Et le monde s'effondre

6 h 30

Le téléphone portable sonne et vibre, c’est l’heure de se lever. Je décolle mon corps du matelas posé à terre. J’enfile un t-shirt, ouvre mon ordinateur portable et vais aux toilettes le temps que la machine réveille ses circuits endormis.
Je suis dans le cirage comme d’habitude mais il faut y aller, les cours ne sont pas en option, dommage, je serais bien resté couché.
Je retourne devant l’ordinateur et m’assoit. Je me connecte sur les différents jeux et forums que je fréquente, regarde comment s’est passé la nuit, répond aux nouveaux messages postés durant celle-ci.
Une sonnerie de cloche me surprend : MSN vient de se connecter.
J’ouvre la fenêtre et examine le statut de mes contacts. Aucun de mes compagnons de jeux n’est connecté.
J’aime particulièrement cet instant. Je suis seul à être debout et profite de ce moment de calme. On me dit que je suis fou de me lever si tôt alors que je pourrais facilement dormir une demi-heure de plus. Mais je m’en fiche, ses trente minutes de tranquillité et de navigation sont plus importantes que mon sommeil. Je suis devenu accro en quelque sorte.
La liste des amis virtuels défile et bientôt, ils sont remplacés par les amis réels et la famille.
Ils sont après les inconnus, étonnant comme l’ordre alphabétique peut nous jouer des tours.
Le profil de mon frère est inactivé. Pas étonnant qu’il dorme encore, les traitements qu’il prend pour sa maladie doivent l’assommer.
Je l’avais vu voila une semaine avant de repartir pour Amiens. C’était la fin d’après-midi et il était allongé dans son lit d’hôpital, à moitié endormi. Apparemment, d’après les dires de ma mère, mon frère passait une journée sur deux endormis pour récupérer de la veille où il avait été plus actif.

Lorsque je m’en vais de mon PC, il est un peu plus de 7 heures. Je mange devant ma télé sur laquelle je regarde des émissions qui ne m’intéressent pas vraiment. Je vais prendre ma douche après m’être brossé les dents. Je ne me rase pas. La flemme. Et je n’ai pas envie de m’écorcher une fois de plus.
Je coiffe mes cheveux blonds qui forment des épis défiant la loi de la gravité. J’examine mes yeux. Ils sont bleus mais pas seulement. Ils sont rouges aussi, plusieurs vaisseaux ont éclatés à force de jouer sur mon PC. Je me dis qu’il faudrait que je lève le pied tout en sachant qu’à la fin de la journée, il ne paraitra plus rien.
Je sors de la salle de bain et m’habille comme la veille. Je prépare mon sac sans vraiment savoir ce que j’ai comme cours aujourd’hui. Je me rappelle vaguement la vue de l’emploi du temps sur le panneau d’affichage.
Je sors de chez moi et me dirige vers l’arrêt de bus à 5 minutes d’ici. Il fait bon en ce dernier jour d’avril et il semblerait bien que le soleil va régner sur la journée. Tant mieux, j’en ai marre du temps pourri.

J’arrive à l’IUT avec un bon quart d’heure d’avance, comme à mon habitude. J’ai horreur d’arriver en retard et déteste les gens qui le sont fréquemment. Pour moi, la ponctualité est une notion de respect.
J’assiste aux cours sans vraiment y prêter attention. Je m’ennuie et aimerait bien retourner chez moi pour jouer encore un peu au PC. La matinée passe tant bien que mal et midi arrive. Je mange seul, mes amis ne finissent pas à la même heure que moi aujourd’hui. Une fois mon repas terminé, je me dirige vers l’IUT pour aller m’asseoir en salle informatique libre service. Je trouve, ô miracle, un PC qui fonctionne. Je me pose sur la chaise et entre mes identifiants. Me voila connecté sur ma session. J’ouvre le navigateur internet, une relique n’ayant pas vu un upgrade depuis trop longtemps et me branche sur mes comptes de jeu.
Ma poche vibre. Sans quitter l’écran des yeux, j’attrape le portable avec sa main droite et l’ouvre.

« Message de Benji »

*Tiens, pourquoi il m’écrit ?*

J’ouvre le message et lit son contenu :

« On pense à vous. »

Je ne saisis pas le sens de la phrase. Benjamin fait partie d’une famille catholique et ils ont régulièrement fait montre d’un soutien depuis le début de la maladie de mon frère mais jamais il ne m’a écrit pour me dire une telle chose.
Je laisse passer, referme mon portable et me replonge dans l’écran blanc, gardant toutefois ce message gravé devant mes yeux, soulevant des questions que je n’ai pas envie de me poser.
Quelques minutes passent et le portable vibre de nouveau. Je me presse sans le vouloir d’attraper le téléphone et regarde de qui vient le message. Mais c’est un numéro qui s’affiche. Et je ne le reconnais pas. J’ouvre le message. Il est d’un ami de primaire que je revois à l’occasion de match de foot avec Benjamin, il le précise au début du message.

« Je te rejoins dans ton chagrin. Il ne souffrira plus là où il est »

Je suis abasourdi et inquiet. Je coupe violemment ma session informatique, empoigne mon sac à dos et me dirige vers l’extérieur. Je descends les escaliers quatre à quatre mais ce n’est pas encore assez rapide, j’ai encore le temps de réfléchir. Durant la descente, des questions se bousculent dans mon cerveau et une idée horrible se frayent un chemin.
Une partie de moi ne veut pas le croire mais une autre me dit que c’est la seule possibilité.
Je parviens à la porte et la pousse plus fort qu’il n’est besoin. Je tremble et vais à l’écart de toute personne.
Je m’arrête aux pieds des quelques arbres plantés là et fouille mon répertoire. J’appelle ma mère. Le téléphone numérote automatiquement le numéro enregistré et lance l’appel. Je colle l’appareil sur mon oreille. Pas de sonnerie, directement le répondeur. Je raccroche rapidement et relance un autre appel tout aussi vivement, vers mon père cette fois-ci. Les tremblements s’accélèrent et la boule dans ma gorge grossit.
Les sonneries se font entendre. Une puis deux puis trois. Et le répondeur.
Je raccroche encore.

« Mais répondez merde ! » dis-je au téléphone.

Je relance l’appel. Encore les sonneries. La première puis la deuxième. Le déclic se fait après la troisième. L’instant entre le bruit et les premières paroles ne dure qu’une seconde mais il me semble qu’il dure une heure.

« Oui mon grand ? »

C’est la voix de mon père qui lui répond. Il y a longtemps qu’il ne m’a pas appelé « mon grand » et ce que je pense devient plus plausible encore, bien que je n’en ais pas envie.
Je vais au contact, directement, sans réfléchir, sans me protéger. Je veux savoir tout en craignant ce que je vais entendre.

« Y a un souci avec Ludo ? »

Un silence se fait encore, d’une seconde, pas plus, puis la voix de mon père, méconnaissable, me répond.

« Il est mort cette nuit. »

Et le monde s’effondre.

J'ai lu ton texte.

Il se lit facilement, l'écriture n'est pas laborieuse, mais je n'y vois honnêtement pas vraiment d'intérêt.
A la limite, j'ai mieux aimé la première partie, le réveil, qui a l'authenticité de la réalité, que la deuxième, qui - j'espère - est complètement fictive, et que tu n'as pas su rendre réelle.

Je suis assez d'accord avec Dounette.
La contrepartie de ce texte "simple", c'est qu'il se perd dans des considérations factuelles. Sans doute as-tu choisi ces descriptions pour renforcer l'inanité d'une vie qui tourne en rond, pour mettre en parallèle au quotidien le caractère extraordinaire de la mort de Ludo, mais finalement, le texte est trop court pour produire un effet. La plus grosse partie de la nouvelle se résume à l'énumération des habitudes qui composent la journée type. On a pas réellement le temps d'apprécier les conséquences de cette fin. Nous ne construisons aucun lien émotionnel avec le personnage principal.
En fait, tu trempes dans la demie mesure : on n'arrive pas à saisir ce que tu voudrais nous faire passer. Il y a comme une impression de neutralité totale. Pas véritablement d'émotions, de mouvements, de sentiments. A la fin, tu commences un peu à creuser le personnage mais c'est aussi l'endroit où tu as choisi d'arrêter le récit.
Je n'ai malheureusement pas lu "Le réveil". Il faudra que j'y jette un coup d'oeil.
Comme le dit Dounette, tu n'as pas su rendre tout ça réel. Un petit travail de fond pourrait peut-être y remédier (et une suite aussi).

Ps : en espérant, de même, que tout ça n'est que pure fiction.