l’aida à ne pas trop se fatiguer. Mais elle dut finir par la désactiver. Lorsque les plaques se furent rétractées, elle sentit soudainement le froid piquant de la fin de nuit, l’humidité du bois, et les dernières odeurs nauséabondes de la tourbière qu’elle venait juste de traverser. Avec un soupir profond, elle fit passer le petit cube sous ses vêtements, sortit sa torche ionique, et continua la marche.
Le roc du Sépulcre avait un air étrangement moins menaçant; elle s’arrêta quelques instants pour chercher à déterminer pourquoi, sans vraiment savoir. Pourtant le jour n’avait même commencé à ce lever, mais les arrêtes apparaissaient comme moins menaçantes, plus abstraites. Il n’y avait plus de points jaunes ou rouges. Pas l’Alkaa également.
Un peu troublée, elle poursuivit son chemin, et rejoignit le sentier, qu’elle remonta en quatrième vitesse, pour finalement aboutir à la lisière du jardin. Là, Cassandre désactiva prudemment sa lampe, et commença à s’avancer doucement, d’un pas félin et souple comme elle les avaient appris avec les mouvements en apesanteur, pour éviter d’attirer l’attention d’un observateur posté à une fenêtre.
Ainsi, elle parvint sans d’encombre—manifestement du moins—jusqu’à la porte de service, où, elle ralluma la torche à puissance minimale, pour voir les chiffres du code, qu’elle tapa prestement. La porte s’ouvrit sans bruit, et elle pénétra.
La jeune femme eut un soupir de soulagement en constatant qu’il n’y avait personne. Prestement, elle retira son vêtement noir, qu’elle fourra dans une des poches. Cela fait, ce fut la montée, et un regard furtif à travers la porte entrebâillée. Elle fut sur le point de s’engager quand il y eut un léger bruit. Elle ne laissa qu’une étroite rainure, et observa. C’était François, qui allait chez Grand-père Anastas. Il passa la porte, et elle l‘entendit de loin échanger quelques mots avec l’infirme. Sachant qu’elle n’aurait plus beaucoup de répit, elle s’engagea.
Le couloir était vide. Elle le remonta aussi rapidement qu’elle pouvait sans courir. Alors qu’elle était presque arrivée à sa chambre, elle se glaça en voyant une porte s’ouvrir.
L’Amiral Law en émergea, la veste sur laquelles quelques galons étaient visibles simplement jetée sur les épaules au dessus de son pyjama, se frottant les yeux, et traversa le couloir, jusqu’à la salle de bain opposée. Elle resta paralysée jusqu’à ce qu’il eut complètement disparu. Trop endormi, il n’avait rien remarqué.
Elle rentra dans sa chambre, et verrouilla à double tour, avant de tomber sur son lit, épuisée. Et de s’endormir l’instant d’après.


On a beaucoup trop souvent méprisé la position défensive. « La meilleure défense, c’est l’attaque », etc etc… Foutaises. Avec des unités fatiguées et inférieures cloisonnées sur de néanmoins solides positions, on doit donc mener une folle sortie? Le commandant ordonnant cela est un imbécile, irresponsable qui plus est, cédant aux pressions des amateurs.
Car la défense peut être le meilleur moyen de donner le coup final à l’ennemi, ses forces s’émoussant contre des positions qu’il n’est de toute façon pas en mesure de prendre, ou alors, les occupants pendant que on lance l’action décisive ailleurs. Il faut uniquement être prudent de ne pas s’exposer aux manœuvres ennemies. La doctrine se résume donc à maintenir une position défensive, sans perdre l’initiative.

Archi-Amiral de Christiansa Nikolaï Syllas d’Acre, lors d’un conférence à l’académie des officiers de la Sérénissime République de Christiansa, remarque sur son ouvrage « La guerre moderne ».


-- -- --


An 3855, E.d.U (Eon de l’Union).
Galaxie 9, espace profond
UFGS Kanopus



Descendre au pont inférieur avait été un vrai chemin de croix, et tous arrivèrent fort fatigués devant la porte verrouillée de l’armurerie. Au passage, les trois officiers avaient rameuté quatre marins rencontrés en chemin. Celui-ci, les ascenseurs principaux étant hors d’état de marche, était passé par les cages de ces derniers, après que le vice-amiral ait bloqué les portes en mode ouvert. Ainsi, lorsqu’il parvinrent à leur objectifs, leurs bras étaient très fatigués, malgré les entraînements et les stages dans l’infanterie de marine. Ishaa, qui devait l’effectuer à son retour de cette mission pour pouvoir envisager de monter davantage en grade, aurait aimé l’avoir déjà passé pour pouvoir se dire qu’elle avait connu pire exercice physique, mais ça n’était pas le cas.
De nouveau, le panneau de contrôle de la porte fut ôté, et on rechercha une batterie d’ouverture, sans succès. Syllas laissa échapper un nouveau sifflement, et se retourna vers les deux mariniers les plus proches:

-Démontez les panneaux des alentours, et tachez de me trouver une batterie!

Ils s’exécutèrent, se dirigeant chacun vers un des deux battants voisins, pendant que l’amiral et Setz préparaient déjà les réglages d’ouverture. Ils discutaient à voix basse; c’était une sorte de réunion d’état major improvisée qui, dans une autre situation, aurait pu être cocasse. D’un côté, Syllas, ses longs cheveux noirs ondulant dans l’air comme s’il était dans l’eau, formant une étrange sculpture au dessus de sa tête, tandis que le reste du corps dérivait et n’était retenu que par le fait que ses mains fussent engagées à l’intérieur de la cavité du panneau de contrôle, à côté de celles du second, qui, s’il n’avait pas une aussi opulente chevelure, maîtrisait quant à lui beaucoup moins bien la stabilité en « vol », ce qui le conduisait à être perpétuellement dans une sorte de rotation, faisant des vrilles, une fois dans un sens, une fois dans l’autre, se tordant les poignets pour essayer de rester en position, sans succès. Ishaa nota les détails, afin de pouvoir en rire une autre fois.
Après avoir prit appui contre la paroi, un des deux mariniers revint, tenant le précieux sésame à la main: une batterie bleue, les contrôles relevés. Le vice-amiral s’en empara vivement en félicitant son subordonné, et l’enfonça tant bien que mal dans le logement prévu cet effet. Une fois le touche de lancement enfoncée, le témoin passa au vert, et, poussivement, les deux battants de la porte de l’armurerie s’ouvrirent.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMar 6 Jan - 20:13

-Enfin! Soupira Syllas, en se poussant dans cette direction du bout des doigts, en faisant signe aux autres de la suivre.

L’armurerie du second pont était une pièce tout en longueur, dont les murs étaient couverts de tiroirs électroniques de rangement. Au bout trônait l’ordinateur de gestion qui servait à trouver ce qu’on cherchait. Le tout était à peine éclairé par un seul petit tube ionique bleu, mais, heureusement, la semaine précédente, l’amiral avait eut tout le temps de participer à l’inventaire, et savait où trouver ce qu’il cherchait. Décidemment, il faudrait bosser dans l’entretient plus souvent, ça s’avérait profitable…
Une fois que tous furent rentrés, il se propulsa vers le haut, et s’arrêta par un grand mouvement assez grotesque à mi-chemin du plafond, devant le rangement E5. D’un geste vif, il attrapa le bout de la manette d’ouverture, et l’abaissa. Le système mécanique fit son travail, et un casier d’au moins un mètre émergea de la paroi. Se maintenant fermement d’une main à son bord, Syllas entreprit de fouiller l’intérieur, où le contenu était retenu de s’envoler par une courroie très serrée. Après l’avoir partiellement détachée et soulevé une épaisseur de couvertures thermiques, il poussa une brève clameur:

-Les voilà!D’une puissante détente, son bras droit tira, et la courroie lâcha complètement. Au milieu d’une explosion de couvertures partants dans tout les sens, plusieurs machines aux courbes étranges émergèrent. D’une cinquantaine de centimètres de large, elles n’étaient pas très longues, à peine la moitié de cela, et on reconnaissait au milieu, entre deux poignées, un petit tableau de bord. Setz, d’une détente, fut à côté de son supérieur, qui avait déjà saisi l’une des trouvailles, et examinait les commandes.

-Cela fait quelques années d’puis l’infanterie de marine, mais je pense que ça va comme…cela.

Sa main droite avait enclenché la machine par une petite roulette sur le côté d’une poignée. Un ronronnement léger s’éleva dans l’air dans l’armurerie , tandis que des lumières apparaissaient sur les commandes. Finalement, à l’avant en pointe, un puissant projecteur s’alluma, balayant le mur d’en face. Après une hésitation, pendant que Syllas réglait quelque chose sur le sien, Setz en prit un, et imita son supérieur.

-Voilà, conclut l’amiral en se tournant vers les autres, restés au niveau du sol, les observant, les modules retropropulseurs ont l’air de marcher, venez en prendre un chacun. Moi…

Il lança son propre rétropropulseur. Deux petites lumières bleues apparurent aux extrémités gauche et droite des ailerons, et soudain, tiré par la machine, l’officier avançait à bonne vitesse dans l’air immobile de l’armurerie, en direction de l’autre bout de celle-ci. Quelques secondes désarçonné, il maîtrisa rapidement—les années de jeunesse n’étaient quand même pas aussi loin—, et le fit s’arrêter en douceur devant un autre rangement, dont il abaissa la manette. De nouveau, le tiroir jaillit, dévoilant des vêtements grisés et noirs soigneusement rangés et également maintenus par une courroie. Tandis que Setz arrivait de nouveau derrière lui, et que de l’autre côté Ishaa, après avoir brièvement examiné une machine, expliquait aux autres comment ça fonctionnait, il tira un ensemble du rangement.
Devant le regard interrogateur de son second, Syllas s’expliqua:

-Plus question de rester dans l’uniforme standard, il serait rapidement irrécupérable…En plus, il se pourrait que des sections n’aient plus de soutient de vie.
-Ah d’accord, effectivement…fit le commandant, en plongeant à son tour les mains pour dégager un pack.

Entre-temps, le vice-amiral avait retiré sa veste, et ses chausses, et dégagé une combinaison d’officier de l’infanterie de marine, dans laquelle il tentait d’entrer sans trop de casse pour le malheureux uniforme standard, qui risquait sinon de finir fripé et taché à outrance. Après une bonne minute, ce fut chose faite, l’habit moulant tant bien que mal tout son corps, sans qu’on distingue les marques des vêtements qu’il y avait en dessous. Il s’empara ensuite d’une ceinture sur laquelle divers appareils étaient fixés, allant du multicapteur à l’ordinateur portable en passant par le SIP, les batteries de rechange, une com. autonome et une lampe ionique. Il terminait d’ajuster le « collier » de plaques d’Hexanox autour de son coup pour transformer le cas échéant cet uniforme pratique en scaphandre autonome en même temps que Setz, tandis qu’Ishaa en avait déniché un pour femme, et entreprenait de les imiter. Finalement, après avoir cherché dans le tiroir voisin pendant qu’elle terminait, Syllas tira un petit paquet de matière plastique transparente dans lequel on distinguait des chevrons magnétiques argentés. Arrachant du bout du doigt la fermeture, il en tira dix pour lui, en plaçant cinq sur chaque épaule, et passa le paquet à Setz, qui en pris huit, et enfin à Ishaa, qui eut la chance de trouver juste le compte dans les six derniers.
Les rangements fermés, ils se retournèrent, et, grâce aux retropropulseurs, regagnèrent le reste du groupe, où on avait tout juste terminé d’attribuer les machines disponibles. Deux jeunes officiers étaient parvenus à les rejoindre, dont un technicien, qui se tourna tant bien que mal vers le vice-amiral lorsque celui-ci arriva:

-[colo=rosybrown]Je suis le Lieutenant Tender, amiral. Nous avons vérifié tout les retros’ de l’armurerie, sur dix, il y en a trois en panne. Les stabilisateurs ont grillé, les utiliser serait franchement dangereux.[/color]
-Hum, marmonna Setz, vous croyez qu’on peut faire tirer les gens sans par ceux qui en ont?

L’ingénieur fit une moue sceptique. Ses traits carrés se plissèrent légèrement, et il déclara sur un ton très professionnel:

-Je pense que ce sont des modèles 25. Ils n’ont pas assez de puissance pour tenir le rythme comme ça. Ceux qui utiliseront ce procédé seront rapidement distancés.
-C’est ennuyeux…enfin, il faudra faire avec, se résolut Syllas en observant sa troupe d’une douzaine de personnes, jaugeant les possibilités qu’elle offrait, avant de continuer, plus doucement: la majorité de l’équipage est dans ses quartiers normalement. S’il suit les consignes habituelles, il n’en aura pas bougé. Nous devons rassembler tout ce monde pour pouvoir faire appel à lui. Il nous faudra un point pour ce faire…

Le second nouvel officier, une femme brune au menton volontaire, s’avança, et proposa:

-Sur le pont 9, à côté des ascenseurs centraux, il y a un espace très large où se rejoignent plusieurs couloirs, adaptés à la distribution de marchandise à l’équipage. En plus, c’est au milieu des quartiers.

Le visage de Syllas s’illumina:

-Excellente idée. Vous êtes…?

Elle tenta aussitôt un garde-à-vous, qui échoua de peu dans la gravité réduite à néant:

-Sous-lieutenant Gerey, Amiral. J’ai la charge du poste tactique 26.
-Bonne initiative de vous en tout cas, répondit avec un faible sourire Syllas en se tournant à moitié vers Setz: Capitaine, vous irez avec elle jusqu’au niveau neuf pour rassembler l’équipage. Je vais moi-même prendre la tête d’un groupe avec les lieutenants Stavanger et Tender pour descendre jusqu’à la salle des machines, sur l’arrière. Pour cela, il me faudra pour chacun des miens un retropropulseur. Vous devrez prendre en chemin dans les armureries pour vous procurer ceux qui vous manquent. N’hésitez pas à en garder pour d’éventuelles autres actions une fois que vous aurez plus de monde!

Le second hocha la tête, mouvement qui lui fit de nouveau perdre un décidemment précaire équilibre—mais personne n’avait le cœur à rire, à cause de la discipline autant que de la situation. Du bout du doigt, le Vice-amiral désigna trois autres hommes d’équipage pour l’accompagner. Ils prirent chacun un retro’, et se dirigèrent vers la porte de l’armurerie. Resté un peu en retrait, leur chef donnait une dernière instruction à Setz, qui préparait ses propres troupes:

-On se contacte sur la fréquence dans une demi-heure maximum. J’espère pouvoir relancer la satanée mécanique en moins de temps quand je serais sur place, mais…bon courage.

Il activa un contrôle du tableau de bord du rétropropulseur, et rejoignit son groupe, qui attendait en position de départ devant la porte entrebâillée. Un bref geste, et bientôt ils filaient les couloirs, évitant de loin en loin des hommes lévitant et divers autres obstacles, dont un immense pot de fleur qui avait du s‘échapper d‘un des mess, et qui, fait scandaleux, n‘avait pas été attaché selon les normes. Arrivés à l‘ascenseur, qui était encore ouvert depuis leur arrivée, ils passèrent un à un par l‘étroite fente de la porte entrouverte, et descendirent à la « verticale » vers leur objectif. Malgré la puissance des rétropropulseurs, qui faisaient partie de l‘équipement de base de l‘infanterie de marine embarquée, le Kanopus restait un grand astronef, et la traversée dura une bon quart d‘heure, sans compter les obstacles particulièrement pénibles qu‘étaient les battants verrouillés, bloqués par des objets, ou membres d‘équipages, flottants, etc. Il fallut également s‘arrêter pour donner quelques instruction à un officier qui avait pris les choses en main sur son pont, pour qu‘il fasse sa jonction avec l‘équipe de Setz.
Mais, lorsque, après un détour par le pont dix-sept, ils parvinrent enfin au pont dix-huit où se trouvait la salle des machines principales, ils eurent une très mauvaise surprise: les portes de sécurité automatiques étaient fermées au niveau de la cage d‘escaliers et d‘ascenseur, tout ce qui était en dessous, en fait, était isolé du reste du croiseur; seuls quelques sas étanches subsistaient. Le système de commande annonçait sur un minuscule écran « Dépressurisation des niveau dix-huit, dix-neuf et vingt ». En voyant ça, Syllas se mordit la lèvre inférieure. C’était une catastrophe. Et, en regardant à travers l’épaisse vitre de sécurité, il ne voyait rien: même les lumières de secours bleues y étaient éteintes.
Sentant derrière lui le souffle de quelqu’un, il s’écarta, et permit à Ishaa et à Tender de regarder à leur tour. L’ingénieur eut un hoquet, et sa main gauche, serrant le rétropropulseur, se crispa.

-Mais qu’est-ce qui s’est passé!? S’exclama d’une voix blanche la jeune femme, détournant le regard du terrifiant spectacle des ténèbres qui laissait présager le pire pour tout ceux qui avaient eut le malheur de se trouver derrière, pour revenir à son supérieur, tout allait bien quelques secondes avant…

Le vice-amiral eut un hochement de tête désolé et désappointé, et finit par dire, sur un ton malgré tout déterminé:

-Je n’en ais pour l’instant aucune idée. Mais il faut s’arranger pour remettre tout cela en batterie. Tender, la motrice gravitationnelle est dans la salle des machines, n’est-ce pas?

La face blanche, le lieutenant opina, sans pour autant se détacher complètement à la contemplation des ténèbres.

-Il faut la sortir de là, et la réactiver. Pour ça, il nous faudra des cellules d’énergie. Il doit en avoir dans les niveaux supérieurs.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMar 6 Jan - 20:14

S’étant repris, l’ingénieur arriva à faire volte-face, et approuva beaucoup plus énergiquement:

-Oui, aux niveaux un, quatre, et douze. Il dois y avoir assez pour le relancer, de même que quelques systèmes. Mais nous avons besoin de toute urgence de récupérer une énergie auxiliaire digne de ce nom. Je peux essayer de trouver des gens de mon équipe habituelle pour improviser un générateur, mais ça prendre quelques temps. De plus, il faudra des pièces détachées, qui ne sont qu’en « bas ».
-Oui, confirma Syllas, lançant un regard satisfait à Tender, qui, si les gens de la salle des machines étaient morts, devenait son chef mécano, nous allons donc devoir « sortir ». Heureusement nous somme prêts.

Effectivement, les uniformes habituels de la section ingénierie tout comme ceux de l’infanterie de marine comprenaient de façon standard le système de pressurisation. Il se cabra, pour avoir tout le groupe en vue.

-Un d’entre vous restere ici pour commander le sas, et les deux autres monteront au douze chercher une première cellule.

Un unique « oui, amiral » répondit, et deux mariniers trapus lancèrent leurs rétropropulseurs dans la direction par laquelle ils venaient d’arriver. Entre temps, le vice-amiral porta sa main à sa ceinture, et en tira le boitier de la com., dont il enfonça le bouton d’appel.

-Setz? Vous êtes là?

Après quelques instants de flottement dans le silence totale de la communication subspatiale, la voix du second s’éleva finalement:

-Oui, amiral? Vous êtes arrivé?
-Malheureusement non, il semblerait que tout ce qu’il y a en dessous du dix-sept se soit dépressurisé. On a du perdre beaucoup de monde là.

Il y eut un silence équivoque à l’autre bout de la communication.

-Je vais y aller, tacher de voir s’il y a eut des survivants éventuels, récupérer assez de matériel pour faire monter un générateur énergétique auxiliaire, et surtout rétablir la gravité. Cela prendra plus de temps que prévu probablement. Et où en êtes vous?
-J’ai passé au peigne fin les niveau huit à neuf, répondit le second, dont la voix témoignait qu’il était content d’aborder un autre sujet, et on a déjà un peu de monde, mais il reste du boulot. C’était au début un peu dur à organiser, mais à présent on s’en sort, d‘autant plus que de nouveaux rétros sont disponibles.
-Bon, c’est déjà ça. Voyez si dans ceux que vous avez, il y a des gens de l’équipe d’ingénierie du lieutenant Tender. Il faudra nous les envoyer en bas, nous pourrions en avoir besoin au retour.
-Okay, j’m’y attelle tout de suite, Gerey se chargera de rameuter pendant ce temps. Soyez prudent, amiral.
-Je n’y manquerais pas, répliqua Syllas, avant d‘ajouter prudemment: dans la mesure du possible, avec un fugitif sourire sérieux, en coupant la communication.

Après les avoir consulté du regard, Syllas hocha la tête à l’intention des deux officiers qu‘il avait auprès de lui. Tout trois activèrent alors sur une pression à la base du « collier » leur casque, qui, en quelques instants, s’établit, s’adaptant parfaitement à la forme de la tête, les coupant de l’extérieur. Une large visière permettait de voir autour de soit, et un petit projecteur ionique était installé sur le côté droit pour voir dans les ténèbres.
L’un après l’autres, ils entèrent dans le compartiment du sas qui s’était ouvert automatiquement dans ce sens lorsque la dépressurisation avait causé la fermeture de l’accès normal, à présent coupé par une puissante herse de de duracier sur leur gauche. C’était comme un couloir large et peu long, fermé aux deux extrémité par des portes étanches, à côté desquelles une petite console permettait d’en contrôler l’ouverture et la fermeture. A peine le battant s’était refermé derrière eux qu’une lumière jaune s’afficha sur l’écran le plus proche d’eux, ayant un circuit d'énergie autonome, annonçant que la dépressurisation était en cours. En vingt secondes à peine, la machine avait fait le vide autour d’eux, et l’ouverture en face se dégageait.

-Allez, il n’y a pas de temps à perdre, déclara Syllas dans le circuit interne, en lançant son rétropropulseur à travers l’ouverture, bientôt suivi par Ishaa et Tender.

Les couloirs du niveau dix-huit étaient plongés dans des ténèbres si profondes que, malgré les projecteurs au bout de leur rétros et à leur casque, on ne voyait guère au-delà de dix mètres, pour se heurter généralement à un mur. Heureusement, ils avaient arpenté assez souvent ces coursives pendant leurs heures d’inactivité pour les connaitre bien, car sinon, dans la nuit profonde où ils ne se retrouvaient déjà que mal, ça aurait été la fin, étant donné l’autonomie restreinte de leurs équipement, quarante-cinq minutes en moyenne, qui ne leur laissait que peu de marge, même en utilisant les localisateurs de leurs ordinateurs.
Au détour d’un corridor, Syllas réduisit brutalement sa vitesse, et se dirigea vers un coin d’ombre, sans que Ishaa ne réussisse à déterminer ce qu’il avait vu. Mais soudain, alors qu’il braquait sa lumière dessus, elle reconnut un uniforme. Et, a dessus du col, ce qui restait de la tête d’un des leurs, éclaté comme un ballon, et congelé, en un absurde enchevêtrement de chair, de nerfs, de cheveux, de peau, et de sang. Beaucoup de sang, flottant comme des petites paillettes brillantes dans l‘éclat des lumières de leurs casques. La dépressurisation de niveau 3…

-J’espère que ça n’est pas ce qui est arrivé à tout le monde, marmonna le vice-amiral, en relançant son rétropropulseur sur leur route.

Se détachant au macabre spectacle, ils lui emboitèrent le « pas » à travers les méandres du niveau dix-huit. En chemin, ils rencontrèrent encore plusieurs autres cadavres, qu’ils passèrent sans un mot, comme si le silence pouvait apporter par un respect presque religieux un adoucissement dans cette mort affreuse. Finalement, au terme de ce mémorable voyage de l’horreur, ils arrivèrent à son point d’orgue: le vice-amiral s’arrêta devant l’entrée principale du compartiment des machines. C’était une porte à triple battant ressemblant beaucoup à celle de la passerelle. D’une détente, Tender fut sur le panneau de contrôle, dans lequel il inséra une batterie. Après quelques réticences, l’accès se déverrouilla lentement.
Il dévoilait une salle gigantesque, plongée dans des ténèbres extraordinairement profondes, qui rebutaient au premier regard. Après s’être engagé avec hésitations à l’intérieur, le projecteur du rétro éclairant à peine le noir total, Ishaa se rendit compte que l’endroit lui semblait totalement étranger.

-J’ai comme l’impression d’être ailleurs, c’est angoissant, commenta-t-elle sur un ton anxieux.
-Ca me fait un peu cela aussi, confirma le technicien, qui les avait rejoint, mais…si mes souvenirs sont exacts, ça doit être par là.

Après quelques instants de traversée dans la nuit avec leurs rétropropulseurs, ils arrivèrent devant la paroi de gauche de l’immense salle. Dès l’arrêt, elle perçut un léger bruit de déglutition venant du circuit de Tender. Suivant son regard matérialisé par le faisceau du casque, elle découvrit un autre corps, tout aussi éclaté à cause de la sous-pression, qui flottait dans l’espace au dessus d’une console.

-C’est le poste d‘alimentation de la tuyère du réacteur, expliqua Syllas, montrant sa remarquable connaissance technique, le générateur gravitationnel ne devrait pas être loin, n’est-ce pas?
-Oui, je suis juste venu prendre du matériel.

Évitant soigneusement le cadavre, l’ingénieur se pencha, et ouvrit un espace de stockage. Plusieurs outils s’échappèrent immédiatement. Il en saisit deux au vol, et les accrocha à sa ceinture. Satisfait, et après avoir effectué une nouvelle gymnastique afin d’éviter d’entrer en contact avec la chair congelée, il revint à eux, et fit le signe « Okay », en prenant immédiatement les devants. Bientôt se profilait devant eux la silhouette du générateur antigravitationnel, une grosse machine plus ou moins cylindrique, qui semblait aussi immuable qu’un roc.
Un instant, la jeune femme retint son souffle. Une autre silhouette était affalée contre la paroi de durane, dans une position affreuse, et bougeait doucement à cause de la vibration d‘une conduite qui était son support. La main gantée de Syllas se posa sur l’épaule d‘Ishaa, et la tira en arrière tant bien que mal. Pantelant, le corps se mit à dériver entre elle et le vice-amiral. Sa tête était protégée par le casque, probablement activé en catastrophe, mais la lampe était éteinte, et les muscles flasques. Le chef d’expédition prit la lampe ionique à sa ceinture, et l’activa, pour éclairer la visière. Il se pencha, et tacha de voir à l’intérieur. Puis, d’un geste sec, désactiva la lumière, et ramena la torche à sa ceinture, en faisant un hochement de tête négatif.

-Tachez de voir ce que vous pouvez faire avec le générateur, lieutenant Tender, furent ses seules paroles.


Dernière édition par Syllas le Mar 6 Jan - 20:16, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMar 6 Jan - 20:15

Obtempérant, l’ingénieur s’approcha de la console sur laquelle le mort avait gît, et commença sa besogne, en bricolant une des batteries de sa ceinture pour d‘adapter et envoyer de l‘énergie dans quelques circuits du poste.

-On devrait regarder dans le reste de la salle pendant ce temps, proposa Ishaa, que tout ce qui pouvait l’éloigner du corps flottant encore à quelques mètres d’eux encourageait.

Sylals fit un bref « d’accord » , et Tender hocha la tête sans même se retourner pour montrer qu’il avait saisi. Reprenant leur rétropropulseurs, les deux officiers poursuivirent le long de la paroi, passant consoles mortes sur consoles mortes. C’était un spectacle de désolation; on se serait cru sur une épave laissée en espace profond pour des années, comme ils en avaient découvert une quelques semaines auparavant. Mais alors, seul un petit groupe était monté à bord, et pour quelques minutes uniquement…et ici, c’était tout leur croiseur qui semblait mort. C‘était rare d‘ailleurs de voir ce type d’images durant les entraînements et même durant tout le cycle à l‘école militaire, car cela n‘encourageait pas outre mesure l‘engagement, le Vice-amiral pestait régulièrement contre la minable qualité de l‘école de marine depuis quelques années.
Un léger frisson la parcouru quand ils aperçurent un nouveau corps, lui entouré d’un nuage de sang qu’ils évitèrent soigneusement, pour ensuite s’arrêter quelques mètres plus loin, devant la tuyère centrale.

-Il faut trouver sa console! Ordonna Syllas en lançant un regard sur la droite, prolongé par le faisceau de sa lampe frontale.

Ils partirent dans cette direction, et arrivèrent devant le contrôle central de la salle des machines. C’était une immense tableau de commandes, couverts de boutons aux formes étranges, d’habitude luisant de mille feux afin de montrer les contrôles activés, en plus des nombreuses manettes sur les côtés, et de quelques compteurs mécaniques éparpillés ça et là. Une corps était également là, installé sur le siège tournant, entouré d’une brume de viscères, de chair et de sang. Manifestement, la dépressurisation avait pris tout le monde au dépourvu. Une mort foudroyante.
Vivement, l’amiral saisi le macchabé, et, après avoir lancé un coup d’œil au grade sur l’épaule de l’uniforme sur lequel quelques traces de givre s’étaient formées par le gel de l’humidité ambiante—glissant au passage à sa jeune subordonnée qu‘il s‘agissait de l‘ingénieur en chef, une femme de caractère qui avait toujours néanmoins été appréciée du reste de l‘équipage—, le poussa aussi loin que possible. La majorité des restes, reliés par des lambeaux de peau ou de nerf, le suivit, et à présent, le sang n’empêchait pas trop de voir. Syllas prit place tant bien que mal, laissant dériver à côté son rétropropulseur, relié à sa combinaison par un étroit et solide fil d‘hexplis, et, éclairant avec sa lampe frontale les compteurs, les examina un à un attentivement, faisant appel à ses lointaines connaissances techniques appliquées du maniement de la machinerie, qui, heureusement, n‘avait pas fondamentalement changé avec le passage à la tuyère à hyperimpulsion.
Pendant ce temps, Ishaa, un peu nerveuse, cherchant à s’écarter le plus possible de nouveau, lança son rétropropulseur, survola la tuyère centrale, immense tube bardé de machines sophistiquées de part et d’autres, servant à orienter le flux Tetryonique, et ainsi, garantir l’alimentation du vaisseau, et de ses réacteurs, aussi bien à hyperimpulsion que ses compartiments à subespace. L’autre côté de la salle n’avait néanmoins rien de plus gai; elle tomba carrément sur un énième corps en descendant de nouveau. Il avait activé son casque, et flottait là, tordu, au dessus d’un siège de commande. D’abord, elle avait frissonné, mais aussitôt, son côté masculin, comme elle aimait croire parfois, la blâma: elle n’était au fond qu’une gamine peureuse, et aurait mieux fait d’aller travailler à l’usine, à Kamensk, ou carrément rester avec Nico chez les Scaliger, plutôt que de s’engager, et y aurait fait du meilleur travail qu’ici, c’était certain.
Cela fonctionnait toujours: résolument, elle s’empara de sa petite lampe ionique, et décida d’en découdre avec sa peur de circonstance, en braquant la lumière contre le visière. Le faisceau éclaira d’abord le haut d’un nez, puis deux yeux. Elle fut prise d’un mouvement nerveux, un tressaillement terrible. Une des paupières avait bougé, elle en était sûre. Presque hésitante, elle braqua de nouveau la torche…ça y est, elle en était sûre.

-Amiral! Amiral! S’écria-t-elle dans la com., en tenant fermement le bras du corps., et activant son rétropropulseur d’autre part, pour revenir en arrière, le tractant.
-Qu’y a-t-il? Interrogea la voix de Syllas dans la Com., intriguée, et vaguement inquiète.

Mais déjà il apparaissait, venant à sa rencontre. Il s’arrêta à quelques mètres au dessus de la tuyère.

-Il est vivant! Ses paupières ont tressailli quand je les ais éclairées, s‘exclama-t-elle, trépignant légèrement.

Intrigué, le vice-amiral répéta l’opération, et constata également un léger mouvement. Soudain beaucoup plus vif, il poussa le corps vers le haut tout en tirant son multicapteur et une batterie de sa ceinture. Après avoir enfoncé le premier dans une prise sur la combinaison de l’autre, il regarda les résultats d’afficher le petit écran holographique qui apparut au dessus.

-Effectivement, remarqua-t-il, mais il n’a plus de réserve d’air; son philtre est HS. Avec ceci…cela devrait aller.

Avec force, il enfonça la batterie à côté du multicapteur, qu’il retira dans le même mouvement, et activa la première, sur laquelle l’habituel lumière verte s’activa.

-Il a de quoi tenir encore une quinzaine de minutes, mais il faut se dépêcher, sinon il sera trop tard pour le réanimer, déclara résolument le vice-amiral, après avoir rangé son instrument, et empoigné le retro’ qui flottait jusqu’alors à quelque coudées de là, au bout de son filin, aidez moi à le tirer, lieutenant, nous rejoignons Tender, puis mettons les voiles, de toute façon j‘en ais vu assez là-bas.

Elle obtempéra, et agrippa solidement le bras droit du rescapé, tout en lançant de l’autre main son module. Alors que, suivant le chemin enregistré à l’allé par leur machine, ils se dirigeaient vers le coin où œuvrait le technicien, Syllas dit:

-J’ai eut le temps de regarder les commandes centrales. Il semblerait que quelque chose ait grillé toutes les conduites plasmiques et même les lignes électriques de base. Ca a dû faire surchauffer les circuits autonomes du générateur de gravité et aussi ceux du maintient de vie de ce niveau. Ceux des autres ponts sont indépendants des circuits plasmiques de salle des machines, et ont tenu le choc tant bien que mal car ils ne fonctionnaient qu‘à une fraction de leur potentiel. On a évité la catastrophe intégrale de justesse!

Entendant cela, Ishaa serra les lèvres. Décidemment, dans la marine, c’était pas une réussite. A peine sortie du navire école — où elle avait eut des relations exécrables avec la hiérarchie —, elle avait été affecté sur le Kanopus, pour une mission au milieu de nulle part, sans escales attrayantes sur des planètes exotiques, malgré une équipage sympa, un chef d’expédition de choix, et des promotion rapide, c‘était de dures années en vue…Et voilà que cela tournait court en plus…
Mais déjà la lumière du projecteur du rétropropulseur de Tender apparaissait au loin. En quelques instants ils étaient avec lui. Il n’avait pas chômé: une bonne partie du panneau extérieur avait été démontée, et, entouré d’outils, il paraissait avoir tout juste fini d’extraire comme un modèle réduit du cylindre, un objet d’une cinquantaine de centimètres de haut, luisant d’une légère lumière bleue. D’un geste, il écarte un mitrailleur énergétique, dit « fusil » dans la profession, et termina de préparer la marchandise en sortant deux balises magnétiques. Il fixa la première contre une des faces au sommet du cylindre, et l’autre sur le côté gauche de son rétropropulseur.

-Je suis prêt, annonça-t-il en les voyant arriver, j’ai tout arrangé, et récupéré en même temps le noyau central et quelques outils…qu’est-ce…?

Il s’était arrêté en les apercevant avec le corps.

-Il est encore en vie, il faut faire vite. Rangez vos outils, on n’a pas beaucoup de temps. Notre réserve s’épuise aussi.

Le technicien hocha vigoureusement la tête, et, d’une pression sur une autre balise magnétique, placée à droite elle, activa le réseau qu’il avait installé, en bon bricoleur, qui réparait à douze ans les postes holographiques de son immeuble. Tout les outils, et une cellule d’énergie, se rapprochèrent doucement les uns des autres, pour finir par former un conglomérat désordonné à un mètre du bout des jambes de Tender, qui flottait légèrement au dessus du sol. Puis, il enclencha l’autre. Comme animé d’une volonté propre lui aussi, le cylindre s’approcha, et s’arrêta non loin du reste de la charge, sur le côté gauche.

-On peut y aller, annonça, avec un sourire qu’on ne distinguait pas derrière le casque, l’ingénieur.

Syllas hocha la tête à l’intention de Ishaa, qui reprit le bras du survivant, et bientôt tout les quatre filaient vers les niveaux supérieurs aussi rapidement que leurs permettaient leurs charges.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMer 7 Jan - 16:24

Tessak (peuple): Les Tessaks sont un élément très étrange de l’histoire coloniale de la galaxie 7. Ce peuple, dont l’origine obscure se perd en galaxie 4, a colonisé trois mondes du système de Ressirgo; Ressirgo V Nova, Ressirgo VI et Ressirgo IX B. Les habitants de R.VI et R.IX suivent le parcours caractéristique de la plupart des civilisations de galaxie 7: l’organisation en cités-états des colonies se termine avec l’intégration au sultanat d’Ascata, qui lui-même est submergé par le royaume de Botmélie. En exil, le sultan Suley’ter’lak II abdique en faveur du Doge de Christiansa. Après une reconquête facilitée par la vaillance des guerriers locaux, les trois mondes sont intégrés à la Sérénissime comme territoire semi-indépendant, puis sous le statu de membre de l’état de Christiansa dans l’Union. Lesdits deux mondes sont alors intégrés à la culture galactique, alors que R.V reste sauvage: seules quelques villes existent dans ses zones fertiles, vallées entre les montagnes et sur la côte, alors que les autres Tessaks vivent dans le désert, perpétuant un style de vie nomade qui a longtemps été celui de leurs frères, et sont ainsi une des seules peuplades dont le niveau technologique a diminué après la colonisation.
Hommes vigoureux et basanés, ils sont des guides de choix, et ont une culture et identité forte. Ainsi, leur langue, de famille turco-altaïque, le Tessak [voir Tessak (Langue), ci-dessus], n’est maîtrisée que par peu de gens de l’extérieur.

Dictionnaire Universel. Edition n°54.8.15. Livre IX, page 322. Extrait de l’Article « Tessaks (peuple) ». Auteur: Pr. Rea Syllas d‘Acre.



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An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Tsarysyn, Union des Galaxies Eloignées
Grand Spatioport Galactique




L’officier lança un regard particulièrement méfiant aux deux femmes en habits sombres devant lui par-dessus ses lunettes d’analyse. Il était repassé cinq fois au dessus du pass de Kerstin, et restait sceptique. Après avoir tapé quelque chose sur un petit clavier hors du champ de vision de Hel, il grogna:

-C’est bon, allez-y.

Kers émit un son désapprobateur, mais ne dit rien, et fit signe à son amie de la suivre dans l’ouverture qui venait de se dégager. Ce passage discret permettait, après plusieurs mesures de sécurité—dont la plus efficace était sans doutes aucuns la tête de trente-sixième dessous de l’officier veillant dans la loge—d’accéder à l’entresol.
Autant les niveaux de voyageurs étaient luxueux, pleins de matériaux étincelants, lumineux, de verre et d’énergie, une foule bariolée originaire des milliers de mondes de la galaxie, où se croisaient les marchands ambulants d’Essi—malgré la répression de la chambre de commerce—et les petits locaux détaxés faisant la joie des dames jadéennes et autres personnes raffolant de petit objets exotiques assurément fait dans les usines des bas-fonds—Hel en témoignait, même si la contrebande de gadgets n’avait jamais été sa branche—, autant les soixante-et-un entresols du spatioport, présentant des dispositions sensiblement semblables, n’étaient qu’une suite de larges couloirs ayant pour seule tapisserie des larges pans de béton renforcé de duranium, de barres d’acier et de longs tuyaux d’Hexanox liquide. Pour couronner cet environnement impersonnel, uniquement traversé par les silhouettes affairées dans l’uniforme gris du spatioport d’ingénieurs, de techniciens, de gens de services, de la sécurité, et des équipages, de la Sûreté, il y avait à chaque croisement une interface de direction multidimensionnelle, soit une pléthore de mots, de chiffres, de flèches flottants à quelques mètres du sol, indiquant des directions différentes.
Kers étudia quelques instants l’imposant embranchement, puis indiqua à son amie une direction spécifique. Hel avait prit sa sacoche légère habituelle, heureusement faite en un tissu synthétique quasiment indéchirable—elle avait déjà survécut à une fuite de plasma à bord d’un vieux cargo faisant la liaison entre Tsarysyn et Assedo, où la jeune femme s’était « par hasard » retrouvée dans la salle des machines au moment d’une rupture de la conduite principale des injecteurs de plasma du réacteur. Heureusement, ses cinq combinaisons, toutes volées dans les stocks d’un vaisseau retrouvé échoué lors d’un de ses voyages en solo, et ensuite recoupées et améliorées, étaient issues du secteurs « ingénierie », comme en témoignait une discrète marque rouge au niveau de la taille, côté gauche. Et résistaient, tout comme la sacoche, a l’énergie plasmique libérée. Depuis cet incident, elle préférait toujours porter un de ses uniformes gracieusement « prêté » sur le long terme par la Marine lorsqu’elle voyageait dans l’espace, où dans les bas-fonds
Elles s’arrêtèrent au nouveau croisement — le centre de celui-ci était occupé par une large ouverture dans le sol, et était déplafonné —, puis allèrent rejoindre une petite avancée sous forme d’une structure de duranium. Quelques gens du spatioport y attendaient, plongés dans la contemplation de leurs systèmes informatiques portables. En fait, lui avait expliqué son amie lorsqu’elles avaient laissées leurs bécanes à la consigne, tout le spatioport était géré par cinq superordinateurs quantiques, distincts, et interagissant. Chacun avait en charge une partie, et envoyait et recevait des instructions. Les cinq rendaient des comptes aux trois centres névralgiques de contrôle, où un groupe d’humains et d’autres ordinateurs avait la gestion de l’ensemble. Cette organisation, quoique complexe, permettait d’avoir immédiatement un contact sur chaque employé ou machine, et d’optimiser la bonne marche du tout. En cas de problème, on était plus facilement sur place et pouvait le réparer. Etant donné que les ordinateurs étaient coupés du réseau extérieurs, et supervisé à chaque niveau, il était impossible de se faire pirater. Quand au sabotage, il était improbable vu l’extraordinaire surveillance.
Une plate-forme en cercle arriva en flottant rapidement à leur niveau depuis les niveaux inférieurs. En jetant un coup d’œil à travers la balustrade, Hel eut un instant le vertige devant la profondeur du puit. Puis, secouant la tête, elle se tourna vers Kers, qui embarquait sur la plate-forme avec les autres. D’un saut, la jeune trafiquante les rejoignit. Ils se succédèrent devant la console, enfonçant chacun un des boutons tridimensionnels s’affichant dans l’espace. Lorsqu’ils eurent terminé, la plate-forme, qui s’était entre-temps repositionnée au milieu du puit, commença à s’élever. D’abord paresseusement, puis de plus en plus vite, alors que ses passagers sentaient un champ gravitationnel les maintenir en place, empêchant de s’approcher du bord. Elle fila encore jusqu’à cinq étages à cette vitesse, puis s’arrêta et laissa descendre quelques personnes. Ici, il n’y avait personne. Elle reprit sa route, très rapidement. Ils passèrent devant une bonne quarantaine de niveaux, et enfin la course sembla de ralentir. La plate-forme émergea sur le tarmac.
La première impression était toujours époustouflante. Un immense terrain surplombant la section supérieure de la station atmosphérique, d’où s’élevaient des tours bardées d’antennes et de capteurs, de paraboles et d’étranges formations aux mouvements biscornus imprévisibles, au milieu d’une débâcle d’astronefs. Les plus petits étaient des modèles de transport quasi-individuels, qui d’ailleurs n’avaient pas grand-chose à faire dans un spatioport gérant le trafic national et intergalactique, comme le ADC Cooper 45, dont une flopée rechargeait ses moteurs en antimatière près d’un vaste terminal à forme aplatie, un de ceux où aboutissaient les passagers après les divers étapes et redirections dans les étages inférieurs, jusqu’au gigantesques vaisseaux de croisière; ainsi, un VY 7C était au départ un peu plus loin, sa lourde coque argentée aux formes élancée encerclée par des pontons d’embarquement et d’approvisionnement, ainsi que plusieurs champs de force, au départ de sa rampe de lancement, ses douze réacteurs atmosphériques brassant déjà l‘air, tandis que chauffaient les propulseurs spatiaux.
Kers tira le bras de Hel, et elles descendirent de la plate-forme, qui repartit instantanément dans les profondeurs de l’immense fourmilière. Elles arrivèrent jusqu’à une bande noire indiquée sur le sol gris. Les personnes devant eux montèrent, et furent entraîné comme par un courant, à tout vitesse, sur la droite. C’était un champ antigravitationnel multidirectionnel, un « courant anti-G », comme on les appelait ici. Ce genre de système coûtait extrêmement cher à installer sur des distances supérieures à quelques dizaines de mètres, on ne les rencontrait que rarement ailleurs. Cela étaient d’ailleurs relativement récents, car absent lors de la dernière venue de Hel, deux ans auparavant, on utilisait alors le transporteur sur rail électro plasmique classique ailleurs, « électrischna » . Ayant failli être épinglée par la sécurité, elle préférait désormais passer par les petits spatioport, plus laxistes.
Elles montèrent sur l’Anti-G, et Hel eut une sensation d’engourdissement au niveau des jambes, alors qu’elles avançaient à toute vitesse dans la direction choisie par Kers. Bientôt, la bande noire quitta le sol, et, ayant pour support un petit pont les faisant passer à une trentaine de mètres du sol, leur permit de passer au dessus d’un vaste « puisard » dans la structure du spatioport. C’était un des trois atriums, qui descendaient jusqu’au niveau le plus bas, où se trouvaient les consignes et espaces de parcage. Chaque étage possédait des milliers de connecteurs auxquels des véhicules aériens venaient se rattacher pour porter à leurs vaisseaux ceux qui n’y avait pas accès directement depuis leur terminal, et devaient passer par un de ces trois centrals. Le vent stratosphérique qui était nul au niveau de la surface du tarmac devenait trente mètres plus haut très puissant. Les courants jets parcouraient toute la haute-atmosphère de Tsarysyn, et les même si la zone du pole nord choisie pour l’installation du spatioport était dans une zone calme, des rafales pouvaient atteindre des centaines de mètres par seconde, et ainsi s’avérer particulièrement dangereuses, surtout pour le personnel opérant dans des endroits où ils étaient en prise au vent, et pour les plus petits vaisseaux. Ceux-ci étaient arrachés, traînés sur de grande distances, et pouvaient tomber, dans un atrium, ou pire, par-dessus les rebords de la station, malgré le champs de force de protections et champs « filets » , et amorcer une d’une dizaine de kilomètres vers la surface. L’urbanisation intégrale de Tsarysyn avait soulevé de graves problèmes écologiques. La planète avait été terraformée comme la plupart, mais l’équilibre de nouveau rompu lorsque toutes les zones maritimes ont été couvertes, et ensuite une bonne partie des banquises. L’atmosphère planétaire, coupée d’importantes sources d’eau, s’est asséchée, et est devenue un nid à gaz dangereux rejetés par les usines. Il a même été un temps envisagé de couper le contact de la planète avec son atmosphère, mais les coûts d’un pareil aménagement et l’installation d’un conditionnement généralisé de l’air ont été repoussés grâce à l’introduction d’une série de mesures efficaces ayant permis de recouvrir des niveaux de vapeur d’eau correcte, et une composition saine de l’air.
Malgré la puissance des bourrasques, le champ de force maintenaient tout ceux installés dans le convoyeur solidement en place, et bientôt ils eurent passé le vertigineux à-pic de l’atrium de près de cent-cinquante mètres jusqu’à la superstructure antigravitationnelle géante de base permettant à l’immense station aérienne de reste ainsi, entre le ciel et la terre.
Le transporteur se ramifia encore plusieurs fois, à chaque reprise leur branche se retrouvant avec moins de voyageurs, pour finir par aboutir à la station 74F-4: A côté d’une excroissance, un bâtiment servant de local technique, un astronef était rangé. C’était un cargo léger reconverti en transporteur de passagers, rien de très impressionnant, la capacité nécessaire pour une vingtaine de personnes au maximum.
Elles quittèrent le chemin, et marchèrent d’un pas vif vers la carlingue. Quelques techniciens s’affairaient autour, mais personne ne posa de questions. Elles purent grimper sans problème le long de la rampe montant vers l’intérieur.


Dernière édition par Syllas le Mer 7 Jan - 16:25, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeMer 7 Jan - 16:24

Celui-ci était très décrépi; des sièges pouilleux et sales s’alignaient sur la moitié avant du long cylindre bardé d’ailerons qu’était le cargo reconverti, alors que l’arrière, plein de caisses et de filets retenus par des barrières magnétiques demeurait dévolu à ce qui était manifestement sa fonction première: le transport de volailles. Le nez était occupé par le cockpit, une série de consoles, avec quelques indicateurs tridimensionnels, et une quantité impressionnante de leviers de toutes sortes, et de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Les trois pilotes étaient chacun installés sur leurs sièges respectifs, qui n’étaient certainement d’origine, et plusieurs bouteillettes de bière plus ou moins terminées trônaient sur le tableau de bord, à côté du traceur astral et des quadrants de l’hyperespace, et d‘une image de femme pendant au bout d‘une petite cordelette en plastique. Au fond d’elle, Hel se disait que si un contrôle technique inopiné de cette puissante et vaillante nef avait lieu, elle avait toutes les chances de finir à la casse avant la fin de la semaine, car devait sûrement avoir plus d’infractions que le contrôle de n’avait de points.
Pas vraiment rassurée, mais malgré tout assez habituée à ce qui était « artisanal », elle suivit Kers, et s’installa vers l’avant de la rangée de droite. On ne trouvait ce genre d’aménagement intérieur que dans les transporteurs les plus primitifs, ou alors les très courte distances. Heureusement qu’elles n’étaient pas très regardantes sur le confort, car sinon, elles auraient été dans un sacré pétrin, serrées comme elles étaient, sur des banquettes de métal à peine couvert de similicuir.
Cinq minutes plus tard, les trois autres passagers arrivèrent, et c‘était vraiment pittoresque, se dit le jeune femme. Un vieux prêtre mal récuré, la soutane plus grise que noire, déchirée sur les bords, un petit livre râpé à la main, s’installa trois sièges derrière, en marmonnant des paroles incompréhensibles, puis un bonhomme d’une quarantaine d’années, un chapeau de paille tout à fait anachronique vissé sur la tête, débraillé à souhait, criant plus que parlant, qui s’allongea de travers sur deux sièges, directement à droites d‘elles, et entrepris de dormir. Quelque chose leur disait qu’il devait sacrément ronfler. Enfin, une vieille femme comme sortie d‘un livre d‘histoire, un foulard sur la tête, habillée d’épais manteaux de couleur sombre, et portant deux gros cagots, ainsi qu’un cage pleine de poules, grimpa péniblement à bord, déposa sa charge à l’arrière, avant de s’installer en sifflant tout à l’arrière, pour rester observer de près ses biens, pas qu’on les lui vole.

-Tsss…Kers, d’où est-ce que tu as sorti ce truc? S’exclama Hel après avoir jeté un coup d’œil circulaire à l’assistance.
-Quel truc? Demanda son amie, arrangeant la veste noire qu’elle portait au dessus de son justaucorps, l‘air distrait quoique malicieux.
-Tu sais très bien ce que je veux dire. Bordel, des ruines pareilles—je parle des passagers comme de la machine! —je ne pensais pas que ça existait!

Kers eut un sourire complice:

-[font=bisque]Oh…ça existe encore. C’est plus ce que c’était autrefois, avant la réglementation et que les ténors mettent de l’ordre dans l’histoire, [/color]déclara-t-elle en faisant allusion à l’amirauté, mais en cherchant bien on trouve encore des petits bijoux pareils. C’est plus rapide que les gros transporteurs de passagers de l’INTG, plus discret et surtout plus pratique. Mais je dois t’avouer que…

Elle huma l’air, sceptique.

-Cette fois ci, ce ne sont malheureusement pas des salades dans les cagots.

Hel lui lança un regard exaspéré, puis, lassée, tourna la tête, et contempla le tarmac depuis les hublots rectangulaires, mais ne parvint pas à détourner son attention pour autant: Une sorte de pointe de métal sortait du cuir usé du siège, et s’enfonçait dans sa cuisse, rendant la position très inconfortable. Elle bougea un peu, mais cela n’aida pas. Avec un soupir, elle retourna à la fenêtre, d’où l’on voyait un UAC StG7 passer gaillardement au loin jusqu’à sa rampe, puis quelques appareils de l’armée. Le spatioport était également une base aérospatiale militaire d’une certaine importance.
L’agitation dans la cabine—au même titre que le métal s’enfonçant un peu trop profondément pour son goût dans la cuisse droite—la ramena à la réalité. Un des pilotes était levé, et avait parcouru les trois mètres—et à demi poussé le rideau— séparant leur espace des passagers.

-Okay, déclara le gars, encore assez jeune et avenant, l’accent Constantien terriblement prononcé, le rendant presque incompréhensible, formant une voix nasale et sifflante, bienvenue à bord d’notre bonne vieille J-CN-3. Notre vol partira d‘ici quelques minutes, pour arriver dans quatre heures et quelques, selon les conditions atmosphériques et le trafic spatial, à Christiansa. Notre escale sera uniquement d‘une demi-heure, nous ne quitteront pas l‘appareil. Ensuite, sauf souci techniques, nous reprendrons notre vol vers Qwireaq, Kilea Prime, Ressirgo IX, Teeslavonia, puis, après trois jours de vol intergalactique, Prijnedor Novi, Dar-Es-Fujan, et enfin notre terminus, Acre.

Il resta silencieux un instant, comme cherchant à voir s’il n’avait rien oublié. Tout un programme songea avec amusement Hel, un véritable omnibus. Pourquoi pas un détour à Almagrad chez les arkiliens tant qu’à faire?

-Notre équipage se compose de Kil, Julian, et de moi-même, Richie Flozan, votre hôte également. Nous ferons de notre mieux pour rendre ce voyage agréable et rapide. Pour votre sécurité, nous vous rappelons que tous les cagots doivent être attachés en cas de décompression partielle de la cabine ou perte de la gravité artificielle. Des respirateurs sont normalement disponibles sous les sièges. Là-dessus, nous vous souhaitons un agréable voyage.

Après cette mascarade d’annonce, le pilote repartit vers sa cabine, alors que le cow-boy à côté émettait les premiers signes sonores de sommeil. Un grand sourire était né sur le visage de Hel quand elle avait entendu que les respirateurs—tout à fait inutiles en cas de décompression qui laisserait entrer le froid spatial—se trouvaient normalement sous les sièges. De toute façon elle avait sa combinaison-scaphandre de la marine qui faisait mieux que leur camelote, et protégeait du froid.
Bientôt s'éleva, à l’avant, la voix de Kil, le principal opérateur de leur cercueil volant, résonna, un peu moins nasale que celle de son Co-pilote et chef de cabine:

-…circuits secondaire: OK, refroidissement: OK, turbo: OK, plasma: OK, antimatière: OK, subespace: OK. Le contrôle?
-Les vieux nous donnent le feu vert en 47-25, on a trois minutes avant l’prochain omnibus.
-Parfait, ça tiendra c’que ça tiendra pour l’temps. Réacteur sous tension?
-Réacteur sous tension, ça tourne sans problèmes mec, confirma Julian en abaissant trois petits contrôles sur le plafond, non sans devoir tapoter relativement fort l‘un d‘entre eux, et actif à 45%.

Un vrombissement sonore envahit la cabine, rapidement suivit d’une vibration inhabituelle sur les astronefs modernes. Derrières, les volailles, paniquées, commencèrent à piailler, réveillant l’homme au chapeau de paille, qui s‘était manifestement déjà endormi pendant la dizaine de minutes depuis laquelle il était à bord. Devant, le check continuait:

-Lanceur?
-Actif.
-Com.?
-Marche sans problèmes.
-Injecteurs à Hexa’?

Richie tapota de nouveau quelques instants le voyant rouge des injecteurs à Hexanox, puis confirma, lorsque celui-ci passa au vert:

-Ca tient l’coup.
-Et on finit par les propulseurs à impulsions: Statu?
-Chargés et prêts!
-Parfait, l’est temps d’décoller le coucou. Donne moi du jus, Julian!

L’interpelé porta ses deux mains aux gros leviers qui flanquaient le tableau de bord, et les tira au maximum vers lui. Les vibrations du moteurs augmentèrent encore davantage, alors que derrière, les poules s’étaient tues.

-On est à 65%!
-Okay, bon, on met lentement les voiles vers l’47-25, fit Kil en actionnant quelques commandes, et murmurer, pinçant ses lèvres: tout doucement ma vieille fille.

Depuis les hublots, Hel suivait le manège du cargo, qui, après s’être séparé de son amarrage, se dirigeait lentement vers leur sillon de décollage, tandis que les portes du petit sas se fermaient doucement. Le tracé était matérialisé par une rampe légèrement inclinée. Pour éviter le chaos total avec des astronefs décollant verticalement, on utilisait ces rampes de décollage, plus ou moins inclinées selon la carrure de l’astronef, comme goulet d‘étranglement pour administrer le tout. L’atterrissage pouvait par contre s’effectuer par voix verticale. Lentement, le J-CN-3 se positionna au départ de la rampe, devant un Fl-Yacht 400, magnifique astronef privé.

-On est dans les temps, on est dans les temps, confirma Richie.
-Parfait, allez, on va p’être le faire cette fois ci. Donne moi-tout, Ju’!

Le technicien manifeste du groupe renversa plusieurs commandes, ignora trois voyants de danger, et inversa deux leviers. Sur les côtés de la carlingue, les réacteurs à impulsions devinrent lentement bleus, alors que les stabilisateurs vibraient de l’effort fait pour maintenir la machine en place.

-On est à 85%, mec!
-C’est parti, yeah! S’écria Kil en poussa un levier central.

L’instant d’après, le stabilisateurs se coupèrent net, et le J-CN-3 fonçait sur le rampe. Lourdement chargé de volailles, il s’éleva trois fois, et retomba trois fois sur le titane de la coque du spatioport, avant que, sur une injonction de Julian, Richie ramène en plus les propulseurs de manœuvre, qui réussirent à arracher le cargo au sol, soumettant les passagers—l’astronef n’avait bien entendu par dispositif sophistiqué pour retenir le forces G—à une terrible pression, et déclenchant une nouvelle salve de protestation des gallinacés derrières.
Bientôt, il filait, plus ou moins verticalement, vers les cieux de Tsarysyn, dans un grand cri de Kil.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeJeu 8 Jan - 19:43

Quant à Ydricht, ce vieux déchet, je veux qu’on fasse qu’il débarrasse le plancher illico dès qu’on n’en a finit. Il n’est pas question de garder des immondices pareilles, compromettantes qui plus est, le colonel Sima s’en chargera!
Amiral de la Flotte Horatius von Heigins, dernières mises au point avant la révolution militaires. Notes du journal de Korigan Cetreçesçu.



-- -- --


An 3859, E.d.U (Eon de l’Union).
Acre



A l’instant où à l’étage du dessus Cassandre tombait sur sa couverture thermique après une longue nuit, dans le hall d’entrée, au rez-de-chaussée, l’Amiral Syllas regardait François, redescendu hâtivement en entendant la sonnerie, ouvrir la porte, et se poster sur le côté.
Un homme de taille moyenne, habillé d’une longue robe aux couleurs ternes, les bras disparaissant dans de très amples manches, s’avança. Son visage était encore lisse, il devait avoir une quarantaine d’années, mais il émanait de lui une aura de réflexion profonde.

-Bienvenue Amiral Liung, fit simplement l’hôte, avec une courbette.

Liung lui répondit en s’inclinant lui-même, avant de faire quelques pas en avant.

-Je vous salue, Amiral. Vous ne paressez pas surpris de me voir.
-Venez, venez, l’invita Syllas, en faisant signe à François de fermer, et non, je ne suis point surpris. Je vous savait depuis trois ans en exil à Sainte-Croix, sur les océans de Lüderitz. Or, lorsque le gouverneur a commis les pires exactions, en apprenant la chute du gouvernement central, le Premier Ministre a cherché refuge auprès de vous. N’est-ce pas?
-C’est cela. Les neuf seaux ont étés brisés, et le gouverneur n’a plus eut aucune retenue à l’égard de ses administrés. Lorsque Jui Sdard est venu demander la modeste protection que je pouvais lui offrir dans mon ermitage des montagnes de l’île de Sainte-Croix, je n’ais pu refuser. Mais lorsque celui-ci a été remis entre les mains des autorités compétentes, je me suis cru délivré de cette charge en le confiant aux hommes de l’honorable amiral Von Heigins.

Il se débarrassa de ses vêtements de voyage dans une penderie avec l’aide du domestique, sortit son grand éventail de plume de paon, et continua, en brassant doucement l’air:

-Néanmoins, d’après les dire de mon respecté collègue l’Amiral Costa, qui est venu à trois reprises me voir en me pressant d’entrer en contact avec vous, il semblerait que mes services soient requis.
-Je n’ais pas demandé à Costa de venir vous importuner. Il a du agir par lui-même. Néanmoins, maintenant, je ne saurais vous voir venir ici pour rien. Venez partager mon repas, je vais vous exposer la situation ensuite. Franck Law est ici également, mais est encore exténué et doit dormir. Peut-être se joindre-t-il plus tard à nous.

Ils pénétrèrent dans le petit séjour, et s’installèrent à une table où un début de petit-déjeuner était servi. Après avoir discuté de banalités et de lieu commun pendant la première partie de la brève collation, ils allèrent à la table basse, et tombèrent dans de grands fauteuils moelleux. François se retira, et ils purent continue en toute tranquillité.

-Depuis maintenant près de trente ans, depuis la mort de Touns Teillen en fait, l’état a sombré dans le vice le plus profond. Il y a trois ans, Dong Jeran est entré dans le quartier gouvernemental Tsarysyn à la tête de troupes nombreuses, et a tenté de contrôler le gouvernement de Stanislas Pavlovitch, qui a démissionné, et s‘est fait tuer par des hommes de la pègre d’Eitso aux affaires desquels il avait nuit. Entre temps, après s’être fait nommer premier-ministre, Dong Jeran a tellement tyrannisé les magnats au pouvoir qu’il les a tous retournés contre lui, et, avec le soutient du Doge, qu’il avait également offensé, est finalement mort assassiné. Ses hommes se sont dispersés. Suite à ça, le simulacre d’élections a vu l’arrivée à la charge de Chancelier de l’Union de Karlson Magnus. Mais Magnus n’était qu’un individu faible, et il était manipulé par le vrai chef du parti Progressiste, le trésorier Edward Ydricht. Néanmoins, l’indomptable Juan de San Ferdino, chef des bellicistes d’extrême droite, avait intenté une action d’honneur devant la Haute-Cour centrale contre le Chancelier Magnus. Celui-ci, maladroit, s’est effondré en larmes devant les juges, et a perdu.

Liung agita tranquillement, son éventail en écoutant le récit de Syllas, qui, prit une des deux tasses de thé offertes par François, avant de reprendre, en buvant régulièrement une gorgée:

-Malgré plusieurs tentatives d’esquive, Ydricht, pour éviter la poussée de droite consécutive au scandale des comptes et mœurs de Magnus, a du monter lui-même à l’office suprême. Ce fut sa plus grande erreur. C’était un excellent politicien, mais sa rhétorique était malhabile, et il était mauvais administrateur. Son cabinet était entièrement formatés vers des objectifs politiques, et ne fit rien de correct. Le budget des forces armées s‘effondra, nous obligeant à nous cotiser parmi les plus aisés par assurer l‘entretient correct des unités les plus importantes, comme c’était le cas pour moi-même et l’UFGS Kanopus, laissant les autres à l‘abandon, ce qui nous était immédiatement reproché, comme si nous pouvions multiplier les devises tel Jésus les pains. Quand à l‘argent accordé à la force publique et à la Sûreté, il avait touché le fond, au même niveau que celui des parcs et jardins—qui, notons-le, ne sont pas devenus plus beaux pour autant—. En fait, au cœur du budget de l’état, il y avait une sangsue. Cette sangsue, c’était ce cabinet débauché, une abysse dans laquelle s’engloutissaient les devises sans parvenir à toucher le fond, encore moins à la combler. Des sommes hallucinantes ont disparues ainsi. Néanmoins, le temps travaillait contre eux. Ils avaient passés un cap dans la débauche en pratiquant leurs orgies jusque dans les antres les plus sacrées de la chancellerie, et dépassés toutes les limites de gâchis et corruption. Le parti de Ferdino fusionna avec celui de mon collègue Von Heigins, qui englobait déjà la grande majorité de la droite, des plus extrêmes aux modérés. Devant les exactions, la Député-maire Silvya Keels, chef des Socio-démocrates, conclut une Union sacrée avec les nôtres. Von Heigins était prêt à expulser les misérables et les traîtres, avec le soutient de politiques intègres subsistants, et de la population, qui, victime de l’oppression fiscale, des bandes de mercenaires écumants l’espace et les campagnes et de mafieux, de la misère sans nom, étaient en proie à une colère latente, et voyait en bien n‘importe quel changement. Entre-temps, les sbires d’Ydricht faisaient tout pour nous détacher les uns des autres, et nous neutraliser. Horatius a été victime de deux tentatives d’assassinat. Il a égorgé de ses propres main le second assassin, un garçon maigre à en être anorexique, fanatisé, lorsque celui-ci a essayer de le tuer avec une machette à la sortie d‘une cérémonie. J‘ai moi-même, après avoir refusé les neuf honneurs qu‘on m‘avait proposé pour m‘immobiliser, été agressé par une machine admirablement camouflée en forme humaine infantile des plus innocentes. Heureusement, en plus de mon mépris à l’égard des stéréotypes infantiles tentant d‘inspirer la pitié, mes entraînements de l’infanterie de marine n’ont pas étés vaincs, et je m‘en suis tiré de justesse. La liste des nôtres ayant réchappé—et des malheureux n‘ayant pas eut cette chance—est longue…interminable.

Syllas se grattait très lentement le menton, les yeux fixés sur le va-et-vient de l’éventail. Il reprit, sans pour autant regarder son interlocuteur dans les yeux:

-Ils creusaient leur propre tombe. Déjà, la Seigneurerie de Christiansa était entièrement derrière nous, et le Doge avait publiquement blâmé d’administration. Le premier de Lüderitz avec tout son cabinet de même. La galaxie huit était acquise. Leur pouvoir ne tenait plus que par miracle. Depuis des mois, la paye des fonctionnaires de bas échelon avait été drastiquement réduite, pour rediriger les fonds vers des comptes secrets sous pseudonymes dans des paradis fiscaux. Des milliards et des milliards se sont échappés de la sorte. Partout des émeutes ont commencé à éclater, et Ydricht a du faire payer des mercenaires étrangers pour mettre un terme aux plus violente, car, évidemment, nous n’allions pas nous ranger de son côté. Mais le temps de la résistance passive se terminait; alors que Von Heigins préparait les plans de coup de main, je recevait l’ordre de patrouiller en galaxie 9. Et, comme chacun sait, la Plaie a ravagé cette région, alors même qu‘en galaxie 8 les tisons de la rébellion qui l‘avait enflammée, même ici, sur Acre, attisée par le Margrave de Prijendor Novi et le Cartel avaient à peine refroidi. Je suis revenu de toute urgence, porteur de ces nouvelles. Personne ne m’a écouté. Cela ôté mes derniers scrupules: un gouvernement laissant consciemment, intentionnellement peut-être, sa nation s’éteindre ne mérite que la mort. Le matin du 27 Mai, jour de fête nationale—sans festivités de toute façon, par coupe budgétaire—, la roue de la fortune tournait, le destin était en marche. Von Heigins, Huys, Ruis, Basil et Von Mach avaient pris position avec leurs forces armées sur terre, sur Tsarysyn, Christiansa, Assedo, Rhode, etc…Epaulé par Cetreçesçu, Costa, Van Kryger et d’autres, j’ai éliminé les derniers éléments subversifs de la marine, et l’ais amenée en orbite de la capitale, ou empêcher la fuite des traîtres.
Dès que la rumeur du putsch a commencé à circuler, ce fut extraordinaire: des secteurs entiers se sont soulevés contre les éventuelles forces loyalistes, et ont accueillis les nôtres en triomphe. Il fallut convaincre les gens de rentrer chez yeux attendre que la transition se fasse tranquillement. Sur Christiansa, le gouvernement de la Sérénissime était déjà acquit à notre cause, et publiquement, dès dix heures galactiques standard, le Doge fit un discours annonçant qu’il ne reconnaîtrait qu’un gouvernement établi par les nôtres. En début d’après-midi, la majorité des états étaient avec nous, rares étaient ceux qui renâclaient.
Entre-temps, sur Tsarysyn, le parlement avait désavoué le gouvernement en place, et le Haute-Cour annoncé la reprise des poursuites contre plusieurs membres de ce même gouvernement. La plupart ont fui, dans un premier temps dans le secteur 9—les lâches, entre l’université médicale et plusieurs autres centres de recherches et grands hôpitaux. Les forces n’étaient pas disponibles pour les arrêter. Seule une frappe orbitale permit d’empêcher la fuite—ils avaient préparés de nombreux petits astronefs.
Seul Ydricht passa, et fit un arrêt à la station Walhalla 7, pour réparer son vaisseau, endommagé par un tir. Apprenant la nouvelle, je mit rendit immédiatement avec cinquante soldats parmi les plus valeureux de l’infanterie de marine. Nous eûmes à faire à un régiment loyalistes, et une centaine de jeunes gens ayant vécu là toute leur vie, et ne comprenant pas les motifs de l’intervention des militaires, et, se disant pacifistes, tentèrent de nous arrêter. Je fut contraint, acculé, de faire tirer une salve afin de disperser. Nous avions limité les dégâts. Enfin, après un barrage au mortier, nous réussîmes à mettre l’astronef de Yricht hors d’état de fonctionner, et capturâmes le traître.


A peine l’amiral eut terminé que la porte de la salle s’ouvrit, et que Law, l’air encore ensommeillé dans sa veste campagnarde, entra.

-Ah, bien le bonjour mon cher amiral Liung! François m’a dit que vous étiez là! S’écria-t-il, jovial, en apercevant l’homme à l’éventail.

Celui-ci se releva, et s’inclina brièvement:

-Mes salutations, amiral Law. Son excellence l’amiral Nikolaï Syllas m’exposait les détails de votres actions des mois précédant.

Law renifla, et alla prendre une chaise, pour s’installer à leur table, laissant le maître des céans reprendre son récit.

-Oui…donc, je vais faire bref. Dans les semaines qui suivirent l’action, nous nous promîmes de remettre en place une société et une Union selon les principes moraux, la justice, et l’ordre. L’organisation fut dure, mais Franck s’est remarquablement bien débrouillé, et notre autorité a été assise. Nous pouvons déjà être fiers de ce qui est fait: nous avons les moyens de changer l’univers de l’Union.

Il resta quelques instants silencieux, réfléchissant à son effet. Puis, il reprit, d’une voix fortifiée:

-Amiral Liung! Depuis vos prouesses dans la guerre contre Alttoria, et vos réussites d’administrateur de Lüderitz, nous ne pouvons que confirmer que vous êtes sans doutes aucuns l’un des plus grands hommes de notre temps, et que votre savoir exceptionnelle n’égale que vos capacités stratégiques et humaines. Vous avoir à nos côtés serait un grand honneur, et de plus, permettrait assurément d’augmenter largement nos chances de concrétiser notre grand projet!

Liung Wu Xun posa doucement son éventail, et joignit ses mains, avant de laisser un long silence. Puis, il répondit:

-L’Amiral Costa est donc venu à trois reprises. J’ai admiré sa détermination, et vos idéaux et objectifs. Il m’a déjà été difficile de me résigner à quitter mes arbres fruitiers et mon bel ermitage de la côte de Sainte-Croix, mais je ne puis que m’attacher à la grande cause. Vous tous vous êtes déjà distingués comme des hommes de valeur par vos actions passées, c’est indubitable, et si je puis apporter à ces projets mon humble contribution, ce sera avec fierté et assiduité que je le ferais. Vous pouvez désormais me compter parmi les vôtres, Amiral Syllas d’Acre, et j’œuvrerais ainsi juste qu’au retour à la gloire et aux honneurs passés.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeJeu 8 Jan - 20:09

La guerre moderne est avant tout celle des pensées. De nos jours, on doit s’interroger avant tout sur les raisons du conflit, pour connaître les méthodes qu’on va y appliquer. Ainsi, les justifications plus ou moins correctes permettront des méthodes plus ou moins totales, et une marge de manœuvre plus ou moins grande dans ses actions.
Archi-amiral de la Sérénissime République de Christiansa Nikolaï Syllas d’Acre, extrait de l’introduction de « La Guerre Moderne »


-- -- --


An 3855, E.d.U (Eon de l’Union).
Galaxie 9, espace profond
UFGS Kanopus



Le commandant Setz affichait une mine sombre en entrant sur le passerelle improvisée. C’était une large pièce, salle de conférence à l’origine, du niveau 9, qui, située au cœur de l’astronef, avait été réquisitionnée pour servir de centre de commandement et d‘hôpital de campagne, étant donné le nombre d‘éclopés en tout genre causés par ce qu‘on appelait déjà « l‘incident ». Des hommes de l’équipe de Tender, promu au rang de mécanicien en chef, avaient installés des connexions supplémentaires, et quelques ordinateurs, branchés sur le générateur auxiliaire qu’ils avaient installés en face du couloir, bricolé à partir de ce que le technicien avait pu sauver de la salle des machines, et de ce qu’on avait trouvé dans les niveaux libres. L’énergie dispensée se limitait aux niveaux huit à dix, c’est à cause de cela qu’on laissait pour l’instant vide la passerelle du pont 1. Une poignée de consoles installés ici sur la table de conférences suffisaient à gérer les quelques systèmes de bord survivants. L’autre moitié de l’immense structure de verre et d’acier destinée à de longues discussions de séminaires et d’ambassadeurs était laissée libre, mais pour l’instant, ne le paraissait pas vraiment, encombrée d’une quantité phénoménale de multicapteurs, de feuilles en tout genre, de pièces détachées même. A l’extrémité, près du siège de Syllas, qui présidait la tablée, sa casquette côtoyait quelques batteries, un SIP, le rétropropulseur et d’autres objets enlevés à sa ceinture. Leur premier soin avait bien entendu été de rétablir la gravité artificielle, mais la faiblesse de leur alimentation en énergie rendait son fonctionnement aléatoire, et trois fois déjà, ils s’étaient retrouvés à léviter, au milieu de leur matériel éparpillé, ce qui était bien entendu très inconfortable, et les obligeait à recommencer tout le travail.
Le chauffage fonctionnant également en mode minimal, à peu près tout le monde avait imité les officiers supérieurs, en revêtant les tenus isolants d’abordages, et rapidement les magasins de bord s’étaient retrouvés vidés.

-Amiral, nous avons terminé de faire le bilan, déclara finalement Setz, nous avons perdu cent vingt-sept hommes, dont quarante techniciens, soit la quasi-totalité du personnel compétent de la salle des machines. Quinze autres, toujours parmi les cent vingt-sept, sont morts dans les étages au dessus du dix-sept, à cause du choc, de chutes d’objets, ou alors d’explosion des circuits électriques principaux à côtés desquels ils se trouvaient.

En entendant qu’il avait perdu plus du tiers de son effectif à bord, Syllas se gratta pensivement le menton, son regard se perdant sur l’immense tablée studieuse. La plus grande partie de l’équipe de techniciens, dont Tender, étaient ici, mais également quelques opérateurs de l’informatique de bord, supervisés par le sous-lieutenant Gerey.

-C’est fâcheux, remarqua-t-il, ici, nous sommes en train de faire le bilan matériel interne. Lieutenant, votre bilan?

Le nouveau mécanicien-chef se leva, en glissant un dernier mot à l’ingénieur qui travaillait à côté de lui, et s’éclaircit la voix, ayant manifestement entendu de loin ce qui en était:

-De notre côté, nous sommes parvenus à restaurer 10% de l’énergie d’origine. Elle est concentrées sur ces trois niveaux, où je peux garantir le maintient de vie, le chauffage et la gravité artificielle. Pour l’instant, nous travaillons à relancer la central de communication interne, et l’éclairage principal. Par contre, nous n’avons aucun moyen de contacter le Regulus et le Steglitz, la phalange de communication étant située au niveau dix-neuf, et de toute façon consomme trop d‘énergie, conclut-il sur une note pessimiste.
-Le Regulus et le Steglitz, justement, déclara Syllas, ce qui m’inquiète, c’est que nous n’en avons pas encore entendu parler. Cela fait deux heures que l’incident a eut lieu, et toujours rien. Il a dû se passer quelque chose…il faut que nous puissions sortir voir ce qui en est.

Enfin, un faible sourire éclaira le visage de Setz:

-Justement, en explorant les dernières parties intactes du vaisseau où nous n’avions pas encore étés depuis, j’ai été dans le hangar des navettes, niveau six. Trois d’entres elles , deux petites 23, et une moyenne de classe Hydra, étaient en veille lorsque l’incident a eut lieu, et sont également totalement grillées. Mais deux, une autres 23, et une plus grande, modèle D-Wahl, étaient déconnectées et leurs réacteurs désactivés; elles sont intactes. Avec ça, nous pourrions sortir…pour peu qu’il y ait assez d’énergie à envoyer à la porte de l’extérieur, et aux pompes à oxygènes, lors du retour. Le lieutenant Stavanger est resté là-bas, voir si, avec quelques autres mariniers, elle pouvait relancer le D-Wahl. Notre idée était de relier son circuit à celui du reste du vaisseau dans un premier temps afin d‘utiliser son générateur de bord, et d’embarquer sur le 23 pour sortir.
-Ca serait en effet intéressant de voir ce qui se passe à l’extérieur…lieutenant Tender, pensez-vous que c’est faisable?

Le technicien eut une moue perplexe, et finit par déclarer, un peu hésitant:

-Je pense, mais ce sera assez handicapant pour notre circuit principal d’alimentation, même si l’apport du réacteur du D-Wahl serait une belle bouffée d’air. Enfin, si nous pourrions trouver de quoi nous aider dehors, je n’ais rien contre.
-Parfait, déclara Syllas, avide de nouveautés, en se levant, je vais y aller, et voir si je peux contraindre ce satané Aliakmon à venir enfin nous donner un coup de main.

Déjà il reprenait les objets qu’il avait laissé sur la table, les attachant grâce aux balises magnétiques incorporées à sa ceinture. Cela terminé, il fit signe à son second de la suivre à côté, au milieu des lits flottants antigravitationnels qu’on avaient apporté de tout le vaisseau, sur lesquels les blessés étaient allongés, pendant que le régénérateur cellulaire faisait son travail. Lorsqu’ils s’approchèrent, le médecin-chef, un officier placide et très professionnel, se détourna d’un brûlé qu’un infirmier traitait, et vint à leur rencontre:

-Tout devrait aller, amiral, il n’y que relativement peu de blessés graves, uniquement des cas légers.
-Bien, et qu’en est-il de l’homme que nous avons rapporté de la salle des machines? Interrogea Syllas, tout en essayant de fixer le retro par un aileron à l’arrière de sa ceinture.
-Il a repris conscience, et semble aller bien mieux, déclara sur un ton rassurant le médecin, en les amenant dans un des coins de son infirmerie de fortune, la vraie se trouvant niveau 5, hors de portée des réseaux d’énergie actuels.

Effectivement, ils retrouvèrent le rescapé, assis sur le bord de son lit. On avait tiré sa combinaison jusqu’à la taille, pour examiner son torse au détecteur cellulaire, sans rien trouver comme lésions et dommages au poumons qui ne pourraient êtres réparés par le régénérateurs et les diverses charges chimiques introduites pour le remettre d’aplomb. C’était un homme de taille moyenne, les cheveux brun tirant par endroits sur le roux foncé, le visage relativement avenant, avec des joues pleines, un nez formant un angle prononcé, et deux grands yeux pétillants dans un marron de myope corrigé médicalement trop tardivement pour ne pas laisser cela comme séquelle. Il entreprenait de remettre son vêtement, car manifestement le personnel soignant, deux infirmières, un infirmier, et le docteur Cecil, en avait terminé avec lui.
Encore probablement un peu sonné, et le regard fixé sur la fermeture magnétique récalcitrante de sa combinaison, il n’avait pas vu Syllas arrivé, et, lorsque l’ombre de ce dernier passa au dessus de lui, il releva prestement la tête, puis, automatiquement, tenta le premier salut militaire réussit que le vice-amiral ait vu depuis l’incident.

-Amiral! Je ne saurais vous remercier de m’avoir sauvé, dit-il sur un ton un brin hésitant, mais réellement plein de gratitude.
-Vous êtes donc le sous-lieutenant Alexander Zikosler, commenta Syllas, avec un faible sourire comme il en avait déjà fait trop pour son goût aujourd’hui, en tachant de se remémorer ce que Ishaa lui avait dit plus tôt, après avoir consulté la base de données de l’équipage qui, avec ses trois cent têtes, ne pouvait être connu intégralement après juste quatre mois de croisière, vous savez, c’est mon devoir d’aider mes hommes, d’ailleurs, ce n’est pas moi qui vous ais trouvé au fond. Enfin bref…vous étiez donc sur le pont dix-huit?

Il opina, en terminant de se rhabiller, et de tirer vers le haut la capricieuse fermeture.

-J’étais à mon poste, dans la salle des machines, quand ça s’est passé. Tout à coup, plus aucune lumière, et ce courant d’air. J’ai eut immédiatement le réflexe d’activer le scaphandre…j’ai bien fait, expliqua-t-il, en se levant doucement, pour ne pas brûler les étapes, ils…ils sont tous morts, n’est-ce pas?

Ce fut au tour du vice-amiral de hocher la tête.

-Nous avons des problèmes pour l’instant, il n’y a que très peu d’énergie en reste, nous ne pouvons que faire fonctionner les systèmes vitaux sur les niveau huit à dix. J’ai l’intention de démarrer une reconnaissance avec une navette, voir pourquoi les escorteurs ne montrent pas signe de vie. J’aimerais que vous veniez avec moi.

L’autre, encore un peu dépassé, bafouilla une seconde, avant de dire vivement, en se levant.:

-A vos ordres, Amiral!
-Tachez de trouver un peu de matériel dans les magasin qui n’ont pas encore étés vidés, puis rejoignez-nous au hangar 14.


Dernière édition par Syllas le Sam 21 Fév - 18:20, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeJeu 8 Jan - 20:11

Avec un « immédiatement », il termina par un nouveau garde-à-vous, et fila. Les deux officiers et le médecin eurent un sourire, puis ils laissèrent le praticien s’occuper des autres en retournant de nouveau à la partie passerelle de la salle de conférence. Le vice-amiral prit sa casquette, restée là, la lança sur un siège qui avait été poussé à l’écart pour qu’elle ne gêne pas sur la table, et donna ses dernières instructions:

-Le capitaine Setz restera donc ici pour superviser. J’espère revenir bientôt avec de bonnes nouvelles. En attendant, faite votre possible pour nous trouver plus d’énergie.

De nouveau, quelques « Oui, amiral » montèrent, et il put sortir, laissa son second prendre place, et se confronter aux dossiers du moment. Le hall de distribution du niveau neuf sur lequel on débouchait une cinquantaine de mètre plus loin était encore encombré d’une foule qui n’avait pas encore été affectée à une quelconque tache, et attendait que les gens de l’équipe de Setz viennent les chercher au compte-goutte. Syllas s’avança, et appela quelques noms, pour terminer de composer son groupe. Des officiers avaient fait l’infanterie de marine avec lui: quatre hommes en uniforme s’avancèrent.

-Nous partons en mission, déclara le vice-amiral, préparez-vous dans une des armureries, et rejoignez-moi dans le hangar 14.

Nouvelles confirmations, et ils partirent au pas de course en direction du magasin le plus proche. Le chef d’expédition fit un signe entendu à l’officier qui supervisait les taches, et prit le deuxième couloir à gauche, qui allait jusqu’à une des cages d’ascenseurs dont on s’était assuré que la nacelle se trouvait tout en bas. L’ouverture de la porte avait été agrandie, et un long plateau de duracier placé pour pouvoir marcher depuis le bord jusqu’à l’échelle d’entretien, sur le mur d’en face. En un bond, il fut dessus, et enfilait les échelons, vers le haut. Il y avait quatre ponts à monter depuis le neuf jusqu’au six, mais la gravité artificielle s’arrêta au-delà du huit. Il continua quelques mètres encore à la force des bras, pour ne pas être précipité dans le vide par une soudaine fluctuation du champ, puis tira son rétropropulseur de sa place sur l’arrière de la ceinture, et ouvrit ses circuits. Le projecteur balaya les parois noires de la cage, uniquement éclairée par quelques lumières de secours rouges ici, et, après que le vice-amiral ait lancé la machine, les rayons bleus jaillirent des deux ailerons, tandis qu’il sentait le souffle de l’air indiquant qu’il se déplaçait rapidement. Avec un angle serré, il quitta juste à travers la porte entrebâillée du niveau six, lui toujours plongé dans l’apesanteur, et où croisaient une multitude de petits objets électroniques, feuilles de papier, et toujours cette plante en pot absurde que personne n’avait eut la bonne idée de pousser dans une pièce afin de dégager le chemin. Mais Syllas n’avait pas vraiment le temps pour cela, et passa allégrement, prenant au carrefour suivant la direction du hangar à navette. Celui-ci se situait au bout d’un corridor très large, adapté pour le transport par chariot à sustentateur de ce qu’on débarquait depuis les petits astronefs afin de ravitailler le bord. Les trois battants de la porte blindée étaient entrouverts, et le panneau de contrôle volait à quelques mètres de là, révélant les quelques boutons clignotants, et une batterie, dont l’indicateur de réserves était passait au jaune.
Tout en réduisant la puissance du rétro, il passa la porte, révélant un vaste hangar sur deux étages, déplafonné. Depuis l’entrée, on aboutissait sur une passerelle de duracier, quatre mètres au dessus des box dans lesquels étaient rangés les navettes, au nombre de cinq à bord. Ils étaient séparés par des rampes d’élévations et des bornes d’entretients, dans lesquels on trouvait outil et ravitaillement, et, au-delà, un petit terre-plein permettait de manœuvrer vers la grande sortie du hangar qui leur faisait face, actuellement fermée par deux battants de durane. Pour l’instant, tout cela était plongé dans la pénombre, uniquement éclairés par la lueur bleue de secours en provenance de la passerelle supérieure. Après s’être arrêté un instant, ayant passé le garde-fou, lévitant au dessus d’une 23 en panne, et jeta un coup d’œil à gauche puis à droite. Là, on voyait quelques lumières. Manifestement, on avait mis en batterie un projecteur supplémentaire. C’était le box juste en dessous du centre de contrôle, poste fermé par des verrières, comme suspendu au dessus du reste du hangar. Il relança son rétropropulseur, pour arriver au dessus, et descendre. Ici, deux navettes étaient rangées côte à côte, Une Wahl, et une 23, autour de laquelle régnait une relative agitation, avec une demi-douzaine de personnes, dont plusieurs travaillant sur le moteur, dont le panneau d’entretient extérieur était ouvert, les autres, visibles à travers la verrière, étaient au commandes, et procédaient manifestement à des essais. Ce petit astronef d’une trentaine de mètres de longueur avait une carlingue assez allongée, entourée respectivement à la proue et à la poupe d’une paire de moteurs à impulsion, des cylindres trapus et d’allure puissante, à côté desquels quelques tuyaux dépassaient parfois. Quelques hublots rares étaient installés, mais seule la verrière de l’avant permettait vraiment de voir à l’intérieur. Il y avait de la place pour une grosse dizaine de personnes tout au plus, c’était un petit modèle.
A côté en revanche, le Wahl était bien plus grand, sous forme d’un triangle, le cockpit à l’avant, l’habitacle s’élargissant au fur à mesure, pour se terminer par deux ailerons, au dessous desquels on distinguait des motorisations bien plus performantes que sur son petit frère. A bord, seule une lumière était visible depuis un des hublots de l’arrière.
Les ingénieurs en uniformes noir et rouges flottaient, à quelques mètres de leurs rétropropulseurs, au milieu d’un nuage d’outils et de pièces de rechange lévitant également doucement dans l’air, ce qui, malgré les nouvelles posibilités de rangement ainsi offertes, n’était pas particulièrement confortable, et les travaux n’étaient manifestement pas spécialement accélérés.
A peine était-il arrivé qu’il voyait Ishaa émerger du battant coulissant ouvert donnant accès sur l’intérieur, dont on voyait les murs gris parsemés de tuyaux et de voyants. Un sourire au lèvres, elle ne fit qu’esquisser un salut, ayant compris la futilité de tenter la chose plus loin:

-Amiral! S’écria-t-elle, j’ai de bonnes nouvelles. Nous avons réparé les quelques dommages au 23, et il est prêt à décoller. Nous pourrons même activer la gravité artificielle à bord en vol.
-Bien, dit Syllas en stoppant son rétropropulseur devant sa jeune subordonnée, nous allons le prendre pour aller à la rencontre de nos escorteurs, s’ils sont encore dehors. Quelques hommes vont arriver bientôt pour nous prêter main forte…

A côté, le technicien en charge de la réparation referma le battant, et ordonna à ses collègues de ramasser, avant d’un bref coup de rétro, arriver devant le chef d‘expédition:

-Amiral, nous avons terminé avec le 23B. Elle est pleinement opérationnelle, expliqua-t-il brièvement.
-Bon, vous allez pouvoir vous occuper de raccorder le Wahl au réseau du hangar pour pouvoir ouvrir les portes, et actionner les pompes à oxygène.

Ce fut au tour de l’ingénieur de sourire.

-Nous avons anticipé cela; un de mes hommes est monté à bord, et a terminé de le relier avec un câble de transfert que nous avons trouvé dans la remise de cet étage. Si le lieutenant Tender nous envoie un petit surplus, nous sommes parés.

Syllas eut un hochement de tête satisfait, en essayant de fixer dans sa mémoire le jeune technicien.

-Excellent initiative, nous pourrons partir sans perdre de temps. Allez activer le réacteur du Wahl, et préparez-vous à ouvrir les portes extérieures.

Son interlocuteur opina, et donna quelques ordres brefs dans sa com.. Bientôt, trois autres personnes de l’équipe techniques émergèrent de la carlingue du 23, et, avec le collègues de l’extérieur, reprirent les rétropropulseurs pour se diriger respectivement vers le centre de contrôle et la plus grande navette. Finalement, activant son scaphandre, le chef d’équipe fit un dernier signe à ses supérieurs, et repartit à son tour.
A peine s’étaient-ils éloignés que le groupe de soldats que Syllas avait appelé arrivait, en tenue d’abordage, aussi vite que leurs permettaient les rétropropulseurs. Leur supérieur leur donna quelques ordres brefs, et ils embarquèrent à sa suite. Finalement, le jeune Zikosler arriva en catastrophe, et, pénétrant sans s’arrêter à travers le sas encore ouvert de l‘astronef, dit sur un ton désolé:

-Toutes les armureries du niveau neuf étaient vides, j’ai dû aller au huit. Je suis désolé…

Syllas ne lui laissa pas le temps d’en dire plus, faisant signe de se dépêcher d’entre complètement, ce qu’il fit. D’un autre geste, il ordonna à Ishaa de fermer le battant extérieur. L’instant d’après, celui-ci coulissait sur ses gonds magnétiques, et quand il fut en place, une légère lueur bleu apparu sur les bords pour tester l’isolation, isolation qu’un voyant vert confirma comme bonne. Les deux officiers, utilisant toujours leurs rétropropulseurs, mais à vitesse réduite, quittèrent le sas, dont la deuxième porte se referma derrière eux sans bruit. Ils se retrouvèrent dans le corridor central, qui partait du cockpit, tout à l’avant, jusqu’à la large chambre de stockage arrière, et était flanqué des deux côtés de portes donnant sur un petit laboratoire de bord, des cabines de l’équipage, et un central astrométrique. Vers le milieu ce couloir s’élargissait pour établir comme un semblant de pièce à vivre, dans lequel se trouvaient pour l’instant les quatre militaires d’infanterie de marine qu’il avait connu quelques années plus tôt en mission commando sur Sido, et Zikosler, relâchant dans l‘apesanteur son module, manifestement pas complètement à l’aise dans autant d’attirail de combat sur lui. Mais il s’attirait pas de regard narquois des autres comme ça se serait vu ailleurs; Syllas ne tolérait pas ça, car pour lui, disait-il toujours, il n’y avait qu’un seul équipage, où chacun avait sa place et ses compétences. C’était assez différent des conceptions habituelles de la Garde, formation d’élite à terre, qui considérait avec mépris les soldats des régiments de ligne normaux, et encore plus les conscrits. Il en allait de même souvent avec l’infanterie de marine, et le terrible colonel Kurtz, instructeur à l’Académie de Cimeria de celle-ci depuis des décennies, en était un des chantres, qui traitait les membres des autres formations embarquées spéciales, comme l’infanterie coloniale, et les équipages réguliers, avec un manque de politesse allant parfois jusqu’à l’insulte, sous-entendue et même ouverte. Cette pensée s’était implantée au fil des ans et des interventions lesquelles ils s’étaient illustrés comme des combattants hors pairs et essentiels de l’appareil militaire de la marine, mais avait lentement tendance à penser qu’ils pouvaient se passer du reste, de artilleurs, des navigateurs, des techniciens, etc... Au début, Syllas, alors tout juste commandant en second sur l’UFGS Gisco, effectuant alors à la terrible Académie son stage obligatoire pour monter davantage en grade, n’y avait pas prêté attention, tachant juste de de ne pas provoquer Kurtz, qui s’avérait le pire des ennemis, capable de ruiner une carrière d’un trait de crayon, mais il avait été placé devant le fait lorsque son ami Horatius, au hasard d’une rencontre lors d’une manœuvre, s’était vu traiter avec une hauteur insultante par plusieurs officiers de la Formation. Ils avaient alors essayés par tout les moyens de le torpiller après que l‘officier ait riposté avec aigreur et honneur, ce qui avait indigné Syllas. Mais, heureusement, Von Heigins avait de bon soutiens, était opiniâtre et au moins aussi redoutable que Kurtz. Plusieurs de ses détracteurs reçurent une « promotion » au musée militaire de Mosta, pour faire de guides à des touristes Jadéens en manque d’émotions fortes sur les reproductions holographiques des plus grandes batailles, pendant qu’une mise en demeure demandait à l’instructeur de ces prétentieux d’éviter d’introduire « la subversion dans les forces armées de l’Union ». Le lendemain, il avait paru sur le camp, la peau d’un jaune de rage impuissante, rage qui fut augmentée lorsqu’il apprit, que quelques jours plus tard, l’obtention par Horatius du rang de capitaine, sans passage dans l‘infanterie de marine, ayant réussit à déroger par les coloniaux, qui aimaient toujours s‘arranger pour nuire à leurs rivaux. Dès qu’ils se retrouvèrent, Syllas et Von Heigins purent discuter, en riant du tour qu’il avait joué, et de l’humiliation de l’infanterie de marine clanique.
Suivi de Ishaa, il traversa l’axe central jusqu’au cockpit, en faisant signe à Zikosler de les suivre. L’avant n’était pas particulièrement spacieux, mais on n’était pas non plus trop serré sur les trois sièges confortables le garnissant, entourés d’une série de commandes, et d’un tableau de bord sur lequel trônait un casque de timonerie pour les vols de précision. Ils n’en auraient pas besoin; sur un geste du Vice-amiral, Ishaa le prit, et le cala derrière, entre deux compartiments de rangement.
Soudain, dans le grand hangar, plusieurs panneau lumineux rouge et blancs s’activèrent, en clignotant, tandis qu’une sirène retentissait, parvenant très étouffée dans l’habitacle. Depuis les côtés de la verrière du cockpit, ils virent les portes étanches se refermer lentement, tandis que des techniciens en scaphandre sortaient du Wahl, se dirigeant vers la salle de commande. Là haut, une petite lumière s’était allumée, indiquant qu’elle était occupée et active. Puis, après quelques instants, tandis que l’air se raréfiait peu à peu dans le hangar, les deux énormes battants fermant l’accès à l’extérieur se séparèrent lentement. D’habitude, un champ de force puissant permettait de maintenir l’air à l’intérieur, ne nécessitant donc pas toutes les mesures de sécurités et l’activation des tenues pressurisées.
Entre temps, Syllas n’avait pas chômé. Ses doigts, agiles, assez proches de son pianiste de frère, avaient parcouru le gigantesque clavier s’étirant de tout les côtés, tandis que, un à un, les écrans holographiques s’activaient, donnant diverses indications. Un en particulier, au centre du cockpit, représentait leur astronef, flottant doucement dans le hangar.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeJeu 8 Jan - 20:12

-Notre tuyère est sous tension, annonça Zikosler en lisant ses indicateurs, où les chiffres défilaient rapidement, nos sustentateurs fonctionnent, les commandes, le carburant, les communications…tout est OK.

En observant les informations s’affichant sur son propre poste, Ishaa se déclara contente de retrouver la couleur blanche et froide des ordinateurs:

-Les inhibiteurs gravitationnels se mettent en marche…

Effectivement, lentement, ils sentirent leurs corps se tasser contre les sièges, tandis que d’un geste sec, le vice-amiral rattrapait son rétropropulseur, pour éviter qu’il tombe brutalement au sol, et l’y posa, tout en déverrouillant la barre.

-Allons-y, furent ses seuls mots alors qu’il poussait l’astronef, lentement en dehors du hangar, espérant que bientôt les techniciens pourraient remettre les communications en état.

Prudemment, il engagea la 23 dans l’ouverture, puis, après avoir reculé une seconde, donna un coup de propulseur. L’instant d’après, ils quittaient le flan de l’immense croiseur.

-Alors, où sommes nous? Et à quoi ressemble notre Kanopus de l’extérieur, lieutenant? Demanda-t-il à Ishaa, qui avait tout juste eut le temps d’activer le moniteur holographique des scanners externes étendus, tandis que l’image représentant la navette dans le hangar s’était effacée.
-Heu… Bafouilla celle-ci quelques instants en lisant rapidement les données dont elle était submergée, quadrilatère 45 de la grille 19. Orbite stationnaire d’astéroïde 45, amiral. Altitude: 250 kilomètres. Vitesse du Kanopus: cent trois nœuds, assiette: 14/13. Aucun dommage visible à la coque extérieure.

Effectivement, peu à peu, tandis que Syllas redressait la navette, calquant sa trajectoire sur celle du croiseur, ce dernier apparut entièrement derrière la verrière. Sa forme se rapprochait un peu de celle de leur astronef, comme un immense triangle s’aplatissant et s’élargissant vers sa base, où l’on distinguait la propulsion derrière les immenses panneaux des réflecteurs. Aux deux tiers de la longueur vers l’avant, deux larges ailerons sortaient de la coque, pour former comme une paire d’ailes supplémentaires, nécessaires à la stabilité atmosphérique en cas de disfonctionnement des sustentateurs. Aussi improbable que cela paraisse, le Léviathan pouvait tout à fait voler sans antigravité. Enfin, tout à l’avant, il y avait un nez légèrement arrondi, bardé de capteurs et de systèmes sophistiqués. La passerelle, quant à elle, se trouvait un peu plus en arrière, entre lesdits ailerons, mais on ne la voyait pas de l’extérieur; il y avait un pont entre l’espace et le centre de commandement de l’astronef.

-Il est quand même bien beau, murmura Zikosler en observant le Kanopus, tout en gardant le vice-amiral à l’œil.

Mais Syllas hocha la tête pour approuver, avant de finalement se détacher pour retourner à ses commandes. Il vérifia plusieurs indicateurs de vélocité et d’énergie, puis lança la 23 sur une trajectoire différente, s’éloignant du croiseur relativement rapidement.

-Où se trouvent nos escorteurs? Demanda-t-il à Ishaa, tout en pilotant.

Cette fois, elle avait anticipé, et lancé quelques instants auparavant un scanner de toute la zone.

-Nous avons un marqueur sur tribord. Distance: douze mille neuf cent trente kilomètres. C’est le Steglitz du capitaine Aliakmon. Il se situe au point d’évacuation de la trajectoire de libération telle qu’elle était au moment où nous avons perdu le contact.
-Signes de vie? D’activité?

Ishaa hocha lentement la tête en un mouvement très négatif et inquiet—elle avait des amis à bord du Steglitz—que Syllas ne pouvait pas voir, et déclara, d‘une voix néanmoins neutre:

-Négatif, rien sur cette distance. Mais nous n’avons pas beaucoup de puissance pour effectuer des mesures sur cette distance; notre phalange de bord peut se tromper.

Le vice-amiral eut un « hum » gêné et vaguement inquiet, mais lui aussi, poursuivit sans autre marque d’émotion:

-Et le Regulus? Vérifiez à la position où nous l’avons laissé!

Fébrilement, elle fit ce qu’il avait dit, mais les résultats de l’ordinateur furent clairs:

-Nous n’avons rien d’autre dans le coin. Ce secteur est vraiment vide; il y a le 45VC, et, aux points L1 et L2 en tout six troyens. Sinon, il y a un rocher satellisé, mais il est trop petit pour cacher quoi que ce soit.

Nouveau « hum » perplexe de la part du chef d’expédition, qui, après avoir programmé un objectif pour son ordinateur de navigation, avait relevé le nez, et examinait d’un air songeur le noir de l’espace, où seules quelques étoiles brillaient tant bien que mal. L’endroit était vraiment désolé; la planète habitée la plus proche, la colonie de 11CD-G9, qui n’avait pour l’instant pas de nom officiel—elle avait été terraformée a peine deux ans auparavant, et comptait à peine mille habitants, de véritables pionniers. En fait, le seul monde de cette galaxie que l’on pouvait plus ou moins se sentir dans le même univers qu’à Tsarysyn ou Christiansa était Grytviken, capitale de toute la galaxie 9, galaxie qui totalisait à peine neuf cent millions d’habitants. De façon générale, la colonisation était récente. Le dernier gouvernement ayant eut de la poigne avait donné l’ordre d’installer les trop pleins de population ici afin d’ouvrir de nouveaux marchés, libérer de nouvelles ressources, augmenter le territoire et la population nationale, et bien entendu, servir la science par l’exploration. Mais depuis cinquante ans, l’immense entreprise stagnait, à cause des incapables actuellement au pouvoir. Chose assez extraordinaire, l’expédition Syllas était la première dans cette moitié de la galaxie 9 depuis cent ans. Jamais encore on ne s’y était risqué depuis le grand Stepenyn, alors que depuis près d’un siècle l’homme est installé à deux pas.
Entre temps leur astronef avait fait la plus grande partie du chemin , et on voyait le Steglitz de près. C’était un escorteur de la classe Halifax, formé d’un corps central trapu dont la longueur atteignait tout juste le quart de celle du Kanopus, qui était flanqué à la proue et à la poupe de deux lourds modules de sustentations, et également support des systèmes de charge DP. Ces explosifs spéciaux permettaient d’empêcher toute fuite ennemie sous couvert de dispositifs de camouflages comme certains étaient installés chez des astronefs très sophistiqués florissant ici et là dans l’univers depuis quelques décennie. A la moindre suspicion, on tirait quelques charges de profondeur, qui endommageaient irrémédiablement les systèmes de camouflage, forçant l’espion à se révéler, et à essuyer le feu de l’escorte.

-Rien de neuf sur les scanners? Demanda le vice-amiral, en positionnant grâce à la poignée de contrôle leur navette juste sur le flan du Steglitz.
-Négatif, toujours rien. On dirait bien que plus rien ne vit à bord. Ni énergie, ni vie. Sauf si tout nos détecteurs sont faussés, y a plus rien de l’autre côté.

Syllas passa sa main droite dans ses cheveux, tout en laissant ses yeux vagabonder sur le tableau de commandes, respirant profondément. Ishaa d’une part et Zikosler d’autre part avaient fait pivoter leurs sièges, et lui faisaient face.

-Bon, finit par lâcher le Vice-amiral, il faut aller voir ce qu’il y a. Au moins pour récupérer un des blocs mémoires de l’ordinateur de bord, sur les dernières minutes, afin de savoir ce qui s’est passé.

Prestement, il se leva, et, debout, entra quelques commandes. Un écran holographique apparut, traversant presque son bras, représentant le flan du Steglitz, et leur navette. Sur une autre injonction de Syllas, un quadrilatère bleu balaya l’image, laissant derrière lui trois points mis en évidence en étant entourés de petits angles droits jaunes. De nouveau, les doigts agiles et rompus à l’exercice du pianotage sur des commandes tordues du chef d’expédition parcoururent la console de bord, et, lentement, sur l’hologramme comme dans la réalité, la 23 se rapprocha d’un des endroits signalés, vers la partie supérieure, et, arrivée en quelques instants à son niveau, entreprit tout doucement de s’approcher. Alors que Syllas se tourna vers ses subordonnés, une vibration traversa la coque, ce qui n’était pas sans leur rappeler l’incident lors de l’exercice:

-Nous allons pouvoir y entrer un pont en dessous de la passerelle. Les réserves mémorielles de l’ordinateur de bord se trouvent à l’étage inférieur. Venez.

Il récupéra son rétropropulseur, posé en dessous de son siège, et quitta le cockpit, immédiatement suivit par Ishaa et Zikosler. Dans le salle centrale, les militaires n’avaient pas l’air d’avoir trop bougés, et attendaient patiemment, les uns adossés aux battants des rangements muraux, les autres simplement debout, dans ce calme froid habituel dans les unités d‘élite. Ces mêmes hommes n’étaient pas beaucoup plus nerveux quelques années plus tôt, lors de l’assaut contre Sido, lorsqu’ils avaient atterri au milieu d’une population pour le moins décidée à se défendre contre ces intrus—nonobstant le fait que les pirates originaires de leur planète causaient 20% des actes les plus graves à al frontière de l’Union dans ce secteur. Beaucoup dese soldats à l’assaut étaient morts à cause d’une mauvaise gestion tactique du commandant et du timing absurde choisi par la gouvernement démocrate.
Ils esquissèrent un garde-à-vous à l’arrivée du Vice-amiral, mais ne dirent rien. Celui-ci se dirigea immédiatement vers une des réserves, dont il ouvrit le battant-tiroir. Tout en fouillant dans les casiers de classement, il donnait ses instructions d’une voix forte et déterminée:

-Nous sommes donc dockés un niveau au dessus de l’objectif. Il n’y a aucune énergie à bord du Steglitz. Plus de soutient de vie, de gravité artificielle, et aucun indice sur la présence d‘éventuels survivants. Nous risquons de rencontrer des cadavres dans un sale état, et d’avoir une progression difficile, bien pire que tout à l‘heure sur la Kanopus. Un homme restera à bord.

Il sortit deux poignées de batteries supplémentaires, des modèles différents de ceux utilisés plus tôt sur le Kanopus, plus puissants et ayant davantage d’autonomie, et les lança, d’abord aux soldats, qui les attrapèrent vivement, pour les fixer à leur ceinture. Chacun en reçut deux, Syllas en reprenant à chaque fois, puis à Ishaa et Zikosler, avant de se servir soi-même, en ajoutant un troisième au cas ou. Puis, il ferma cette armoire, pour en ouvrir une autre, et en tirer un lourd fusil à impulsion, un FAM1. Le mettant en bandoulière, il s’écarta, et laissa les quatre hommes d’infanterie de marine se servir. Ishaa suivit, mais ne prit qu’une arme moins lourde, un pistolet mitrailleur NC2. Elle n’avait jamais été très adroite avec les énormes machines à tuer, et préférait faire appel, quand c’était nécessaire, à des armes plus petites, qu’elle était capable d’utiliser. Zikosler s’empara sans empressement d’un pistolet à impulsion SIP, car il avait perdu le sien dans la salle des machines, et d’un fusil d’assaut laser AZ, un modèle assez vieilli, mais plus maniable que les FAM, neufs. De toute façon il avait appris à tirer avec son Grand-père. Sur Hooykaas, c‘était plus que de la culture, c‘était un style de vie. Il paraissait même qu‘on pouvait tuer du gnou à la mitraillette à impulsion là-bas. Finalement, quatre puissants projecteurs auxiliaires firent leur apparition, et intégrèrent les ceintures de Syllas, de Ishaa, et de deux soldats.
Le passage à l’armurerie ainsi terminé, Syllas referma, désigna celui qui resterait, en lui conseillant de se tenir prêt, le cas échéant, à le aider, et prit la tête de leur colonne, jusqu’à l’arrière, où un témoin sur l’ordinateur du sas annonçait que le lien avait été correctement établi avec l’écoutille du Steglitz. Après un dernier hochement de tête à leur adresse, il enfonça une commande, ouvrant la première porte, tout en activant le casque de son équipement. Ils entrèrent à sa suite, faisant de même, et bientôt le battant se refermait, tandis que le vice-amiral gérait la procédure depuis le panneau de contrôle intérieur. Les micropompes firent leur travail, et rapidement, l’air fut pompé dans les ballasts, ne laissant que le vide autour d’eux. Puis, tout d’un coup, la gravité artificielle s’arrêta, les faisant soudain se soulever dans l’espace. Instinctivement, déjà, ils allumèrent leurs rétropropulseurs, conservés depuis le Kanopus sur soi, dont les projecteurs balayèrent bientôt les parois de métal gris du sans. Et la porte extérieure s’ouvrit, en même temps que celle du sas du Steglitz. Ils traversèrent rapidement, aboutissant à l’extrémité d’un corridor totalement obscur, que seuls leurs projecteurs éclairaient. Après un dernier regard en arrière, où un petite lampe brillait près du panneau de contrôle de la navette, ils s’élancèrent dans l’épave sans vie de l’UFGS Steglitz.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeVen 9 Jan - 20:00

[HRP]Je conseille de descendre jusqu'à la fin de ce chapitre, et de copier le "lexique" dans un bloc note, pour pouvoir l'afficher facilement. Les lettres et chiffres entre parenthèses renvoient vers ce lexique. Tout ça, c'est pour la floklore.[HRP]


L’Empire survit! Gloire à la République! Gloire à la Sérénissime!
Attribué à Frederico I Zen, premier Doge de Christiansa, au sujet du titre ducal de « Empereur d’un quart et demi de Romanie ».



-- -- --


An 3859, E.d.U (Eon de l’Union).
Ressirgo IV



Le contremaître, préoccupé et sombre, lança un regard méfiant à la paroi directement à droite de l’entrée principale—il en existait une autre, bien plus étroite et moins praticable, qui, au terme d‘un interminable couloir sinueux et instable, aboutissait de l‘autre côté du plateau calcaire, et seules deux personnes en plus de lui étaient au courant de son existence—, puis monta l’échelle de duracier pour quitter l’excavation, et enfin aboutir dehors.
L’air y était très sec, et, malgré les remblais, d’épaisses langues de sable s’élançaient vers la petite fissure qui était la seule entrée praticable. Une demi-douzaine de locaux, levés parmi les siens de toute urgence quelques heures plus tôt pour combler la ravine qui menaçait l’entrée de l’extérieur et étayer un dangereuse paroi très instable retenant plusieurs tonnes de sables de submerger le trou que par des bouts de ficelle, travaillait sous le soleil de plomb du désert.
T’ser replaça son cache-visage pour être à l’abri de ce dernier qui dardait de ses puissants rayons le plateau sablonneux qui surplombait le désert occidental, et termina de sortir de la ravine, après avoir échangé brièvement quelques mots en langage Tessak avec l‘homme chargé de la dure besogne de mener ses troupes contre les assauts sable et du sel. Le plateau continuait à descendre en pente douce à partir d’ici pour aboutir à une zone plus vallonnée, puis, finalement la mer. Le sol avait toujours été très salé ici, et rien ne poussait, même directement en bordure de l’eau. L’approvisionnement du camp était un vrai casse-tête, le premier puit potable étant à des kilomètres à travers les dunes. Une fois par semaine un hélijet venait apporter les réserves de nourriture, de nouvelles et d’autres machines. Car le sable très fin de Ressirgo entrait dans toutes les fentes et orifices, et paralysait la mécanique très rapidement, forçant à revenir aux moyens humains normaux. Seuls les robustes hélijets, conçus spécifiquement pour l’endroit, s’en sortaient s’en trop de casse. Mais déjà trois foreuses avaient rendu l’âme sur le chantier, et les malheureux travailleurs avaient dus reprendre les pelles traditionnelles pour déblayer les dégâts qu’avaient causés plusieurs secousses sismiques. Car, bien entendu, le chantier se trouvait dans une zone géologiquement active. T’ser l’avait toujours dit, ce chantier était une ruine, il n’en ressortirait rien, en plus, le moral des ouvriers était pour d‘autres raisons évidentes au plus bas, et si la paye n‘avait pas été grasse en fin d‘exercice, tout le monde aurait déjà mis les voiles. Mais c’est qu’on s’entêtait, et personne ne l’écoutait, lui, un Tessak qui pourtant était celui qui suivait les chantiers depuis des dizaines d‘années, qui en avait vu d‘autres? Non, non, on n’avait pas le temps…
Avec un soupir, il lança un dernier signe aux gens occupés à déblayer, puis entra dans la petite ville de tentes qui s’était installée ici depuis trois semaines. Il slaloma un instant, jeta un coup d’œil dans plusieurs d’habitations, puis, voyant qu’il n’y avait personne, alla droit à la tente d’état-major, comme on l’appelait maintenant, d‘où sortaient quelques brides de musique indéfinissable pour ses oreilles d‘homme du désert, habitué uniquement au petit luth de bois duquel jouait son peuple depuis des générations.
Manifestement, il n’y avait pas grand monde. Il était vrai qu’une bonne partie étaient allés en ville avec l’hélijet de la veille refaire les stocks. Le professeur Hugen, responsable de la partie surface du chantier, grattant lentement son menton glabre, était installé sur une chaise pliante en duranium, confortablement, même s‘il suait terriblement, examinant quelques artefacts trouvés deux jours auparavant avec une optique, tout en fumant doucement une pipe qui aurait, au même titre que les trouvailles, eut sa place au musée. A côté de lui, un jeune étudiant à la peau d’un rouge terrible à cause des coups de soleil, chaussé de grosses lunettes, triait des tessons d’une main fébrile, l’œil à demi fermé dans la chaleur déjà lourde de la fin de matinée, manifestement épuisé. Enfin, de l‘autre côté, Rea Syllas, chargée par le chef d’expédition Dimitiev des souterrains, debout, le haut du corps déchargeant son poids à travers les mains posées sur la table, observait fixement la reproduction de plusieurs anciens bas-reliefs, très concentrée. Plusieurs grosses gouttes de sueur brillantes coulaient depuis son front, entre des cheveux blonds clairs mi-long en désordre, sur la peau très bronzée par des mois sur Ressirgo du visage, pour finir par lentement goutter depuis le menton. Elle avait ouvert sa veste très légère, laissant voir son maillot de corps gris moulant constellé de taches de transpiration, et posé de côté son cache-visage, pour plus de confort dans l’atmosphère lourde de la tente.
Hugen cessa de fumer son tabac en voyant entrer le contremaître, et dit d’une voix pâteuse, comme toujours les jours de grosse chaleur:

-Ah, T’ser, entrez. J’espère que vous nous apportez de bonnes nouvelles, car de mon côté, les poteries pour Elisa‘ n‘avancent guère.
-Je ne sais pas, S‘rella (A), répondit avec sa voix caverneuse T’ser, utilisant la dénomination en langue Tessak de respect et retirant son cache, mais il va falloir que vous veniez.

Rea releva doucement la tête de ses bas-reliefs, et demanda, avec l‘accent régional, et rajoutant le mot servant à interpeler:

-Qu’y a-t-il, T‘rara (B)?
-Après que la dernière machine ait lâché ce matin, les ouvriers ont tous eut très peur, S‘relii (A). Ils ont néanmoins continué un moment. Mais maintenant, ils se sont tous enfuis. Je n’ais même pas eut le temps de leur demander, ils hurlaient de terreur. Et le jeune professeur Zimmer a disparu, plus personne ne l’a vu au fond, ni en surface.

Hugen fronça les sourcils:

-Encore? Ca fera la cinquième fois depuis le début de nos fouilles ici! Je n’ais jamais vu ça sur un chantier, quelle bande d‘imbéciles, dire que nous les payons! Par contre, Zimmer, il ne faut pas s‘étonner quand on connait le bonhomme…
-Ca n’est pas un chantier comme un autre, et S’rella (A) Zimmer n‘aurait je ne pense pas fait ça, murmura T’ser d’un air sombre, en posant machinalement la main sur la dague traditionnelle au manche d’onyx qu’il portait à sa ceinture, dans les replis de l’étrange vêtement bleu noir de chef de groupe, s‘éloignant de plus en plus du galactique pour aller vers le patois Tessak, et le plateau est un lieu secret! Les hommes sont nerveux, le moindre petit incident les hérisse. Moi-même ne peut pas dire que cela me plaise ce qu‘on fait, Dj’Tak Ka’ba (C), mais je fais confiance à S‘relii Syllas. Vous savez que toutes nos croyances placent les esprits de la terre, les Yh’zins (D), ici, les déranger n‘apporte que le mal!
-Mais enfin, ils voient bien qu’il n’y a rien! S’indigna Hugen en posant sa main libre sur une hanche, c’est de la science, et nous ne sommes pas des vandales! Ah la bêtise humaine…

Rea dégagea ses bras de sa veste pour ne la laisser que sur ses épaules, flottant doucement, puis déclara, le contralto ressortant étrangement moins en galactique qu’en Tessak:

-Jerry, vous savez bien que pour les Tessaks, la science et la religion sont confondus. Et Zimmer n’est pas rassurant du tout pour eux, vous le connaissez!
-Enfin, Rea, il va pourtant falloir les remettre au travail, encore. Je veux bien m’y mettre moi-même au déblayage de la caillasse si ça les motive, mais nous n’avons plus qu’une semaine au bled! Le temps presse, et si nous ne trouvons rien de concluant d’ici là, tout cela sera abandonné! Tout ça, tout ce travail pour rien!

Il claqua sa pipe contre la table, frustré:

-Nous allons être la risée de l’université! Gobain ne nous manquera pas, et nous y laisserons des plumes, tout ça à causes des superstitions au sujet de ces histoires à dormir debout de Yh’sins (D)!
-C’est bon, je vais y aller, tacher de voir ce qu’il en est, déclara, lassée, Rea, tendant déjà la main vers sa puissante lampe ionique et son multicapteur spécial, craignant également un peu que l‘attitude de Hugen fasse éventuellement empirer les choses, en hérissant le contremaître, qui pouvait pousser à leur fausser compagnie tout les travailleurs, du jour au lendemain.
-Merci, je m‘y serais bien collé, mais il faut que je trouve quelque chose dans ces poteries, sinon Elisabeth va s‘emporter au retour, soupira le professeur en jetant un regard assassin à sa besogne, Jules n‘aura qu‘à venir avec toi.

Le professeur avait dit cela sur un ton à la fois soulagé, plein de gratitude et las. Entendant sa nouvelle affectation, l’étudiant se leva à son tour, laissant son classement de morceaux terreux, pour prendre également une ceinture avec des outils, pour rejoindre T’ser à l’entrée de la tente, où Rea attendait également, les mains sur les hanches.

-J’espère être de retour bientôt, déclara-t-elle, avant de sortir à la suite du contremaître, laissant à peine à Jules Liemsa, originaire de Rhode, le temps de se préparer.

Rhode était un monde industriel et relativement froid, et elle se serait mentie si elle n’avait pas avoué à elle-même qu’elle ne prenait pas une once de plaisir sadique à le voir souffrir de la puissante chaleur du désert occidental pour sa première expédition, comme elle-même lors de sa première fois, alors qu‘elle ne faisait que débarquer de Teeslavonia. En plus, on était dans un des endroits les plus chauds et inhospitaliers de Ressirgo, une région désolée, uniquement habitée au niveau des petites oasis côtières par les Tessaks. Ce peuple, le même au niveau ethnique que ceux qui bâtissait de grandes villes blanches de l’autre côté des montagnes, dans les plaines fertiles, fascinait la femme de l’Amiral, qui parlait couramment leur langue, apprise au fil des expéditions dans le coin, étant une des rares personnes étrangère à avoir une pareille maîtrise, et également cette proximité culturelle. Ainsi, après un accident, elle s‘était retrouvé pendant des semaines au milieu d‘eux, et c‘est à peine si on l‘a reconnue à son retour à Ressirgo-City. Près d’un an avait été nécessaire, sur Christiansa, pour que sa couleur de peau habituelle soit plus ou moins restaurée. Mais, au-delà de cela, elle n’était plus la même…
Elle faisait partie depuis toujours des gens dans leur secteur de l’université de Christiansa qui préféraient de loin les campagnes, et essayaient le plus souvent de fuir le travail interminable entre les livres, les ordinateurs, et les artefacts au retour, dans les caves du complexe universitaire, qui pourtant composait la majeure partie de l’archéologie et de l’ethnologie. D’ailleurs, beaucoup de monde dans le métier ne l’appréciait pas du tout à cause de cette nature plus aventureuse que studieuse, et sa relation avec Nikolaï avait fait jaser dans un premier temps, avant de se tasser finalement, en particulier à cause de l’influence grandissante de son ami Von Heigins, mais elle s’en contrefichait. Sa philosophie était de vivre intensément ses intérêts et passions, au diable les autres et le reste.
Un regard par-dessus son épaule lui appris que Jules les avaient rejoint. Ils traversèrent en troisième vitesse le camp déserté par travailleurs et universitaires, pour se diriger directement vers la fosse, en silence. Les Tessaks n’étaient pas très loquaces, et Rea n’avait rien à ajouter pour l’instant.
Les ouvriers s’étaient de nouveau rassemblé en un groupe devant la rampe en bois servant à descendre. L’un d’eux s’avança, et déclara d’un air aussi sérieux que terrifié quelque chose à T’ser que Rea n’entendit pas. Le contremaître hocha la tête avec désapprobation, et répliqua une série de phrases brèves à voix basse. Le groupe se scinda en deux, laissant libre le passage vers la rampe, en murmurant lentement.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeVen 9 Jan - 20:01

-Que ce passe-t-il, professeur? Demanda Jules.
-Hum…je crois qu’ils prient, expliqua Rea en tendant l’oreille aux paroles, avant de grimper sur la structure: Allez, on descend.

Au centre du cercle formé par des linteaux de bois et de métal retenant le sable du plateau, la fosse faisait cinq à six mètres de profondeur. Tout en bas, une énorme arrête de pierre émergeait, avec un large trou, à l’origine une fissure, renforcée et agrandie par commodité, béant sur un côté.
T’ser descendit en premier les quatre mètres supplémentaires de l’échelle, à l‘intérieur. Rea, agile, le suivit, et sauta sur le sol sablonneux de l’antichambre. Ici, l’air était épais à cause de la poussière soulevée par les machines et travailleurs, même si l’atmosphère était bien plus fraiche. La fissure dans les parois épaisses d’un mètre par endroit donnait assez de lumière pour voir l’intégralité de la vaste salle. Toute en longueur, elle s’enfonçait sur leur gauche, et était encombrée des torrents de sables qui tombaient des diverses ouvertures plus ou moins grandes sur les côtés.

-Kopac D’ver (E), déclara T’ser, en prenant la direction du fond, alors que Jules était arrivé, et que Rea lui traduisait brièvement par un signe vers l’endroit où se
dirigeait le Tessak.

Le passage à travers l’épaisse cloison granitique du fond se faisait sur le côté, où les foreuses avait ouverts. une petite excavation. Rea alluma sa lampe, et s’y engagea, toujours à la suite du contremaître.
Le passage, large d’un mètre et à peine plus haut, continuait assez longtemps, puis aboutissait à la première salle. Celle-ci, circulaire, totalement obscure sans les deux projecteurs installés plus tôt et les lampes apportées, était large et haute, et plusieurs tunnels y aboutissaient, chacun avec d‘épais câbles à énergie jaillissants des ténèbres, servant à faire fonctionner les machines. Sans hésiter, T’ser en prit un, le troisième à gauche.

-Teres D’san Wschulii quan, Kop, T‘rara? (1) Demanda en Tessak Rea à leur guide, un peu préoccupée, avant de murmurer, en galactique: j‘avais pourtant dit de m‘attendre!
-Jhuus (H), approuva calmement T’ser, puis expliqua: S’rella Zimmer quant guv zautal, S’relii, t’san luscha mo’sa kiuis. Sez Koppa Fuy Wschulii D’san, Vaans (2), avant de, à la vue d‘une ramification avec plusieurs corridors depuis le leur, répéter: Kopac D‘ver (E).

Jules, n’y tenant plus, demanda:

-Professeur, qu’à-t-il dit?

Rea eut un soupir, et souffla:

-Rien de vital. Manifestement, Eugen a encore voulu être le premier sur le coup.

Le jeune homme hocha la tête, et Rea ne pouvait que se dire qu’au fond, le professeur Eugen Zimmer avait presque le même âge que lui, mais était un véritable génie, et avait déjà fait des découvertes extraordinaires en se basant sur la localisation théorique établie par lui-même, et, plus tard, écrit plusieurs bouquins, et été décoré pour l‘un d‘eux pas le recteur en personne. Par contre, sa jovialité et son impétuosité, en plus d’un caractère assez spécial et versatile, faisaient qu’il pouvait parfois créer quelques tensions, en particulier avec les ouvriers locaux, qu’il poussait à bout à certaines occasion. Une « grève » avait même eut lieu une semaine auparavant, et il avait fallu qu’elle vienne convaincre les Tessaks de revenir au chantier sous Zimmer, non sans l’avoir blâmé publiquement, et certifié aux ouvriers qu‘au moindre problème ils pouvaient venir la voir. Elle était probablement celle à laquelle les locaux faisaient le plus confiance parmi l‘équipe universitaire, entre le nonchalant professeur Hugen, l’imbuvable Sereïi, le froid, impersonnel, distant chef d’expédition Dimitiev, dont l’on sentait que les ambitions se tournaient vers autre chose que les sables de Ressirgo, et bien entendu Zimmer avec les histoires sans fin qu‘il causait, sans même mentionner les autres savants ne sachant même pas baragouiner un mot de Tessak…

-S’haisak (F), Kopak D’ver (E), fit T’ser, après un passage rapide dans une énième antichambre, en direction d’un passage dont le plafond était vouté, avant d‘expliquer, en galactique, à fort accent néanmoins: Le puit huit. Deux échafaudages se sont effondrés dans l’empressement des ouvriers, nous ne pourrons descendre qu’avec le troisième.

Ils pénétrèrent dans une salle étroite, au plafond bas, toujours circulaire, d’un diamètre d’environ cinq mètres, dont la majorité du centre était occupé par un large puit encerclé d‘un rebord de pierre de taille, autour duquel une débâcle d’instruments, et structures et d’outils s’étalait. L’éclairage se faisait par un petit projecteur portable, étalé au sol, envoyant sur faisceau vers la clé de voute, probablement oublié là.
Rea fit une moue désapprobatrice, se pencha, et prit, dans le sable du sol, une petite pièce de poterie bleu marine trouée en son milieu. Manifestement, les travailleurs étaient vraiment paniqués. L’un d’eux avait même laissé tomber ce pendentif, un porte-bonheur traditionnel Tessak dont la valeur religieuse et personnelle était grande.

-Yxan, g’ssan T’ser, Fzar al-syt (3), dit-elle doucement, en montrant le petit objet à T’ser.
-Jhuus (H).

A côté, Jules avait abandonné l’idée de les écouter, et était plutôt allé observer l’état des infrastructures. Rea donna le tesson à T’ser, avant de porter sa main à son propre porte-bonheur, un petit morceau de poterie vert frappé d’un sigle de force que lui avait confié six ans plus tôt un chaman, sentant comme les gens de ce peuple le lien qui unissaient les porteurs de ces bijoux.

-Professeur, venez![/color] Fit Jules, je pense que le troisième échafaudage tient!

Elle rejoignit les deux hommes. T’ser observait la superstructure d’un œil critique. Puis, doucement, il souleva son corps puissant forgé par les excavations et traversées du désert, pour s’asseoir sur le rebord du puit cérémoniel, et posa doucement le pied sur le premier échelon. Il l’éprouva un instant, puis y mit son poids.

-Ulut V’ai! (J) Fit-il en y mettant le second pied.

Rea hocha la tête en direction de Jules, passa la lampe autour de son cou grâce la cordelette qui la retenait, et enjamba elle-même, pour descendre à la suite du Tessak.
L’intérieur du puit était couvert d’inscriptions qu’ils n’avaient pas encore réussis à traduire, et comme rayé en spirale. A intervalles régulières, une lampe rouge pendait le long des encoches qui avaient servis comme points d’appuis aux deux autres échafaudages. La descente était longue et pénible, dans l’air lourd de poussière, et les mains couvertes de sueur n‘offraient guère de prise sûre sur les barreaux. Le silence était troublé par les craquement de l’échelle, les halètements des escaladeurs, et le sifflement caractéristique des lampes à hydrogène les balayant de lueurs sanglantes.

-Professeur, fit Jules, commençant à fatiguer, quand arrivera-t-on? Je ne pensais pas le huit aussi profond!
-T’raf Dj’ouva (P), Jules! Bientôt! Répondit avec un léger sourire Rea, le huit est le plus profond et le plus instable de l’excavation. Normalement, tu n’aurais même pas du y aller. Seul Zimmer, Hugen, Goldenberg et moi avons l’autorisation de venir. Dieu sait qu’on a sué pour installer l’attirail!

Samuel Goldenberg était le géologue du groupe, et probablement la seule personne unanimement appréciée parmi eux. Brave homme, il s’était attiré l’amitié des scientifiques par ses indispensables services tout comme son amabilité et sa gentillesse, et celle des Tessaks autant par une relativement bonne maîtrise linguistique que pour l’histoire connue de tous: C’était lors de l’arrivée, au spatioport de Ressirgo-City, un mois plus tôt. Dans les souterrains, un local Tessak de retour de voyage avec des objets « exotiques »—comprendre ustensiles de cuisines, un synthétiseur dont il ne se doutait pas qu’il fallait le brancher, et plusieurs paires de pantoufles — rapportés pour toute sa tribu s’était fait prendre à partie par une dizaine de jeunes vandales issus des quartiers le moins recommandables d’Assedo, par un étrange hasard atterris ici, qui, chacun une matraque à la main, avaient entrepris de rosser le malheureux. Goldenberg avait, accessoirement, fait son service militaire dans l’infanterie de marine, et dépassait le plus grand des gaillards d’une bonne tête, aussi, quand il avait vu cela, il s’est immédiatement interposé. Une fois l’un d’eux corrigé dans les règles de l’art—il devait garder pour longtemps l‘empreinte de ce pylône, fort opportunément planté là, sur la joue—, les autres n’avaient pas demandés leur reste, et s‘étaient débinés, pour tomber dans les mains de la Sûreté omniprésente au prochain coin du souterrain. Les ouvriers de l’excavation avaient appris ça grâce au bouche à oreille qui faisait que les informations circulaient vite dans la communauté Tessak, et tous respectaient Goldenberg au plus haut point comme un « guerrier juste et brave », pour reprendre leurs dires, ce qui avait le don de rendre hilare Zimmer, qui, se tordant de rire, imitait les mimiques des locaux.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) Icon_minitimeVen 9 Jan - 20:02

-F’nsha K‘yua (K)! Déclara finalement T’ser en posant pied sur le sol rocailleux du mastabas numéro huit, et s’écartant.

Rea arriva à son tour au fond, et lança un coup d’œil circulaire. C’était la première fois qu’elle venait ici; le puit n’avait été dégagé qu’avant-hier; elle en avait sept autres en cours et ne pouvait pas être partout, déjà qu‘elle avait participé à la mise en place de l‘échafaudage depuis le haut, chantier qui avait été un vraie gabegie, d‘autant plus que Zimmer était d‘une humeur désastreuse ce jour là.
Le mastaba, selon l’expression consacrée, quoique pas très exacte du point de vue historique, était formé d’une salle en étoile, haute de cinq mètres, d’un diamètre d’une cinquantaine à son endroit le plus large, et avait le puit qui aboutissait dans le plafond, en son centre. Un système de construction et de voutes complexes garantissait l’équilibre du tout. Mais l’espace en dessous de l’accès était encombré par les débris des deux échafaudages qui s’étaient effondrés, formant une immense masse de carbone et de duranium informe. C’était une chance qu’aucune des trois puissantes torches à hydrogène qui étaient placées en dessous n’ait été détruites, car elles assuraient l’éclairage de toute la salle, et sans elle s‘y retrouver aurait été une sacré galère.
Chacun des recoins formés par l’étoile était obscurs, isolés les uns des autres par des murs en angles aigus couverts des mêmes inscriptions linéaires mystérieuses que le puit, hors de portée des puissants projecteurs, et occupés par des artefacts et des statues de dieux aux formes étranges. Immédiatement, le regard expert de Rea sut que les rapports n’avaient pas menti, et que le n°8 était assurément le plus riche des huit. Et le plus instable; les fissures partout en disaient long. Une plaie.
Instinctivement, son regard alla à la voute, couverte d’une carte stellaire incroyablement précise. Un astronome aurait sûrement put repérer l’étoile de Toula, autour de laquelle orbitait Tsarysyn, parmi celles représentées. Autour du vide de l’endroit où aboutissait le puit, des dieux hybrides animaux formaient une étrange ronde, dans une frise admirablement décorée par des symboles en serpents s‘enroulant les uns sur les autres. Plusieurs étaient dégradés par de larges lézardes, et par endroits méconnaissables. Samuel n’avait pas non plus menti: peu de choses suffisait à refermer définitivement le mastaba.
Rea secoua sa tête, et tira d’une poche de son bermuda kaki — elle mettait par contre les vêtements traditionnels locaux que quand elle avait à sortir dans la nature avec ceux-ci, au camp, mieux valait ne pas exciter les esprits des Christianiens — un multicapteur, qu’elle activa. L’appareil émit une série de sons caractéristiques, et son rayon balaya la pièce. Elle hocha plusieurs fois la tête devant les résultats, puis se tourna vers T’ser, qui était resté silencieux:

-T’ser, Juv’ra Quuc Wsh’ea Gai‘ss, T‘rara? (4)
-Kopac D’ver (E), S‘relii (A) Syllas.

Laissant Jules s’occuper de stabiliser l’échelle et de déblayer un peu, ils se dirigèrent vers l’un des coins. On y trouvait de nombreuses pelles et pioches jetées en désordre au sol. Rea réactiva sa lampe ionique, et la dirigea dans la pénombre. Au milieu de gravats, on trouvait des poteries et quelques glaives de bonze et de fer, entrecroisés. Une large statue du dieu animal bicéphale, Bes’kes—Tonnerre en Tessak, on lui avait donné ce nom car on ne connaissait pas son vrai dénominatif —, trônait à leur gauche, ses quatre yeux tordus et mauvais les observant en coin d‘un air malfaisant.
Ils fouillèrent méticuleusement l’endroit. T’ser allait tourner les talons quand Rea s’écria:

-Ps’er! (L)

Elle entrepris d’escalader prudemment le tas de gravât qui montait au bout du coin jusqu’à la voute. Non sans avoir égratigné ses longues jambes largement nues, elle parvint presque en haut, et s’arrêta, assise sur une pierre plate. Elle avait vu quelque chose briller sous les débris. Sur un signe de sa part, T’ser fut avec elle, et ils commencèrent à creuser. Jules était arrivé en bas.

-Qu’est-ce qu’il y a? Vous avez trouvé ce qui les a terrifié? Leur cria-t-il, sans oser s’engager sur l’abrupte montée.
-Je crois que…commença Rea, sans terminer, trop concentrée, arrachant une poterie des gravats.
-Vous croyez quoi, prof…
-J’ai vu un truc…

Jules s’apprêta à grimper quand la voix de T’ser s’éleva, l‘accent terrifié:

-Dj’Tak Ka’ba (C)! Ostoust tuuis zav’nik Yh’zins! Kus’fav’saq! (5)

Il recula, révulsé, et glissa sur une pierre. Tétanisé, incapable de se retenir, il roula jusqu’à ce que Jules, qui s’était précipité, ne le rattrape, non sans s’endolorir sérieusement le torse en sentant l’acier du fourreau claquer contre un os de sa poitrine. L’élan de T’ser le plaqua avec son sauveur contre un mur, haletants et saignants.
En haut, Rea, calme, avait sorti immédiatement après la chute son multicapteur, qu’elle passait au dessus du petit filet de liquide argenté qui jaillissait du trou formé dans les gravats. Un instant, elle était restée fascinée par l’étrange substance.

-Incroyable! Murmura-t-elle.
-Qu’est-ce qui se passe à la fin là haut, bordel de merde! Hurla Jules sa main serrant la peau à l’endroit où l‘Iskat(M) l‘avait heurté, avant de se raidir en se rappelant qu‘il avait dit ça à un professeur.
-Du mercure! Une veine de mercure liquide! Je ne pensais pas que ça existait sous de pareilles conditions!

Elle rangea sa machine, et redescendit prudemment jusqu’au niveau des deux hommes. L’étudiant montra la paume de sa main en disant « ça va » et désignant l‘autre; T’ser était allongé à l‘endroit où son sauveur providentiel l’avait déposé, assis contre le socle de l’effigie de Bes’kes. Il avait l’air sérieusement amoché; il saignait à plusieurs endroits sur son visage et le tissu bleu de son habit au niveau du bras droit était teinté de rouge. Un râle sinistre sortait de sa bouche.
Rea observa cela avec consternation, puis, prenant conscience de la gravité de la situation de T’ser, fit signe à Jules d’aller chercher de l’aide. Celui-ci hocha la tête et, rallumant sa lampe, fonça vers l’échelle.
L’archéologue retira complètement sa veste et, après avoir dégagé l’habit déchiré du Tessak, lui banda le bras avec, serrant aussi fort que possible. Le froid du fond la fit frissonner autant que la situation; elle n’avait plus qu’un petit maillot de corps sur les épaules.
Puis, elle s’empara de son multicapteur, et le passa doucement au dessus du bandage de fortune. L’os n’était pas atteint, mais le risque d’infection était sûrement important. N’étant pas médecin, elle ne pouvait faire beaucoup mieux. Il fallait le tenir éveillé, le faire parler.

-T’ser! T’ser! Lre’nud Juf! (6) S’écria-t-elle, en le secouant un peu au niveau des épaules.

Les yeux du Tessak s’ouvrirent péniblement. Il fixa Rea avec un regard étrange, comme absent.

-Claz’xu, T‘ser? Aq’la P’ser!? (7)Insista-t-elle.
-Rea…Zav’nik tuuis…zav’nik tuuis(cf.5)…Kus’fav’saq (N)…
-Terres mer’kur, nyu fer’ch, koppa tuuis! Terres koppa Su-vei’l!( 8 )

Il l’écouta distraitement, le regard à des milliers de kilomètres. Réellement inquiète, Rea prit ses grandes mains brunes tannées dans les siennes, bien plus petites, les serrant aussi fort qu‘elle pouvait. Mais T’ser tremblait, très fort. Soudain, sa tête se renversa par derrière, et ses yeux vides restèrent un long temps à contempler les deux têtes reptiliennes de Bes’kes. Ensuite, très lentement, il descendit, jusqu’à regarder l’archéologue dans les yeux.

-Rea…uns’pek om…Falla-Fzar…(9)

Il dégagea fébrilement sa main droite, et la porta jusqu’à son cou, où il arracha son propre pendentif. Tremblant, il laissa son bras retomber, et posa l’objet sur les mains de Rea. Celle-ci le fixait, très inquiète. Ses blessures n’étaient pas fatales, loin de là. Or, ce geste était celui des Tessaks mourants. Instinctivement, après avoir rangé l’objet, elle porta sa main à sa ceinture, décidée à essayer la communication, pour la forme. La balise com. grésilla longuement, puis elle crut percevoir une voix furtive:

-…Disperse et se…crissa affreusement le petit haut-parleur de la com., avant de retomber en dehors du champ audible, mais déjà l’archéologue enfonçait le bouton de réponse:
-Ici Rea Syllas! Nous sommes au puit 8, j’ai un blessé! Des secours, vite!…

Mais déjà le crissement, plus puissant que jamais, reprenait. Alors qu’elle actionnait la roulette de changement de fréquence, l’appareil en accrocha automatiquement une, et crachota d’abord quelques autres parasites, avant de faire apparaitre un autre bout de phrase, prononcé rapidement par une voix autoritaire qui n’était celle de personne dans son équipe.

- …prendre le 47, et couper…

De nouveau, la fréquence fluctua, et le signal s’éteignit. Rea était glacée. Cette voix…était celle de l’amiral Syllas, son mari. Elle secoua sa tête. C’était impossible, elle était trop nerveuse, et commençait à halluciner. Se concentrer sur les problèmes du moment: Elle ne pouvait plus compter que sur Jules, car était très inquiète. Quelque chose dans l’histoire ne lui plaisait pas du tout.
Elle se retourna vers les gravats, et pointa sa torche sur l’endroit d’où ils avaient vus la source. Ses yeux s’agrandirent sous l’effet de la peur: plusieurs petits ruisseaux de mercure descendaient lentement dans les rochers vers le sol du mastaba. Bientôt des vapeurs toxiques allaient en émaner. Il fallait se tirer de là.
Courageusement, elle saisit par son vêtement T’ser, et le traîna aussi loin que possible de là, lentement, difficilement—le Tessak était un homme grand et musclé, et même si Rea se maintenant en forme comme c’était nécessaire souvent dans son métier, elle n’était pas non habituée à tirer au moins quatre-vingt dix kilos sur des dizaines de mètres.—jusqu’au pied de l’échelle, contre laquelle elle s’affala. Au loin, elle crut un instant entendre des éclats de voix, puis, soudain, un puissant grondement emplit l’air.

-Kus’fav’saq(N)…eut-elle le temps d’articuler avant qu’un lourd bloc du plafond de la salle du puit, quarante mètres plus haut, ne se décroche, et tombe à quelques mètres d’elle et de T’ser, faisant vibrer puissamment le sol, et envoyant des éclats partout autour.

Alors que le séisme devenait toujours plus puissant, un mur, à l’opposé, lâcha, et une avalanche de gravats et de mercure submergea le mastaba n°8...


Bref lexique Tessak:


Expressions récurrentes
(A) S’rella/S’relii: Désignatif respectueux, plus ou moins équivalent de « monsieur; monseigneur/madame; mademoiselle; maîtresse ».
(B) T’rara?: Interjection qui interpelle et interroge.
(C) Dj’Tak K’bar: Dieu(x) me/nous protège.
(D)Yh’zins: Esprits de la terre, démons. Djinns.
(E) Kopac D’ver: Par ici.
(F)S’haisak: Toujours, encore.
(G)Fzar: pendentif traditionnel, porte-bonheur.
(H)Jhuus: Oui; en effet.
(I)Kop, koppa: Non.
(J)Ulut V’ai!: C’est bon!
(K)F’nsha K‘yua: Nous sommes arrivés!
(L)Ps’er!: Là!
(M)Iskat: Poignard cérémoniel Tessak
(N)Kus’fav’saq: Malheur, malédiction.
(P)T’raf Dj’ouva: interjection très ironique et moqueuse appelant à lutter contre la fatigue, littéralement intraduisible.
(-) Bes’kes: tonnerre, dieu du tonnerre.

Phrases
(1)-Ca n’est quand même pas le huitième puit, non?
(2)-Oui, S’rella Zimmer était jeune et impatient, S’rellii, il aura sans doute ignoré ce que vous lui aviez ordonné. Je ne suis pas le responsable du huitième.
(3)-Regarde, l’un d’entre eux a perdu son Fzar.
(4)-T’ser, où travaillaient les ouvriers au moment où la panique a commencé?
(5)-Dieu nous protège! Les larmes d’argent des démons de la terre! Malheur!
(6)-T’ser! T’ser! Tu m’entends?/Entends-tu?
(7)-Pourquoi, Ts’er? Qu’as-tu vu!?
(Cool-C’est du mercure, quelque chose de chimique, et non des larmes. Ca n’est pas magique!
(9)-Prends mon Fzar.
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