Les morts avancent en rang, désolés. L'interminable file d'attente au distributeur de condoléances s'étire dans le chemin de graviers. Les crissements de pas s'élèvent au milieu des chuchotements, commentaires toujours plus éthérés sur la vie d'un qui fût. Ils sont quatre hommes, quatre proches. Costumes noirs sur cravates noires qui portent le cercueil. La dernière chambre. Ruminements sur sombres pensées. Il était aimé ce défunt-là. Pas par tous, cela s'entend, cependant par sa femme et ses enfants, rare chose de notre temps. Les proches s'entassent dans le cimetière troublé. Quel est donc ce nouvel hôte ? Allons ! Pas un seul petit fantôme pour l'accueillir ? Que d'impolitesse. Voilà donc que la procession s'arrête. Un temps, deux petits pas. Tourne et laisse la corde enrouler sa prière autour du chêne laqué. Il descend dans le trou, cette fois il touche le fond, quand le prêtre, fidèle à son poste, vient prononcer son oraison. C'est funèbre, mais pas funeste pour autant. Tu es désormais poussière, comme tu le fus longtemps auparavant. Mais aucun message d'espoir de vient colorer le tombeau. Et quand la rose et la terre s'entrecroisent, ce sont les mots qui s'en vont. Voir ailleurs, ou chercher leurs amies les larmes, qui assaillissent désormais les plus sensibles et les plus proches, tristes collègues de vie. Retour arrière, la file fait volte face. File et passe entre les croix. Les gens courent, ils n'en peuvent plus, ils étouffent. Pas un regard en arrière. De toutes manières, ils y finiront tous, devant les regards éplorés de ceux qui auront survécu. Endroit sinistre, plein de froids reproches. Les reproches triviaux des pierres de marbre. La sépulture est sale, les fleurs sont fanées. Le vent, désormais, ne rafraîchit plus personne et glace le sang. La porte ! Vite ! sortir d'ici !Tout de suite ! Dehors !