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 L'institut.

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Bouche Dorée

Bouche Dorée


Féminin Nombre de messages : 49
Age : 36
Date d'inscription : 15/07/2012

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MessageSujet: L'institut.   L'institut. Icon_minitimeSam 16 Nov - 5:21

Addendum:

Ici, c’est un Institut. Probablement qu’il a un nom mais pour l’instant je ne le connais pas. Sans doute que c’est quelque chose comme « La chênaie », afin de permettre au directeur de faire un parallèle ennuyeux et boursouflé sur sa mission. Mon nom, c’est Moineau. C’est un peu étrange de s’appeler comme ça, et même si je ne sais plus qui me l’a attribué, j’y suis habitué et c’est comme ça que je me présente. Un jour, un tuteur m’a dit que c’était le nom d’un petit oiseau. Je lui ai répondu que de nos jours, il n’y avait que des corbeaux et lui m’a dit que ça date d’il y a longtemps. D’avant l’histoire, celle avec un grand H qui fait des champignons.

Tout ça ne m’avance à rien, pas plus que d’attendre dans cette file interminable, apparemment. Il y a des gardes qui nous surveillent d’un air de maton. Je peux les voir qui caressent du doigt une sorte de matraque électrifiée. Nous n’avons pas le droit de parler, ni entre nous, ni pour poser une question. Je ne sais pas trop pourquoi je suis là. Il y a deux jours, on est venu me chercher dans mon école. J’ai trouvé d’autres types comme moi : désemparés, parfois apeurés. Déjà à ce moment, le silence nous a été imposé. J’ai espéré un peu que quelqu’un s’émeuve mais je ne crois pas que je manquerais à qui que ce soit là-bas.

Il commence à faire froid. Le soleil est en train de tomber. Je peux voir l’ombre de l’Institut qui avance doucement en recouvrant ceux qui sont devant moi. Je claque des dents. Les autres s’agitent et les gardes doivent donner de la voix. Certains allongent une gifle ou deux pour restaurer l’ordre dans la file. Les chuchotements se dispersent. Je suis resté sans bruit mais un des vigiles me regarde avec un drôle d’air. Le jeune a côté de moi, qui l’a remarqué aussi me dit :
« Celui-là, je crois bien qu’il va vouloir te voir seul à seul »
Avant de ricaner doucement et de faire un geste suggestif. Avant que je ne puisse lui demander ce que ça veut dire, l’un des matons, qui l’a entendu, s’approche très vite et envoie une claque retentissante à mon voisin. Il s’écroule. Il ouvre la bouche l’air de vouloir faire une scène mais le regard de celui qui vient de l’envoyer à terre l’en dissuade. L’homme m’observe un instant pendant lequel je m’emploie à avoir l’air docile. Puis il lance un regard vers le vigile à l’air prédateur et me dit à l’oreille :
« Ce petit con a raison. Je te déconseille l’infirmerie. »

Je n’ose rien dire. Je hoche la tête. A côté de moi le jeune se lève en me lançant un regard blessé. Je détourne la tête, mon admirateur aussi. Il a un air, un je ne sais quoi de terrible. Comme de la pollution dans les yeux, ses mains s’agitent tout en fluidité. Peut-être que pour lui, nous sommes un étal de boucher, il regarde la viande et lui fait de l’œil.  Je remarque que je ne suis pas le seul à retenir son attention. L’un de ses collègues s’approche et je les vois discuter, le sourire aux lèvres. Ils sont dangereux, ils chassent quelque chose. Ne pas savoir ce que c’est me rend nerveux. Enfin, la file avance. Doucement. L’Institut nous avale et du bout de la file la lumière blanche n’a rien de rassurant.

Finalement, pas à pas, nous entrons. Tous ensembles nous nous entassons dans une grande pièce écrue et sans décoration. Il faut se serrer, la pièce n’est pas très grande. Je suis au milieu de la foule. Je ne vois pas très bien mais au-devant quelqu’un prend place et s’éclaircit la gorge.
« Bienvenue à l’institut. Les surveillants vont vous appeler et vous mener à votre dortoir. Je sais que ce changement est brutal, mais sous peu vous saurez que c’est une bénédiction. Ne causez pas de scène, ne posez pas de problème. Je suis le Directeur et nous aurons l’occasion de faire connaissance. Bonne soirée.»

Le discours est à peine terminé que déjà des noms sont appelés. La pièce se vide doucement. On m’appelle, moi et neufs autres gamins. Le surveillant est un homme au visage déformé. L’un des côtés de son visage est affaissé et lui donne une sorte de rictus mauvais. Une balafre lui va du milieu du nez jusqu’à la mâchoire. Il s’aperçoit que je le dévisage ; s’accroupit devant moi, approche son visage tout près du mien et dit. « Regarde bien, petit. » Il sent la sueur et le savon. Il relève une mèche de cheveux.  « La prochaine fois que tu regardes je te fais la même. Ton profil s’arrangerait. » Je ne peux pas reculer. Sa main se saisit de mon menton.
« Il faut vraiment refaire à fond votre éducation. Quand un grand s’adresse à vous, répondez ‘’Oui monsieur’’ ou ‘’Non monsieur’’. » Sa mèche retombe sur son œil à moitié fermé. Je déglutis et répond d’une petite voix « Oui monsieur ». Sa main me lâche la mâchoire et je peux enfin détourner le regard.

Le surveillant se relève et fusille d’un œil deux idiots qui ricanent. Avec un air de haine profonde, il les fixe et le petit gloussement insupportable s’éteint dans leurs gorges. Puis il part. Un instant plus tard un gosse plus vif que les autres s’élance à sa suite et nous le suivons. Au bout de quelques minutes nous arrivons devant une porte épaisse en métal. Le surveillant la déverrouille avec une grosse clé et son regard s’étrécit jusqu’à ce que nous comprenions quoi faire. Dès le dernier d’entre nous entré, la porte claque et le verrou cliquète.  

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Bouche Dorée

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MessageSujet: Re: L'institut.   L'institut. Icon_minitimeMer 10 Sep - 2:54

Nous nous lançons des regards. Les murs sont blancs mais sales. La peinture est craquelée, on peut voir de la moisissure noire dans les coins de la pièce. La pièce n’est pas très grande, assez pour que cinq lits superposés y soient alignés. Ils sont disposés au centre, de sorte qu’on peut en faire le tour complet. L’armature est en métal. Je m’approche sans rien dire et teste l’un des matelas de la main. Un ressort grince, je peux en sentir la pointe à travers la mousse. Un autre grincement. Je tourne la tête. Un gosse a ouvert une porte et de fortes effluves de javel s’échappent d’une autre pièce. Les neurones de l’un de mes collègues semblent se connecter. Il s’avance, repousse violemment l’autre enfant hors de la pièce et referme la porte. A terre, l’autre fait mine de rien, se relève et s’avance nonchalamment vers l’un des lits du bas pour s’y assoir. C’est le signal. Nous nous jetons tous vers les matelas restants. Je laisse tomber ceux du bas, déjà accaparés par les plus gros ou en cours de l’être, et m’octroie l’un des lits du haut, éloigné des toilettes et de la porte d’entrée. Plus important, le costaud du dessous n’a pas l’air bovin. Je me penche par-dessus la rambarde et nos regards se croisent. Je n’y vois rien, son visage est fermé comme une porte de prison. Soudain, il se lève et me dit
« Ne me fais pas chier, je ne te ferais pas chier. »

Je me contente d’opiner. Il est grand et son visage atteint déjà la rambarde. Il n’a pas la maigreur habituelle de ceux qui sont déjà grands ; sans être gros. Ses cheveux sont courts, coupés en brosse, châtain, ses yeux sont marrons. Sa déclaration me parait un peu solennelle, comme s’il avait longuement réfléchi avant de m’en faire part.

Sur le lit d’à côté, à droite, je retrouve le gamin trop observateur. Il n’est pas très grand mais a apparemment réussi à s’arroger l’un des matelas du bas. Son regard crie triomphe. Je sens qu’il me tient responsable de sa gifle. Il a vraiment l’air jeune, plus que nous en tous cas.
La porte des toilettes se rouvre et la brute en sort. Une sale odeur se répand et les plus proches grimacent. Le gamin se rend compte que les regards se sont tournés vers lui. Il se met à glousser, lâche un pet retentissant puis se dirige vers le lit d’à ma droite. Nez à nez avec le jeune, il fait une moue et reste immobile quelques secondes pendant lesquelles l’autre sourit nerveusement. Le jeune fini par craquer. Il marmonne un ‘’salut’’ et détourne les yeux, assis sur sa couverture.

« C’est quoi ton prénom ? » Demande alors le gros.
« Tommy. »
« Tommy hein ? »
« Ouais, je… »

Tommy n’a pas le temps de finir sa phrase. La brute lui a saisi une jambe et le traîne hors du lit. Tommy essaie de s’accrocher à l’armature du lit. Il s’accroche. Le gros tire un grand coup et le poteau échappe aux mains de Tommy. D’un grand geste du bras il est envoyé glisser et s’écrase en se cognant la tête contre le mur.
« Salut Tommy, moi c’est Rex. »

Rex renifle alors un grand coup et crache dans les cheveux blonds de Tommy avant d’aller s’écrouler sur le matelas. De là où je suis, je peux voir les épaules tremblantes de Tommy le gamin. Un petit moment se passe et le public se désintéresse de lui. Il se relève en grimaçant un peu, jette un coup d’œil aux alentours et s’aperçoit que je le regarde encore. Tommy me jette un regard assassin et part dans les toilettes pour se cacher, malgré l’odeur écœurante que l’on devine depuis les lits.

Quelques instants plus tard, le surveillant entre et observe l’ordre naturel qui vient de se créer. Avec un reniflement, il se tourne vers les toilettes lorsque Tommy en sort. Sans sourire, il marche jusqu’à la porte avant de lâcher un grognement et de lancer un regard courroucé au petit. Il lui demande :
« C’est toi qui a fait ça ? »
« Non, je… »
« Non quoi ? »
« Je… »
« Non monsieur ! Retiens ça, je n’aime pas me répéter. Qui a foutu un bordel pareil dans les toilettes en à peine cinq minutes ? C’est toi ? »
« Non monsieur ! C’est pas moi m’sieur ! »
« Qui alors ? »
Tommy se tourne. Rex le regarde, un air méchant sur les lèvres en fronçant les yeux.
« Qui ? Je t’ai posé une question. »

Tommy reste muet et Rex ne peut s’empêcher de laisser échapper un ricanement. Les yeux du surveillant s’étrécissent. Il prend Tommy par le bras et l’emmène près de Rex, qui perd son sourire à chaque pas. Rex s’assoie au bord de son lit, puis se lève. Je peux le voir de là où je suis regarder droit dans le vide, au travers du maton, dans ce qui semble être un pressentiment. Le garde s’arrête, et Rex le géant lui arrive tout juste au menton. Il y a un silence.

Le garde frappe alors Tommy d’un revers de la main. Le petit valse légèrement avant de reculer sans oser courir. Le visage de Rex s’éclaire à peine lorsqu’un direct dans le ventre le prend par surprise. Un genou au sol, je peux le voir tenter de reprendre sa respiration frénétiquement. Il suffoque encore quand le coup de pied l’atteint dans les côtes gauches. Rex s’écroule et sa voix devient rauque avant de tourner perçante. Le surveillant le relève et tout en tenant fermement la nuque, enfonce sa main dans la bouche pour en tirer la langue. Rex est paralysé, les yeux devenus fous, cherchant quoi faire dans le visage du garde qui pendant dix, quinze, trente secondes, tire sur cette langue, les ongles plantés dedans, les jointures blanches. Des petites gouttes perlent sur son poignet et sur le menton de l’enfant qui n’ose rien faire en émettant des gargouillis écœurants. Finalement, les doigts relâchent l’appendice avant de s’écraser contre le foie de Rex, qui s’écroule de nouveau en gémissant, sous le choc. Le garde se retourne et nous observe. Le silence est mortel et certains pensionnaires sont visiblement au bord des larmes. Finalement, il se retire, laissant un tommy sanglotant et un Rex apathique, la joue collée au sol dans une flaque grandissante de salive mêlée de sang. Les lumières s’éteignent et petit à petit, j’entends le bruit des couvertures qui sont tirées, les reniflements qui s’estompent et Rex qui regagne péniblement son lit. L'odeur infecte se répand doucement dans la pièce.

Je ne dors presque pas.
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