Un grincement me fit sursauter, une envie de meurtre me vient contre le volet qui s'agite au rythme des bourrasques. J'ouvre avec difficulté, un oeil puis le second, je bouge mon bras qui s'abat lourdement sur la radio de la table de nuit. La mauvaise série continue, la radio crache un spot de publicité et pas un morceau de musique ce qui me laisse échapper un grognement proche de celui de l'ours. Enfin il y'a des matinées ou rien ne va, je me lève soudainement pour échapper à la voix stridente d'une ménagère qui vante les bienfaits d'un produit ménager que j'ai bien envie de lui faire avaler. Quoiqu'il en soit me voilà debout et je m'avance vers la fenêtre, j'ouvre en grand les volets sans manquer de me faire assommer par le volet récalcitrant qui m'a réveillé et je contemple quelques minutes le paysage qui s'offre à moi. Je sens la morsure du froid sur mes joues, une barbe de quelques jours commence à me démanger, je prends la résolution de la raser et de fêter dignement ce réveillon de noël. Je ne prends guère soin de moi depuis quelques jours, de toute façon la maison est vide. Mes parents sont en voyage d'affaires et fêteront probablement ce soir la signature d'un juteux contrat dans la blanche Moscou tandis que mon frère est partit en même temps qu'eux dans je ne sais trop quel coin que les adeptes de la vie nocturne affectionnent. Voila donc une semaine que je soigne peu mon apparence, ressemblant plus à un sans domicile fixe qu'à un gosse vivant dans l'opulence. Peu de gens comprennent que je profite si peu de cela, je peux avoir à peu près tout ce que je désire, mes parents sont des gens importants dans le monde des affaires et sont donc par cela peu présents, ce qui me laisse de surcroît une liberté inhabituelle. Mettant fin à toute ces réflexions je referme la fenêtre et enfile un jogging, un superbe pull offert par une tante pour des raisons qui m'échappent encore et un bonnet noir. Je descends rapidement les escaliers et ouvre la porte du salon pour descendre courir dans la rue, dehors comme à l'accoutumée depuis quelques années il ne neige plus à Noël, je trouve sa assez triste, enfant j'appréciai me vautrer dans les monticules de neige.
Une heure plus tard me voilà de retour, je monte prendre une douche et enfile de nouveaux vêtements. Ensuite je descends expédier en vitesse le repas du midi tout en regardant les informations particulièrement inintéressantes pour un jour de fête, entre le métier de sculpteur de santons et les visites du pape dans divers pays on est à deux doigts de se rendormir. Je range mes couverts dans un lave-vaisselle dernier cri et remonte nonchalamment dans ma chambre pour passer mon après-midi à lire. En début de soirée je commence à réfléchir à la meilleure façon de fêter le réveillon, mes parents m'ayant laissé l'équivalent du salaire mensuel d'un de leurs employés pour que tout se passe bien. Soupirant je regarde la montagne de cadeaux laissés par mes parents lors de leur départ, je trouve sa limite pathétique, le peu de charme qu'il pourrait y'avoir à fêter le réveillon est brisé. Ils n'ont apparemment toujours pas compris que je n'accordais aucun intérêt à la quantité mais à la façon dont les choses sont données, surtout lorsque je pourrai me payer deux ou trois fois les cadeaux présents. Promesse due, promesse tenue peu de temps après je me suis rasé, habillé et décide d'aller fêter Noël dans un restaurant chic de la ville.
Lorsque j'arrive le portier semble choqué par le fait que je sois arrivé à pied, cela me fait sourire aussi je lui laisse un pourboire généreux qui le laisse encore plus perplexe. Je suis immédiatement reconnu et conduit au salon des membres à l'étage, je mange bien, on arrive au dessert quand les douze fatidiques coups de minuit résonnent à l'extérieur. La totalité de la population de l'étage descends pour fêter minuit, le champagne coulera sans aucun doute à flot dans les coupes de cristal servies sur les plateaux en or massif. Je suis amusé, la plupart des clients étant riches et âgés, on se divertit entre gens de la haute société, ce soir le troisième âge s'amuse. Sa doit être pour cette raison que j'aime fréquenter cet endroit, il me fait sourire intérieurement à chaque fois. Une serveuse s'inquiète et vient me demander si quelque chose ne va pas pour que je ne fasse pas la fête avec les autres mais je lui demande juste mon dessert. Ce dernier mangé lentement, je regarde mélancoliquement à travers les grandes baies vitrées, je crois que pour Noël j'aurai souhaité qu'il neige, que les flocons recouvrent tout dehors. Le rythme de la musique en bas me sort de ma torpeur, je termine mon dessert et paye l'addition. Le même portier me regarde abasourdi partir au plus fort de la fête, je marche un peu jusqu'à traverser un large pont de pierre. J'allais continuer mon chemin cependant j'eu une idée, je descends alors les marches sur le côté du pont, il y'a en bas juste la place pour s'allonger, la rivière a une couleur légèrement bleu nuit. Je me suis donc étalé sous l'arche de pierre et n'entendant plus que le bruit du vent qui fouettait par moment l'eau, je ferme les yeux.