Eclats.
C’est mon cœur en milliers d’éclats. Une pluie de moi dans ma poitrine et mon ventre. C’est la peur de savoir ce que je sais déjà. La souffrance de tes mots comme une lame qui ferait perler ma gorge offerte. La peur de croire tes paroles, en bourrasques balancées sur mon corps tremblant. Le doute que tu instilles dans mon esprit fatigué. Fatigué d’espérer ce que tu veux bien m’abandonner parfois. Tes lèvres pour une nuit et tes caresses au levé d’un soleil pâle et silencieux. Et l’indifférence brutale qui me heurte de plein fouet quand, seule parmi les autres tu m’abandonnes.
C’est mon cœur qui se brise quand d’une voix sure tu me dis non. Quand la veille tu me voulais toute entière. Pour un soir seulement entre tes bras. Pour le calme et le repos après un voyage sans fin. Quand tu me dis oui, et non. Quand je sens mes larmes à mes yeux s’épandrent. Quand ça fait du bien dans la peine. Que je sens mes larmes en étoiles se répandre dans le ciel de mes joues. Alors c’est mon cœur qui se serre à mourir, qui tord ma poitrine et broie mon souffle court. Chaque respiration comme un éclat plus profondément fiché.
C’est mon cœur en milliers d’éclats qui s’explose, quand je replace tes cheveux le soir. Quand tes lèvres effleurent mon front à l’horizon du sommeil. Quand tu fais vibrer ma peau sous tes doigts. Mais que tes regards glissent sur moi le jour dans la foule. L’attente de toi qui se fait violente alors que tu es si proche. La distance que tu instaures entre nous hors de notre lit. Quand le monde s’enveloppe de ton silence, c’est mon univers qui se meurt.
Et quand je pars sous ton regard incertain, où je ne sais rien lire, c’est mon corps qui se défait dans les bras salvateurs d’une amie. Quand je souffre sans raison. Que je ne sais pas me faire une raison. Alors que pour la première fois, cela fait tellement mal que j’en perds le sens. Quand je ne sais pas m’enfermer dans la négation de nous, c’est seule que je repars. Et mon cœur qui voudrait hurler à m’en briser la voix. Quand il se souvient du bruit de nos jeux le matin, du murmure de nos mots dans le froid, serrés l’un contre l’autre. Mais tout semble si vite oublié sous le voile de ton esprit silencieux.
Alors c’est mon cœur en milliers d’éclats quand je veux mourir de douleur. Quand je ne sais pas quoi faire pour calmer cette souffrance absurde. Absurde puisqu’elle ne t’atteint pas. Que je sois dans tes bras ou non, tu ne penses plus à moi. Je ne te manque plus et je ne suis plus belle.
C’est de savoir ce qui aurait pu être qui hante chacun de mes pas et de mes soupirs. Ce qui aurait été si tu nous avais laissé être différents. Mais c'est la perte seule qui me reste. J'ai perdu ma voix dans un courant d'air silencieux et glacial. C'est la sensation dure et tranchante du rejet qui m'enveloppe le soir. Sans un mot. Nous aurions été. Différents.
C’est mon cœur qui se brise pourtant, en millions d’éclats coupants, fiché dans ma poitrine et mon ventre.