[votes] Trophé Zola Innomable contre dvb

Innomable a défié dvb



Voici les armes choisies :

Thème : écrire un texte sur le thème de la cabine.

Il n'y avait aucune contrainte sauf écrire un truc bon, et comprendre le sujet

Mais Innomable n'a pas rendu son texte.
Il a disparu corps et arme en main.

dvb souhaite cependant que vous notiez son texte.
Il aimerait savoir comment vous l'auriez jugé.
Faisons plaisir à notre nouveau gardien littéraire
fusillons le !

Citation :

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Vous pouvez si vous vous en sentez capable et si un formulaire vous irrite, argumenter pour justifier de votre note en mettant en valeur les qualités et défauts du texte au niveau stylistique, lexique, orthographique ou en fonction de l’originalité du texte, son respect des contraintes et du thème demandé.

Mais vous pouvez aussi utiliser le formulaire ci-joint pour justifier de la note établie :



Je mets la note de X/10
Respect du thème : X/2
Composition, rédaction : X/4
Point de vue personnel : X/4
XXX

Citation :

Citation :

cabine : nom féminin. local ou un édifice de petite dimension conçu pour un usage spécifique.

La dernière cabine :

La neige tombait drue sur les routes du Dakota du Nord. Février était toujours un mois difficile pour les routiers, mais le semi-remorque de John filait bon train sur la quatre vingt quatorze. Il serait à Fargo d’ici ce soir. Une fois déchargé sa cargaison de téléviseurs, il rentrerait chez lui et se coucherait tôt.

La Cibi grésilla. John tendit la main vers le poste pour régler la fréquence. Seul au volant depuis des mois, il avalait les miles de route, parcourant le nord-ouest, parfois même jusqu’à Juneau. Il n’avait pas trouvé de meilleur moyen pour se vider la tête de toute cette folie. Pour lui, le monde s’était arrêté un douze février, il y a des siècles ou des années de ça. Il ne savait plus trop. Depuis il roulait.

Les flocons de neige s’écrasaient les uns après les autres sur le pare-brise de sa cabine. Les larges balais de ses essuie-glaces dessinaient un hublot arrondi au travers duquel il ne voyait que le bitume et sa propre solitude.

Derrière lui, il avait accroché une photo de sa femme disparue à côté de celle de leur maison de Fargo. Ce soir, après avoir déchargé le camion, il rentrerait chez lui. Il ne pleurerait pas. Ensuite il irait se coucher dans le lit vide et froid. Demain matin il devrait prendre l’avion de Chicago à l’aéroport d’Hector.
Demain le monde serait toujours aussi mort qu’aujourd’hui. Mais enfin il pourrait pleurer sa femme.


Johanna dansait devant sa vitrine. Derrière il y avait un homme qu’elle ne voyait pas. Elle s’en fichait. Elle avait fait ça tellement de fois. Ca payait mal mais ce n’était pas si difficile, une fois l’amour propre plié et rangé dans l’armoire, entre ses porte-jarretelles et ses tenues de strip-tease. Au moins, ainsi enfermée dans sa cabine de peep-show, elle était protégée de l’extérieur. Elle n’avait pas à subir les mains moites et les haleines envinées des ses « clients ».

Elle jouait l’effeuilleuse dans son bocal aux lumières rouges sans autre complexe que celui de devoir un jour expliquer à ses parents comment elle gagnait sa vie.

Mais aujourd’hui, elle n’avait même plus cette honte ni cette hantise. La vie en avait voulu autrement. Elle dansait dans cette cave malsaine, pour se rappeler qu’elle avait un jour voulu être danseuse. Elle se frottait contre une barre métallique pour manger et se déshabillait pour payer son loyer. Evidemment elle se touchait, car c’est ce qu’on attendait d’elle ; qu’elle fasse durer le plaisir d’inconnus pervers l’observant derrière la vitre teintée.

Aujourd’hui, Johanna se masturbait devant la vitre pour se payer un billet de train. On l’avait invité à se rendre à Chicago. Elle ne savait pas très bien si elle devait s’y rendre, elle n’avait jamais mis les pieds dans l’Illinois, mais quelques jours de vacances lui feraient peut être du bien.

Une chose était sûre cependant, ça ne changerait pas grand-chose à sa vie. Johanna était du genre fataliste.
La lumière s’éteignit. Le client n’avait plus de pièces de monnaie à lui glisser dans la fente.


Mattew avait l’œil rivé sur l’altimètre. Les mains moites, le regard troublé, il suait à grosses gouttes. Il allait sans doute devoir demander à son copilote de prendre les manettes pour l’atterrissage, malgré ses milliers d’heures de vol et le fait qu’il était l’un des plus anciens pilotes de la compagnie. Il n’avait jamais manqué de sang-froid, mais depuis trois ans, il perdait sa concentration en cette période de l’année. Il se souvenait de la tragédie. La veille il avait demandé à Mike de le remplacer sur le vol Paris-New York. Il ne savait plus pourquoi d’ailleurs. C’est drôle comme le destin ne se rappelle pas des petites causes qui font les grandes blessures. Il aurait du être le commandant de bord de ce vol. Il aurait du mourir à la place de Mike, son ami de toujours. Il ne se remettait pas de cette culpabilité. Mais à dix mille pieds d’altitude, aucun homme ne peut se permettre de perdre les pédales dans une cabine de pilotage. Pas lorsqu’on a la vie de centaine de passagers entre les mains. Il le savait, Mike aussi.

Mattew se ressaisit donc. Il repensa une dernière fois à son ami de toujours, sourit vaguement au ciel embrasé de cette fin d’après midi, puis plongea dans la masse des nuages gris et annonça lui-même le début de la phase d’atterrissage.

Mathilde quitta précipitamment son bureau du cinquante-quatrième étage du Willis Tower. Sa secrétaire lui tendit une enveloppe scellée qu’elle empoigna à la volée. Elle courrait vers les ascenseurs espérant ne pas avoir à attendre plus de dix minutes. Elle était pressée et devait encore se trouver un taxi pour se rendre à sa séance d’UV, où elle avait une cabine réservée toutes les semaines. Ca lui épargnait le voyage aux Maldives pour entretenir son bronzage. De toute façon elle se refusait à mettre les pieds dans un avion, surtout depuis…
La porte coulissante de l’ascenseur s’ouvrit et elle se glissa à l’intérieur.

Elle profita de ce laps de temps pour déchiqueter l’enveloppe qu’on venait de lui remettre à l’instant. Il s’agissait d’une convocation du Ministère de la Justice. Elle savait déjà pourquoi, mais lut tout de même le document officiel. Les mots ne s’imprimaient pas dans son esprit. Au lieu de ça ils lui rappelèrent son fiancé, mort dans le crash. Trois ans déjà.

L’espace d’un instant elle perdit son aplomb. Elle n’était plus ce requin de la finance en jupe. Elle était redevenue cette jeune femme follement amoureuse, à qui l’avenir souriait sous les traits de ce beau jeune homme qui l’épouserait bientôt, dès son retour d’Europe.

L’exiguïté de la cabine d’ascenseur lui rappela ces moments complices avec l’homme de sa vie. Elle ne savait plus comment l’idée leur était venue, mais elle se souvenait qu’ils avaient pris l’habitude de faire l’amour dans les endroits les plus exigus qu’ils trouvaient : cabine de paquebot, cabine de douche, cabine d’essayage…
Elle sourit à ce souvenir. Elle soupira à ce rêve, puis pleura à cette douleur. Le vide qui avait suivi sa disparition, l’avait détruite plus qu’elle ne l’avait transformée. Elle s’apprêtait à devenir papillon, et à vivre à la lumière éternelle de leur amour. Au lieu de cela elle s’était réveillée dans un puis sans fond et sans espoir. Son travail l’avait façonnée en femme sévère et méchante, mais terriblement efficace.

Les larmes séchées, les portes s’ouvrirent sur le pallier du rez-de-chaussée.

La lettre officielle l’invitait à se rendre à l’exécution du seul coupable retenu par l’enquête fédérale de l’attentat du vol 9576.


Malick avait toujours clamé son innocence, mais ses choix religieux et politiques en avait fait un coupable idéal. Demain, il serait exécuté pour un crime qu’il disait ne pas avoir commis, mais dont le Gouvernement avait cependant jugé qu’il était partiellement de son fait. Le terrorisme ne saurait laisser le bénéfice au doute. Il en allait de la sécurité nationale.

Quoi qu’il en fût, on accompagna Mallick à travers les couloirs du Metropolitan Correctional Center. La procédure voulait qu’on lui fasse faire la répétition de son exécution la veille.

Aujourd’hui les couloirs étaient vides, de même que la salle et les chaises de l’autre côté de la vitre. Demain elles seraient toutes occupées par des maris veufs, des enfants orphelins, des collègues de travail des victimes, ou des proches éplorés, cherchant la vengeance ou le pardon, la colère ou la délivrance.

Demain John le regarderait avec haine puis remonterait dans son camion.

Johanna le verrait en se disant que cela ne lui ramènerait pas son père ; puis elle rejoindrait sa vie misérable aux vitre teintées.

Demain Mattew décollerait vers un nouveau ciel ; son ami n’aurait pas voulu d’une exécution pour le venger. Il ne croyait ni en la haine ni en la rancœur.

Mathilde, elle, pleurerait au souvenir de sa vie perdue alors que Mallick entrerait dans la cabine de la chambre à gaz pour son dernier voyage.

« Dead Man Walking » prononça à son attention, un détenu depuis l’une des cabines téléphoniques de la prison, alors que Mallick traversait un couloir accompagné de ses gardiens. Le prisonnier lui sourit sans malice avant de raccrocher.