[Votes] Trophée Verlaine

Poésie n°1 :

Citation :

Vers la vie

Sombre jour d'une vie de tristesse.
Du haut du viaduc le corps presque mort, tombe.
L'esprit suicidaire sans cette goutte d'allégresse,
Il est temps de laisser la place. Partir en trombe.


« Pourquoi vivre ô mon Dieu... »


La chute est longue, et l'esprit peu à peu sonne le gong. Tourné indéfiniment en rond, il a touché le fond, de la raison.


« La chute vers la mort est si longue »


Mais au loin le soleil, déjà, pointe ses premiers rayons d'émerveille. La palette de couleurs, celle de la vie, apparaît toujours à l'heure. Et s'élargit.


« Je me souviens maintenant »


Il en est à la moitié de sa chute, et son esprit s'éclaircit à force de lutte. Le souvenir de l'amour, celui qui ne mérite pas de laisser passer son tour.


« L'espoir, je le ressens »


Plus il descend et plus les lumières de sa raison l'éclairent. Blanche rédemption au loin dès le matin, le souffle du vent frais si lointain. Des images telles des bombes boursouflent l'espoir perdu. Nuage doux d'un ciel bleu azur. Peut-être pur ?


« J'aime la vie »


Tout lui revient de si loin, il joint ses mains et contemple le tableau serein. Pourquoi ne voyait-il rien ?
C'est alors qu'il hurle :


« Blanche colombe que tu es belle. Tache d'encre si subtile, toi le ciel. L'incalculable nombre de maisons dispersées. Leurs tuiles d'un teint orangé. Sans faute de goût jamais, mère Nature. Cette forêt offre sa verdure, pleine d'envergure. Les routes tel un fourmillement. Les voitures pleines de couleurs qui passent indéfiniment. Tout est si beau, je veux vivre encore longtemps.»


Ses derniers mots juste avant l’atterrissage violent,
Corps de l'homme mort rouge sang.

Poésie n°2 :

Citation :

Au delà du basalte

À la mort succéda l'ennui gris anthracite.

La caverne volcanique revêtait encore ses atours pales, sombres et fades, qui chaque jour oppressaient un peu plus l'excentrique germant en son sein. Sur sa peau s'étendaient les restes noirâtres et poussiéreux d'une montagne morte ; la cendre, les lapilli éteintes d'un brasier à bout de souffle, formaient un voile inexpugnable sur les sens de cet homme. Ses yeux avaient acquis le laiteux de l'opaline, sa gorge encombrée de miasmes ne savait plus ni chanter, ni trouver les mots, ni même rire encore. Frustré, reclus, ses doigts usés fouillaient ses chairs à la recherche de l'ultime couleur accessible à son esprit malade. Rouge framboise.

Sous la croûte la peau le carmin en sommeil.

Incapable de souvenir et de vue, moi, qui me voulais poète, trouve dans mes mutilations une espérance. Comme si la délicieuse douleur de mes dents effeuillant un à un mes doigts excusait le vide. Ce liquide divin me fascine, l'inspiration qui me fuit, s'écoule lentement de moi. Mes ongles s'insèrent un peu plus, essai après essai, laissant retentir dans mon exil les reflets de ma vie. Il n'y a plus ici que mon ombre, mes échos sombres. Mon désespoir, la crispation sourde de ma douleur, font naître en moi des envies inavouables. Ma chair me délecte et ma langue avide la fouille comme elle fouillerait une fille.

Au delà du basalte une lueur d'opale.

Découpée par le soleil, une jeune femme se tenait à la lisière de la perception. Elle pouvait maintenant sentir s'étendre partout devant elle le talent jeté au sol, les rêves brisés par trop de noirceurs et d'apitoiements. Avec délicatesse ses gestes commençaient à gratter la surface, briser l'épaisse couche de crasse. Elle voyait désormais à travers le poète comme celui-ci aurait dû lui-même voir à travers son enfer. Tout en nuances délicieuses et subtiles ; de vers, de merveilles vermeilles et de vibrions. La fille avait ces couleurs chatoyantes dans les yeux, qui couvraient par vagues incessantes l'antre magique d'une chromakey florale, de pierres précieuses et d'autres espoirs tout droit sortis de son imagination. Fracassant la réalité, brisant les roches et les verrous, la jeune femme vit à travers les fissures le monde et son infinité de toiles.

Pour l'homme redressé, un vernissé de blancs.

Le second.

Indéniablement.

Le deux (ça c'est du commentaire constructif)

J'aime bien le premier, mais je trouve que la fin est dommage, et bien que les couleurs soient présentes, c'est moi subtil que le deuxième. Ce dernier est plaisant car creepy

(C'est dingue à quel point c'est facile de deviner qui sont les auteurs )
Bravo pour vos travaux !

J'avoue qu'avec un tel thème, je m'attendais à voir des mots réellement colorés Ma première réaction, en voyant les œuvres, a été : "Mais ils tout fait en blanc sur noir ! C'est trop moche !".

Bah oui, quand même ! Moi j'aurais fait chaque lettre d'une couleur différente ! Avec une majorité de rose et autre teintes épileptiques, bien sûr. À la fin du premier poème ça aurait rendu super : une belle explosion de sang églantine et de bonne humeur.

Plus sérieusement, parlons du premier poème. Je trouve le commentaire d'Haalysse très bien vu sur la "palette de couleurs" : simplement dire que c'est coloré ne suffit pas à nourrir ma pauvre et rébarbative imagination, elle a besoin de plus de détails pour s'enflammer ! L'avant-dernier paragraphe tente bien d'allumer l'étincelle, mais il aurait pu produire un feu plus vigoureux à mon goût.

Pour le personnage, j'ajoute discrètement que sa personnalité aurait pu être plus étoffée. On sait qu'il est suicidaire, mais on ne sait pas pourquoi (c'est très important de donner au moins un petit indice ! Pour que le lecteur s'identifie).

Parlons de la forme à présent. Il y a eu du travail sur les rimes qui donne un avantage par rapport au second texte, c'est bien. Mais en même temps, la prose n'est pas toujours parfaitement maîtrisée, parfois maladroite à cause des rimes, là où au contraire elle éblouit de sa splendeur dans l’œuvre suivante.

Oui, le deuxième poème est très joli, rien à dire sur la forme si ce n'est : congrats !  
Comme pour le texte précédent, je rajoute cependant un seul petit bémol au niveau de la personnalité ; pas celle du personnage principal dans ce cas, mais celle de la fille. On n'a aucune information sur elle, ça pourrait être une personne comme une autre. Certes, elle voit le poète, elle le comprend. Mais qu'en pense-t-elle ? Il serait bon de le savoir.

D'un côté le poème parle beaucoup d'elle ; d'un autre il ne le fait pas.
Et ça manque.

Je vote pour le deuxième texte.

Bon je ne me répandrais pas en considérations artistiques ou littéraires de quelques sortes que ce soit, le constat est simple : le premier texte ne me parle pas, le second énormément (peut être trop même ). C'est entièrement subjectif mais la poésie c'est comme ça, ça parle ou pas .

De ce simple fait mon vote se portera sur le second texte.



Et Chikoun encore une fois t'es tellement reconnaissable quand t'écris (mais change rien c'est ça qui est cool).

Deuxième texte ici

Bravo à vous deux

Je rejoins Mic à ce niveau-là, et tout comme lui, le 1er texte ne me parle pas alors que le second oui. Mon vote ira donc au second.

Au risque d'aller à contre-courant, je préfère le premier texte. Certes, les couleurs ne sont pas très présentes et l'évolution est rapide (en même temps, sinon on y passe 20 pages). Mais j'aime les rimes et le parti pris de traiter la chute du suicide ainsi.

Pour le second, les couleurs sont aussi peu présentes (gris, rouge et un blanc sur la fin). Ce qui me gêne dans celui-ci, c'est cette femme tombée du ciel. ça me chagrine, je trouve ça incohérent et du coup, le texte ne remporte pas mon adhésion.

Je vote le texte 1

Bon alors, déjà au niveau des dégradés, "Vers la vie", il y a la chute d' une part (dégradé vertical, couplé à une horizontalité du temps probablement, le rendant vertical peut être mais rien n' indique cette recherche de sens), l' éveil aux perceptions et à l' intensité (dégradé perceptif de la dépression sans sensations à un sentiment d' amour, en fait 2 dégradés mêlés mais pas bien identifiés, on n' en voit qu' un), enfin le dégradé de "sombre" vers "rouge". Les 3 se veulent unis à progression constante et linéaire, qui colle avec notre conception du temps linéaire, un peu fataliste etc... le choix de la chute se justifie. De ce point de vue j' ai pas détesté... ça a une unité, c'est sympa, ça se tient. Mais le dégradé de couleurs à proprement parler est un peu décevant et trop rattaché aux perceptions du perso (car il y a bien 2 types de perceptions en parallèle, celles du lecteur et celles du perso, le garder à l' esprit rend le texte plus riche...)
                La forme suit la représentation linéaire et régulière du temps. Mais comme précisé plus haut, pas grand chose ne semble indiquer une métaphore.. les figures de style manquent de vigueur à mon gout "sombre jour de tristesse" "suicidaire sans allégresse" "blanche colombe belle"etc... pas de nuances, limite des pléonasmes, qu' on devine involontaires car trop nombreux...
               De même, trop de mots dans les phrases qui alourdissent gratuitement et brouillent le sens "dès le matin" en pleine chute, l' indicateur de temps est juste inutile à priori (exemple).
               Bon, du coup à part la jolie représentation liée de diverses dimensions pour le dégradé (mais qui aurait pu gagner 2 dimensions facilement en creusant un peu et qui aurait simplement allégé le texte) ça ne va pas être suffisant pour gagner contre le texte 2.

                "Au delà du basalte", niveau dégradés c'est moins simple mais un peu plus nuancé : on trouve la visquosité, d' abord minérale, rocheuse, ensuite charnelle, liquide, et enfin la vision à travers l' être, une sorte de summum du translucide et fluide. On trouve la personne, de la troisième personne en mode "détaché de soi" à la troisième "le lien à l' autre" en passant par la première (la progression vers la féminité est aussi un dégradé sensuel). On trouve le dégradé de la mort à la vie en passant par la mutilation "à vif", et enfin celle du noir au blanc (pureté) en passant par le rouge (passion/organique). On trouve donc plus de nuances.
                Les nuances sont un peu travaillées en relatif, pas trop linéaires (le laiteux des yeux qui préfigure le blanc...), une mini complication qui aurait mérité je pense d' être équilibrée par un peu plus de simplicité dans les phrases, car je trouve qu' il y a beaucoup d' adjectifs, de choses qui rendent le truc "touffu" sans forcément de nécessité. Et si il y avait un dégradé du style à trouver, je ne l' ai pas trouvé assez prononcé. Au contraire il semble que la forme ait choisi une approche inspirée du rondeau (3 strophes, la répétition du premier hémistiche devient une phrase plus courte en séparation des strophes) donc pas une forme dégradée (bien sur c'est pas négatif hein, je commente c'est tout).
                 Outre le côté touffu et un peu lourd (dommage car il y a du sens de présent...) ça ne me parle pas, question de goût, trop violent (bah je frissonne aux mutilations, désolé ^^ ), et vu l' effort fait pour nuancer et enrichir le sens, ça garde un aspect un peu schématique sur le fond qui me parle peu. (même critique sur le 1er, mais le choix du linéaire étant moins ambitieux aurait pu donner un petit joyau plus précis si ça avait été mieux travaillé).
                En passant pour l' auteur, j' ai bien envie de lui poser des questions sur sa conception de la violence dans le style après quelques lectures

                   Donc je suis obligé de voter pour "au delà du basalte", qui montre un peu plus de maîtrise sémantique et formelle, un peu moins de "hasardeux" dans les choix faits.

                   Désolé si le commentaire est un peu violent ou négatif, j' ai voulu faire plaisir en fait... Vous êtes tous les deux au dessus des critiques mal prises je pense.

                          Félicitations et merci à vous deux pour la participation.

Félicitations à toi quand même (: Une prochaine fois peut-être!