De la décadence

En marge du débat religieux et au hasard de mes recherches pour ma propre culture mais aussi pour écrire, je suis tombé sur une phrase très intéressante (que j'ai d'ailleurs incorporé dans un rituel dont je vous ferais part plus tard) qui tombe pile dans l'analyse psychologique dont est empreinte mon texte.

L'aphorisme du Traité des Pères (Mishna 5:13)
"Ce qui est à moi est à moi, ce qui est à toi est à toi. C'est la voie de l'Homme moyen, c'est la voie de Sodome."

Je dois avouer que j'ai une façon de penser très perfectionniste, mais aussi très ancré dans les concepts religieux, dans la morale, une façon de voir la vie très "conformiste". Mais dans la décadence du monde actuelle je m'interroge, j'ai un grand mal à comprendre certains comportements d'ordre "libertin" (et pas simplement dans la terminologie d'ordre sexuel). Jalousie d'avoir des tabous non transgressés ? Je ne crois pas. Est-ce un problème de caractère ? Souvent on attribue à cette liberté, une certaine forme d'accession au bonheur suprême. Mais je trouve cette voix égoïste (ayant cette culpabilité transmise par l'éducation et la société de devoir des choses aux autres). Cette phrase du Traité des Pères me paraît être en plein dans mes réflexions actuelles sur les buts de ma vie, son utilité et surtout son évolution. Outre ce que je dis à ce propos, j'aimerai évidemment avoir des mœurs dissolus parfois, une tentation quotidienne même, à laquelle je "résiste" mais qui ne me rend pas heureux. Je sais aussi qu'y succomber ne me mènera pas dans une voie qui gardera mon esprit et mon corps en "bon état".

La question sera, que pensez vous de cette phrase vieille de 3000 ans ?

Au travers de cette question, je cherche à avoir des réponses précises, pas des analyses objectives pourries. Certains peuvent répondre qu'ils multiplient les conquêtes, d'autres qu'ils abhorrent cette façon de penser, je m'en fiche un peu. Ce qui m'intrigue au plus haut point, c'est la réalité de l'inconscient, les réponses au pourquoi, outre les banalités ostentatoires (du genre oh non moi je suis un romantique je respecte les gens...). Je voudrais quelques choses de plus "creusé", qui pourrait expliquer certains "comportements" sur le plaisir de l'instant, votre façon de l'aborder, vos solutions pour éviter le questionnement.

Merci d'avance.

Je vais très certainement passer pour une inculte finie peu digne d'être votre âme damnée à tous mais ....

Autant je comprends et j'aime ton analyse de la vie et de tes choix ancrés dans la morale judéo-chrétienne, autant je ne vois pas le rapport avec ta phrase de base. Tu pars d'une citation, qui amène une constatation, puis ton analyse dérive, et je ne vois plus le lien.

Donc je ne peux répondre à ta question.
Pourrais tu préciser le sens que tu vois à cette phrase, et surtout, comment tu y es parvenu?
Peut être que cette phrase était dans un contexte qui t'a permit d'y voir un sens que seule, elle ne dégage pas ...

Invité

"Ce qui est à moi est à moi, ce qui est à toi est à toi. C'est la voie de l'Homme moyen, c'est la voie de Sodome."
Point de vue de la phrase avec ma compréhension actuelle.
"Touche pas mes affaires, j'te détruirai pas les tiennes. C'est comme ça que l'homme raisonne, c'est comme ça que l'homme se fait avoir". pour rester poli.
En prenant en compte la mythologie de la ville de Sodome et toute la chose religieuse :
"Chacun ses affaires. Le monde périra pour cela"

Ce serait alors un aphorisme sur la stupidité de l'homme dans le premier cas, incapable de voir plus loin que son individualisme sot et infichu de partager la connaissance pour progresser, l'expérience pour ne pas faire les même erreurs que dans le passé.

Une prédiction quasi apocalyptique dans le second. Avec toute les histoires de réchauffement climatique (le dilemme de la Nano, la voiture des pauvres qui risque de faire grimper la pollution tant elle sera accessible) par exemple. La prédiction simple que l'individualité nous mènera à nitre perte, comme la dépravation de Sodome et de Gomorrhe leurs coutèrent la vie. De fait, on assimile l'individualité, l'égoïsme (soyons fou) à un péché, condamnable.

C'est comme ça que je l'interprète

C'est également comme ça que j'ai interprété cette phrase (sans aller aussi loin que toi Kinder), mais cela ne semble pas être la version de Tr0n ...

Hum.

Vous raisonnez d'une façon très 21ème siècle et matérialiste. Le ce qui est à moi allié à l'image mythique de Sodome me fait penser à la possessivité sentimentale et à la jalousie. A la décadence (et l'esprit libertin de la cité de Sodome) qui est une résultante de l'égoïsme humain. A partir de là, se lancer dans l'aboutissement de son propre plaisir, qui selon certains est une voie d'accession à la liberté et au bonheur, n'est qu'un acte purement égoïste qui mène souvent à la ruine de ce qui nous entoure. Quand je parle de ma façon de voir les choses, c'est que j'aimerai toucher ce bonheur de décadence illusoire et libertaire tout en sachant philosophiquement et par mon caractère que c'est une intenable situation. Je n'arrive pas à concevoir une façon suffisante d'être égoïste pour ne pas me ronger l'esprit pour les autres.

En terme simple, cette phrase a un lourd écho qui traduit mon antithèse et j'aimerais justement avoir l'avis de gens qui arrive eux, à être des hommes moyens. Car au contraire de ce qu'on croit, comme je l'ai dit récemment dans un de mes textes : j'ai la migraine de l'intelligence. Non que je sois sur-intelligent, mais que ma capacité d'analyse et de réflexion est sans cesse en ébullition et fait de moi un homme incapable d'actes mauvais. En somme, comment arrivez vous à accepter les choses qui font mal aux autres ? Comment arrivez vous à accepter le mal que vous font les autres, à relativiser ? Arrivez vous surtout à accepter que vos amis, vos femmes, vos maris, vos copines, vos sœurs, vos frères ou vos mères, pensent à eux avant de penser à vous ? En un sens la question a l'air stupide. Mais j'aimerais avoir des réponses recherchées là dessus. Pas vraiment une analyse, mais une analyse de votre propre ressenti face à cette façon de voir les choses, et surtout "honnête" avec vous même. Car étrangement, je pense souvent aux autres, mais j'insupporte le fait qu'il ne pense pas à moi : de l'égocentrisme masqué par un côté très généreux. Je n'arrive pas à mettre un terme sur cette façon d'être, et la maxime m'a très sérieusement fait penser au contraire de ce que je crois être.

Justement le fait que ce soit un péché condamnable me donne l'envie d'y sombrer mais en 10 ans, jamais une seule fois je n'ai réussi à aller à l'encontre pour "changer". J'aimerais avoir l'avis de ceux qui arrivent à vivre de la sorte, et justement même ceux qui ne l'accepte pas réellement. L'aphorisme n'était qu'un exemple, le sujet est dans le titre et parle de la décadence.

Arrivez vous à sombrer dans vos péchés ? Et dans celui évoquer par ce Mishna ?

[EDIT RAMROD] Ecris plus petit, juste pour voir si tu mérites que je t'édite encore ...

Nombre de messages : 113 Age : 40 Date d'inscription : 27/03/2009

Bien le bonjour. Si je puis me permettre d'apporter ma modeste contribution à ce passionnant débat théologico-philosophico-moraliste ...

Ce qui est à toi est à toi, ce qui est à moi est à moi. C'est la voie de l'homme moyen, c'est la voie de Sodome.

Tr0n, il me semble que tu poses la question de savoir comment chacun de nous vie son rapport à ce "péché", au rapport au plaisir, ainsi qu'à la liberté et à l'égoïsme. Je me trompe peut-être, mais il me semble que ta question se rapproche d'une interrogation sur la recherche de l'acte juste. Ou, pour faire simple : et maintenant, je fais quoi ?

Je trouve intéressante la construction de la pensée judéo-chrétienne, et son articulation autour de la dualité bien/mal, avec Dieu qui joue le rôle de /. Mais c'est une IDÉE, rien de plus. Faisons attention ou nous mettons les pieds lorsque l'on entre dans ce jeu là. Sinon, on finit par se perdre dans sa tête. Et ça pourrait être un péché du 21e siècle ...

Sinon, l'histoire d'homme du milieu me fait penser à Bouddha et sa voie du milieu, qui est justement un moyen de libération. Cela pourrait sembler ne pas avoir grand chose à voir avec la voie du milieu de Sodome, mais j'ai l'impression d'y voir quelques similitudes. Je vous laisse y penser pour ne pas sombrer dans le blabla inutile.

À part ça, au niveau de l'égoïsme : avoir beaucoup de sympathie (ou d'amour) pour quelqu'un peut se transformer en attentes. Et si ces attentes ne sont pas satisfaites, chacun en souffre. Désir, frustration, tout ça, vous connaissez, quoi. D'où le fait que je comprenne le fait d'être "égoïste", ou alors asocial, et d'éviter l'implication émotionnelle avec les gens pour éviter la souffrance. Il y a, en effet, le "ce qui est à moi est à moi, ce qui est à toi est à toi" matérialiste (le rapport aux possessions), et un plus psychique.

Cela rejoint aussi la question de la différenciation et de l'identité. Naturellement, nous nous séparons du monde au fil du temps, que ce soit physiquement, en pensées et en sentiments. La vision altruiste de cette morale judéo-chrétienne ne serait-elle pas issue d'un genre de contre-mouvement face à ce phénomène, qui viserait à s'unir au monde ? C'est d'ailleurs quelque chose que l'on peut retrouver dans beaucoup d'endroit sur cette recherche d'union à l'absolu.

Mais personnellement, je n'aime pas vraiment me mettre en "régime forcé" pour donner une direction à ma vie. Juste être soi et suivre les courants ...

Et pour finir, une petite histoire (qui n'est pas de moi)

Main ouverte, main fermée

Un disciple vint se plaindre à son maître du caractère dépensier de sa femme : "Pouvez-vous m'aider ? Je ne sais plus quoi faire. Ma femme dépense sans compter, et je cours à la ruine."
Le sage alla rendre visite à l'épouse de son disciple. Il dressa son poing fermé devant le visage de la femme et lui dit : "imagine que ma main reste dans cette position jour et nuit jusqu'à la fin de ma vie, qu'en dirais-tu ?"
- Je dirais qu'elle est déformée" répondit la femme
Satisfait de la réponse, le sage ouvra grand la main et demanda : "Et que dirais-tu si elle était jour et nuit comme cela ?"
- Là aussi je dirais qu'elle est déformée.
- Si tu as compris cela, conclut le sage, tu as compris comment être une bonne épouse."

Célèbre koan zen, extrait de Le doigt et la lune, d'A. Jodorowsky