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 La démocratie : l'Etat faible

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Aillas
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Aillas


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MessageSujet: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeVen 8 Oct - 18:15

Comme nous sommes dans un pays républicain, on le saura, nous avons entendu partout que nous avons le meilleur dispositif d'Etat existant au monde depuis le début des temps. Que la démocratie est, on nous l'aura répété, l'évolution naturelle de la distribution du pouvoir, de la nation.

Mais qu'en est-il au final ? Avec la démagogie, le travail aliénant, la disparition du politique via la création de l'Europe, l'architectonique économique ? Est ce que la démocratie est toujours ce qu'elle se prétend être : le pouvoir au peuple ? Ou la tyrannie de l'Epitunia ?
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MessageSujet: i   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeSam 9 Oct - 22:58

Ah ! La démocratie !
Vaste sujet, aurait dit l'autre.

Tout d'abord, je pense qu'il convient de distinguer sans laisser la moindre ambiguïté les différents types de démocratie.
On trouve notamment ce que j'appelle la "démocratie de la société civile" : une vie publique libre et pluraliste, avec droit à la liberté de croyance, d'opinion, de circulation, d'expression, etc.
On trouve également la "démocratie sociale", concept forgé par le PCF dans les années 1930 (et qui forme un duo avec le "centralisme démocratique") : les biais qu'a le peuple (ou du moins une partie du peuple engagé dans la lutte syndicale) de peser sur les décisions politiques par l'établissement d'un rapport de force.
On a également ce que l'on peut nommer la "démocratie politique" (qui n'est pas la seule pluralité politique) : la participation du peuple (via des représentants, notamment) au processus de décision politique.
Je pense que c'est à ce dernier concept qu'Ailas fait référence, mais quand on dit "démocratie", aujourd'hui, on parle en fait d'un gloubi-boulga, d'un mélange plus ou moins dosé de ces trois conceptions (plus quelques concepts un peu moins évidents et un peu plus exotiques).

L'important à saisir pour comprendre ce qu'est la démocratie en France, c'est qu'elle intimement liée à la notion de république. La république, c'est l'idéal politique de la France depuis presque sa fondation en 987 (Hugues Capet devient roi de France après Louis V qui, lui, était roi des Francs) : le gouvernement pour le "bien publique" (res publica). La démocratie politique a été longtemps une réalité en France. Le mouvement des communes présent surtout à partir du XIème siècle (notamment à partir du règne de Philippe II dit Philippe-Auguste) en est un exemple : des paysans se sont unis et se sont déclarés comme relevant de l'autorité de leur souverain (le roi de France) et non plus de leur suzerain (le seigneur féodal). Outre l'intérêt bien compris entre les communes et le roi (ne plus subir l'arbitraire seigneurial pour les premières, affaiblir les seigneurs et les contrôler pour le second), ce mouvement large et profond qui s'est étendu à la France entière en à peine deux siècles (et s'est par la suite exporté, notamment dans l'Espagne d'après la reconquête) a eu pour conséquence l'établissement d'un système politique démocratique : les communes se géraient elle-mêmes. Bien souvent, les représentants (chargés notamment de transmettre les édits royaux) ne gardaient leur charge (officieuse) qu'un an avant de la céder à d'autres, soit choisi au hasard, soit élus par les habitants.
Ces "micro-sociétés" paysannes ont eu leurs équivalents urbains, dans les bourgs et à Paris. On retrouve encore la trace de cet héritage politique dans la manière dont les sans-culottes s'organisèrent pendant la Révolution : participation de chacun aux décisions politiques, élection pour un an de tous les représentants de l'autorité publique (juges, gendarmes, commissaires, etc.), communautés gérés par des "comités de citoyens" à toutes les échelles (quartier, canton, village, commune) se réunissant régulièrement et dans lesquels tout habitant peut intervenir, etc.
Après 1795, le mouvement s'estompe (interdiction des comités par l'assemblée de Termidor) jusqu'à tout à fait disparaître (quoiqu'il paraît que survivent certaines communautés villageoises fonctionnant sur ce modèle, dans le sud de la France).

Le rapport avec la république s'accentue encore lorsqu'au XVIème siècle Juan de Mariana théorise la souveraineté populaire (par opposition à la souveraineté royale), devenue - du moins en France - apanage de la République.

De même que la démocratie politique disparaît tandis qu'apparaît la démocratie de la société civile, la république en tant qu'idéal de gouvernement disparaît au profit de la république en tant que modèle institutionnel. Et là encore "démocratie" et "république" sont indissociables, puisque la république comme modèle institutionnel est la condition de la démocratie comme pluralisme et liberté de la vie publique. Situation dans laquelle nous vivons présentement.

Le décor étant posé, je répondrais à Ailas de la manière suivante : l'hypocrisie étant l'une des marques de la civilisation , j'estime qu'il convient d'en user en considérant (c'est donc pure convention) que, le peuple étant le souverain (j'insiste sur le "le", bien trop souvent oublié, notamment par mes amis québécois), il faut le supposer bon. "Toute institution qui ne suppose pas le peuple bon et le magistrat corruptible est vicieuse", mentionnait à juste titre ce brave Robespierre dans l'article 19 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1793. Et ce bien qu'il faille constater que tout groupe social est relativement facilement perméable aux influences (lire à ce sujet l'ouvrage fondateur de la propagande moderne : Propaganda, d'Edouard Bernays) ni n'est nécessairement conscient des priorités et données politiques essentielles (mais ce n'est pas là chose neuve : dans ses Histoires, Tacite déjà nous contait que le peuple de Rome s'affolait de la moindre rumeur de rébellion gauloise, l'empereur seul - en l'occurrence Tibère - ayant pleinement conscience du peu de danger réel de la situation).
Que le peuple soit influençable, qu'il puisse avoir tort, être manipulé, etc. tout cela est une évidence, mais puisqu'il est notre souverain (le fameux "roi à dix millions de têtes" conspué par les monarchistes de Coblence) il faut en respecter les volontés.

Et puis aussi, on peut avoir l'espoir que chacun des citoyens puisse être pénétré du soucis de l'intérêt général. Mais là, ce n'est plus la démocratie mais la république.
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeMer 13 Oct - 13:01

On peut difficilement assumer que le politique ait disparu aux Etats-Unis; il n'en disparaîtra pas plus en Europe, quoique la mouvement fédéraliste affaiblisse sans doute les pouvoirs nationaux. Le politique deviendra Européen, simplement - encore qu'on puisse douter de la réalité d'un pouvoir exécutif imposant et s'imposant dans la prochaine décennie. [/i]A priori il me semble plus logique de désigner la mondialisation économique comme source de la diminution du pouvoir politique - et non comme cause d'une "disparition du politique".

Après avoir lu le très pertinent exposé de Brath-z, j'ai l'impression d'énoncer une tarte à la crème en signalant que la démocratie n'a jamais été le "pouvoir au peuple" stricto sensu: la démocratie directe est un mode de gouvernement impensable dans une société aussi vaste que la nôtre où la division du travail empêche la participation directe et systématique de tous les citoyens à l'élaboration de chaque loi, chaque amendement, chaque décision. Presque devenue kitsch, la phrase du contractualiste J-J Rousseau n'en demeure pas moins vrai:

« S'il y avait un peuple de dieux, il se gouvernerait démocratiquement. Un régime si parfait ne convient à des hommes. » - Du contrat social

C'est par la représentation que la démocratie peut néanmoins être indirecte et exister dans sa forme amoindrie. La représentation est le concept fondamental en démocratie: le représentant apporte théoriquement un supplément d'être au représenté. Il se déplace là où il(s) ne peu(ven)t être et possède souvent un bagage académique supérieur à la moyenne.

C'est tout le paradoxe de la représentation: un député énarque et extrêmement cultivé, touchant une indemnité de 5200 euros par mois ne reflète pas le moins du monde la population française qui, à plus de 80%, touche moins de 2000euros par mois, n'a que rarement fait un doctorat, et ne possède pas nécessairement ni les mêmes affinités culturelles ni les mêmes paradigmes que son représentant.

C'est là que la nuance importe: en démocratie il ne s'agit pas de refléter mais de représenter.

Prenons l'image du prévenu au tribunal qui se voit adressé une sempiternelle question par le juge au début d'un procès: "Monsieur/Madame/Mademoiselle, êtes-vous représenté? " Si l'avocat est présent, alors le prévenu répond qu'il est effectivement représenté. Et pourtant, le contraste est évident: le prévenu n'a que rarement une quelconque connaissance du code pénal/civil/règlements administratif tandis que l'avocat est tout sauf un néophyte.
En représentant le prévenu, l'avocat lui apporte donc un supplément d'être, sous la forme de qualités que le prévenu n'a pas toujours: l'éloquence et l'expertise.

A partir de là, la question de la démagogie peut s'expliquer de deux manières. D'une part, demande-t-on à un avocat d'expliquer les subtilités des procédures à son prévenu? Non. En démocratie, oui: on demande au représentant d'expliquer à l'électeur les méandres de telle loi d'analyse financière - le bouclier fiscal par exemple. Par conséquent, que fait le représentant? Selon son talent, il parvient à synthétiser et simplifier l'essentiel de la loi, ce qui sous-entend qu'il ait lui-même les compétences nécessaires; sinon, il la vulgarise et la schématise, comme c'est le cas le plus souvent.
Une technocratie relative demanderait donc que les députés soient tous surdiplômés - quelle attache à la réalité leur resterait-il néanmoins, et ne faut-il pas tout de même refléter un minimum la population? Une technocratie absolue est tout à fait aussi impossible qu'une démocratie directe: il faudrait alors que l'ensemble de la population possède une expertise forte sur tous les sujets politiques possibles. Autrement dit, sur tout. Impossible, donc.

Incapacité d'abord, il existe cependant une deuxième source de démagogie: le calcul politicien. Partant du principe très simple que la population est ignorante, pourquoi ne pas la désinformer voir l'intoxiquer? Cela ne marche évidemment pas toujours avec la population extrêmement politisée ou ce qu'on appelle un peu pompeusement l'élite intellectuelle. Ces prêts-à-penser faciles permettent néanmoins de ratisser très largement dans l'électorat: peu d'individus sont prêts à vérifier si, oui ou non, le modèle socialiste des retraites est solvable ou non. De même pour celui du gouvernement. Ils se pencheront donc sur des questions très générales et au final assez négligeables relativement à la réalité du dossier, et donneront leur assentiment à celui qui leur semble le plus proche de leurs intérêts propres ou de l'intérêt général.

E.g. de démagogie: un ministre de l'agriculture - gouvernement X - avait promis d'allouer 12 millions d'euros à tel secteur agricole, en sachant pourtant pertinemment que l'Union Européenne bloquerait ce processus, pour des raisons toutes simples de budget: les experts de l'UE, tout en voulant aider, ne peuvent simplement pas débloquer ces 12 millions sans gréver sur d'autres secteurs prioritaires. Néanmoins, le ministre promet. Evidemment, l'UE bloque. Il revient alors avec le beau rôle devant un parterre d'agriculteurs, dénonçant cette horrible Europe qui, contrairement à lui!, refuse de mettre l'argent là où il faut.
D'où l'Europhobie primaire, voire primate pour certains. C'est un bel exemple de démagogie. Il suffit alors de peu pour s'en apercevoir: feuilleter le site du Parlement Européen, qui évidemment s'insurge et dénonce ce genre de pratiques; ou encore connaître a minima cette institution fédérale. Cela ne sera cependant pas fait; et cela se comprend.

A cela s'ajoute que les citoyens préfèrent les sujets d'actualité chaude - donc flous, peu analysés, foyers de démagogie - aux dossiers de fond. En résulte une politique qui gagne des voix sur des points d'actualité négligeables plutôt qu'en proposant des réformes de fond.

Heureusement, néanmoins, la démocratie est suffisamment indirecte pour que les dirigeants une fois au pouvoir ait une marge discrétionnaire suffisante pour se passer des considérations populistes et poujadistes; quoique.
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeJeu 14 Oct - 17:34

Cher (chère ?) Volodia, je suis tout d'abord très heureux de te voir distinguer représentation et réflexion. Combien de fois par jour je m'énerve contre les admonestations de tel(le) ou tel(le) qui m'assure sur un ton docte que la France n'est pas démocratique "parce que l'assemblée nationale est constituée à 80% d'hommes blancs entre 40 et 55 ans cadres supérieur ou professions libérales". La représentation en démocratie n'est pas et n'a pas à être représentative de la population. Chaque député(e) représente les intérêts de la Nation toute entière. Raison pour laquelle j'enrage chaque fois que je vois ou entend un abruti de journaliste désigner tel ou tel député par son département d'élection (si l'on veut être précis, il serait même plutôt judicieux de dire "député élu dans la Xème circonscription de tel département").
On peut certes considérer qu'une pluralité de vécus et de conditions apporte un éclairage plus complet et donc plus pertinent (déjà, cela se discute, comme aurait dit Delarue entre deux pailles de coco) sur les orientations politiques à suivre ou à ne pas suivre. Mais on peut aussi considérer qu'en s'arrachant à ses humus, l'élu de la Nation peut (et doit) n'être inspiré que par le soucis de l'intérêt général, le bien de tous et de chacun ("bien public", c'est-à-dire "res publica" en bon latin). Évidemment ceci est un idéal.

En revanche, je doute que la mission de l'élu de la Nation inclut d'être un pédagogue et d'expliquer les méandres de la politique de terrain aux citoyens. Un élu n'est pas (et n'a pas à être) un professeur ou un instructeur. Cela créerait un état de domination de l'élu sur l'électeur, plutôt malvenu (je met ici un bémol en ce qui concerne la "magistrature suprême" du président de la République, fonction très française qui fait écho à la monarchie ancienne et est une incarnation de la souveraineté). En fait, lorsqu'en politique on parle de représentation (et non pas de représentativité), cela induit une domination inverse, par le biais d'une notion déjà théorisée dans la république romaine : le principe de responsabilité. Lorsqu'un représentant de l'autorité publique (élu ou non élu) prend une décision, il en est responsable et est tenu d'assumer cette responsabilité. Il doit pouvoir être sanctionné.
Lorsqu'il s'agit d'un(e) élu(e), sa légitimité lui venant de manière directe du peuple, c'est ce peuple (ou, pour des raisons techniques, la fraction du peuple qui l'a élu) qui doit avoir la possibilité de le sanctionner. Le système du mandat impersonnel (qui n'existait pas sous la république romaine ni dans ses "répliques" en Italie au XVIIème siècle) a été conçu théoriquement comme un moyen d'appliquer ce principe de responsabilité (par le biais du non-renouvellement de mandat), mais il a montré au cours des XIXème et XXème siècles ses limites, fort nombreuses. C'est pourquoi je vois d'un œil assez favorable les tentatives faites dans certains pays de rendre incontournable ce principe.
Ainsi, au Venezuela, la constitution qu'a fait adopter le président Chavez autorise la tenue d'un scrutin plébiscitaire à la moitié du mandat de chaque élu (!) et même de chaque fonctionnaire (!!), sous des conditions assez contraignantes pour ne pas encombrer le système d'état et assez peu contraignantes pour ne pas rendre cette tenue impossible (de mémoire : une pétition réunissant 10% du corps électoral concerné). En Chine, après Xiaoping, les dirigeants ont décidé d'instaurer un système de "sacerdoce politique" intégrant des sanctions très dures (y compris la peine de mort, ce qui me chagrine) à l'encontre des membres dirigeants du parti communiste (ce qui fait que l'élite politique chinoise est aujourd'hui moins corrompue qu'il y a dix ans, fait suffisamment rare pour être mentionné). Deux exemples certes imparfaits mais qui ont le mérite d'exister et de donner des résultats. En France, évidemment, il faudrait adapter autre chose, mais enfin la culture de la transparence ayant été dévoyée par la dérive paperassière de notre société (trop d'informations, de paperasse, pour être au courant et surtout comprendre), il est à mon avis vain de fonder des espoirs sur les lois et systèmes qui s'y rapportent (comme la modification du règlement du Conseil Constitutionnel qui le contraint désormais de publier lors des élections présidentielles pour chaque candidat les noms de 500 des élus qui lui ont apporté leur signature).

En ce qui concerne la démagogie (qui est une dérive d'un système a priori pas condamnable, puisque le démagogue était dans l'Athènes antique le seul magistrat élu du peuple), je conteste le principe suivant lequel le peuple est ignorant (cf. mon message précédent). En revanche, il peut être manipulé, comme tout groupe. Et c'est là que la propagande moderne joue à plein. Lorsqu'en plus on retire au peuple une instruction exemplaire (cf. la destruction méthodique de tous les fondamentaux de l'école française en cinquante ans), qu'on l'incite à la culture des "mutins de Panurge" (cf. Philippe Muray) qui engendre des mouvements de groupe tout en méprisant la notion de collectif (construction intellectuelle assez remarquable, je dois dire) et qu'on le sature de données non hiérarchisées ("tout est important"="tout se vaut"="rien n'est important"), on en arrive à la société évoquée (avec plaisir) par Samuel Huntington dans les années 1960 : la "démocratie non représentative".

Je reviendrais aussi sur l'exemple que tu as donné :
Je ne connais pas le cas évoqué, mais à ton récit j'apporte trois objections :
- d'abord, la souveraineté n'étant (fort heureusement) pas détenu par les technocrates qui dirigent l'UE (le parlement européen étant le seul parlement du monde à n'avoir aucun autre pouvoir que de répondre "oui" ou "non" à la proposition de commission européenne faite par le président de ladite commission, ce sont bien les technocrates qui dirigent l'UE), un représentant de l'autorité publique française (ministre, donc incarnant le pouvoir exécutif de surcroit) n'a pas à considérer l'avis (ou estimé tel) de l'UE dans ses choix de politique intérieure ou extérieure
- ensuite, la France ayant formellement et à de nombreuses reprises (1791, 1795, 1848, 1898, 1936, 1945, 1946, 1958, 1965, 1988, 1992, 2005, et j'en oublie) refusé tout "gouvernement des juges" (c'est-à-dire toute intrusion du droit - qu'il soit pénal ou constitutionnel - en amont des décisions politiques), un ministre de la République française n'a pas à se soucier d'une éventuelle décision ultérieure d'un organe judiciaire (ici, la Commission Européenne, qui, comme son nom ne l'indique pas est une instance absolue puisque détenant les pouvoirs politiques - législatif et exécutif - et judiciaire) lorsqu'il prend une décision politique
- enfin, la politique n'étant guère faite que de rapports de force, il est également fort possible qu'en prenant une décision allant directement à l'encontre des orientations europe-uniennes (je nie formellement à l'UE tout caractère "européen") ne soit rien d'autre que l'expression de ce rapport de force, certains gouvernements français plus courageux que d'autres n'ayant pas hésité à mettre des bâtons dans les roues de la technocratie bruxelloise
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeMer 20 Oct - 0:12

Je me permets un petit post inséré dans le débat (je n'ai pas lu les réponses de Brath-z ni de Plumolodia - n'ayant pratiquement plus de temps pour TA en ce moment), posté à chaud.

Aujourd'hui, la démocratie a été bafouée à Lorient.
Un cortège d'une vingtaine de milliers de personnes manifestait pacifiquement en direction du port. Les autorités, qui se préoccupent de protéger le dépôt pétrolier (un des derniers non bloqués en Bretagne), ont établi un important dispositif de sécurité (plusieurs compagnies de gardes mobiles) pour défendre le port.
Arrivés à une dizaine de mètres du barrage, les manifestants s'immobilisent. Les gardes mobiles font une rapide sommation et (Edit-rectification : pas de sommation) tire de nombreuses grenades lacrymogènes, à courte de distance, mais aussi à plus longue distance.
Dans le cortège, des femmes, des enfants, des retraités, sont pris au piège (pas de rue perpendiculaire, et impossibilité de reculer puisque la foule s'étend tout le long de l'avenue). Ceux qui, placés devant, parviennent à reculer de quelques mètres, n'évitent pas grand chose puisque d'autres nuages de gaz les attendent plus loin (les tirs à longue portée).

Ainsi, les forces de gendarmerie ont gazé une manifestation pacifique (et légale de facto) constituée de personnes de tout âge (j'ai même vu des poussettes), sans aucun remord pour les plus faibles, sans aucune gêne à risquer un mouvement de foule qui aurait pu mettre en danger la vie de nombreuses personnes.

Le pouvoir au peuple ? Quand on lui interdit même de s'exprimer et qu'on le punit pour ça, je me pose la question.
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeMer 20 Oct - 23:48

Je rappelle le règlement aberrant de ce site: on n'y parle pas de politique. Tout du moins pas de politique pure. Bien sûr, c'est absurde et c'est hypocrite mais c'est aussi une sécurité, un garde-fou à certains abus. Le débat doit rester un débat d'idées, pas un échange entre des convictions partisanes.

Alors sois tu t'occupes, en tant que Gardien, de faire sauter cette règle pour l'ensemble des membres.
Sois tu seras convié puis contraint de retirer ton message par nos compères.

Je parle d'aberration non pour emmerder quiconque; simplement parce qu'un nombre gigantesque de textes de bibliothèque ou encore de débats sont, ici même, des débats de politique. Peu importe que nous bannissions la politique puisque la politique, elle, s'occupe de nous.

D'autant que faire de la politique à chaud est à mon sens une ligne de conduite très limite conduisant par moments à des écrits emplis de pathos.
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeJeu 21 Oct - 0:25

Je ne crois pas avoir fait de la politique, mais avoir relaté des faits, si je me trompe, je t'enjoins vivement à me citer les passages qui transgressent les règles.
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeJeu 21 Oct - 0:54

Tu m'accorderas que la distinction que tu fais est extrêmement polémique. Tout d'abord parce que ce que l'on appelle des "faits" en politique est, de manière générale, une chose discutable: cf. les débats sur le nombre de manifestants selon la police ou les syndicat, qui montre à quel point les "faits" peuvent changer d'un parti à l'autre. Ensuite parce que ce report des faits induit lui-même une certaine orientation: on imagine bien que tu milites contre les retraites toi-même. Car si tu ne faisais que rapporter les faits, tu rapporterais tous les faits et non certains d'entre eux: les cassages à Nanterre ou Lyon par exemple qui, quoique marginaux, sont évidemment la source de la réaction disproportionnée des CRS en ce moment. Note par ailleurs que je n'exprime pas ici de jugement politique sur l'orientation à prendre.

Néanmoins, je te rejoins GP et je n'ai pris ce ton impérieux que pour souligner ce que moi-même je ressentais comme une injustice: il faut qu'on laisse Ter Aelis parler de politique, dans la mesure du respect d'autrui. Cette ironie était visiblement trop réaliste et, en me relisant, je concède que c'était même franchement impossible de le prendre autrement qu'au premier degré.
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeVen 22 Oct - 14:16

Je m'immisce dans votre conversation au débotté, comme ça, sans prévenir.

Tout d'abord, qui a dit que la passion était mauvaise conseillère ? Je sais bien que chez ceux qui ont mal lu Locke ou Rousseau on oppose passion et raison, mais je n'y ai jamais cru et n'y croirais vraisemblablement jamais.

Ensuite, malgré son aspect indubitablement partisan, le message de Green Partizan apporte beaucoup au débat. Ne serait-ce que par cette phrase : "Aujourd'hui, la démocratie a été bafouée"
En effet, cette phrase traduit que GP considère une protestation populaire comme la (ou une émanation de la) démocratie. Or, et c'est là que cela devient intéressant, cette notion est une tradition politique éminemment française. Je l'ai mentionnée dans mon premier message sur ce sujet : c'est la fameuse "démocratie sociale" théorisée par les intellectuels du PCF dès les années 1920.
Mais cette notion n'est que la caution idéologique et philosophique d'un caractère politique français présent depuis plus longtemps encore. Comme même sous les plus autoritaires de nos rois (à l'exception de Louis XVI et de ses deux suiveurs qui s'en sont affranchis) l'autorité politique était issue notamment du peuple (le roi de France lors de son sacre déclarait à trois reprises s'en remettre "à Dieu, au peuple et au clergé"), on pouvait difficilement motiver une protestation populaire à l'autorité publique. Pendant longtemps, ces contestations ont ouvertement adopté le visage de l'illégalisme (des jacqueries jusqu'aux premières grèves du XIXème siècle) avant d'être réglementées par les lois de la IIIème République (qui a d'ailleurs à cette occasion montré une fois de plus qu'elle ne faisait que finir le travail largement entamé par le second Empire, de même qu'avec l'école, l'armée, l'industrie, la religion, etc.). Cependant ces contestations désormais légales à défaut d'être légitimées philosophiquement (en régime de démocratie représentative, on considère envers et contre tout que pour la durée de leurs mandats les autorités publiques sont l'incarnation directe du peuple et ses représentants, quand bien même l'opinion changerait-elle d'avis) se réduisaient à de "simples" rapports de force entre factions politiques et classes sociales.
En saupoudrant la contestation populaire "de la rue" d'un zest de "démocratie", les intellectuels communistes lui ont donné une légitimité qui, à force d'intériorisation, est aujourd'hui considérée comme allant de soi, au point qu'on puisse écrire ou lire sans broncher que lorsqu'une manifestation (pacifique ou pas, il s'agit d'une contestation) est réprimée par les forces de l'ordre (seules incarnations de l'autorité publique pouvant appliquer la "violence légitime de l'état" sans laquelle il n'y aurait jamais eu de France) "la démocratie a été bafouée". C'est, quelque part, une illustration de la justesse de vue de Gramsci.
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeSam 23 Oct - 1:53

[figurez-vous un(e) désespéré(e) s'arrachant les cheveux face à une connexion internet ayant réduit à néant le produit d'une heure de réflexion]

Pour faire simple, contentons-nous de rappeler à Brath-Z que je distingue "à chaud" (vice administratif) de "passionné" (prérequis artistique et politique); distinction qui lui permettra, pour évidente qu'elle soit, de comprendre que je n'ai rien à voir de près ou de loin avec les "mauvais lecteurs" d'Hobbes & Rousseau.
Quoiqu'encore je vois la spontanéité comme une attitude plus propre au préjugé qu'au red in te et à la longue réflexion, qualité de tout administrateur ou gouvernant compétent poursuivant l'intérêt général. Sans pour autant que je vois la circonspection comme inconciliable avec l'impétuosité: Machiavel lui-même considère que les deux peuvent être intelligemment alliés et alternés, à l'image de la ruse prudente de son renard et de la force brutale de son lion.

Pour ce qui est du reste, je m'accorde avec l'argumentaire justement étayé de Brath-Z.

J'ajoute néanmoins qu'il faut que les partis politiques dépassent leur forme première et primaire de regroupement partisan pour se diriger vers une silhouette plus subtile et austère: celle du pédagogue.

J'avais aussi glissé un N.b pour démontrer à quel point le débat sur les retraites était inconcevable d'un point de vue autre qu'économique ou administratif; que les combats de coqs entre écoles politiques n'avait pas lieu d'être, puisqu'il n'était justifié par aucune divergence dans les faits; qu'enfin je répondais de l'incompétence de l'à-peu-près totalité des militants de tout bord compte tenu de la complexité des dossiers et des compétences qu'il pré-requiert. A savoir notamment que le dossier des retraites dans sa forme la plus synthétique représente un volume d'une soixantaine de milliers de pages, avec certes des temps forts et des points plus techniques mais non négligeables. Tout du moins pas plus négligeables que l'alinéa d'un contrat d'assurance pour particulier, ce qui donne une idée du risque encouru par des analyses aussi évasives que celles qui parcourent actuellement le dossier des retraites.
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MessageSujet: Re: La démocratie : l'Etat faible   La démocratie : l'Etat faible Icon_minitimeMar 26 Oct - 14:16

Volodia a écrit:
[figurez-vous un(e) désespéré(e) s'arrachant les cheveux face à une connexion internet ayant réduit à néant le produit d'une heure de réflexion]
Je compatis. Ça m'est arrivé plus d'une fois...

Volodia a écrit:
Pour faire simple, contentons-nous de rappeler à Brath-Z que je distingue "à chaud" (vice administratif) de "passionné" (prérequis artistique et politique); distinction qui lui permettra, pour évidente qu'elle soit, de comprendre que je n'ai rien à voir de près ou de loin avec les "mauvais lecteurs" d'Hobbes & Rousseau.
Hum, désolé si tu l'as prit pour toi, c'était plutôt une remarque gratuite, en fait. Le reliquat de débats estudiantins (passionnés), aussi bien avec les "mauvais lecteurs" d'Hobbes et Rousseau qu'avec les béats de la "spontanéité". Par contre j'arrive difficilement à saisir en quoi "à chaud" est un "vice administratif" et "passionné" un "prérequis artistique et politique".
Et puis tu reconnaitras, je pense, qu'en règle général une réaction "à chaud" est motivée notamment par la passion. Pas seulement, note.
(et sinon, honte sur moi pour les siècles à venir, mais que veut dire "red in te" ?)

Volodia a écrit:
J'ajoute néanmoins qu'il faut que les partis politiques dépassent leur forme première et primaire de regroupement partisan pour se diriger vers une silhouette plus subtile et austère: celle du pédagogue.
Là, je suis d'accord sur l'esprit ! Les groupes et organisations à vocation politique se doivent d'être un minimum pédagogue, ne serait-ce que dans leur intérêt : la victoire politique passe par la conquête des esprits (je rappelle que la pédagogie est la transmission d'une logique de pensée plus que de connaissances). Par contre je ne vois pas en quoi cela nécessite de changer leur forme.

Volodia a écrit:
J'avais aussi glissé un N.b pour démontrer à quel point le débat sur les retraites était inconcevable d'un point de vue autre qu'économique ou administratif; que les combats de coqs entre écoles politiques n'avait pas lieu d'être, puisqu'il n'était justifié par aucune divergence dans les faits; qu'enfin je répondais de l'incompétence de l'à-peu-près totalité des militants de tout bord compte tenu de la complexité des dossiers et des compétences qu'il pré-requiert. A savoir notamment que le dossier des retraites dans sa forme la plus synthétique représente un volume d'une soixantaine de milliers de pages, avec certes des temps forts et des points plus techniques mais non négligeables. Tout du moins pas plus négligeables que l'alinéa d'un contrat d'assurance pour particulier, ce qui donne une idée du risque encouru par des analyses aussi évasives que celles qui parcourent actuellement le dossier des retraites.
Là, par contre, je ne suis plus du tout d'accord. Le système des retraites par répartition a été instauré en 1940 non sur la base d'un raisonnement administratif ou économique mais d'un parti-prit idéologique : il s'agissait de permettre aux anciens qui ont donné une vie de travail à la collectivité un "salaire différé" correspondant à la donne économique du temps actuel (d'où le financement par cotisations salariales). On peut tout à fait envisager une réforme sur le même mode, en passant par exemple de "salaire différé" à "revenu différé" d'où légitimation d'un alignement des cotisations sur les revenus du capital sur celles des revenus du travail (ou bien un moyen-terme entre les niveaux de cotisation actuels). On peut aussi (et c'est ce que font les gouvernements depuis 1988) adopter un point de vue purement démographique consistant à comparer le taux de retraités par rapport aux actifs (un raisonnement économique intégrant de nombreux autres paramètres tels le niveau de productivité, la consommation, la dynamique de la production, etc.).

Enfin, je conteste aussi qu'on puisse retirer légitimité à discuter de (et à s'opposer à) une réforme sans s'être fadé les soixante mille pages du dossier dans sa forme la plus synthétique. D'autant que les contestations peuvent aller jusqu'à celle de la logique même qui est employée dans le dossier (ce qu'à titre personnel je fais : la logique comptable ne me semble avoir engendré de progrès économique et social que lorsqu'elle a été sciemment mise de côté par les gouvernants).
C'est comme avec l'affaire du projet constitutionnel européen : ce n'est pas parce qu'on n'a pas lu l'intégralité du machin (je l'ai fait, mais ça n'a pas été une partie de plaisir...) qu'on ne saisit pas que sa logique est celle d'une "intégration" de l'UE dans une mondialisation résolument libérale, avec limitation (c'est-à-dire fin) des souverainetés nationales et cantonnement du politique à la gestion des affaires courantes. Il suffisait pour s'en convaincre d'écouter les interventions de son auteur le plus médiatique : Valéry Giscard d'Estaing. Et bien là, pour saisir l'esprit de la réforme des retraites, il suffit d'écouter Nicolas Sarkozy et Éric Woerth.

Par contre, je suis relativement d'accord avec ce passage : "les combats de coqs entre écoles politiques n'avait pas lieu d'être, puisqu'il n'était justifié par aucune divergence dans les faits". Quoique je n'aurais pas écrit "écoles politiques" mais "partis politiques". Et j'aurais ajouté "de l'arc central". En clair, tous les partis (qui sont des organisations structurées, au contraire des écoles politiques) d'orientation libérale auraient fait une réforme sensiblement identique. Mais, fort heureusement, en France, la politique ne se réduit pas à choisir de quelle couleur on va habiller la même politique (alors même que "PS et UMP, c'est la même chose ; c'est comme une voiture : vous choisissez le coloris, mais c'est la même voiture, et c'est la même route", s'il faut en croire Éric Besson) mais à choisir quelle politique va être menée.
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