La hache affutée d'Ordil s'écrasa sur le crâne épais du troll. Un sang visqueux et acide gicla sur la fourrure que le Lion Blanc portait à l'épaule mais il n'y prêta pas attention. D'un autre revers, la lame recourbée sectionna les tendons qui rattachaient le cou à l'épaule. L'immonde créature hurla de douleur avant de lancer une attaque pataude vers l'elfe. Sans problème, le puissant combattant esquiva le bras noueux de la bête et s'élança à nouveau.
Tout autour d'Ordil, une furieuse mêlée faisait rage. Ses frères repoussaient les assauts combinés d'un groupe de trolls particulièrement stupides, et d'une masse d'orques hystériques et bestiaux. Un peu plus loin, de fiers lanciers elfes arboraient la livrée blanche d'Ulthuan et tenaient en échec leurs homologues gobelins. Les petites peaux vertes étaient promptement massacrées. Chaque rang de combattants se relayait pour frapper d'estoc, dans une mécanique parfaite, si bien qu'un véritable muret de cadavres gobelinoïdes s'était dressé devant les lignes elfiques.
Ordil et un de ses camarades brandirent à l'unisson leur grande hache. Chacun d'eux sectionna proprement une des chevilles du troll. Ce dernier s'écrasa en beuglant par terre. Ordil sourit à son frère mais sa joie fut courte. Un éclair rouge fusa et la tête du Lion Blanc qui se trouvait à ses cotés explosa littéralement. Des morceaux de cervelle et des fragments d'os se dispersèrent alentours. Ordil leva rageusement les yeux en l'air pour voir un chamane orque chevauchant une vouivre crier son contentement. D'un geste de son bâton aux symboles impies, il répandit à nouveau la mort parmi les lanciers.
Les elfes redoublèrent de vigueur pour hâter la fin de la bataille. Les derniers Lions Blancs abattirent leurs adversaires et chargèrent les gobelins en scandant un chant de guerre chrace. Ordil grondait alors que son arme effectuait de grands moulinets, décapitant ses ennemis dans des jets d'hémoglobine verdâtre. De son coté, le champion des lanciers lança une offensive pour percer les lignes adverses. Alors que les fils d'Asuryan atteignaient le porte-étendard gobelinoïde, fait de peau humaine, une déflagration retentit et un brasier souffla une multitude de guerriers des deux camps. Le chamane orque eut un rire gras avant de tourner son attention vers Ordil. Ce dernier récita une brève prière à Kurnous en voyant un trait de foudre foncer vers lui...
Mais l'air crépita soudainement, comme animé d'une volonté propre, et la sorcellerie hostile se dissipa. Le général adverse grogna de mécontentement avant de comprendre ce qui s'était passé. De justesse, il brandit son bâton totémique pour dévier une boule de feu qui visait sa face couturée de cicatrices immondes. Un mage elfe, monté sur un Grand Aigle, traversa les cieux en invoquant des pouvoirs oubliés. Les incantations ne semblèrent pas effrayer son homologue orque qui éperonna sa monture, bien décidé à engager le combat au corps à corps ; toutefois, la vouivre était trop lente pour parvenir à se saisir du rapace géant.
Il n'en fallut pas plus à Ordil. D'un saut, il bondit comme un félin au milieu des gobelins qui s'égayèrent en tous sens. Le chasseur faucha une à une ses proies, alors que Lions Blancs et Lanciers s'alliaient pour venir à bout de la vermine, mettant à profit ce répit pour prendre l'avantage.
Les troupes ennemis étaient en fuite, et la débâcle s'intensifia lorsqu'un terrible rugissement de rage et de douleur secoua les cieux. La vouivre chuta au sol dans un grand fracas, projetant de grosses caillasses partout. Le corps sinueux de la créature venait d'être traversé de part en part. Un rai d'une lumière intense et pure venait de calciner ses chairs et de bruler ses entrailles. Ordil fondit vers le cadavre mourant en quelques instants. Il n'eut qu'à chercher une fraction de seconde ce qu'il cherchait. La silhouette imposante du chamane orque se massait la tête, dos à lui. La créature se relevait au moment où un arc de cercle argenté la fendait en deux tronçons nets...