Avide

C'est lui, une évidence.
Elle ne se voit pas avec quelqu'un d'autre. Elle ne se voit pas seule.
Chaque matin, elle oublie le jour d'avant. Elle le regarde dormir paisiblement dans le lit. Il a l'air fragile. Elle ne voit pas comment elle pourrait le quitter. Il l'épuise mais elle ne peut s'en passer.
Elle trouve toujours des excuses, des prétextes pour revenir.
Elle l'admet, elle est avide de lui. Elle l'aime à en avoir mal à la poitrine. C'est tellement fort que parfois elle croit mourir dans ses bras. Elle peut être elle-même, sans honte. Aucune des facettes de sa personne n'est ignorée. Son regard la trouble, il la fait exister.
Elle est soumise, son cœur est esclave de son être. Elle s'épanouit dans cette fusion, cette disparition.
Elle frémit en sa présence, se sent en danger. Elle a pleinement conscience de sa violence.
Quand il tient fermement son poignet dans sa paume, elle sait qu'il ne la lâchera pas.
Elle n'a pas peur, elle tremble d'excitation. Elle aime sentir ses mains la saisir brutalement.
Ne pas savoir si elle va s'en sortir, s'il va s'arrêter à temps.
Il ne cogne pas, rarement. Il n'en a pas besoin.
C'est une frénésie qui l'emporte, sur sa peau, des morsures, les stigmates de la passion.
Elle se perd dans cette animalité. Elle n'a pas à réfléchir, seules ses sensations la guident.
Pas de fracture, ni d’œil au beurre noir. Quelques hématomes, foulures, sur lesquels elle appuie pour se rappeler.
Ce n'est pas qu'elle aime avoir mal. Avec lui elle se sent tout permis. Elle en oublie les règles, la vie. C'est lui qui décide. Elle n'a plus à se demander si elle fait bien, ce que vont en penser les autres. Elle a dépassé ce stade.
Son monde se limite à lui, au clair-obscur de son existence.
A la douceur des lendemains courbaturés où leurs corps fatigués reposent dans un silence. Et à la fureur de la tombée de la nuit, à l'ivresse et à la colère de celui qui rythme les battements de son cœur.
C'est lui qui frappera le coup final. Parfois elle prend conscience de la fragilité de son existence, mais la vit pleinement.
Elle ne voit pas comment sortir de ce rouage sans casser la mécanique.
Elle ne sait même pas si elle veut arrêter. Elle se laisse dériver. Le quitter, vivre, aimer.

Tout va très vite. Ca débute comme toujours, une dispute. Ils crient, n'entendent même plus ce qu'ils disent. Puis la voix ne suffit plus, il s'approche d'elle, menaçant, et saisit dans ses mains sa tête et la fait reculer jusqu'au mur où elle se cogne.
Un bruit sourd emplit ses oreilles. Les couleurs s'éteignent. Tout n'est que pénombre et voile. Du sang envahit sa bouche, elle s'est mordu. Tout est au ralenti. Il continue à la secouer. Il la force à rouvrir les yeux, en lui claquant le visage, puis il l'embrasse, lui caresse les cheveux et tient fermement sa tête pour qu'elle continue à le regarder. Il lui tire le bras et la force à avancer. Elle résiste comme toujours, mais pour une fois n'abandonne pas, ne s'abandonne pas. Elle gesticule et s'échappe. Elle le regarde. Elle aime cet homme, il est beau, elle admire la force qu'il dégage. Il reste planté là face à elle. Il va revenir à la charge. Ca va recommencer.
Elle se précipite dans les marches et laisse son corps tomber, s'effondrer.
Il dévale les escaliers, la secoue, tape du poing contre le sol.

Elle respire par petit à coups, les yeux clos, le corps recroquevillé, ça se rapproche.
Dans ses bras, elle se recueille, elle se repose.
Elle ne l'entend plus pourtant il crie, l'implore et se recueille sur son corps.
Elle dort. Elle est morte.


[ No i won't be afraid, as long as you stand, stand by me]

Ah non ! Il ne faut pas t'arrêter si vite. Après tout ce que j'ai vu et dont j'ai été témoin, je veux la voir mourir doucement, sous les coups. Je veux savoir ce que chaque coup lui apporte et lui retire.

Je dis : Reprends ton texte et finis le !

Après je commenterai.

Citation :

Le quitter, lui ou la quitter, la vie.

je crois que c'est la seule phrase du texte qui me chiffonne. La syntaxe est trop bizarre, ça fait lourd et mal bidouillé.


UNE SEULE phrase sur tout le texte ! tu te rends compte ^^

Pas mal, j'applaudis à deux mains.

On avait déjà eu des textes sur ce genre de thématique (c'ets ça qu'on appelle masochisme ?), et je trouve que celui-ci, dans sa simplicité et son efficacité, est particulièrement bien ficelé et explicite.

Je suis pas sûr d'avoir envie d'en voir plus...

... quoi que ! (oui après tout moi je torture bien des petits vieux et des animaux sans défense dans mes textes... en même des fois je fais exploser les têtes des enfants ! mais ça n'a rien à voir :p)

Ah ah ah vous êtes rigolo!
Je veux bien en rajouter mais je sais pas si j'en aurai la force moi d'écrire plus!
Dvb, une seule phrase oui! mais le texte est court! hé hé! j'avoue qu'elle casse un peu la fluidité du texte, j'aimais bien la symétrie de la phrase mais c'est peut être pas en accord avec la tonalité du texte.

En fait c'est à la fois un thème sur la maltraitance et le masochisme, je me suis un peu perdue moi même en l'écrivant.

PS : Je vais essayer de le reprendre mais je ne garantis rien

Cassie, Tron, ça y est je l'ai battu, j'attends vos commentaires bande de détraqués

C'est gentil d'avoir retravaillé ton texte.

Il me convient nettement mieux ainsi, même si ce n'est pas ce que j'imaginais.

Hé ! C’est toi la détraquée !
L’idée de parler de la femme battue avec ce contexte masochiste est bien vu. Même si je ne suis pas certaine que toute femme battue qui reste près de son compagnon le fasse avec un tel plaisir.
Cependant, j’aime bien ce mélange de cruauté et de saveurs amoureuses. On pourrait associer ton texte à celui de Boris Vian « Fais-moi mal Jonnhy ».

Spoiler:

J’aime bien comment tu as mené le cheminement de cette dépendance.
Ce qui est le plus intéressant, je trouve, c’est la candeur du texte en comparaison des actes qui y sont décrits.

Par contre, je n’aime pas la fin : Elle dort. Elle est morte.
J’aurais préféré que tu ne me le dises pas aussi crument.

J'ai pensé à ce que vous m'aviez dit et puis j'ai eu une impulsion nocturne et donc j'ai écrit.
Moi non plus je n'imaginais pas poursuivre ainsi, et inconsciemment j'ai glissé là dedans, car je pense que j'ai toujours un fort sentiment d'individualité et de culpabilité. C'est bête mais pour moi généralement ce qu'on vit, subit on le choisit en quelque sorte ( j'ai pas dit que j'avais raison).

Je n'écrivais pas forcément sur une femme battue ou sur le masochisme, vous avez mis les mots à ma place à vrai dire, pour moi c'était surtout une relation extrême, de forte dépendance.

J'aime beaucoup Vian, c'est gentil.

Je pense que la brutalité de la fin est nécessaire, je trouve que c'est bien que ça choque et que ça contraste, car c'est la dure réalité. On ne doit pas fermer les yeux, je ne donne pas de morale pour autant, juste un instantanné