Mont de Vénus

Cette partie de toi qui souhaite s’incriminer. Pourquoi penses-tu que nous faisons face à un crime ?
Cela ressemble plutôt à un phare en flammes au milieu de nulle part. Un appel du feu qui lance tout le corps, le manipule, le dessine et le fait tanguer. Ce n’est pas un crime mais une sorte de dégénérescence momentanée.
Tu dis que ce n’est pas un crime, mais ton ventre se tend. Tu flottes sous tes propres cendres en fusion, la bouche ouverte, l’air à fleur de bouche. Tu voudrais le mordre, le griffer, arracher à ton souffle la caresse qui te noie. Mais ton silence étouffe tous tes cris. Tu gis dans les draps de l’envie, brûlante braise. Incandescence spontanée. Sois la compagne de ce moment si grand ! Maintenant je ressens pour deux cette main sûre qui danse et qui dénonce du doigt l’enclos sacré de ta rose. Et tout près de cette devanture, je sens cette main qui ose, sur le mont de Vénus, s’aventurer autour des ronces. Elle n’est que frôlement, douce vibration qui se répand dans nos nerfs. Toutes nos sensations fleurent la peau et s’arrêtent de vivre pour mieux recueillir les battements de nos cœurs. Ils s'étreignent l’un l’autre, pressent nos seins et tiraillent ces draps, blêmes témoins du drame. Car ta main endiablée s’engouffre dans la nuit et grimpe jusqu’au bout du phare. Garant d’une douleur exquise, toujours ce crime contre la chair nous désarme et nous dénonce par un ressac de cris. Une mélodie qui amuse les sirènes et qui charment nos marins lorsqu’elle emporte notre océan jusqu’à le déverser.

Le flot monte alors et suit le mouvement lourd de la houle. Ta main agrippe plus fort, plus tendrement aussi.  Elle modèle la mer, lui impose son souffle et tempère le temps. C'est un jeu dans lequel tu te mouilles toute entière. Maintenant, c’est l’effondrement d’un pont d’anges suspendus, d’un dos longtemps arqué qui ne l’est plus - la mer est brisée. Et parmi les dégâts, je hurle cette petite mort et sens le naufrage nous libérer.


Je soulève nos paupières et subjuguées par ces effluves tièdes qui altèrent notre air, je te souris. Tes mots sentent le musc et l’écume. Ton souffle s’éteint sur ma peau quand ta parole laisse les traces indélébiles de l’amour dit. Je t’entends dans l’odeur de ta sueur. Je te sens dans mes sens éperdus et je touche à nos âmes jointes dans une prière pour ce dieu qui unit nos chairs.