L'acte est il plus puissant que le symbole ?

Petit débat que je porte à vos oreilles.

Vous savez que nous entreprenons chacun des gestes au quotidien, et que nous serons peut être amenés un jour à prendre une décision qui influencera une large communauté d'humains, de nos sociétés modernes, ou encore d'une race animale. Qu'en sais-je ?
Il est indéniable que l'Histoire est parsemée d'actes oubliés de toutes et de tous, isolés ou non, qui ont largement influencé le déroulement et le cours des choses. A l'inverse, on a donné une symbolique forte à de petits choix qui ont très largement dépassé le cadre de l'importance qu'on leurs donnait au moment où ils ont été réalisés.

Au final, si le geste influence concrètement l'Histoire et le temps, la symbolique qu'on peut lui octroyer est capable d'influencer la manière de pensée de générations entières. Elle trouve sûrement plus d'échos dans l'espace temporel que ne peut le faire l'action dont elle découle.
Néanmoins, l'action a pour elle d'influencer n'importe quoi : humain, environnement... à l'inverse de la symbolique qui a besoin d'un support pensant (aujourd'hui l'homme) pour espérer jouer dans la suite des évènements. Somme toute, il est difficile de mesurer de manière certaine l'impact que peut avoir une action ou la symbolique d'un acte sur le futur (ou notre passé).

Quoi qu'il en soit, il reste intéressant de se demander ce qui est le plus puissant : la symbolique d'une action ou l'action en elle-même. Elles sont détachables l'une de l'autre, et contrairement à ce que l'on pourrait croire de prime abord, l'aboutissement de l'action n'a pas d'importance, ou une influence moindre sur la symbolique. Je clarifie : une action inutile, qui n'aboutit pas, peut créer une symbolique forte rien que parce qu'elle a été tentée.
Toujours à contrario, une action finalisée peut être oubliée totalement par l'Histoire, transformée... La symbolique semble donc dépasser l'action dont elle résulte, puisqu'on la préfère souvent à l'action en elle-même. Sa signification est ancrée dans l'inconscient collectif plus que l'action dont elle découle. Bref, vous aurez saisi l'essentiel.

Néanmoins, comme dit plus haut, l'action n'a pas besoin d'un cadre "pensant" pour exister, à l'inverse de la symbolique. L'action a bien eu lieu. Et elle aura toujours eu lieu d'ici des milliers, des dizaines de milliers voire même des milliards d'années. Bien que les remous qu'elle aura provoquée se seront estompés de par le temps et l'espace, son influence aura duré et perduré. A l'inverse, la symbolique a besoin de la pensée pour exister. Elle peut influencer des choix, des actes même, mais n'a de vie que jusqu'au moment où la pensée se tarie, disparait.

L'acte est il donc plus puissant que la symbolique ?

Si l'acte perdure en effet, la symbolique elle, lui donne une aura toute particulière.

Un jour un roi a tué un mec qui avait cassé un vase. Ca c'ets l'aspect factuel.

N'empêche que c'est la symbolique qui en découle qui marque vraiment l'esprit.

La liturgie, la magie (au sens ésotérique), ou même tout ce qui touche au protocole parfois, a souvent un point de départ factuel, mais la véritable valeur morale tient dans le symbole qui est né ce ce fait.

Ainsi j'aurai tendance à dire que c'ets le symbole qui prévaut, voire qui supplante le geste en lui-même.

Le fait est que les superstitions qui peuvent toujours être suivies ou appliquées aujourd'hui, prennent naissance dans des actes dont on a perdu la trace aujourd'hui, ou qui n'ont plus véritablement d'intérêt dans le monde moderne. La symbolique, quant à elle, perdure.

Exemple : pourquoi des marins navigants sur des supertankers en métal, n'acceptent toujours pas de voir de lapin à leur bord ? que craignent-ils de ces pauvres animaux ? qu'ils se mettent à ronger les bouts et envoient le navire par le fonds ?

La symbolique parvient même souvent à noyer l'acte originel et à le supplanter.

Il faudrait établir clairement ce qui est "important", ce à quoi doit tendre cette "puissance" du symbole ou de l'acte. Le symbole ne touche certainement que les êtres pensants, mais il se trouve que les êtres pensants, c'est nous. Rien ne peut nous sembler plus important que ce qui nous concerne, nous est intelligible. Et dans l'absolu, rien n'est important. C'est d'ailleurs tout le vertige de la pensée chrétienne (et de toute religion qui entend instaurer une transcendance) : en établissant une instance morale supérieure, on transforme ce qui est important pour nous, en une importance en soi.

Signé : Goldmund

Dans ma question finale, j'ai bien usé du terme "puissant" et non "important". Car l'importance n'existe que par corollaire avec l'intellection. L'importance ne se mesure que par rapport à un point de vue. Je suis d'accord Gold que dans l'absolu, rien n'est "important".

C'est pour cela que je préfère le terme de "puissance". Qu'est ce que la puissance ? Beaucoup de philosophes se sont escrimés à en donner une définition claire. C'est un mot flou, fourre-tout, je le reconnais.
Cependant, se cache derrière ces trois syllabes quelque chose : la portée de l'acte, du symbole ? Dans quelle mesure il interagit sur le monde, l'univers...

Si je voulais reformulais ce débat, que préfères-tu ? Être dévoré violemment d'un seul coup par un lion ? Ou rongez longtemps mais moins douloureusement par une colonie de fourmis rouges ?

Dvb, certes, la symbolique noie l'acte originel, mais pour nous seulement. Sans l'acte, pas de symbolique, sans la symbolique, l'acte et ses effets perdurent, même sans la conscience humaine ?

La symbolique "camoufle" l'acte pour un temps, avant de s'estomper comme nuage de fumée.

Teclis a écrit:

Dans ma question finale, j'ai bien usé du terme "puissant" et non "important". Car l'importance n'existe que par corollaire avec l'intellection.

La puissance aussi, précisément.

(Toujours bouche-dorée)

La symbolique n'est-elle pas le sens donné à l'acte ? Donner du sens est, comme toujours, relatif à la pensée de celui ou ceux qui lui donnent un sens.

Ensuite, en ce qui concerne la puissance et la porté des actes ou des symboles, pourquoi chercher lequel prévaut sur l'autre ? Pourquoi les comparer ? Il s'agit là de la recherche d'un absolu, non ?

Par un acte, un homme peut mourir. Cela lui donne une certaine importance. Un symbole, que change-t-il lui ? Un symbole ne tue pas un homme. Mais par le sens donné à un symbole, un homme peut en tuer un autre.