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 [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes

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Nicolas




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MessageSujet: [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes   [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes Icon_minitimeMar 8 Sep - 11:13

Dix, visions euclidiennes




>>Émilie Victoire Nue<<


Euclide fait glisser un œil vitreux vers la barre des tâches, l’accompagne de la souris, clique. La messagerie se superpose au film en cours, confirmation, il y a bien un nouveau message. Au lieu du nom de l’expéditeur s’affichent les traditionnels rectangles remplaçant les signes spéciaux ou caractères étrangers. Sans doute un virus avec des prétendues photos de starlette. On a fait plus fin.

Mais quelque chose cloche. Émilie Victoire ? Le nom lui dit quelque chose. Un café plus tard, il y est. Émilie Victoire, c’est le nom de sa si jolie voisine, celle avec qui il est si heureux de partager l’ascenseur chaque matin vers huit heures. C’est trop gros, alors il clique.

Un lien vers une vidéo. Le film mis en pause, il enclenche le lecteur. La voix atone d’une chanteuse princière des années quatre-vingt vient tenter comparer son amour à un ouragan. Un vieux clip, chiant à mourir, statique au possible. Les premières secondes disent tout.

_ Qu’est-ce que c’est que cette merde encore ?




_ Maître ?

Euclide, mathématicien en Grèce antique, détourne le regard de sa tablette d’argile. Dans ses yeux tournent encore des assemblages de chiffres sitôt désassemblés. Son stylet les pointe toujours, pris dans des perpendiculaires. Il tient quelque chose, là, il le sent, y’a un truc à faire pour faciliter la répartition des chiffres ; il avait le doigt dessus. Il allait trouver. Et Pythagore l’aurait dans l’…

_ Ouais ?

Un messager à l’air quelque peu anxieux jette des œillades insistantes sur l’agora. La foule bruisse anormalement. Quelque chose de chaotique, une désorganisation du désordre naturelle. Des cris se font entendre.

_ Allons bon …




C’est drôle. La pop-star a un petit air en commun avec Émilie. Petit, hein, parce que franchement indéfinissable. Le genre de connexion à laquelle on ne parvient pas même en recensant les différences. Et elles sont nombreuses. Le port, l’habillement, la prestance, le charme naturel, la grâce. Le sourire. A se demander qui est la princesse.

Elle a ce petit air, et regarde Euclide drôlement. Pas la caméra, non. Euclide. C’est troublant, ça aussi. Intimidant. Première fois qu’il ose plonger son regard dans le sien. Qu’il ose lui sourire ouvertement. Sans rougir.

Et cette voix qui ralentit. Vire au grave. Et ces traits qui s’estompent. Virent au flou. La vidéo devient psychédélique, informe. Il s’évanouit.




_ Heu … C’est la bête, Maître.

Grattement de barbe, vénérable forcément. Le disciple pourrait être cette bête tant il est disgracieux. Quelque chose de porcin. Brillant mais porcin. Peu à voir avec les classiques éphèbes dont il aime à s’entourer.

Euclide fourrage sa barbe. Le personnel n’est plus ce qu’il était ma bonne dame, ha ça c’est sûr. Soupire.

_ La table de dix, Antinoüs, i’m’faut ma table de dix.

Il faut tout leur dire.

L’étudiant se précipite vers la sacoche du maître, tremblant de tous ses membres.

Au pied des gradins, l’agora est devenue une fourmilière et grouille d’affolement sur jambes.




Des mots défilent. Ligne à ligne. Flashs. Stroboscope. Effet subliminal. Gravure sur cortex. Les mots s’impriment. En lettres capitales. Plus facile à relire.




DIX STRATES VERS LA SURFACE, L’AIR INFECTÉ DE CHARMES.

DIX POUCES DERRIÈRE LE CRANE,
DIX GRIFFES FRAÎCHES DE SÂNG.

DIX CROCS ÉTINCELANTS,
DIX CRÂNES ÉBLOUISSANTS,
DIX ENVELOPPES VOLANTES,
ESSENTIELLEMENT.

DIVISION CELLULAIRE,
DISPOSITIONS SOLAIRES,
DICTION ATRABILAIRE,
DIFFUSION SOLITAIRE,
DILUTIONS INCENDIAIRES.

ELLE,
UNIQUE,
CRÉATURE
LASCIVE,
INDOMPTABLE,
DÉCIDE
EST
HOMME POUR ELLE.





Et se superposent à l’image de la jolie voisine. Deviennent la jolie voisine. Son sourire. Irrésistible. La jolie. Voisine.

Sur fond d’amour, d’ouragan et de dizaines.




_ Mais vous foutez quoi tous, alors, là ? Je révolutionne les mathématiques, moi. J’ai pas l’temps pour ces enfantillages !

Toujours une main dans la barbe, il intercepte une femme, une hystérique, et manque la faire chuter. Finalement, elle chute. Bien fait. Elle se redresse en catastrophe, crie de plus belle et se remet à courir, au hasard.

_ La bête ! La bête !

C’est toi la bête, pense-t-il. Tout de la vache laitière, sauf les performances.

Euclide est bousculé par de nouveaux fuyards, tout aussi hystériques. Ses notes tombent de ses bras, fontaine d’argile et de papier. Il appelle Antinoüs pour ramasser. L’apprenti ne vient pas ; il enrage. Une autre femme débaroule et piétine ses notes. Il la pousse dans le décor, ce qu’elle n’a pas volé. A quatre pattes, il entreprend la collecte.

_ Ah, tu es là. Aide moi un peu à récupérer mes notes.

Antinoüs ne répond pas. Figé comme une statue de discobole, à l’exception des dents, qui jouent un air de bossa, les yeux exorbités. Une tache mouillée s’étend sur sa toge, vers l’entrejambe.

Une ombre ne tarde pas à venir les recouvrir. Un brin confus, le sage se retourne. Lentement.




Euclide émerge. La joue humide. Une petite flaque de bave s’est formée sur le bureau, signe qu’il a bien dormi.

_ Qu’essé passé ? Ooh ?

Clignements. Il a oublié ce qu’il fait là. La seule chose qu’il sait, c’est qu’un connard de hippie joue du djumbé dans son crâne et qu’il a besoin d’une aspirine. Cinq ans que les meubles n’ont pas bougé. Il s’y cogne encore. Parle tout seul. Encore.

_ Faut que je vais. La pharmacie.

Il sort sans fermer la porte. Titube. Se ressaisit. Appelle l’ascenseur.




La bête fixe le mathématicien. Enfin, chacune des têtes le toise de son œil unique. Une créature monstrueuse qui ne ressemble à rien, là, en plein milieu d’une agora déserté. Les dalles de marbre comme labourées sous le coup de l’irruption, directement depuis le royaume d’Hadès.

De pattes, il n’y pas trace ; des protubérances, des tentacules au dessin abstrait, et encore. A leurs bouts, des griffes chitineuses s’entrechoquent, allant jusqu’à percer la chair voisine. Par endroit, des sortes de larges couches gélatineuses sont gonflées par le vent, faisant muter une silhouette déjà indéfinissable. D’épais grumeaux se forment puis éclatent sur le derme ravagé, dégageant une fumée à l’odeur sulfureuse et envoûtante.

Un cri haché, stridulent, aigu et à vrai dire assez peu approprié à ce que l’on pourrait attendre d’une pareille monstruosité s’élève des dix têtes à la fois, révélant des dents orphelines, torsadées, aux proportions ubuesques. Une goutte de bave vient perler sur le sol et s’embrase à son contact. Une tache mouillée apparaît à son tour sur la toge d’Euclide.




La cabine étroite s’ouvre, révélant des formes familières. La voisine, Émilie. Il bredouille un bonjour, échoue même à sourire et finit par entrer. Lamentable. Quel mal de crâne ! Il s’en veut de se retrouver devant elle dans un tel état.

Il baisse les yeux et bute sur un détail : une charmante ceinture ornée de têtes de mort métalliques.

Flash. Le sang lui monte à la tête. Les mots lui reviennent : dix crânes éblouissants.

Les dix strates. Elle habite au dixième ! L’air est emprunt de son parfum. Il chavire. Dix griffes fraîches de sang. Son vernis à ongle, bien sûr. Rouge. Tout concorde si bien. Division cellulaire ? Cette grille de sudoku qui surnage hors de son sac. Chaque ligne de la prophétie vient se calquer. Des dispositions solaires ? Son joli bronzage en témoigne. Diction atrabilaire, son léger bégaiement. C’est si évident. Et ces mèches qui jaillissent de son chignon, les pouces derrière le crâne. Diffusion solitaire, oh oui. Elle écrit, Émilie, sur le net, cherche un éditeur ; elle le lui a confié. Et qui d’autre a failli mettre le feu à l’immeuble du fait d’une plaque mal éteinte, si ce n’est elle ? Et ces foulards dont elle aime à se couvrir et qui flottent paisiblement alors que le vent s’engouffre dans la cabine ? Pas un mot qui ne vienne valider le présage, qui ne vienne certifier sa certitude.




ELLE,
UNIQUE,
CRÉATURE
LASCIVE,
INDOMPTABLE,
DÉCIDE
EST
HOMME POUR ELLE.




Il la regarde maintenant dans les yeux. Princesse Émilie sourit. Dix crocs étincelants.




La bouche de l’une des têtes fond sur Euclide…




Celle d’Euclide rencontre les lèvres d’Émilie.
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Ruby

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MessageSujet: Re: [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes   [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes Icon_minitimeMer 9 Sep - 12:31

Bon je commente vite fait je reviendrai car je n'ai lu le texte qu'une fois et il me faut souvent plusieurs relectures afin d'apprécier et surtout de comprendre. D'un côté pour moi c'est obscure et en même temps enrichissant. Bon on reconnait bien " ton style d'écriture",je vois qu'aanubis a participé aussi mais je n'ai pas eu l'occasion de le lire. L'idée du chassé croisé est sympa mais j'ai pas vraiment saisi la finalité.
J'aime bien " le texte gravé "
DIX STRATES VERS LA SURFACE, L’AIR INFECTÉ DE CHARMES.

DIX POUCES DERRIÈRE LE CRANE,
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EST
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avec ensuite l'explication ou du moins la superposition logique avec le portrait de la femme
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dale cooper

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MessageSujet: Re: [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes   [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes Icon_minitimeMer 9 Sep - 13:52

Je me souviens de ce texte envoûtant.

Après quelques mois de recul, je le retrouve ici, et m'en émerveille de plus belle. En vous connaissant un peu mieux tous les deux, j'admire d'autant plus l'alchimie de vos papattes s'entremêlant dans cette alchimie délirante (oui bon on a bien le droit de vouer un culte à ses maîtres non ! )

C'est marrant, mais j'ai l'impression de voir plus le style d'aanubis dans le corps du texte (et je ne parle pas de la simple mais célèbre apostrophe); la structure tiens plus de la fusion par contre.

(très cher UF, recevez les salutations de notre distingué confrère par mon truchement, soit dit en passant).


Le texte est délirant à souhait (c'était pas le concours à deux auteurs sur le thème de la "vision" ça ?), une vraie construction de traumaturgie (j'ai pas trouvé de définition à ce mot mais çame semblait être de circonstance)
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Haalysse
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MessageSujet: Re: [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes   [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes Icon_minitimeMer 23 Sep - 17:59

Ayant mentionné Aanubis dans les courants d'air, Nicolas m'a déterré ce texte, et je dois dire qu'il m'a bien fait rire. Quelques phrases sont des perles :

"Le disciple pourrait être cette bête tant il est disgracieux. Quelque chose de porcin. Brillant mais porcin."

"C’est toi la bête, pense-t-il. Tout de la vache laitière, sauf les performances."

Etc.

Et je ne comprenais pas le lien entre les deux Euclides avant de lire la fin.

Bien sympa cette histoire Gardien
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MessageSujet: Re: [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes   [Aanubis & UF, 2008] Dix, visions euclidiennes Icon_minitime

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