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 Réminiscences (Union IV)

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Syllas

Syllas


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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeMer 18 Fév - 19:24

En premier lieu, il convient d’analyser l’état actuel des systèmes militaires et stratégiques disponibles d’une part par la majorité des états et collectivités, d’autre part uniquement par les plus importantes puissances et centres. Notre méthodologie s’axera sur dans un premier temps un examen séparé des trois énergies stratégiques, et de leur intervention tactique cette fois, puis sur une synthèse de l’ensemble.
Amiral Nikolaï Syllas d’Acre, extrait de la première partie de « La guerre moderne » .


-- -- --

An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre


On avait mis le bateau que transportait le deuxième véhicule à l’eau au profitant de l’endroit favorable à cela qu’offrait le plateau rocheux descendant en pente douce vers le lac de retenue. C’était une barge à fond plat, large, faite pour le transport sur le fleuve Fynn, uniquement dotée un petit moteur diésel à l’arrière qui devait sûrement coûter cher à alimenter, PetroInter et la Standard favorisant les moteurs à Hexanox pour enfin pouvoir supprimer l’essence civile, même si la firme restait liée par contrat à l’état qui avait toujours besoin de dérivés pétroliers. Une brèche avait été réparée quelques années auparavant manifestement, et cela ne semblait pas spécialement solide. Ils n’avaient pas intérêt à toucher un rocher à cet endroit là, car ils seraient dans un sacré pétrin. Enfin, ils, pas Hel. Elle avait appris à nager dans les eaux froides et tumultueuses de la mer de Kangas qui bordaient la péninsule d’Eupatoria, et elle s’en tirait tout à fait honorablement, même si Kers et d’autres avaient plus d’aptitudes pour cela qu’elle. Mais elle doutait que ses compagnons puissent en dire autant, étant donné l’état des installations de natation à Kamensk, et du fait que ceux ayant envie de faire quelques longueurs dans le fleuve risquaient de finir à l’hôpital d’Acreopolis. Mais, souriant en observant l’ombre de l’Île-longue, de l’autre côté du lac, qui était large de quelques six kilomètres à cet endroit, Scaliger était confiant, presque insouciant, assis sur le petit banc qui faisait le tour, à une dizaine de centimètres du rebord. L’intérieur était encore vide, un grand espace qui aurait sûrement pu accueillir beaucoup de choses. Seuls les sacs sur lesquels ils avaient dormis en route étaient là.
Derrière eux, les chauffeurs et un milicien s’étaient installés à l’ombre d’un de leurs véhicules, et paraissaient jouer aux cartes autour d‘une petit lanterne ionique, surveillant du coin de l‘œil le gosse ligoté contre un des sustentateurs. Ils s’étaient relayés devant lui, lui gueulant des menaces, sans arriver à rien, et finalement, ce sont Hel et Janeshki qui sont parvenu à lui cracher son nom grâce à une petite technique spéciale apprise quelques années avant, comme par hasard, et qui était très utile dans ce genre de cas. Elle consistait à maintenir la tête fermement le regard en avant, tandis que la main de quelqu’un d’autre, invisible à l’interrogé et ne disant rien, se glisse sur la nuque, et, avec l’aide d’un petit objet en fer, appuyait avec force dans une cavité, causant une douleur phénoménale renforcée par l‘imagination. Le gosse leur avait avoué qu’il s’appelait Maxam, de Christiansa, et qu’il avait perdus ses parents, qui s’étaient égarés en chemin, et étaient tombés sur des gars pas très recommandables des Galtieri. Le père a été exécuté sous ses yeux manifestement, et si ça mère était encore à peu près fraiche, elle embrassait probablement sa toute nouvelle carrière dans les maisons publiques de Kamensk-Nord. Si le gamin disait vrai. Tous demeuraient sceptique, et continuaient de se demander ce qu’ils feraient ensuite de lui. Dans l’immédiat, bon signe pour lui; ils ne le noieraient pas dans les eux froides du lac ce soir.
Ant’ fit signe à son homme, qui hocha la tête en jetant sa main de cinq cartes, ayant manifestement gagné la première manche.
Entre-temps, tout le monde était à bord. Une demi-douzaine d’hommes de main, Scaliger, Lubbock, fumant tranquillement, installé au fond, Janeshki, et elle, l‘air décontractée. Une belle bande, songea-t-elle derrière son petit sourire de façade, au moins on n’aura pas une tête d’enterrement sur la photo du légiste. Hel s’était placée à l’arrière, non loin du moteur, qu’un milicien trapu lançait en tournant la manivelle magnétique. L’antique dispositif crachota de la fumée noire qui couvrit la face du malheureux « expert » désigné, mais commença malgré tout à pétarader péniblement. Finalement, un petit filet d’écume se forma en dessous de leur coque, puis grandit, et bientôt ils filaient sur les eaux calmes du lac Tisça. Dans la toute fin du crépuscule, celles-ci semblaient comme rayonner d’une faible lueur violette au creux des vagues. Ce fut seulement quand ils arrivèrent au milieu de leur traversée qu’il y eut quelques remous, très localisés, provoquant des clapotis anormalement forts et inquiétant, alors que le Hetman allumait un de leurs projecteurs portables ioniques. La lumière balaya les flots dans la pénombre opaque du crépuscule, alors qu’il y avait un frisson qui parcourait les rangs des miliciens, installés à l‘avant, scrutant les ténèbres dans laquelle se discernait à présent à peine la silhouette devenue menaçante de leur objectif, alors même qu‘un rafale de vent balayait l‘embarcation, un vent véritablement froid, qui donna la chair de poule à Hel au niveau de ses bras nus. Elle se dépêcha de défaire le nœud qui retenait sa combinaison autour de sa taille, et de l’enfiler de nouveau au dessus de son vêtement léger. Mais alors qu’elle tendait la tête vers le haut en terminant d’ajuster sa tenue, il lui sembla distinguer quelque chose passer à côté du disque à peine visible de la Grande Lune, une ombre, puis une autre. Elle s’arrêta net dans son mouvement, chancelant un peu, levée dans les remous qui secouaient leur glorieux radeau, mais ses yeux eurent bon fouiller toute cette région du ciel, ils ne découvrirent plus rien.
Tu déconne ma fille, faut arrêter la ravaga à deux sous avant d’aller se coucher, plaisanta-t-elle mentalement, sans pour autant se sentir le cœur à rire. Elle avait plutôt un sombre pressentiment, mais à côté, Scaliger semblait inébranlable dans son optimisme et son intention d’aller jeter un coup d’œil sur l’île. Puis son regard croisa celui de Janeshki, et elle lut dedans qu’il devait avoir entrevu la même chose qu’elle. Ses lèvres dans la lumière issue des côtés du projecteur étaient contractées pour conserver une expression neutre, mais elle connaissait le Hetman, c’était un gars prudent, quand quelque chose ne lui revenait pas, il préférait mettre les voiles, et vite. Cela avait évité plusieurs fois à leur bande de se faire avoir par la Famille, chez qui un traquenard était autre chose qu‘une planque de la police; cela risquait de se terminer dans le sang.
Alors qu’ils étaient en proie à ces incertitudes, l’embarcation continuait son bout de chemin, et était à présent plus proche des côtes insulaires que du continent, qui disparaissait presque, se confondant avec l’eau, à l’exception du petit point que représentait la lumière de la lampe des joueurs de cartes. Bande de veinards, songea-t-elle, amèrement.
Mais quelque chose vint les distraire dans leurs idées morbides. Un des miliciens, qui avait jusque là tenu héroïquement, avait fini par abandonner la lutte, et vomi par-dessus bord pendant de longues secondes ce qui semblait être bien plus qu’un ou deux repas, plutôt une longue série de fastueux banquets allant nourrir les poissons du lac. Ses collègues éclatèrent de rires gras, Lubbock eut un air méprisant, et firent quelques plaisanteries, même Janeshki et Hel se permirent un sourire, et oublièrent pendant quelques secondes l’endroit sinistre où ils se trouvaient, mais furent rappelés immédiatement après à leur situation par la voix de Scaliger, qui regardait l‘homme au visage de suie qui tenait la barre:

-Ralentissez! Je crois qu’on arrive à portée, commenta-t-il, avant de se tourner vers le hetman: Janeshki, tachez d’éclairer pour voir où nous pouvons accoster.

Le motard obtempéra, et braqua son projecteur sur la côte, qui n’était en effet plus qu’à une quinzaine de mètres d’eux; on pouvait entendre le clapotis de la faible houle contre ce qui n’était manifestement que rochers et galets. Le puissant faisceau confirmait cela: des gros blocs défendaient l’accès, rond ou allongés, ils s’étalaient sur plusieurs mètres avant que la côte se raffermisse, et ne devienne un terre-plein dominant de plusieurs mètres la surface de l’eau. Leur timonier fit avancer l’embarcation en parallèle, à vitesse réduite, et un deuxième projecteur fut mis en batterie. Durant de longues minutes, ils cherchèrent un endroit où accoster entre les rocs, sur près d’un kilomètre, mais, devant la mauvaise humeur et le manque de patience croissant de Scaliger, ils durent se résigner à aborder sur une plage espèce plus accessible, formée d’énormes galets pointus. Malgré les efforts du barriste, la barge ne pouvait s’approcher à moins de trois mètres du plus proche des rochers sans risquer d’abimer la coque déjà fragile, et ainsi de les piéger dans un endroit peu accueillant. Antonelli fulmina, mais ne put rien faire, et dû se résigner à accepter la situation. Il s’empara du premier projecteur, et le braqua sur la côte à cet endroit. Les premiers galets étaient épars dans l‘onde, mais se densifiaient et s’empilaient au fur à mesure pour former une véritable plage qui montait vers la pente rocheuse de l’intérieur de l’île en elle-même. Le mafieux se gratta le menton, et puis se tourna vers Janeshki:

-Bon, tu vas y aller en reconnaissance avec la fille. Et Lubbock.

Il regarda celle qu’il venait de nommer.

-Hel, c’est ça?

Elle hocha lentement la tête, un peu indécise.

-Bon, vous montez jusqu’à la fin d’ces p’tins d’cailloux, et m’dites si la voie est libre. Okay?
-Okay, répondirent-t-ils en concert, bons volontaires désignés.


Dernière édition par Syllas le Mer 18 Fév - 19:25, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeMer 18 Fév - 19:24

Janeshki se positionna en premier sur le bord, alors que Hel portait sa main à son pendentif, et activait son propre bloc, pour lui éviter de se retrouver trempée et transie, sous le regard à la fois hostile et soulagé de ne pas avoir à y aller en premier des miliciens. Après avoir réactivé son casque et bandé ses muscles pendant un instant sous l’armure d’hexanox, le hetman prit appui contre l’une des rainures du fond de la barge avec le pied droit, contre le rebord avec le gauche, avant d’une détente se propulser sur deux mètres en avant, et d’atterrir dans l’eau, formant une série de vagues autour de l’endroit où il avait pénétré la masse liquide. Mais avant qu’on ait le temps de le fixer, il avait déjà grimpé sur le gros roc gris-beige le plus proche. Son casque se replia sur un bref mouvement de son doigt, et il dit:

-C’est pas très profond, un mètre au plus, on n’aura pas de problèmes…passez moi le projecteur.

Scaliger s’avança vers le bastingage alors que Hel à son tour prenait position, et le lança d’un puissant mouvement à son chef de la sécurité, qui l’attrapa au vol sans difficulté. Puis il sauta sur un autre rocher pour laisser le plus proche à la jeune femme, qui imita sa première performance. Même à travers la protection, elle sentait que l’eau était froide. Une bloc de Motograv n’était pas un équipement de plongée, et uniquement conçu pour protéger de la pluie et de la boue, mais pouvait rester immergé pendant une minute au moins avant de commencer à prendre sérieusement l’eau. D’ailleurs, Hel sentit quelques gouttes au niveau de sa main, et ne doutait pas qu’il devait en avoir ailleurs, mais ça n’était rien. Néanmoins, ce froid était anormal. On était à la belle saison, et l’eau du lac se réchauffait normalement dans la retenue, qui était immobile au soleil, or, celui-ci venait à peine de se coucher, et la chaleur aurait du subsister encore assez longtemps. C’est en se posant cette question qu’elle grimpa d’un mouvement sur le roc, et une fois s’être stabilisée, désactiva le casque, pour se retrouver avec quelques gouttelettes dans ses cheveux bouclés, qu’elle s’abstint de chasser d’un revers de sa main gantée, en sachant celle-ci encore plus mouillée. Du regard, Hel chercha son Hetman, qui avait entre-temps avancé de plusieurs rocher. Elle fit de même, et était bientôt à ses côtés sur la plage de galets, avançant assez péniblement sur ce sol chaotique. Mine de rien, la montée était assez abrupte, mais sans commune mesure avec les talents d’escaladeur qu’il aurait fallu déployer à d’autres endroits de la côte insulaire si étrangement inaccessible.
Enfin, ils parvinrent au sommet du talus. A partir de là, il y avait une pente plus douce qui montait au moins soixante-quinze mètres jusqu’à une arrête de sommet qui courait tout au long de la partie de côte qu’ils connaissaient de vue.
Mais déjà ils entendaient derrière eux un autre bruit d’un corps lourd entrant dans l’eau. En se retournant, ils découvrirent Lubbock nageant maladroitement en direction du rocher, puis s’y hisser péniblement. Lorsqu’il fut debout, il lança un regard chagriné à ses habits détrempés jusqu’au col, et tira un paquet de cigarette, également trempé, oublié dans une poche. Après un essai pour en allumer une, il finit par jeter dans l’eau la marchandise désormais inutile. Ensuite, avec une agilité surprenante qui tranchait avec ses performances de natation, il arriva à la côte en quelques bonds, puis monta également très rapidement. Il lança aux deux autre un regard criant « n’oubliez pas qu’j’ai été dans l’infanterie de marine et en ais vu d’autres, bandes de mauviettes », mais ne dit rien.
Avec le projecteur, ils examinèrent les environs, sans rien trouver de suspect dans la masse minérale que seuls quelques buissons secs couleurs sable perçaient, puis se fixèrent sur la pente de la montagne, où ils réussirent à dégager un petit chemin plus praticable, assez dissimulé. Il serpentaient le long de la pente, et évitait les failles et fissures qui la lézardaient ici ou là. Rien à signaler.
Le Hetman se retourna et fit un signe à Scaliger sur la barque. Celui-ci jaugea la distance qui le séparait. Il ordonna quelque chose que Hel n’entendit pas à un de ses miliciens, et ce dernier eut à essayer, d’un seul saut, d’arriver sur le roc, mais il s’écrasa dans l’eau tête la première sans rien atteindre. Ant’ fulmina, puis, résigné à se mouiller les pieds, fouilla dans ses poches, et posa à bord sa com. et quelques autres objets électroniques. Cela fait, il prit appuit sur le bord, renifla, et se lança dans l’eau froide. Après quelques mouvement désordonnés, il parvint au rocher, et, en sautant depuis celui-là sur un autre, puis encore un, et parvint finalement jusqu’au groupe en haut du talus. Il avait, par un quelconque miracle, réussit à ne pas mouiller son veston, mais observait le reste d’un air en colère.

-Si j’avais su, on aurait ramené une passerelle, marmonna-t-il, avant de gueuler à l’intention des gars encore sur le bateau: vous vous dépêchez, oui? On n’a pas que ça à faire!

Les miliciens échangèrent quelques regards agacés, mais se mirent à l’eau aussi vite que possible, et montèrent sans enthousiasme la pente rocailleuse jusqu’à leur patron. Ils avaient ramenés le deuxième projecteur. Seul un homme restait sur le bateau, avec une petite lumière attachée au portique de métal qui passait au dessus de l‘embarcation, se balançant au grès des mouvements de la houle.
Janeshki indiqua à Scaliger le chemin à peu près dégagé qu’ils avaient remarqué, mais celui-ci tira une feuille de sa poche, et déplia. Elle était assez grande, et formait une large représentation couvertes de lignes tordues. Une carte bidimensionnelle à l’ancienne. Les motards s’approchèrent derrière lui, et jetèrent un coup d’œil. Il posa son doigt sur un endroit, dans ce qui était l’île, sur sa côte ouest plus précisément:

-Voilà, nous sommes ici. Et votre chemin…Est ici.

Son index remonta vers la ligne chiffrée qui représentaient la crète. Mais le regard du hetman continua de l’autre côté, et il fit une remarque:

-Mais, à l’intérieur d’ce cratère, ya…rien.

Ant’ fit une moue sceptique, mais ce fut Hel qui répondit, en montrant une petite mention en bas à gauche du plan:

-Cette carte a plus de deux cent ans, avant qu’on ne généralise les cartes holographique. A l’époque, l’île devait être déserte.
-Exact, confirma le mafieux, elle a même trois-cent ans en théorie, mais est une copie datant d’il y a deux cent. Malheureusement, à l’époque, l’île était déserte. Elle ne nous servira que pour la topographie.

Janeshki poussa un « hum » méfiant, mais dit:

-On commence à monter donc?
-Oui.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeSam 28 Mar - 21:43

L’engagement.
Il est la base même de l’action militaire, et détermine dans la grande majorité des cas ses conséquences. Il consiste en un mouvement de façon de se mettre au contact direct de l’ennemi, et de le vaincre. Bien entendu, on peut nuancer. Ainsi, lors d’un maintient en position défensive, on ne peut parler proprement d’engagement, même si des sorties et des la préparation de frappes par des moyens indirects existent. De même, l’objectif de l’engagement peut ne pas être d’obtenir la victoire mais uniquement de retenir l’ennemi, de le leurrer, de l’amener dans la position voulue à partir de la laquelle on parviendra à le vaincre.
Dans la branche terrestre, il se déroule généralement entre les composantes militaires d’infanterie et de cavalerie. Pour la première, on peut aussi bien mener le combat uniquement à l’arme à distance, ou alors charger à la baïonnette, qui généralement donnent, dans les deux cas, lieu à des combats sanglants et indécis. Pour la seconde arme, les unités mobiles permettront des mouvements bien plus rapides et décisifs, et de percer une brèche dans les lignes ennemies, mais présentent un inconvénient dans la nature même de leur point fort: cette avancée risque d’isoler les unités en territoire ennemi. Mener correctement une campagne nécessite de combiner les deux armes en parfaite harmonie, et avec les autres possibilités aérospatiales offertes, pour obtenir la victoire stratégique. A part, l’artillerie est nécessaire à l’engagement, même si elle n’agit que depuis l’arrière dans la majorité des cas, l’artillerie de campagne étant apparentée à l’infanterie, ou alors montée sur un support motorisé et faisant dans ce cas partie de la cavalerie. Pour une offensive massive, une préparation d’artillerie est vitale: elle désorganisera et détruira les premières lignes adverses. La victoire tactique introduit un autre facteur, qui est la géographie immédiate de l’endroit ou a lieu l’engagement de l’ennemi. L’engagement terrestre prend fin avec le terme des combats sur le champ de bataille.

Amiral Nikolaï Syllas d’Acre, extrait de la seconde partie de « La guerre moderne », « L’engagement 1/2 » .

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An 3847, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre


L’opérateur Com. était accroupi à côté de sa machine, dans la fraicheur de la nuit des Badlands. Son visage encore livide portait les signes caractéristiques de l’épuisement, en plus de cernes et d’yeux injectés de sang. Un pas derrière lui, le Cavalierre avait également piteuse allure, une partie de la manche de son uniforme dépouillé arrachée, en dessous de laquelle perlait le sang, , son arme encore chaude battant sa poitrine à chaque mouvement. Ses yeux disparaissaient dans l’ombre de sa casquette légèrement brûlé sur l’arrière, laissant à peine entrevoir un éclat lorsque l’écran de la machine de communication émettait une faible lueur verte. Elle avait été endommagée dans leur retour mouvementé du lac Tisça, et nécessitait des réparations que l’opé’ ne pouvait faire dans les cahots de leur déplacement à travers l’environnement hostile des Badlands. Ils s’étaient arrêtés à proximité d’un des petits affluents du fleuve Fynn, et la plupart des hommes se reposaient dans l’herbe touffue, ou alors se rafraichissaient après les heures terrifiantes qu’ils venaient de passer. Ils avaient également une demi-douzaine de blessé que leur unique infirmier traitait péniblement dans un camion, tachant de régénérer les cellules des grands brûlés et d’empêcher l’amputation des victimes d’autres « accidents ». Le lieutenant Faieil avait été tué, et ils avaient du laisser le cadavre derrière eux, même si Syllas avait eut le temps d’arracher tout les insignes et de prendre l’identificateur numérique. Ensuite, il y avait eut la sale besogne, passer par les armes une poignée de civils qui avaient eut la malchance de passer par là au mauvais moment. Cela ne plaisait pas au Cavalierre, mais les ordres étaient les ordres: aucun témoin, même lointain. Il n’avait pas hésité, tout comme ses hommes.

-Attendez! Je crois que je reçois quelque chose. C’est très diffus…je vais essayer de redresser le signal…

L’opérateur trifouilla sur la multitude de boutons, et de la neige constante jusqu’alors émergea un morceau de phrase, parfaitement clair, mais aussi fugitif que volatil, sans la moindre image holographique associée:

-…disperse et se retrouve…

Le commandant fronça les sourcils, et demanda, agacé:

-Jarren, qu’est-ce que c’est que ce charabia?

L’opérateur eut un mouvement désolé des bras, et répondit, tout en continuant de tourner la commande:

-Je n’en sais rien, commandant. Toutes les fréquences subspatiales civiles sont vides, je ne suis pas encore arrivé aux militaires. Celle qu’on vient d’entendre n’était même pas dans le spectre habituellement utilisé. Je ne connais personne qui les utilise, c’est trop instable comme liaison, vous l’avez vu.

Syllas eut un geste irrité, tapotant du bout des ongles sur le bloc énergétique de son SIP nerveusement:

-]Peu importe, passez directement au militaire, je n’ais pas envie d’entendre les nouvelles régionales de Kamensk, vous savez.

Heinz hocha la tête, et fit effectuer au bouton de contrôle une rotation complète. Nouveaux grésillements, continuels, malgré les essais du malheureux opérateur. L’officier, quoique intrigué par ce silence Com., allait tourner les talons voir s’il y avait encore un peu d’alcool disponible pour faire passer les émotions des heures précédentes quand il y eut un cri de joie.

-J’ai un signal, commandant! S’écria Jarren, c’est des nôtres.
-Enfin! Affichez moi ça si ça marche.

Le projecteur au dessus du bloc se déploya, fut illuminé d’une petite lumière bleue, et s’activa. Juste au dessus, une image à l’échelle un demi d’un homme de taille moyenne, au visage nerveux et rougit contrastant avec une chevelure brune déjà rare malgré un âge encore relativement jeune, se tenait dans une position entre l’avachissement et la brutalité.

-Ah, enfin j’arrive à contacter quelqu’un! Fit-il d’une voix où perçait également l’irritation—décidemment ce soir dans l’armée, songea avec un demi-amusement Jarren—, avant de continuer: vous n’avez pas idée comme j’ai eut des difficultés à tomber sur autre chose que des grésillements…

Il étudia longuement les épaules de l’uniforme de son interlocuteur, avant de se hasarder:

-…Commandant, c’est bien ça?
-C’est bien ça, Commandant d’escadre, grinça Syllas. Mon nom importe peu.
-D’ailleurs, pardon de ne pas m’être présenté, se corrigea l’étrange bonhomme, Colonel Kwessel Sima, du IXème de ligne de Suse. J’ignore quelle est la raison de votre…
-Assez! L’interrompit le commandant, ce sont mes ordres, voilà tout. Je ne vous demande que pourquoi je n’arrive également à contacter personne d’autre.

Sima le jaugea avec étonnement, puis déclara doucement:

-Vous n’êtes pas au courant?

Syllas releva ses cils avec un petit mouvement négatif de la tête, mais resta muet. Le colonel émit un bruit guttural, et s’expliqua sur un ton assez mécontent:

-Toutes les forces qui restent sont en alerte. Les Badlands et presque la moitié du continent sont à feu à sang! J’pense que c’est le Cartel qui a lancé un soulèvement général avec l’aide des Hunsa de Kamensk. Ils ont pillé de larges quartiers de la cité, et d’autres villes le long de la vallée du fleuve Fynn. Même les casernes n’ont pas étés épargnées, nous avons étés submergés par le nombre. Ils ont fait venir des mercenaires, en partie d’Alttoria et de Prijnedor Novi, ainsi que d’autres zones en rébellion le long de la frontière Alttorienne, sans qu’on ne s’en rende compte.
-Acreopolis? L’ouest? Demanda abruptement Syllas.
-Je suis sans nouvelles. La dernière communication assurait que la capitale tenait, et que la rébellion n’avait pas atteint les territoires en bordure de l’océan et la mer de Kangas.

Les épaules de son interlocuteur retombèrent devant la catastrophe, mais sa voix demeurait aussi vive et violente, alors qu’il continuait:

-J’étais avec une fraction du IXième, environ deux cent hommes et des transports légers, en entraînement dans les forêts des monts Métallifères au moment où ça a commencé, hier soir, et lorsqu’on est redescendu, on a failli se faire massacrer par une horde de mercenaires. Et vous, où êtes vous en ce moment?

Syllas fit une légère moue en clignant des yeux. Il recalculait ses positions. Manifestement, il faudrait coopérer avec cet étrange homme en l’attente des renforts, et laisser tomber quelques pans du secret de l’action de Track 2. Finalement, alors que Sima s’apprêtait à le relancer, il déclara lentement:

-Je me trouve dans les Badlands, non loin de la route 7, au niveau de la rivière Karkemi. J’ai soixante-quinze homme d’infanterie de marine, dix véhicules blindés tout-terrain, et deux half-tracks, blindés également.

Le colonel fit une mine étonné devant une force d’infanterie de marine aussi importante et équipée si loin de ses bases, qui étaient sur la côte entre Acreopolis et Eupatoria. Mais ayant compris que la mission de son unique interlocuteur était aussi secrète que jalousement défendue des indiscrets, il renonçant à questionner. Au lieu de cela, il demanda simplement:

-A votre avis, commandant, faudrait-il opérer notre jonction, où attaquer ensemble une position ennemie et s’y retrancher ensuite?

Syllas croisa les bras, et s’engagea dans une réflexion stratégique au moyen terme. Déjà, le temps que les renforts arrivent, en petite quantité des mondes voisins de galaxie 8, et ensuite la marine Christianienne—Acre appartenait au territoire de la Sérénissime, et celle-ci était pour l’instant une meilleur protection que l’Union en proie à la guerre civile—depuis la galaxie 7.

-L’unique pont sur la Fynn se trouve en plein cœur de Kamensk, et le premier guet à quatre cent kilomètre au nord. Le fleuve est long et large, même si j’avais des amphibies, le passage serait difficile. Il nous faudra passer par le cœur de la révolte, car derrière nous il n’y a que le désert.
-Vous voulez donc aller vers Acreopolis?

Syllas hocha la tête.

-Mais si celle-ci est déjà tombée?
-Même si à cause de la guerre civile et des coupes de budgets nos forces sont très affaiblie, et si vous dites vrai, notre ennemi n’est qu’un ramassis de mercenaires généralement mal équipés et à la logistique minimale. Ils ne pourraient prendre la capitale sans traîtrise majeure. De même, si nous joignons nos maigres forces, nous pourrons les tenir en échec jusqu’à l’arrivée en lieu sûr. Ensuite, on prendre le 47, pour couper et arriver directement.

Le colonel Sima resta perplexe, la mine songeuse.

-Je devrais donc m’engager dans la ville, et vous aider ensuite à sortir par le passage que j’ai pris à l’allée.
-Exact. Cela permettrait de minimiser les pertes par rapport à un engagement de mes seules unités.
-Mais cela nous met en danger tout deux…?

L’homme de la marine acquiesça de nouveau, ne disant que le strict nécessaire en fait.

-Bon, il va falloir mettre ça au point, marmonna à contrecœur Sima.


Dernière édition par Syllas le Sam 28 Mar - 21:45, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeSam 28 Mar - 21:43



Dans le cadre de la marine spatiale, et une moindre mesure de son tenant aérien, l’engagement se traduit par l’agression directe sur les unités adverses. Ici aussi, il peut être aussi bien défensif qu’offensive. Une flotte en stationnement sur une trajectoire orbitale adoptera une formation de combat défensive de couverture, protégeant ses unités les plus vulnérables, et devra le faire d’autant plus vite que souvent l’agresseur a l’effet de surprise avec lui, et une supériorité numérique sûre, afin de ne pas s’exposer à d’éventuels soutient depuis l’artillerie de surface. Il aura lui une formation qui visera à maximiser sa puissance de feu, et offrant le moins de flan exposés possibles. Il faut au commandement de la défense qu’il puisse couvrir aussi bien les unités de surface que la flotte de couverture en un même temps, et infliger des dommages à l’ennemi en minimisant ainsi les siens. L’agresseur quant à lui tendra, suivant les canons classiques, à dans un premier temps éliminer la défense orbitale, dans le meilleur cas à l’aborder et la capturer, avant d’entreprendre la destruction de celle de la surface, et ensuite l’invasion. L’engagement aérospatial prend fin lorsque l’un des deux belligérants a acquis un contrôle suffisant de l’espace pour assurer ses opérations terrestres correctement dans le cadre d‘un siège comme nous l‘avons étudié ici, quand il a éliminer ou mis en fuite la marine adverse dans le cadre d‘un engagement en espace stellaire ou interstellaire.
Amiral Nikolaï Syllas d’Acre, extrait de la seconde partie de « La guerre moderne », « L’engagement 2/2 » .



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An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Christiansa
Au dessus de l’extension continentale


Vingt-six ans plus tard, c’était un Cavalierre plus fourbu et épuisé que jamais qui embarquait à bord d’une navette depuis la surface de Christiansa, où le dernier acte de l’intronisation du Doge avait eut lieu avec l’atterrissage du Buccentaure sur la place Saint-Marc devant deux millions de personnes rassemblées sur d’étroites plate-forme d’observation, qui acclamèrent le nouveau chef d’état de la Sérénissime. Pendant trois quart d’heure, le déjà exténué amiral—mais entre temps habitué au protocole lourd de la bureaucratie et du pouvoir de l’Union, on finissait toujours par s’y faire de toutes façons—avait suivi le cortège, en compagnie d’un Von Heigins ne tenant debout plus que par les petits verres qu’il buvait dès le premier moment de repos donné, mais ayant encore belle prestance. L’amiral Liung conservait toujours la même attitude distante, mais son air tellement éveillé rendait Syllas soupçonneux. S’essaierait-il aux remontants médicaux autres que les neurostimulateurs dont-ils étaient tous gavés? D’ailleurs, il avait bien remarqué que Sirica portait sur son front, songeusement couvert par une chevelure pourtant raréfiée, la trace infime d’un implant cortical que l’on utilisait pour maintenir le cerveau alerte et remplacer le sommeil pendant une durée réduite. L’amiral ne l’avait utilisé que pendant la campagne des rocs d’Elyonna, lorsqu’il avait fallut être à son poste plusieurs jours de suite jusqu’à l’arrivée des renforts, et que le moindre instant d’inattention pouvait être exploité par l’ennemi. Mais le fait était que la machine présentait plusieurs effets secondaires relativement peu désirables: premièrement, elle ne pouvait totalement remplacer le sommeil, et peu à peu, détraquait les rythmes de l’horloge interne, ce qui finissait par nuire aux circuits neuraux eux-mêmes. Cela allait jusqu’à la démence chez certaines personnes, mais relativement rare, car on retournait au lit assez facilement généralement, car un autre symptôme était le fait que les yeux devenaient graduellement gris, comme pour les personnes engluées dans l’environnement virtuel du réseau, qui utilisaient une interface cervicale à la même base, mais plus élaborée, et aux objectifs différents minimisant les dommages au cerveau. D’autres, plus traditionnalistes, disaient que dans la lutte contre le sommeil, rien n’était mieux que le café, mais l’amiral trouvait ce liquide tout bonnement abject, même sous force de comprimés, et préférait des thés, produits qui avaient l’effet contraire d’endormir, ce qui n’était pas l’objectif. Mais quelques fois, quand il était vraiment à bout, il se faisait servir un fond de café noir. Quand l’odeur seule ne le fouettait pas pour une bonne heure, l’unique gorgée, si elle arrivait à descendre, suffisait à lui laisser remâcher le goût infâme pour de longues heures, le tenant réveillé dans des reproches sur la raison désespérée qui l’avait poussée à passer à l’acte.
Custer non plus semblait pas très frai—enfin, encore moins frai que d’habitude. Ses mouvements étaient plus lents, moins mesurés. Il avait mis les dernières choses au point alors qu’on faisait le plein d’hectanox dans la navette sur le petit terrain aérospatial qu’ils avaient déniché pour décoller sans passer par les méandres du Spatioport Ducal de Christiansa. On discutait de Track 2, à mots couverts, en cas d’éventuelles oreilles indiscrètes. Il en ressortait finalement qu’ils avaient tout deux des doutes sur les actions qu’allait effectuer la cavalerie; Syllas ne connaissait pas à 100% cette Stavanger, il ne l’avait eut qu’une seule fois sous son commandement , et malgré les remarques très favorables à son sujet du Capitaine Heere de la Pentarême Kama sur laquelle la fille est d’habitude seconde, il restait sceptique. Track 2 était une formation très particulière, avec des moyens très particuliers. Et des objectifs uniques. Si elle ne se montrait pas à la hauteur…les conséquences seraient lourdes. En premier lieu, toute l’histoire risquerait de s’éventer. Ce serait dramatique. Comment réagirait l’opinion publique face à des choses pareilles? Les jadéens? Ils seraient aussi mystifiés qu’inquiets. Ensuite, il faudrait employer les grands moyens, ce qui serait d’autant plus la preuve qu’ils ne maîtrisaient plus rien là.
Malheureusement, il ne pouvait toujours pas se rendre sur place. Il était appelé par des obligations sur Tsarysyn, aussi diverses que parfois futiles, mais qui auraient attiré l’attention s’il avait dérogé.
Il tomba sur son siège, dont les conduites électroplasmiques s’activèrent pour donner une impression chaude et agréable, s’adaptant à la forme du corps pour optimiser la lecture, le travail, etc… Il se serait bien laissé aller pour dormir, mais devait encore faire quelques choses. Son aide de camp, le commodore Zikosler, dont les paupières tombaient un peu également, apporta une pile de feuilles et quelques porteurs de données, et s’installa sur le siège en face du sien. Rapidement une table se déploya, grâce à des dispositifs à subduction, le même que celui des scaphandres de la marine, silencieusement, et il poussa quelques feuilles vers son supérieur. La séance était ouverte.

-D’abord, la garnison de Kilea Prime demande un renforcement temporaire en raison de …heu…Complications lors d’une opération de routine, déclara Zikosler sur un ton tout à fait passionné par le sujet, tout en se préparant à prendre des notes à l’aide d’un petit dispositif neurotactile reliant le bout de son doigt à un écran holographique minuscule.

Syllas examina le document. En effet, la lutte contre des activistes s’en prenant aux abattoirs de bovins sur un monde perdu de la frange extérieure était un sujet qu’il importait tout à fait de présenter au plus haut officier de la marine entre l’intronisation d’un chef d’état et les discussions du Conseil d’Etat au sujet de la politique internationale de l’Union.

-Tachez de leur dénicher quelques dératiseurs, qu’on en finisse, mais n’envoyez surtout pas la cavalerie, ce serait ridicule, soupira le Grand Amiral en passant à la doléance suivante.

Celle-ci faisait état d’une proposition de changement majeurs dans les itinéraires de patrouille des franges extérieures de la galaxie 7. A étudier, avec précaution. Ensuite, un jeune ingénieur naïf pensait pouvoir faire modifier toute la gamme de senseurs à bord des pentarêmes pour un disfonctionnement mineur qui allait être réglé rapidement par le bureau technique sous la forme d’une simple mise à jour. Une demande de renforts pour la lutte contre la piraterie dans les avants postes de galaxie 9. Y accéder. La dégradation d’un capitaine avait entraîné des étincelles entre son successeur et le second, au point de presque mettre en danger le vaisseau lors d‘un moment critique. Y remédier en bottant les fesses aux deux. Vous notez toujours, Zikosler?

-Commodore? Vous êtes toujours avec moi?

L’aide de camp sursauta d’un mouvement nerveux, soulevant bien moins rapidement les yeux:

-A vos ordres, Amiral!

Syllas reposa sa tête contre sa main, elle-même solidement installée sur l’accoudoir, et eut un faible sourire rare chez lui, un peu comme jadis durant leur campagne commune sur le Kanopus…Ah la jeunesse. Il déclara doucement:

-Vous pouvez rentrer à votre cabine, Alexander, nous sommes bien trop fatigués pour penser régler les affaires de la flotte en une nuit.
-Merci, Amiral, fit Zikosler avec un air de profonde gratitude, tout en enlevant le dispositif neurotactile, et se levant bientôt.
-Profitez bien du sommeil, d’ici le prochain départ par JAN MAYEN, nous avons quatre heures. Ensuite, il faudra remonter au créneau.

A peine le militaire eut quitté l’espace de travail de l’amiral, celui-ci repoussa les documents et la table de travail, tout en se reposant contre le siège, et se sentant ensommeillé. Mais, au bout de cinq minutes, il se surpris à être encore éveillé. Quelque chose le gênait pour rester serein. Track 2? Non, Thomas avait tout en main, et même, les choses étaient lancées et il n’y avait plus rien à faire. Puis, il saisit. C’était au sujet de Rea. Au cours des derniers jours, l’incident du mastaba lui était revenu en tête, sans qu’il parvienne à l’en chasser entièrement. Mais ce qui le tracassait n’était pas directement là. C’était au sujet…de ce drôle de bonhomme, ce professeur d’exorcisme à demi prêtre prétendant qu’elle avait survécu. Il était sûr à l’époque de l’avoir déjà vu quelque part, même si son nom ne lui avait rien dit dans l’immédiat. Maintenant, ça lui revenait. C’était il y a une petit éternité, deux fois en fait. La première datait d’il y a plus d’un quart de siècle, lorsque, sur Ressirgo, il avait rencontré pour la première fois Rea. C’était cet homme qui les avait retrouvé, et ramené à la civilisation. Ensuite, c’était pendant cette terrible année 47...


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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeSam 28 Mar - 21:44

L‘action offensive.
Elle est naturellement le premier facteur de la guerre moderne, qui ne rencontre plus d’actions militaires sans actions diplomatiques. Sur le plan aérospatial, est se caractérise aussi bien par la préparation finale des forces, la reconnaissance, et le transport jusqu’au lieu des combats que par l’engagement lui-même audit lieu. L’attaque que nous étudions ici est bien évidemment un mouvement largement offensif tourné vers l’ennemi pour lui causer des tords, et non pas une simple réponse aux actions d’icelui. Elle implique de pénétrer dans un territoire théoriquement contrôlé par les forces de celui-ci, et d’engager tout ou partie desdites forces. Une attaque correctement menée devra néanmoins ménager toutes les possibilités de communication, de coordination, et même de retrait de la force, afin de se prémunir des aléas du combat. […
]
Amiral Nikolaï Syllas d’Acre, extrait de la seconde partie de « La guerre moderne » .


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An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).



-Honnêtement, ce type que tu fréquente, ça m’inquiète beaucoup. Je n’aime pas ça, tu le sais, murmura Maxam en bougeant à peines ses lèvres fines.

D’une certaine façon, il faisait également peur à Kalamata. Très peur. Grâce au Réseau, elle avait entendu parler des méthodes de la Sûreté, et devait avouer qu’elle était loin d’être rassurée. D’un autre côté, grâce aux petits services rendus à Custer, elle avait déjà passé deux ans dedans, sans avoir à sortir faire des petits boulots le jour, pour payer les gelpacks nutritifs et autres, et n’être tranquille que la nuit. Une chance, si on voyait les choses sous cet angle.
Avec un petit sourire satisfait, elle termina les rangements de données, immenses cascades de chiffres autour se déversant autour d’elle, qui demandaient beaucoup de puissance neurale que seule l’opération de mise en réseau pratiquée sur son cerveau avait pu rendre disponible, avant de verrouiller les contrôles de la sous-station. Gérer tout cela, comme le demandait son job, c’était une chose, mais elle ne passait jamais une heure de suite à traverser les programmes pour rechercher, grâce à son intuition rendue infaillible, les fautes et erreurs—pas seulement au niveau de ce monde, au niveau de tout le réseau hyper-assisté même, ce qui faisait d’elle et de ses semblables un élément vital de la stabilité et de la cohérence du tout—, car s’était un travail épuisant, malgré toutes les modifications. Enfin, lentement, elle laissa son esprit de nouveau ce glisser dans l’interface générale, où se trouvaient tout les gens reliés pour l’instant à sa sous-station. Cela donnait l’impression de voler, puis de tomber, comme attiré par une gravité énorme, avant de se ralentir enfin, et de se retrouver dans l’environnement parfaitement simulé. Il regroupait dix-neuf sous-semble, reliés à la station 2071. C’était un des plus développés, qui possédait de nombreux relais talentueux, et leur programmateur de génie était sans conteste Maxam, qui avait rendu tout cela tellement plus vivant grâce à des algorithmes inédits—repris par l’université Jagellone à laquelle il était affilié comme relais hyper informatique officiel, un poste de rêve, car payé, et bien vu—, au point qu’on ne faisait plus la différence entre les personnages formatés ici et les personnes réelles. Ces qualités extraordinaires avaient convaincu près de vingt millions huit cent cinquante mille personne de placer leurs serveurs com. sur la station 2071. C’était gigantesque; ils avaient du faire plusieurs extensions, et même trouver des sponsors afin d‘acquérir les machines nécessaires. L’université Jag‘, pour ses études physiques et sociologiques, ainsi qu‘un accès gratuit et illimités aux capacités de la station, avait mis un peu d’argent sur la table, la GE pour sa pub également, ainsi que d’autres compagnies mineures. Enfin, le colonel Custer avait donné la bénédiction de la Sûreté en échange d’un droit de regard qui ne lui était jamais refusé—personne ne voulait risquer un malheureux « plantage » généralisé du système aux moindres « soupçons » de présence d’un nid à activisme—. Cette grande affluence avait également nécessité la mise en place de relais intermédiaires, n’ayant pas les capacités des vrais, mais pouvant traiter les affaires mineures: litiges entre lignes com. et leurs utilisateurs, ce qui était très fréquent, et bugs mineurs. En effet, lorsque l’un des clients voyait disparaitre ses espaces de stockage, il n’était jamais content, et il fallait fouiller les traces hyper-numérisées à leurs recherche, ce qui prenait du temps. Or, ces choses là étaient si communes que les dix-neuf relais d’origine seraient morts d’épuisement à faire cela à longueur de journée. Il y avait donc dix bonnes centaines d’auxiliaires qui s’avéraient souvent vitaux.
Maxam, silhouette athlétique aux traits pleins encore plus idéalisée que Kalamata—en réalité, il faisait une tête de moins que cette dernière, et avait tendance à prendre du poids, mais ne voulait pas que ça se sache—, se gratta la joue tout en prenant ses aises, installé dans le vide de ce monde gris-blanc par où passaient des milliards de données toutes les secondes. Seuls les systèmes du gouvernement avaient des dispositifs plus sophistiqués et étendus, probablement des dizaines d’années d’avance sur le civil et le privé, mais les militaires comptaient bien conserver cet avantage, et chaque fois que la jeune homme avait tenté de s’introduire discrètement dans les flux codés au plus haut niveau, il avait été appréhendé et renvoyé à son point de départ avant qu‘il ne se rende compte de ce qui lui arrivait, et recevait toujours quelques jours plus tard un mot de la part de la Sûreté l’invitant à éviter certains impairs qui pouvaient lui coûter cher. Bien entendu, cela était risqué, mais certaines unités provinciales étaient bien moins performantes. Ainsi, quelques jours auparavant, indécrottable, il s’était essayé sur les machines d’Acre, a intercepté quelque chose sortant vers le centre via le transpondeur de Galaxie 8 et le STIA. Une communication de toute urgence, codée au plus haut niveau. Comprendre quelques lignes avait été un labeur durant des heures, rien que le fait que cela passe inaperçu tenait du miracle, et probablement que la suite prendrait encore de jours, mais il en avait appris assez pour avoir envie de jeter un coup d’œil sur place. En fait, ce qu’il avait trouvé été un accusé de réception d’un message antérieur, mais comprenait déjà assez pour intéresser Maxam, d’autant plus que cela lui rappelait des souvenirs d’un lointain passé.

-Custer est comme il est, et fait son boulot, le tout est qu’on puisse l’éviter, répondit Kalamata en revenant vers son ami, avec un déhanchement aussi poussé qu’irréel, mais qu’est-ce que tu compte faire?
-Tu sais qu’je suis déjà là-bas, et Zhao aussi. On va y aller tout les deux, et voir si on ne peut pas tirer les choses au clair.

Kalamata pinça ses lèvres, inquiète:

-Est-ce que c’est nécessaire? Tu sais, on ne peut pas se permettre de te perdre.
-Je vis ma vie, répliqua avec philosophie le programmateur en se balançant doucement, [collor=cadetblue]et tu sais combien je tiens à savoir ce qui s’est réellement passé à l’époque. Toi seule peut me comprendre. Fais moi confiance![/color]
-Je sais, je sais, fit elle avec un mélange de résignation et d’abattement, sans que son visage ne trahisse le moins du monde ces émotions, mais je me demande si tu ne devrais quand même pas y réfléchir plus longtemps, et…

Elle n’avait même pas fini sa phrase qu’elle remarquait que son interlocuteur avait disparu, sans qu’elle ne se rende compte quand. En étudiant le marque résiduelle, elle arriva à la conclusion fatale qu’il était véritablement parti. Pour retourner là-bas. Assez nerveusement, elle retourna terminer sa session du jour au milieu des flux numériques, mais avait l’esprit ailleurs. Cette histoire la tourmentait maintenant, et ne voulait quitter son cerveau virtuel. Il y avait quelque chose qu’ils avaient négligés, qu’il avait négligé. Quoi, quoi?
Soudain, il y eut comme une lumière. C’était Custer. Pourtant ils en avaient parlé. Mais là…
Fébrilement, elle écarta les communications, et rechercha le câble que Maxam avait piraté, câble qu’il avait assez bien caché, mais qu’elle dénicha en trouvant finalement dans un des recoins secrets du gourou. Avec empressement, elle fit sauter les codes de sécurités—anagrammes d’Edward Ydricht, du nom du chancelier au moment de la révolution militaire, le genre de blague qui pouvait tourner au drame rapidement—, et examina le reçu du central d’Acre. Ses craintes furent confirmés.
Le message émanait d’une quelconque cellule du nom de Track 2. Le même qu’avait utilisé Custer lors de son appel à cette brute de Lubbock. Or, quand Custer était dans un coup, cela sentait toujours le roussit. Euphémisme, cela risquait plutôt de finir au lance-flammes. Il fallait arrêter Maxam, avant qu’il ne se jette dans la gueule du loup. Il fallait faire quelque chose.
Mais quoi?
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeDim 29 Mar - 21:41

Esclavage: […]. La pratique moderne de l‘esclavage commence avec le fin du monopole spatial de la Compagnie Fédérale aérospatiale de la Fédération Terrienne Unie, qui permet à tout un chacun d‘acquérir un astronef, et d‘effectuer des voyages interstellaire. Le nombre de vaisseaux produits et de capitaines indépendants est bientôt tellement important que la Compagnie est totalement dépassée, et finit par faire faillite, au prise à la terrible concurrence d‘entreprises plus petites et agressives. La fin de cet institution de contrôle coïncide avec l’apparition des premiers états indépendants de la Fédération—celle-ci ne connaissait depuis cinq siècles que la Confédération Helvétique, et n’a pu adapter ses relations pour conserver le contrôle—. En quelques années, la piraterie fait son apparition, ainsi que la guerre de course, et, dans un contexte de guerre interplanétaire et de guerre civile de la Fédération, la plupart des barrières et conventions sont brisées; la question du sort des équipages capturés est posée. Dans un premier temps, la coutume était de les déposer sur des planètes désolées, et de les y abandonner, ou encore de demander des rançons s’il y avait des personnalités de poids, mais bientôt, une nouvelle classe servile apparaissait sur certaines colonies, issue de ces malheureux. Certaines colonies en firent même une spécialités, tandis que d’autres états, comme la Fédération, tout juste sortie de sa guerre civile, s’y opposaient farouchement. Même si la plupart des autorités d’importance ont banni ce mode social barbare et primitif, il s’est perpétué dans les zones tribales existantes aux marches des galaxies, ainsi que dans certains pays aux principes contestables, généralement à tendance très passéiste, discriminatoire, ou ultra-monarchique…

Dictionnaire Universel. Edition n°54.8.16. Livre IV, page 14. Extrait de l’Article « Escalvage ». (1/3)[/size][/font=georgia]


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An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Ressirgo V
Ressirgo-City


Lord Francis Eramstead se considérait comme un philanthrope. Derrière ses airs de Gentleman-farmer casé ne fréquentant que les meilleurs clubs des quartiers de la haute-société d’Assedo, c’était également un aventurier, baroudeur des mondes les moins connus et les plus exotiques de l’Union. Selon ses lectures, ou simplement en posant le doigt quelque part dans la carte galactique tridimensionnelle, il trouvait le prochain endroit où aller. Ca n’était pas plus difficile que ça; il était riche. Immensément riche. Fait exceptionnel pour l’époque, sa fortune—celle de sa famille en fait—était basée sur les terres. Un lointain ancêtre, quelque cinq mille ans auparavant, avait acheté sur le papier pour une bouchée de pain trois grilles d’une galaxie à la Haute-République d’Assedo, qui, lorsqu’elle a transférée tout ces affaires courante à l’Union, a également fait passer la reconnaissance au nom d’Eramstead à Tsarysyn, qui, lorsqu’elle a voulut coloniser la zone des trois grilles, a du payer un droit, minime à l’échelle nationale certes, mais néanmoins existant, aux Lords d’Eramstead. Ramené à l’échelle humaine, cela donnait un afflux de liquidités gigantesque, et toujours croissant au fur à mesure que la zone se colonisait. Une mine d’or encore augmentée par le fruit de spéculations prudentes mais néanmoins décisives sur la Combinat Industriel d’Askay, et surtout sur la General Electric, dont les instances dirigeantes étaient généralement tenues par la famille fondatrice, les Howell; ainsi, l’actuel président, Lord Ferdinand Howell, était un ami de Francis. Ils s’étaient rencontrés aux célèbres courses de chevaux d’Assedo, où tout deux entretenaient une écurie, et depuis étaient devenus très proches.
Tout cela lui permettait de vivre sa vie de bohème, tantôt ici, tantôt là, dépensant généreusement—sans pour autant jeter l’argent par la fenêtre non plus, la prudence financière était dans la famille, et de nombreux ancêtres avaient eut un train de vie modeste, et même lui dormait parfois sous la tente—, et de faire le bien autour de lui. Il fallait dire qu’il avait été aussi bien dans le territoire national—qui englobait quand même plus de deux-tiers de la galaxie 7—, et à l’extérieur, autant chez les jadéens tout proches que aux antipodes, dans les zones tribales où il n’y avait que de mondes barbares survivants de la piraterie et d’autres actions crapuleuses. Par exemple, il avait découvert de nombreuses sociétés qui avaient régressé, l’une, sur un obscur monde nommé Birkirkara, utilisait un déflecteur récupéré sur un astronef Kwajaleinien pour émettre un signal de détresse très anonyme et chaque fois modulé sur une fréquence différente. A l’appel de ce chant de sirène, des cargos ou autres navires s’approchaient, et étaient pillés lors de leur atterrissage, sans qu’ils ne se doutent de ce qui leur arrivait. Le jour où le vaisseau qui le transportait était tombé dans ce piège, Francis avait bien cru que sa vie aventureuse touchait à son terme, mais un homme parmi les pillards qui avait été tiré d’un mauvais pas avec les gardes-frontières de l’Union par le multimilliardaire l’avait reconnu, et protégé, pour lui permettre de repartir après un séjour passionnant. Une autre fois, sur la planète Sido, il avait découvert une société où toute la vie était axée autour du combat et de la violence; les enfants étaient enlevés dès la naissance à leurs parents pour survivre dans un environnement terrifiant, puis plus tard, se joignait à une horde hétéroclite qui écumait tout un secteur galactique jusqu’aux marches de l’Union. Le très cultivé Lord n’était pas sans faire l’analogie avec la Sparte antique, et trouvait cela fascinant. Mais le fait qu’on l’ait enfermé pendant plusieurs jours l’était beaucoup moins. Les sociétés pastorales paisibles et autres nomades pacifiques étaient assez rares dans les zones barbares, et ils fallait repasser la frontière pour les trouver, dans secteurs tribaux de l‘Union, réserve de planètes pour les sociétés minières. Ainsi, un beau jour de l’année 3862, Lord Francis Eramstead descendait de la passerelle mobile de son astronef de plaisance, et une fois arrivé sur le vaste tarmac poussiéreux, respira longuement l’air surchauffé de Ressirgo V: Il était brulant et humide; au loin, derrière les bâtiments vieillots, on voyait la ville de Ressirgo, et sa cité-jumelle, Nova, séparées par le fleuve principal de ce continent. C‘étaient des centres urbains assez étendus, et bas. Des immeubles de quelques étages tout au plus, relativement sales, pleins d‘une couleur et d‘une agitation qu‘on trouvait rarement dans les immenses secteurs d‘habitation uniformes des grands mondes unioniens qu‘étaient Tsarysyn et Christiansa, même Assedo avait un continent entier nivelé et aseptisé, suivant la norme urbanistique Doctrinaire. Mais ici, c’était une foule bariolée se pressant devant des marchands de tapis et de myrrhe, la joyeuse agitation du jour de marché au souk, la gaité et l’étrangeté qui semblaient provenir d’un autre temps que l’on sentait, même à côté des bâtisses décrépies et sans style du petit spatioport.
Il y avait, à côté du yacht, un vieux transporteur de passager dont le moteur, un antique EV. II, semblait sérieusement fatigué, et dont les passagers descendaient avec lenteurs, non sans observer avec étonnement l’astronef du milliardaire, comme une apparition.
Il y eut une rumeur de conversation derrière lui; en se retournant, il découvrit son fidèle assistant—Et ami surtout—Fendlein discutant avec un employé local assez jeune au teint basané. Il n’avait qu’un galactique hasardeux, et lorsque Eramstead se joignit à eux, ils n’en fut pas moins difficile de communiquer. Le vocabulaire du servant ne s’étendait pas au nom « surveillance ». Le bonhomme était de la génération qui avait connu le système d’éducation de la fin de la république à son point le plus bas, et était la preuve de sa faillite. L’Assedien n’avait pas vraiment d’opinion sur les amiraux, mais devait leur laisser cela: la galaxie tournait mieux depuis qu’ils étaient là, il l’avait vu par ses pérégrinations, avant et après.

-Paahrdon, S’rella, mais j’ne vois non comme déf’ndre votre vaisseau, fit l’employé sur un ton hasardeux, provoquant l’exaspération de Fendlein, et un fou rire du milliardaire, à qui il jeta un regard intrigué.
-Pas défendre, surveiller, abruti! Cria l’assistant avec un grand geste, mais l’autre hocha des épaules avec un mouvement bref, en glissant « pas comprendre ».

Eramstead posa sa main sur l’épaule de son ami qui était sur le point d’exploser, et dit à l’indigène, en faisant la mimique de consulter la com. à son poignet:

-Vous pouvez appeler votre supérieur, s’il vous plait?

Après avoir attentivement examiné le geste de la main de son interlocuteur, l’employé appuya avec incertitude sur son bracelet-com., et baragouina quelque chose dans le patois local. Un grognement y répondit, et le local releva le nez, avec un petit sourire provoquant un nouvel éclat de rire franc chez le milliardaire, qui donna une tape amicale contre son bras. Ils n’eurent pas à attendre très longtemps; bientôt, un homme veston léger et pantalon beige arriva. Son visage, surmonté de cheveux blonds grillés par le soleils taillés au carré, avait des traits qui étaient tout sauf locaux, et qui étaient rehaussés avec couleur par son bronzage. Sans faire attention à l’employé, il alla directement vers les deux autres, avant de déclarer avec énergie:

-Messieurs. Je me nomme Stephens Vesner, à votre service. Ce p’tit bonhomme m’a dit qu’il n’arrivait pas à comprendre ce que vous disiez.

Toujours le sourire au lèvres, Eramstead répondit d’une voix aimable:

-C’est juste un tout petit problème de communication, même si je doute que mon ami Erich Fendlein soit d’accord. Je m’appelle Francis Eramstead, et nous voulions simplement nous arranger pour faire surveiller notre modeste chaloupe.

Vesner fit une petite moue, jaugeant d’abord ses interlocuteurs, l’expression toujours ferme, puis le vaisseau, qui était tout sauf un sobre esquif comme le disait avec ironie son possesseur, mais se retourna finalement vers l’employé, qui était resté sans rien dire quelques pas derrière, et ordonna brièvement:

-J’che’ras Quuc D’ver K’tai F’san Isso, et‘ii zak!(1)
-Vous n’êtes pas d’ici, n’est-ce pas? Demanda Eramstead, qui l’avait observé de profil glapir ces instructions qui firent décamper au quart de tour l‘employé, le profil soudain bas.
-Non, en effet, j’suis d’Helgokals, répondit Vesner en les emmenant en direction d’un des bâtiments miteux alors que plusieurs autres employés se pressaient autour de l’astronef fermé contre les éventuels « visiteurs », balançant doucement ses bras musclés, je suis arrivé ici y a une dizaine d’années, et vu qu’ils avaient tellement besoin de gars sachant parler avec le commun des gens du reste de la galaxie, ils m’ont offert un joli p’tit salaire pour faire la police du spatioport. Et vous? Je doute que vous soyez également de simples voyageurs?

Le Lord eut un petit sourire amusé, et hocha la tête:

-Oh, je ne suis qu’un homme qui fait son bout de chemin dans l’univers. D’Assedo. Appelez moi Francis.
-Hum, je vois, fit l’homme avec un air un plus sérieux, et qu’est-ce que vous comptez faire ici, à part vous arracher les cheveux devant la langue locale—que j’ai mis une décennie à assimiler partiellement—?

Ce fut au tour de Fendlein d’approuver vivement de la tête, mais Eramstead répondait:

-Oh, on verra. J’ai entendu dire que les forêts et mangroves étaient magnifiques, de même que le déserts.

Vesner eut un petit geste pour écarter cela, et dit, comme pour s’excuser:

-Oh, cela, je l’ais vu une fois, ça m’a suffit. Quand au désert, à part rencontrer d’autres portrait comme le nouveau du vaisseau, il n’y a rien que du sable et des vieilles pierres.
-Des vieilles pierres?

Leur guide se retourna vers le lord, le regardant avec un étonnement non dissimulé:

-Vous n’êtes pas au courant? Pourtant le coin est principalement connu pour ça, déclara-t-il, avant d’ajouter devant le regard des visiteurs: des ruines anciennes, tout le long de la côte, dans le désert.
-Des ruines…murmura Eramstead, le regard se perdant dans le lointain.
-Désolé de devoir vous le dire, mais l’état déconseille de se rendre là-bas, fit Vesner, les risques d’éboulement sont considérables, il y a des années, une équipe d’archéologues a failli y passer. De plus, tout s’est ensablé, on n’y vois plus grand-chose de sensationnel, pour peu que ça l‘ait été avant. Cet an ci d’ailleurs une multinationale projette de faire table rase et d’installer des mines.

Mais le milliardaire n’écoutait déjà plus, et quand il regarda leur guide, ce fut pour demander:

-Comment puis-je arriver là-bas?

Note sur les phrases #3:
(1)Arrange toi pour faire garder ce vaisseau là par quelques gars, et qu’ça’saute!


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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeDim 29 Mar - 21:41

…Nous prendrons le célèbre exemple du Royaume de Botmélie, qui a été une puissance d’importance dans l’échiquier politique de la galaxie 7 pendant plusieurs siècles, et dont la force était basé sur une économie fonctionnant sous perfusion d’esclaves capturés par des hors-la-loi plus ou moins affiliés à travers tout un quadrant, entre autres aux dépends des marchands Christianiens et Tsarysyniens, mais également des citoyens jadéens, mal équipés pour faire face à une menace pareille sur leurs colonies. Sur Botmélie, les esclaves étaient traités avec des produits qui inhibitaient de nombreuses fonctions du cerveau, inutiles pour le travail, et limitaient leurs tentatives de révoltes, et de façon générale toute initiative personnelle néfastes. Ils travaillaient aussi bien dans les usines, les mines, les champs, la voirie, etc… soit à la force de leur bras, plus souvent avec d’imposantes machines, que dans les résidences de riches Botméliens d’origine noble, où ils pouvaient effectuer les travaux domestiques, servir à l’éducation des plus jeunes et à l’assistance personnelle directe, et bien entendu avec des esclaves de plaisir exécutant tout les vœux de leurs maîtres. L’affranchissement était un phénomène véritablement rarissime, ne se produisant pas deux fois en un quart de siècle, en partie du fait des dommages grâves causés par les drogues au cerveau qui, rendu dépendant, ne peut fonctionner correctement sans.
Néanmoins, les études de l’université Jagellone de Christiansa, reposant sur des simulations très pointues (Station 2071, ©) et les archives de la Bibliothèque Ducale de Christiansa (BDC), ont mis à jour les faiblesses du système Botmélien, pourtant regardé parmi les esclavagistes comme le plus développé et efficace: En premier, la classe libre moyenne et le prolétariat ont subit une paupérisation croissante au fur à mesure du renforcement de la population servile, pour finalement n’avoir qu’un niveau de vie misérable, à peine supérieur à celui des esclaves, qui eux-mêmes étaient inaccessibles comme auxiliaires à la population du fait de leur prix. Ce phénomène a entraîné une chute des revenus de l’état, ainsi, à la veille de la guerre, les finances Botméliennes étaient sérieusement compromises, et seule une série de campagnes et de butins pouvait les renflouer. Également, le système social a rapidement montré ses limites auprès de l’étroite tranche haute de la population, dont une importante proportion s’est enfoncée dans l’oisiveté, dépendant entièrement de ses domaines, revenus fonciers, et bien entendu, esclaves…

Dictionnaire Universel. Edition n°54.8.16. Livre IV, page 14. Extrait de l’Article « Escalvage ». (2/3)



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An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre



Dans le noir le plus total, uniquement percé par leurs deux petits projecteurs, ils arrivèrent au sommet. Une crête rocheuse, où ne poussaient que de rares plants d’herbes sèches, très espacés, au milieu des graviers et du sable. Et, de l’autre côté, une autre pente, plus abrupte descendait en direction de ténèbres tellement opaques que leurs lumières ne parvenaient pas à les percer au-delà de quelques mètres. Autant derrière eux on percevait encore le clapotis lointain de l’eau du lac, que devant, ça n’était qu’un immense trou noir béant, d’où semblait sortir un petit filet d’air glauque et poussiéreux que l’on sentait sur la peau du visage, mais sans l’entendre aucunement siffler dans les oreilles. La voix d’Antonelli Scaliger, une silhouette quasi-invisible, paraissait rassurante et familière dans sa brutalité et détermination:

-Bon, Lubbock, par où on va, vous avez une petite idée?Demanda-t-il avec un grognement qui indiquait qu’au fond, il n’était pas très rassuré non plus.

Une torche se braqua sur le visage du mercenaire, qui cliqua des yeux. Même si il avait toujours un air sérieux et un peu ennuyé, Hel remarqua que son teint était devenu livide, et que lorsqu’il porta sa main pour se gratter la joue, celle-ci tremblait légèrement.

-J’pense qu’vous vous en doutez, ça descend de l’autre côté, et il faut aller jusqu’en bas, dit-il sur un ton néanmoins égal.
-Y a un chemin, ou quelque chose dans l’genre? Poursuivit néanmoins le chef de clan, sur le visage duquel on devait une grimace.
-Comment veux-tu qu’m’y retrouve dans cette purée? Répliqua, ironique, le mercenaire après avoir haussé les épaules.

Sans qu’on n’en dise plus, la petite troupe se remit en marche. La pente était formée de gros blocs de pierres dont l’espace entre lesquels était comblé par des gravillons, du sable, et quelques plantes vivaces. L’extrême aridité, la difficulté du terrain, et le soupir en provenance du bas que l’on remarquait à présent travaillait dur sur les nerfs, et même si tout le monde était alerte, un accident arrivait vite; ma descente était très inclinée, et l’aide des systèmes d’équilibre de son bloc ne fut pas de trop pour Hel. Plus d’un fois, un des hommes de main glissa sur une de ces petites pierres plates traîtresses, disparaissant rapidement hors des faisceaux des projecteurs, et n’évitait que de justesse de trébucher, ou pire, de tomber dans une des quelques crevasses que l’on voyait lézarder la pente ici et là. On le retrouvait étalé sur un lit de graviers, contre un rocher plus gros qui avait barré son chemin vers l’abyme, ou encore debout, recourbé, les mains sur les genoux, hors d’haleine.
On ne parlait pas; tout le monde était concentré sur la descente, et personne n’éprouvait le besoin de communiquer sa peur autres. Seule l’étrange grondement indéfinissable en provenance du bas et les halètements réguliers du groupe brisaient la chape de plomb qui était retombée sur eux dès les premiers mètres depuis la crête, coupant tout les bruits rassurants de l’eau et du vent, même de loin en loin un cri d’animal, sûrement un des troupeaux de chèvres sauvages qu’ils avaient vu à l’arrivée.
Janeshki et Hel avançaient en tête, prudemment, mais néanmoins plus rapidement que les autres. Le hetman avait l’un des deux projecteurs, tandis que le reste du groupe s’éclairait avec l’autre. Ainsi, les deux motards furent les premiers à arriver devant un gros rocher, en plein milieu de la pente. Un morceau de basalte, ou de granit, selon la composition du sol, mais la géologie n’était pas leur spécialité, et pour l’instant, la seule chose qui importait était de le contourner. Ils attendirent les autres, et passèrent à droite. D’autres, étant arrivés par un chemin un peu plus à gauche, choisirent cette voie plutôt que de remonter vers la ramification qui était une dizaine de mètres plus haut et reprendre la voix que les autres avaient prise. Parmi eux, un milicien maigre au visage éprouvé par des années de violence, vêtu d’une veste grise sur une combinaison verte électrique, portait le second projecteur. Pour pouvoir éclairer les autres, il passa en dernier. Depuis l’autre côté du roc, le groupe le vit aller doucement le long de la paroi, évitant de glisser à cause de la fissure. Un premier, puis un second, et enfin un troisième passèrent. Ce fut le tour du milicien en vert et gris. Prudemment, bien plus qu’à son habitude, il se glissa, dos au mur, sur le petit passage. Il était déjà presque arrivé lorsque son pied dérapa sur une des étranges pierres plates très lisses, et qu’il perdit l’équilibre. Un instant, se retenant désespérément à une arrête, il parut le regagner, mais en quelques secondes, ce fut l’autre pied qui lâcha, et il fut arraché par son poids à la paroi avec une grande violence. Le projecteur, lancé avec l’énergie du désespoir comme pour se retenir à quelque chose, atterrit sur le terre-plein, dans un tas de graviers, à quelques pas des autres, éclairant le funeste destin de son porteur. Celui-ci était tombé dans la crevasse; on entendait ses gémissements, très étouffés, car elle semblait profonde comme s’il était à des centaines de mètres.
Ils se précipitèrent, ramassant la robuste lumière ionique, au bord, non sans déclencher des cascades de sables vers le fond, qui firent redoubler le malheureux de cris et d’appel:

-Bordel, tirez moi de là, j’crois qu’j’m’suis cassé quelque chose, purée de purée, geignait le milicien d‘une voix pitoyable, au point que si l’atmosphère avait été différente, certains de ses collègues auraient même ri.

Mais déjà Janeshki fourrait son propre projecteur dans les mains gantées d’Hexanox à subduction de Hel, et s’accroupissait près du bord, jaugeant la paroi d’un regard critique, alors que sa jeune apprentie et Scaliger s’approchaient par derrière.

-N’y va pas, c’est d’la folie, on risque d’te perdre aussi, murmura la jeune femme en observant par-dessus l’épaule de son mentor les ténèbres de la crevasse que même la puissante torche ne parvenaient pas à dissiper pour voir le fond, tandis que les gémissement diminuaient en intensité.
-La p’tite a raison, fit Scaliger, avant de, les lèvres pincées, hocher la tête, y a p’t’être moyen de descendre plus loin, mais là …

Avant qu’il n’ait terminé, un nouveau cri retentit au fond, mais c’était cette fois un hurlement déchirant très différent des gémissements de douleurs précédant, prolongé, emplit d’une terrible peur. Les trois personnes au bord discernèrent un dernier « au secours ! », avant un nouveau hoquet de cri, qui se termina abruptement, sans transition. Pendant de longs instants, ils écoutèrent, tétanisés, le terrible silence du fond, aucunement troublé, même pas par le plus petit roulement caillou indiquant le moindre mouvement.
Finalement, fébrilement, le hetman se releva, et recula, imité par les deux autres, et murmura, fixant la fosse noir sur laquelle le faisceau était encore fixé:

-Je crois qu’il ne sera plus nécessaire de descendre l’aider.

Il n’y avait rien à répondre, ils restèrent là à observer la crevasse, se doutant vaguement que les miliciens derrière faisaient de même. Soudain, la tête de Janeshki se tourna brusquement, d’un mouvement mécanique, vers l’homme de la pègre, et il reprit, sur un ton différent:

-Monsieur Scaliger, je ne vais pas poursuivre plus bas si je n’ais pas quelques explications.

Reculant toujours, Antonelli eut un petit mouvement nerveux à sa joue, et mit du temps à répondre, sur un ton entre la peur résiduelle, la gêne, et l’excuse:

-Janeshki, vous comprenez que je ne peux pas tout dire, étant donné que je ne sais pas ce qui se passe ici…
-Que voulez-vous faire là-bas? Reprit inexorablement le hetman, alors que quelques murmures d’approbation se faisaient entendre derrière, chez les hommes de main.
-Heu, c’est que…bafouilla Scaliger, déstabilisé autant pas l’événement inexplicable de l’instant précédant que par ces questions de personnes payées pour ne pas en poser, j’ai appris qu’il y avait ici un machin de l’armée, qui n’avait pas déménagé son matériel. Tout est intact, parait-il, alors…

Ils sursautèrent tous, toujours pas remis de leurs émotions, lorsque, quelques pas derrière eux, éclata un gros rire entre le mépris et l’ironie:

-Scaliger, tu es pitoyable, une lavette franchement, gloussa la voix goguenarde de Lubbock, totalement déplacée, je te l’avais pourtant dit qu’le coin était totalement déconseillé, mais tu n’as pas voulu me croire.

Soudain furieux, le chef de clan se retourna brutalement, et se précipita sur le mercenaire, pour finir à quelques centimètres de lui, son poing refermé en dessous du menton de Lubbock, qui avait toujours un gros sourire, et l’observait sans aucune crainte.

-Je ne suis pas venu ici pour rien, salaud, maintenant, c’est toi qui marchera en premier, tu riras moins comme ça, aboya Antonelli, et tiens ta langue.

Leur « guide » eut une grimace de mépris, et se dégagea, mais déjà les miliciens s’étaient ressaisis, et avaient leurs armes de nouveau à la main. Il pesta, mais finit par avoir un mouvement résigné, ramasser une des deux lampes ioniques et s’ébranler de nouveau dans la direction de la descente, Scaliger et ses hommes lui emboitant le pas, après un signe à Janeshki, qui avait suivi tout cela en silence. Ce dernier tourna la tête vers Hel, et lui souffla, avant se mettre en route avec réticence:

-Ce truc ne me plait pas du tout, on reste prêts à décamper. On s’ra deux à s’en sortir.

Le Co-chef de clan parut les écouter, mais ne comprit pas, et eut un petit mouvement de tête mécontent, le tout sans se retourner. Et, alors que la tête de la colonne, avec Lubbock et ses « anges gardiens », s’ébranlait, et disparaissait dans les ténèbres, avec pour unique petite luciole le premier projecteur, alors que les deux motards emboitaient le pas, inquiets, dans la direction des ténèbres si opaques et oppressant de l’intérieur de l’Île-Longue.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeMer 1 Avr - 18:18

…Dernièrement, les drogues pouvaient finalement ne plus avoir d’effet. Un document a été récemment déclassé du niveau de sécurité TS de la BDC, et a permit aux historiens de trouver enfin la réponse à l’énigme de la mort de Noradom VI, grand-père d’Attal, qui fut roi une cinquantaine d’années avant la guerre contre Botmélie. Un conflit mineur avait déjà à l’époque opposé la Sérénissime au Royaume, sans pour autant trouver de solution, mais s’était terminé sur une plutôt bonne note pour Christiansa, dont le chef de la flotte, l’amiral Aetius Syllas, avait capturé un astronef ennemi intact, et obtenu une grande quantité d’informations, en libérant une certaine quantité d’esclaves. Un test effectué sur eux a permis de découvrir que la population servile de plus de quatre générations était bien moins affectée par les drogues que celle de première génération. Le Service à la Sûreté Extérieure monta alors une opération afin de faire assassiner le Roi, et se révolter les vassaux planétaires du royaume, pour l’affaiblir considérablement. Une fillette fut choisie parmi les esclaves de quatrième génération. Pendant plusieurs années, on l’entraîna, et l’initia à sa mission, qui était, une fois de retour sur Botmélie, d’entrer dans le harem du roi en tant qu’esclave de plaisir…Et de l’assassiner. Le harem était le talon d’Achille du système de sécurité paranoïaque de Noradom VI, et, après des années d’infiltration, mimant la soumission alors que son métabolisme dégradait chaque dose chimique injectée, l’esclave réussit à approcher le souverain…et à la tuer. Indépendamment des conséquences extérieures—le coup de main de la flotte Christiannienne consécutif à la mort du Roi fut un succès, quoique temporaire—, cela amorça le déclin du système esclavagiste botmélien, qui ne survivra pas parmi les états civilisés après la chute du royaume, en l’an 0 E.d.U. De nos jours, seules les marches barbares des galaxies ont encore de pareilles pratiques, qui sont inenvisageable en Union, ou encore en République Jadéenne. Le phénomène socio-économique de la seconde moitié du premier millénaire E.d.U a en effet …[…].
Dictionnaire Universel. Edition n°54.8.16. Livre IV, page 14. Extrait de l’Article « Escalvage ». (3/3)


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An 3847, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre
Kamensk



La traversée la Kamensk fut une prouesse militaire, véritablement épique. Jusqu’à la moitié du chemin, les clans, surpris, et les mercenaires du Cartels, désarçonnés, n’avaient offerts que peu, voire aucune résistance, mais tout s’était gâtés lorsqu’ils s’étaient repris. Plusieurs des véhicules déjà sévèrement amochés de la formation militaire avaient étés touchés par de puissants tirs, mais tenaient bon, et à chaque attaque, la riposte était sanglante, généralement avec les mitrailleuses installées à l’avant, ou à l’arrière. Lorsqu’un half-track avait été touché, et immobilisé, les hommes à l’intérieur ont gagné, sous le couvert de leurs collègues, les autres antigravs, puis, une fois un peu éloigné, déclenchés les détonateurs encore en réserve à bord depuis la mission, soufflant les poursuivants. Finalement, grâce à une fréquence sûre, le groupe avait fait sa jonction avec les troupes du colonel Sima, ravagé plusieurs barricades tenues par les séditieux, enfoncé définitivement leur résistance, et était sorti de la ville par une route qui gagnait les premiers contreforts des Monts Métallifères de l’autre côté desquels se trouvait la plaine côtière et la cité Ducale d‘Acreopolis. Au cours des combats d’une rare violence, les hommes de l’infanterie de marine, qui, après les événements précédant, dans les Badlands, avait pour ainsi dire perdus toute émotion et retenue, avaient agit avec la plus grande brutalité, au point que leur commandant dû leur demander d’éviter les dommages aux infrastructures et à la population civile, ce qui n’était pourtant pas son genre; il se contentait de tirer, par la fenêtre à demi ouverte de son automotrice de tête de loin en loin, avec son SIP, sur les miliciens, et faire des sommations sur les individus louches mais pas directement menaçants. Rapidement, l’atmosphère dans l’habitable du puissant antigrav militaire était devenue lourde de la chaleur émise par les batteries plasmiques des armes et saturée de la poudre qu’utilisait les fusils à pompe de certain d’entre eux; c’était toutes vitres baissées qu’ils fonçaient sur les routes secondaires choisies au cœur du massif de l’extrême est de la Cisylvanie, dont les obscures forêts et les crêtes accélérées fournissait une excellente protection au convoi, mais les mettaient également devant le danger d’éventuelles embuscades. Néanmoins, il n’y eut rien; l’endroit n’était pas très fréquenté, et son importance stratégique faible, sauf, bien entendu, pour ceux qui connaissaient le Tunnel 47. Il se trouvait à la frontière de la Cisylvanie et du Achetenbürgen, deux régions séparées par le fleuve Fynn, qui jaillissait de la montagne à cet endroit. Là, à côté du point où se trouvait justement la base du LXVIème de Cavalerie, qu’aboutissait un tunnel secret, dévolu à l’armée, caché au fond d’une vallée par d’épaisses forêts de conifères , et surveillé de prêt par l’armée, qui éconduisait ceux qui s’approchaient de trop prêt. Sur le papier, il s’agissait d’une zone d’essai d’artillerie; régulièrement, on faisait tirer le canon à blanc, afin de confirmer cela, mais de toute façon, enclavé comme il était, l’endroit n’intéressait personne.
Entre temps, la colonne d’une douzaine de blindés de Track 2 s’était vue renforcée par les dix-sept transporteurs légers de Sima, et deux Camions de soldats qui étaient en transfert d’un camp à l’autre au moment de l’attaque des mercenaires du Cartel, à présent placé sous les ordres des deux officiers qui étaient fort opportunément de rang égal. Après qu’un éclaireur eut annoncé que l’entrée de la vallée était sûre, ils s’y engagèrent. Le colonel avait pris place dans le blindé de tête, aux côté de Syllas, et tout deux observaient dans les premières lueurs du matin le paysage qui s’offrait à eux avec l’immobilité due à la fatigue après plus d’une journée de combat intenses: Sur deux cent mètres de large, et quelques kilomètres de long, l’entrée s’ouvrait sur un sol de galets et de grosses pierres dans lequel se détachait à peine à chemin dégagé longtemps auparavant par des engins de déblayage, sans une herbe; c’était un ancien glacier qu’il y avait eut ici, mais le réchauffement très rapide subit par la planète lors de sa Terraformation avait laissé l’œuvre glacière inachevée; ainsi, sur les bords, la forêt boréale avait poussé dans une terre encore riche en nutriments, tandis que le fond ne s’était libéré que récemment, et se transformait en cascade pendant les hivers particulièrement pluvieux. Il y avait ainsi, plantés de manière très serrée sur les pentes, une forêt qui semblait infinie de pins, de sapins, et d’arbres à feuilles caduques particulièrement vivace, le tout séparé par des plaques d’herbes seiches. C’était seulement bien plus haut dans les Monts que cette forêt cédait la place aux versants enneigés du Mont Yaksa, dont on apercevait le sommet, pourtant distant d’une centaine de kilomètres, depuis le fond de la vallée. Ce même sommet était visible depuis Acreopolis également, dans le lointain et la brume du matin.
La route de terre battue et de graviers laissant place à celle de pierre, les sustentateurs antigravitationnel eurent un peu plus de mal à maintenir un équilibre parfait, et, faute d’ordinateur pour les synchroniser, faisait cahoter un peu les véhicules. A cause de cela, leur progression fut un peu plus lente, mais ils arrivèrent rapidement au fond de la vallée.
Le Tunnel 47 y aboutissait sous forme d’une casemate massive, flanquée de plusieurs bunkers de garde, nids à mitrailleuses automatiques, générateurs de champ disruptifs, etc…, possédant plusieurs entrées fermées par des battants de Dutane, certaines juste de taille humaines, trois capable de faire traverser des véhicules de combats et les lourds lanceurs de missiles THOR I et II mobiles qui depuis des siècles anhélaient les pirates tentant d’attaquer la planète. Plusieurs étaient stationnés ici d’ailleurs, avec de nombreux missiles en réserves. Plus qu’un tunnel, le 47 était un point d’importance hautement secret.
Avec un léger soupir de la part des sustentateurs, l’automitrailleuse de tête s’arrêta, et attendit que toute la colonne. Celle-ci mit encore une minute à converger et se mettre en bon ordre, ce que regardaient, mutiques, leurs chefs. Mais soudain, sans que l’un d’eux n’eut tendu la main vers l’émetteur du code d’entrée, le battant de la porte centrale se releva, disparaissant dans le béton, en silence, laissant un énorme trou noir béant. Cela dura quelques instants, durant lesquels tout les regards se braquèrent sur eux, puis, il y eut une lumière, un phare, un blindé recouvert d’un de ces nouveaux revêtements furtifs rendant le mouvement moins voyant apparu, suivi d’un deuxième, d’un troisième, toute une colonne, qui s’immobilisa brusquement à la vue de celle qui lui faisait face. Une portière de l’unité de tête s’ouvrit, et deux hommes en uniforme sautèrent au sol, avant de s‘avancer vivement vers l‘automitrailleuse de tête, dont les occupants sortirent, et allèrent à la rencontre des nouveaux arrivants. En premier avançait un officier haut gradé, en uniforme de combat, et ensuite un aide de camp, portant en bandoulière un FAM1, lançant autour de lui des regards méfiants. Ce fut le premier homme qui parla lorsqu’ils furent à portée de voix:

-On m’a parlé d’unités subsistantes de l’autre côté des montagnes, vous en êtes?

Sa voix était brève et sèche, sur un ton pincé, qui n’aspirait pas vraiment à la chaleur, pas plus que son visage sur lequel apparaissaient de longues années de combat n’était engageant.

-C’est cela, Général, répondit Sima, esquissant un bref salut en même temps que son collègue, et vous, je suppose, les forces de secours?
-Oui, confirma le nouveau venu, Général Gustave Sadowa, je suis à la tête de la deuxième armée de Galaxie 8, qui va aller nettoyer tout cela. Je suppose que vous aurez quelques détails intéressants pour nous…Vous êtes?
-Colonel Kwessel Sima, et j’ai de bonnes raison croire que je commande tout ce qui reste du IXème de ligne de Suse, déclara l’homme de l’armée, on sans inconsciemment se bomber légèrement le torse.

Le regard de Sadowa alla vers Syllas, qui n’avait rien dit jusqu’alors, et observé d’un air froid. Il répondit sur un ton neutre:

-J’ai reçu des instructions directes de la part de Son Honneur le Doge afin de garantir le secret des actions de mon groupement d’infanterie de marine, et de l’identité de ses membres. Je ne peux vous donner mon identité ou vous informer sur la nature de ma mission sans avoir au préalable obtenu confirmation du Doge.

Sadowa, l’air plus ou moins embêté, observa attentivement l’officier de la marine, raide, le dépassant d’une demi-tête, dans son uniforme fatigué, et s’arrêta sur les galons argentés:

-…Commandant d’Escadre dans la marine. Je verrais tout cela. Peu importe votre nom, le tout est d’arriver à en finir ici.

Il se retourna, et fit un signe de la main en gueulant dans la com.:

-Allez, on déploie les hommes, le matériel, et le QG. Tout doit être près pour dans une heure, s’écria-t-il, avant de se retourner de nouveau: Messieurs, nous allons reconquérir les Badlands, et je compte sur vous, pour rendre coup sur coup aux hommes du Cartel.

Et c’était bien l’intention des deux ambitieux officiers.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeMer 1 Avr - 18:20

[i]Depuis la découverte des applications pratiques de la théorie Tetryonique, je suis en proie à une réflexion et un surtout un doute profond. Ces dispositifs dont nous, simples mortels non familiarisés avec les théories quantique et cosmique ne comprenant goutte, nous permettent de manipuler l’essence du temps. Est-ce sain? J’en doute. Les techs et autres scientifiques ne nous ont pas donné de réponses; c‘est aux philosophes de le faire. Les essais dans le cadre du programme Condor et de l’Opération Dynamo se sont révélés rapidement concluants, et des objets sont partis vers l’avenir. Des heures, des jours en avant parfois! Tout cela est difficilement concevable, pourtant c’est la réalité de cette étrange époque, paradoxale, où nos coutumes et habitudes de vie ont peu changé depuis des siècles, voire même des millénaires, et la technologie de pointe libère des voies jusqu’alors inimaginable.
Pour en revenir au sujet premier, ce qui me fait le plus douter, malgré les assurances de nos chercheurs à ce sujet, c’est d’inverser le processus, celui d’un retour en arrière. Cela serait, je pense, la découverte la plus terrifiante et destructrice depuis la maîtrise du feu atomique. Je fais ici le serment solennel de m’y opposer, quoiqu’il arrive, pour le bien de l’humanité.[i]
Amiral Liung Wu Xun, Ministre d’état à la propagande et à la culture de l’Union. Carnets personnels, lire VI, p481.



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An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Ressirgo V
Désert occidental, Route 4


L’antigrav que Vesner leur avait trouvé était une sacré antiquité; modèle datant du siècle dernier, il faisait un bruit pas possible, cahotait, et ne gênait que mal les tournant. A l’intérieur de l’habitacle un peu rouillé et décrépi, le refroidissement de l’air ne marchait même pas à moitié, et, si on n’ouvrait pas les fenêtres, l’atmosphère devenait irrespirable. Enfin, leur sauveur du spatioport leur avait déniché cette petite merveille par défaut, car c’était al seule du mois partant vers le désert, et tout les hélijets étaient déjà réservés. Mais si Fendlein trouvait cela passablement inconfortable et peu supportable, Eramstead au contraire s’amusait beaucoup. Le milliardaire non conformiste adorait s’immerger dans des milieux très différents du sien, et cela était un bel échantillon. Car, aux commandes de leur bolide se trouvait un moine dont la soutane sale cachait à peine la combinaison, vêtement plus usuel, enfilée à la hâte dès la sortie du marché, le frère Epidus, qui, après avoir fait les courses pour son monastère en ville —la remorque, et une bonne partie de la banquette arrière dont Fendlein n’occupait qu’un coin, étaient plein de paquets divers de vivres, d’objets hétéroclites, de semences, etc…—, retournait vers la solitude du désert dans laquelle une quarantaine de religieux vivaient, retirés du monde trépident de la civilisation galactique, pour se consacrer à la prière et à la réflexion. Malgré cela, le frère Epidus était quelqu’un de très loquace qu’on aurait mal vu reseter silencieux et prosterné pendant des heures dans une cellule: il parlait de tout et de rien, autant de leur vie dans une forteresse du sultan, servant jadis à surveiller les invasions des monades du déserts, dont la ferveur guerrière n’avait été calmée que par les bataillons d’infanterie de la Sérénissime bien plus tard, reconvertie en monastère, qui, plantée sur un roc dominant et la mer et la terre et le désert de l’ouest, semblait un refuge loin du monde. Il était venu là à dix-sept ans, ajuste après son service militaire. D’ailleurs, c’était grâce à lui qu’il avait connu l’endroit; sa caserne, aujourd’hui transférée plus au nord, se trouvait pas si loin de l’abbaye, et il avait eut l’occasion de la visiter. L’aura de sainteté l’avait touché…il avait conservé ce souvenir, et lorsqu’il fit son baptême du feu faces aux rebelles de galaxie 8 dans l’armée du général Mariens, c’est, au cœur du combat, dans le souvenir du calme et de la présence divine de cet endroit qu’il avait trouvé le courage de monter à l’assaut. Alors que ses compagnons avaient étés décimées par une erreur de mouvement de leur bataillon, lui seul survécu, et il interpréta ça comme un signe. Au fond, quand on s’y habituait, la vie là-bas y était douce. Leurs jardins, au cœur de la forteresse, produisait de quoi les alimenter, car, irrigués par l’eau désalinisée et protégés des sables, ils voyaient fleurir les plants tropicaux et autres nourritures qui leur suffisaient, tandis que leur esprit se nourrissait de la réflexion, et de la prière qui rythmaient leurs journées au grès des sonneries des cloches. Ressirgo était en soi, malgré tout, un monde difficile. Les locaux restaient un mystère pour cet homme sanguin et direct, avec leurs manières parfois étranges, et leurs comportements non moins biscornus. Tenez, une fois, au marché, je me suis retrouvé blâmé pour une broutille, enfin, rien de bien grave, mais leurs réactions m’avait perturbé. Enfin, ce n‘est rien à côté des Tessaks du désert, qui ne vous regardent que d‘un air méfiant. Pourtant, l‘Abbaye était là depuis des siècles, mais ils la considéraient toujours comme vaguement étrangère. Enfin, cela ne les empêchait pas de venir de temps en temps faire du troc ou acheter quelques fruits et légumes, qu‘ils utilisaient pour leurs charmes, ou dévoraient lors des fêtes. Une assez étrange civilisation, des demi-sédentaires, qui, une fois par an, levait leur camp, embarquaient tout sur des radeaux de bois fort ancien, que l’on réparait de temps à autres, soit avec de la ferraille de duranium, soit en coupant un ou deux arbres dans le delta, au nez et à la barbe des propriétaires des palmeraies. Cela fait, ils suivaient la côte jusqu’à trouver un endroit qui leur plaise, puis s’y installaient. Ces rudes hommes vivaient de la pêche et de la chasse des petits animaux du déserts, et parfois, tiraient quelques revenus des très rares visiteurs. D’ailleurs, il se souvenait de l’expédition archéologique du prof’ Dimitiev, il y avait trois ans de cela. Leurs hélijets et gros camions n’étaient pas passés loin, ils cherchaient un truc dans le nord, avec beaucoup de main d’œuvre locale, mais bon, cela ne passionnait pas Epidus, ce qui le fascinait, c’était plutôt le mode des vie de ces derniers…

-Attendez, le coupa pour la première fois Francis, vous dites qu’il y a eut une expédition archéologique?
-Oui, oui, confirma joyeusement le frère sans prendre ombrage, avant de donner un grand coup de manette pour suivre une des courbes de la « route », c’était en 59. Rude année, avec l’affaire des amiraux. Enfin, je m’éloigne. C’est donc une centaine de gens, de l’université de Christiansa qu’on m’a dit, mais je n’ais pas cherché plus loin non plus, qui sont montés vers la côte nord. Nous n’allons jamais par là, il n’y a que le désert, et même les Tessaks ne s’éloignent jamais à plus d’une dizaine de kilomètres de la côte. Il parait qu’il y avait une sorte de grande ruine plus haut, presque entièrement sous le sable, le mastaba qu’on appelait cela. Mais il y a eut un accident, à ce que j’ai entendu, et des morts. C’est triste, car ce ne sont que des gens qui font leur travail, un vrai travail.
-Quel accident? Interrogea Eramstead, son insatiable curiosité piquée au vif.
-Oh, je ne sais pas, répondit Epidus, haussant les épaules d’un air désolé, je m’excuse. Mais le prieur y est allé, quand il a fallu enterrer les victimes, et pourra vous en dire davantage. D’ailleurs, nous sommes bientôt arrivés.

Il fit encore faire un virage périlleux au véhicule, soulevant un petit nuage de poussière et de cailloux, contournant une dune, pour arriver au sommet d’une autre. De là, on avait une vue plongeante sur la mer, un océan d’un bleu profond qui tranchait avec le jaune impérial du désert. Cette côte était parsemée de formations rocheuses plus ou moins importante, mais, au milieu du panorama, une, bien plus imposante que les autres se détachait. Elle s’élevait côté terre en pente douce jusqu’au une bonne soixantaine de mètres au dessus de la mer, qui venait s’émousser contre une falaise granitique jaunie par le années. Au sommet se dressaient un complexe aux formes étranges, qui n’avait plus rien à voir avec le fort du sultanat; plusieurs bâtiments d’un blanc très pur, tout en coupoles bleu clair, en nefs et en transepts, reliés par des corridors dont les murs étaient largement ouverts, formant sûrement plusieurs atriums. Sur la face océanique, des petites fenêtres et même de véritables constructions à la verticale émergeaient de la falaise, s’élançant vers la mer, comme un défi à l’apesanteur. Au sommet de chaque toit ou coupole se trouvait une croix d’argent brillant même de très loin dans la lumière implacable du désert.
Le frère Epidus était un vrai pilote; avant qu’ils n’aient même totalement appréhendé ce spectacle grandiose, leur véhicule attaquait déjà la montée sur le chemin poussiéreux serpentant entre les pierres. Après quelques coups de volant, ce petit homme plus ou moins chauve aux poils dorés par le soleil les fit passer sous une belle arcade de pierre blanche, et entrer dans une cour verdoyante: ce vaste atrium carré, entouré de toutes part de bâtiments aux nombreuses dorures, était occupé en grande partie par des espaces de terre noire meuble sur lesquels poussaient, outre les légumes communs et vivaces, de grandes et belles plantes des pays chauds et arides, dont les larges feuilles d’un vert sombre ne prenait que autant d’espace aux énormes fleurs tropicales aux couleurs bariolés allant du rose pale au bleu le plus profond, en passant par une gamme de jaune, de vert, et de rouge. Entre ces espaces délimités par des petits murets et les chemins de pierre blanche sur lesquels circulaient quelques moines, certains armés de pelles et de multicapteur botaniques, d’autres ne faisant que se promener dans ce décor paradisiaque, des petits canaux d’une eau à l’aspect frai et vif étaient délimités, et allaient partout, pour finir par converger vers une fontaine centrale où un générateur antigravitationnel la faisait s’élever vers le ciel en un mouvement gracieux et contraire à l’apesanteur.
Epidus gara leur tacot sous un porche—duquel émergeait une petite cascade d‘onde claire, qui était ensuite conduite des deux côtés, pour tomber dans une parfaite symétrie dans une paire de canaux—, et sortit, pour aller ouvrir, très obligeant, leurs portes avant même qu’Eramstead n’ait pu le faire lui-même, ou refuser de se laisser servir. Ils sortir, et furent surpris par la fraicheur de l’air, empli des bruits de l’eau qui coulait de toute part, et des senteurs exotiques du jardin alliées à celle, très minérale, de la pierre blanche qui couvrait tout.

-Bienvenue au monastère de Kerulen, déclara avec un sourire le moine, tout en sortant de la carlingue de l’ancestral antigrav une partie de son chargement, laissez moi une seconde…

Il les quitta un instant, et revint, libéré de son fardeau, avec deux autres religieux, qui portaient un peu mieux que lui leur robe, et avaient leur peau un peu plus foncée par le terrible soleil de Ressirgo. Il leur confia une batterie de recharges de synthétiseur, et un caisson plein de choses diverses. Ensuite, satisfait, il leur fit signe de le suivre, laissant ce qui était apparemment l’antigrav communautaire à la discrétion du prochain utilisateur.
Ils quittèrent le large passage central dallé par lequel ils étaient arrivés, en empruntèrent une chemin qui avait un tracé en forme de S entre deux rangées d’arbres fruitiers richement irrigués. A bout, trois religieux s’étaient en train de cueillir quelque chose, avec une échelle magnétique, le lançant dans un panier. Les visiteurs observaient tout cela avec étonnement, découvrant ce spectacle de pays de cocagne très improbable au milieu du désert.

-C’est fantastique ce qui vous avez fait ici! S’exclama Fendlein, humant de nouveau la délicieuse senteur fruitée en provenance des arbustes riches en petites formes hautes en couleurs.

Épidus eut un nouveau sourire franc, et l’on voyait qu’il luttait contre l’orgueil:

-Nous sommes content de vivre ici, et nous en avons fait le meilleur. De nombreux monastères vivent péniblement des donations dans des environnements tristes et urbains, nous avons beaucoup de chance
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeMer 1 Avr - 18:22

Le milliardaire avait quant à lui saisi doucement une branche pendant au-dessus du passage, et frotté une des feuilles d’un vert clair où l’on percevait à peine les nervures dans ses mains. Après avoir porté cela à son nez, il respira longuement, avant de demander:

-C’est un kitrinier, n’est-ce pas?

Le moine confirma vivement, tout en essayant de réajuster un peu mieux sa robe afin de cacher les dernier coins où transparaissait le justaucorps qu’il mettait pour ses sorties en ville:

-Nous en avons une douzaine, tout au long de ce chemin. La kitrine est un fruit très riche en vitamines et autres éléments qui fortifient le corps et l’esprit. On peut aussi le distiller, et en faire un alcool. Nous en produisons quelques litres pour notre consommation personnelle.
-C’est la Ravaga, non? Interrogea Fendlein, assez intrigué.
-]En ville, on appelle ça comme ça. Mais la vrai kitrine a disparue depuis longtemps des recettes des usines à alcool, ça ne vaut pas le notre, qui ne conserve que les vertus, et bannit les vices engendrés.

Mais déjà ils avaient dépassés les arbres fruitiers, et l’ombre d’un couloir couvert se profilait devant eux. Le toit était porté par des colonnes doriques assez espacées, et, au milieu de ce passage entre deux bâtiment, il y avait une entrée, flanquée de deux cascades miniatures qui projetaient quelques gouttelettes sur les passants. Ils entrèrent, et découvrirent un autre atrium, davantage dévolu à la culture de légumes, mis toujours richement irrigué et fleuri. Néanmoins, ils restèrent dans le corridor, obliquant à droite, en direction d’une bâtisse massive ouvertes aux vents, dont les niveaux supérieurs étaient systématiquement soutenus par les colonnes des étages inférieurs, jusqu’à la grande coupole bleue du sommet, où brillait la croix d’argent. C’était manifestement le centre de l’immense abbaye; on y rencontrait de plus en plus de moines, qui regardaient parfois avec étonnement les nouveaux venus—manifestement, les visiteurs étaient relativement rares—, mais sans aucune hostilité ni méfiance. Ils passèrent sous un portique, et entrèrent dans le bâtiment central; on débouchait sur un large couloir qui en faisait manifestement le tour, les murs occupés par des statues très anciennes ou des tableaux, recouverts par des champs de suspension, afin de les prémunir dans la mesure du possible des ravages du temps. Mais ces œuvres n’étaient rien comparées à la voute, qui montait presque jusqu’au sommet, magnifiquement peinte en couleurs vives des scènes de la Bible, allant de la passion du Christ à la fuite et la refondation par Saint Raphaël Paléologue, éclairé par les ouvertures aménagées vers l’extérieur, et des lumières indirectes.
Eramstead et Fendlein s’avancèrent sur le sol de marbre, admiratif devant cette grandeur insoupçonnée.

-C’est…magnifique, murmura le milliardaire, se tordant le cou pour tout apercevoir.

Mais déjà la main, patiente mais déterminée, d’Epidus se posa sur son épaule:

-L’office vespéral a lieu en avance aujourd‘hui, et débutera bientôt. Si vous voulez voir le prieur avant, il faut se hâter.

Francis secoua sa tête pour se ramener sur terre, et répondit:

-D’accord. Menez-moi au prieur, s’il vous plait.


Le combat appelle des sacrifices, et les sacrifices appellent la victoire!
Juan de San Ferdino, chez des bellicistes, lors d’un meeting de ce parti, quelques heures avant sa mort dans une émeute.


-- -- --

An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre



Après cinq minutes de descente, le terrain commença à revenir à l’horizontale. Quoique toujours formé de galets, de sables, et de grosses pierres, il était plus praticable car les fissures s’espaçaient. La petite caravane était bien plus nerveuse et prudente depuis ce qui était arrivé au gars qui était tombé plus haut, et même Hel s’est surprise à regarder à deux fois où elle mettait le pied. D’ailleurs, Lubbock leur avait fait faire plusieurs grands crochets pour éviter des passages peu praticables, et finalement, il y eut un petit relâchement dans la tension quand ils furent arrivé au fond. Les ténèbres y étaient toujours aussi épais, et le silence oppressant, mais l’impression d’avoir passé le pire flottait dans l’air entre les miliciens. Néanmoins, Janeshki et Hel d’une part et le mercenaire d’autre part ne semblaient pas gagné par ce sentiment, et restaient sur leur garde. Finalement, Lubbock s’était avancé, et avait déclaré à voix haute:

-On est au fond du cratère.

Scaliger s’était avancé jusqu’à lui, et avait lancé un coup d’œil circulaire, éclairant les alentours avec sa torche. D’abord, il ne trouva rien de nouveau, que des cailloux, puis, en regardant de plus près au sol, il remarqua quelque chose, et s’en approcha. Intrigués, les deux motards l’imitèrent. Il y avait quelque chose au dessus des cailloux, une couche étrange, transparente, et lisse, ponctuée par endroit de métal. Lubbock, qui les avait rejoint, fit d’une voix pas complètement assurée:

-]Ca pourrait bien être du duranium au troisième stade chimique…quand on le chauffe trop, il devient transparent…

Le chef de clan tourna la tête vers lui, mais le mercenaire haussa les épaules en ajoutant:

-Je n’ais pas été à l’unif pour en savoir plus, c’est c’qu’on nous a dit dans l’temps, voilà tout.
-Mais si y a du duranium…C’est que les installations sont pas loin, poursuivit Scaliger, recommençant à prospecter les environs, tournant autour du groupe.

Le manège dura de longue minutes dans le froid manifeste du fond, et le silence n’était percé que par les bruits effrénés des pas d’Antonelli, et les conversations à voix basse des miliciens qui, rassemblés en troupeau autour de celui des leurs qui avait le deuxième projecteur, lançaient des regards méfiants dans les ténèbres. Lentement, Hel se demanda qu’est-ce qu’elle faisait ici, au fin fond de nulle part, dans des ténèbres qui étaient tous sauf rassurantes, avec Antonelli Scaliger, à chasser les galets…

-Par ici! J’ai trouvé! Cria tout d’un coup ce dernier, qui s’était éloigné d’une trentaine de mètres au point que son projecteur était devenu un minuscule lampion.

Ils le rejoignirent en courant, pas saccadés et silencieux sur l’étrange revêtement de duranium du sol, et arrivèrent derrière. Une auréole de lumière issue de la torche éclairait une minuscule entrée pratiquée dans un mur de béton affleurant à la paroi opposée à celle avec laquelle ils étaient venus. C’était totalement désolé, d’un gris tombant lentement en décrépitude, et légèrement rouillé sur le métal du battant. Seul se détachait, écrit en un jaune encore vif comme au premier jour dans la lumière, l’avertissement: « ZONE DE DANGER EXTREME - ENTREE INTERDITE - TIRS SANS SOMMATION ». A sa vue, un malaise passa parmi la troupe massée derrière Scaliger, qui eut un mouvement de recul inconscient. Les ténèbres, la profondeur, l’éloignement, et maintenant cela, ça travaillait les nerfs, et pas grand monde n’avait envie de jeter un coup d’œil à l’intérieur de ce qui était estampillé comme cela. Mais déjà l’homme de la pègre avait fourré le projecteur dans les mains d’un de ses miliciens, et s’attaquait au verrouillage. A contrecœur, tous se rapprochèrent, comme craignant que la violation d’une sorte de périmètre sacré jette une malédiction obscure sur eux.

-A les salauds, c’est bien fermé leur machine, gargouilla Scaliger en appliquant un couteau magnétique contre l’emplacement du verrou, puis un peu plus haut, avant de faire un gros efforts pour soulever, comme avec un pied de biche.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeMer 1 Avr - 18:22

Après de longs instants comme cela, désabusé, il fit un pas en arrière, furieux d’être tenu en échec par un vieux battant rouillé et une serrure de l‘armée. Après avoir proféré à voix basse une menace contre icelui, il se retourna vers Janeshki, qui avait suivi tout cela les bras croisés, jaugeant les chances de réussite:

-Essayez d’ouvrir cela, bordel de bordel!

Relevant le ton employé, mais ne disant rien, le hetman s’approcha de la serrure, et l’observa pendant plusieurs instants, battant des paupières avec intérêt. Quelques pas derrière, sa jeune amie, adossée au mur, regardait la manœuvre, l’air sceptique, une main sur sa hanche, sceptique quand aux chances de réussite.

-Hum… c’est un verrou à barillet magnétique rotatif, pas très récent. Ca date au moins d’y a quinze ans, expliqua finalement le motard, passant ses gantés dessus, mais on dirait qu’il a été endommagé il y a moins longtemps.

Scaliger, entendant ça, avait sauté en avant, et s’était accroupi, pour vérifier ce disait Janeshki, qui détailla:

-Ca se voit pas vraiment; on l’a fait sauter au couteau laser, un seul rayon entré avec précision jusqu’au cœur du dispositif…
-C’était du beau boulot, voyez bien qu’j’m’y connais, fit soudain une autre voix derrière eux, celle, amusée, de Lubbock, car c’machin, c’est moi qui l’est foutu comme ça.

Ils se tournèrent leurs têtes vers lui; il était là, debout, en train de les regarder.

-Et comment ça s’ouvre, c‘truc? Glapit Scaliger, que le manque de coopération du mercenaire hérissait.
-Comme ça…laissez-moi passer les enfants, répondit avec un petit sourire cruel et ironique Lubbock en les écartant sans ménagement, et se plaçant devant, regardez-moi bien.

Antonelli, depuis le côté, fixait la serrure, pendant que Janeshki, au contraire, s’éloignait de la porte. Le mercenaire avait tendu la main, tapoté le petit carré de métal qui était la seule manifestation extérieure de verrouillage, puis, referma son poing, et assena, tout droit et d’une seule fois, un puissant coup en plein dedans, qui fit trembler le battant sur ses gonds invisibles.
Et alors, au plus grand étonnement de tous, il y eut un grincement, et, lentement, la porte blindée s’ouvrit, sur l’extérieur, d’un mouvement lent et régulier. Scaliger, d’abord abasourdi, arracha violement la torche au milicien à qui il l’avait confiée, et éclaira l’intérieur, tandis que les autres restaient béat devant la simplicité brutale de la méthode d‘ouverture. On voyait les cinq premiers mètres d’un couloir, bétonné et vide, sans la moindre lumière. Une étrange odeur en sortait, qui n’était pas sans rappeler celle de l’alcool à brûler pur qu’utilisaient certains à Kamensk pour faire flamber les aliments, dans la tradition gastronomique masochiste comprenant en plus des piments à côtés desquels ceux de Mosta n’étaient qu’aigre-doux, et qui mettaient à genoux les criminels les plus endurcis, faisant la célébrité de la cité en dehors de sa place entre temps bien assise dans la rubrique des faits divers, et de celle dans le monde des maisons publiques, drogues et trafics. Mais, déplacée ici, cette odeur avait quelque chose de profondément inquiétant, déstabilisant. Un grognement de Lubbock, qui avait vu les marines bouger, s’éleva:

-C’que vous sentez là, mes p’tits choux, c’est c’qui reste d’la stérilisation d’la dernière fois. Et j’vous assure, c’est pas c’que vous croyez qu’on a pulvérisé.
-Est-ce que c’est encore dangereux? Demanda le hetman, un peu préoccupé.
-Après tout ce temps, plus vraiment, sauf bien sûr s’il y a des gars d’jà sacrément éclopés parmi vous. Mais t’façon, moi j’continue plus. J’vous ais montré l’coin, j’ai rempli ma part du contrat.

Antonelli avait brusquement tourné la tête vers le mercenaire, et le fixait, le regard en feu:

-Comme cela? J’crois qu’j’ai mal entendu là! Lubbock se campa solidement sur ses deux pieds, juste en face de Scaliger et de l’entrée. Sa silhouette trapue faisait comme un rocher qu’on n’aurait pu bouger.
-T’a très bien entendu, j’fais pas un pas d’plus. Même les flingues de tes gars pourront pas m’forcer à entrer là-d’dans. D’ailleurs, si t’avais encore un p’tite morceau d’cervelle, t’mettrait les voiles tout de suite.
-Tu crois ça?

Le chef de clan s’était rapproché de plusieurs pas, et tendait le couteau magnétique, toujours activé, juste sous le nez du mercenaire, qui le regardait calmement, avec détermination.

-Oh oui, et toi, t’m’étonne que tu n’le crois pas après c’qui est arrivé à ton mec plus haut.

Un spasme de colère violente traversa le visage d’Antonelli, et le couteau, à quelques centimètres de le gorge de Lubbock, vibrait dans sa main. Mais il parvint à se dominer, et lâcha sur un ton profondément chargé de mépris:

-Casse-toi, salopard, et qu’tu croise pas un fois encore mon ch’min, sinon, j’te charcuterais.

Le mercenaire eut un sourire amusé qui ne plut pas du tout à Scaliger, mais avant que ce dernier n’ait le temps de l’insulter de plus belle, il avait déjà tourné les talons et s’éloignait à toute vitesse, sortant une toute petite lampe d’une de ses poches. Bientôt, lui, et le point lumineux de sa lumière, avaient disparus, avec un dernier ricanement.

-Et t’a pas intérêt à piquer l’bateau, siffla à voix basse Antonelli en fixant l’endroit où il se tenait auparavant.

Puis, il jeta un coup d’œil aux hommes de mains. Ceux qui affichaient des expressions incertaines, et échangeaient des regards à la fois entendus et inquiets. Finalement, l’un d’eux s’avança, et fit, d’une voix un peu intimidée:

-Ecoutez, patron, v’savez, ça ne nous dit rien d’entrer là…
-La ferme! Gueula Scaliger, avant de répéter, faisant de grands mouvement avec son arme encore active, presque hystérique, la ferme, la ferme! On va entrer dans s’trou, même si c’est pour crever, compris, bande de saleté de trouillardes et d’salopes d’ingrates! Pour quoi je vous paye à la fin!?

Cette petite tirade, prononcé sur un ton sans équivoque, fit taire les remontrances du personnel, mais pas son inquiétude. Maintenant, il n’allait plus être très coopératifs. Néanmoins, il se retourna vers les motards, encore furieux:

-Vous deux, en tête, et c’ça saute. On a assez perdu d’temps comme ça!
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeJeu 2 Avr - 19:27

Il existe deux états d’esprit: celui où l’on distingue une cause, un déroulement, et une conséquence à une action, tout à fait cloisonnées et à sens unique, en somme, presque indépendantes, et celui, plus flexible, où l’action est un tout, linéaire, qui peut être affecté en cours pour changer sa finalité.
Réflexion communément attribuée à Aetius Syllas


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An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre
Kamensk


-J’espère qu’tu sais c’que tu fais, sinon au aura quelques problèmes, grommela Hel en contemplant au bâtiment carré et haut, tout en style massif, conçu comme un blockhaus, au dessus de la large porte duquel scintillait les lettres d’acier « Commandement Militaire ».

Malgré l’implication des militaires dans les affaires locales, et les liens existants, on évitait quand même de se fourrer jusque là-dedans, car on ne savait jamais ce qui pouvait trop arriver. Au cours des précédentes heures, elle avait mit Kerstin au pied du mur, et celle-ci avait avoué, à coup de demi-mots et d’expression voilées, qu’elles venaient ici pour de toutes autres raisons. Finalement, lorsque « lac Tisça » était sorti, la jeune femme s’était arrêté net, et avait transpercé du regard son ancienne amie, avant de siffler qu’elle s’en allait tout de suite. Kers l’avait conjuré de rester, et finalement, après avoir renoncé à sortir son arme, concéda de plus amples explications. Finalement, Hel s’était dite qu’un autre aurait intérêt à venir avec elle. Sans trop de difficultés, elle s’était invitée chez Falco Scaliger, parrain du clan qui s’était pharamineusement enrichit avec l’explosion des affaires de leurs casinos, et surtout la répression des Hunsa, et dans une moindre mesure, des Galtieri. Celui-ci n’avait pas forcément été mécontent de la revoir—les livraisons d’armes régulières vers Kamensk depuis la capitale de Hel n’y était pas pour peu, mais bien sûr, il n’y avait pas que ça—, et, lorsqu’il fut instruit de l’affaire, décida de la suivre, et proposa même de se rendre illico au commandement. Lui non plus, cela ne lui revenait pas complètement, mais c’était la façon la plus rapide et efficace de sauver ce qui pouvait l’être. Kerstin, désarçonnée par la tournure que prenaient les événements, était parti contacter on ne savait qui, et de toute façon, on se passait d’elle, maintenant qu’Hel était au fait de l’essentiel.

-Ne t’inquiète pas, la rassura Falco, en faisant signe à ses hommes, quatre miliciens cachant tant bien que mal leurs pistolets, et deux personnages plus propres, probablement des notables du clan, ou alors même les successeurs, de se poster en face de la rue, surveiller ce qui vient, et éventuellement chercher des renforts, c’est le tout pour le tout. Il n’y a pas d’autre choix.

Résolument, ils s’avancèrent vers les marches, entre deux soldats de faction, assez raides avec leur lourd FAM3, qui les observaient d’un air méfiant depuis qu’ils avaient débouché d’une rue d’en face. On n’avait pas à douter que dès qu’ils seraient loin, l’un des soldats informerait ses supérieurs.
L’entrée du commandement militaire était une salle basse et assez allongée, avec quelques bureaux sur le côté, et un large espace ménagé au centre, avec un tapis de moindre valeur pour couvrir le carrelage. Au bout, un escalier montait vers les étages. Alors qu’ils s’apprêtaient à se diriger par là, trois nouveaux militaires surgirent comme par magie de derrière un des piliers gris, et s’approchèrent, la mine sombre, des visiteurs.

-Papiers et raison de la visite, siffla l’officier, un pas devant ses soldats, en lançant un regard qui donna l’impression à la jeune femme d’être passée aux rayons X. Sans rechigner, ils tirèrent leurs plaque à marquage atomique. L’une après l’autre, l’homme de la sécurité les vérifia avec son décrypteur, tout en hochant la tête, avant de marmonner sur un ton autoritaire et cassant:

-Je vous rappelle que si vous avez des armes, il faut nous les donner. Le moindre mouvement hostile au-delà de ce point ne sera pas toléré.

Les deux visiteurs échangèrent un regard finalement pas si étonné, et portèrent leur main à leur ceinture, tirant leurs pistolets à impulsion, que le militaire prit, et fourra sans ménagement dans une poche de son uniforme où les armes pourtant volumineuses disparurent sans problèmes. Il s’attarda sur Hel.

-Votre sacoche, mademoiselle.

A contrecœur, elle l’ouvrit, et en tira son FW2 compact, faisant briller le regard de l’officier, mais qui s’abstint néanmoins de toute remarque, empochant la puissante arme automatique également. Un instant, elle envisagea de donner le couteau télescopique qui se cachait discrètement sous le bras, à l’abri des regard indiscret, et nécessitant une fouille au corps rondement menée pour être trouvé, mais se ravisa, tandis que leur homme poursuivait:

-Et la raison de la visite?
-Nous aimerions parler au général, fit sur un ton dégagé Falco.

L’officier de sécurité fit une petite moue qu’Hel, malgré son expérience, ne parvint pas à décrypter, et lâcha, dédaigneux:

-Nous allons voir si le Général est disponible. Veuillez me suivre.

Alors que les deux autres restaient en arrière, il se dirigea, sans un regard pour ceux à qui il s’adressait, vers l’escalier. Ils lui emboitèrent le pas sans rechigner, car de toutes façons, des militaires qui avaient l’air d’avoir avalé leur fusil, ça existerait toujours, en particulier à Kamensk. D’un pas parfaitement régulier d’exercice, mais néanmoins rapide, il les fit monter au troisième étage d’une seule traite, sans un mot, et s’avança dans le couloir totalement nu qui leurs faisait alors face. Seules les portes, en bois clair, apportaient la touche qui différenciait l’endroit d’un bunker. Il passa les quatre premières, et s’arrêta à la cinquième, à laquelle il frappa. Après quelques instants, elle s’ouvrit, et un secrétaire apparu.

-Le Général est-il disponible?

L’homme, n’ayant qu’un uniforme de petit fonctionnaire de l’inventaire des couchettes des soldats, répondu sur un ton bien plus humain que son supérieur:

-Il est revenu d’une inspection il y a un quart d’heure avec le colonel Starkhänder, mais il ne devrait pas être très occupé, mon lieutenant. Est-ce urgent?

Le lieutenant de sécurité regarda les visiteurs, et déclara:

-Pas assez pour déranger le général s’il est déjà occupé.

Le secrétaire hocha la tête, et souffla « un instant », en poussa la porte. Tout d’un coup, Hel était prise d’une envie terrible de cracher à la face de ce bonhomme imbu de lui-même et de son rang de subalterne. Ah! Quelle tête il aurait fait en sachant que l’oncle de la personne qu’il avait devant lui et qui n’était « pas très importante » était l’un des deux officiers les plus gradés de la Nation? Sa petite attitude hypocrite aurait sûrement changé. Sans qu’on ne le voit de l’extérieur, elle se mordait la langue, tachant de ne rien faire paraitre. Mais déjà le secrétaire, figure bien plus sympathique en fin de compte, revenait.

-Vous pouvez entrer, déclara-t-il avec un faible sourire, en ouvrant davantage la porte pour les laisser passer.

La première pièce était tout aussi nue que le couloir, et un bureau sur lequel se pressaient les papiers et porteurs de données autour d’un terminal informatique—probablement la place de choix de ce petit comptable et secrétaire d’armée—faisait face à cinq chaises du genre de celles qu’on trouvait dans les cliniques, aussi accueillantes que le pire trou à Épaves des bas-fonds de Tsarysyn. De l’autre côté de la pièce se trouvait une deuxième porte, sur laquelle se trouvait un petite écriteau noir, « Bureau du Commandant Militaire du district des Badlands ». Le secrétaire s’avança, et alla l’ouvrit, et la tint pour eux. En premier s’avança le lieutenant, et ils le suivirent, tandis qu’on refermait méticuleusement derrière eux.
Le bureau était différent; les murs étaient décorés de cartes, à l’exception d’un, un tableau d’affichage géant le couvrait entièrement, et des centaines de petits bout de papier y étaient retenus par des petites attaches magnétiques; c’était des feuilles noircies à la main, manifestement des ordres reçus ou envoyés, des rapports rapidement fait, et autres, qui trônaient derrière la table de travail flanquée de plusieurs chaises, un bureau massif en bois aux multiples tiroir, sur le plan duquel on voyait de nombreux ustensiles d’écriture disputant sa place au terminal informatique et à la com.: un presse papier, une batterie de stylos et de correcteurs, un large tampon aux armes du Commandement.

-Le Lieutenant-Général Ramon Primo de la Rivera, annonça le guide, tandis que le maître des lieux relevait la tête du rangement de quelques papiers qu’il n’avait pas interrompu pour observer l’entrée de ses visiteurs.
-Vous pouvez disposer, lieutenant, répliqua-t-il, retournant à sa besogne, mais restez à côté.

L’officier eut un petit mouvement de la tête pour indiquer qu’il allait le faire, et joignit immédiatement le geste à la parole. Lorsqu’il eut quitté la pièce, De la Rivera, homme entre deux âges, aux cheveux légèrement grisonnant, et au visage pétillant d’intelligence, releva enfin la tête, et déclara d’une voix à l’accent très particulier:

-Falco Scaliger…je me disais bien que vous finiriez pas atterrir ici, mais je ne pensais pas que je n’aurais même pas besoin de lever le petit doigt pour cela. Ca aurait été le rêve de Flamin, n’est-ce pas?

Un sourire énigmatique était né sur son visage alors qu’ils parlait, puis il se tourna vers la visiteuse:

-Mais je n’ais pas l’honneur de vous connaitre…?

Prudemment, Hel répondit, néanmoins sans hésiter:

-Hélène Sey.
-Et que me vaut votre visite? Poursuivit doucement le Général, en battant des paupières, fixant de nouveau Scaliger.
-Nous avons à vous faire part d’une information grave, répondit celui-ci sans ciller, qui concerne la sécurité de la planète entière en plus de la notre…
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeJeu 2 Avr - 19:27

Une des évolutions de la guerre est la passage du stade brut de combat au corps à corps, associé d’une certaine façon à une pratique virile, une partie de l’équilibre, à une guerre de recoins, nécessitant rapidité et souplesse, diplomatie et ruse, l’autre équilibre, plus féminin. Cette évolution a eut lieu une première fois pendant la préhistoire stellaire, et ensuite, après l’anarchie généralisée des années 3000-4000 A.D, qui avaient vu un retour aux stades les plus primaires de l’homme, vers le nouvel équilibre regagné à présent grâce à la Doctrine.
Note interne au Haut-commandement de la Marine, par l’Amiral Nikolaï Syllas d’Acre, Grand Amiral de l‘Union et Archi-Amiral de Christiansa.



-- -- --

An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Ressirgo V
Désert occidental


Le prieur se préparait à l’office imminent dans une petite sacristie en face de la grande entrée sous forme d’une très haute porte à doubles battant, pour l’instant fermée, de l’église du monastère. C’était un homme de petite taille, assez mou d’aspect, mais aux yeux intelligent, et aux mouvements calculés. Doucement, il allait d’un côté à l’autre, préparant les objets de cultes. La dance des ciboires, calices, et autres encensoirs était ainsi menée de vive main par moine difficile à cerner. Il ne s’était pas tout de suite arrêté à leur entrée, mais, avant que le lord n’ait le temps de dire un « pardon » plein de respect, le prieur lui faisait déjà face:

-Bien le bonjour messieurs, fit-il d’une voix agréable, avant de se tourner vers Épidus: à toi aussi mon frère.
-Mes salutations, je me nomme Francis Eramstead, se présenta le lord, et voici mon ami et compagnon Mark Fendlein. Nous avons étés invités à rester quelques temps ici par le frère Epidus.

Le prieur inclina la tête dans leurs directions.

-Hum…je vous souhaite donc la bienvenue à l’Abbaye St Raphaël. Je suis le frère Vanas. J’ai la charge de prieur du monastère depuis voilà huit ans. Que puis-je faire pour vous, en dehors bien entendu du gîte qui est une évidence?

Eramstead échangea un bref regard avec Fendlein, et garda également leur guide dans le coin de l’œil, avant de dire tranquillement:

-Le frère Épidus nous a raconté pendant le voyage en antigrav’ jusqu’ici qu’il existaient des ruines anciennes plus loin, au nord, le long de la côte. Là où a eut lieu une expédition, il y a trois ans.
-Ah, je vois…mon frère n’aurait pas du parler de cela, c’est une histoire tout à fait sinistre.

En disant cela, le visage du prieur Vanas s’était assombri, alors qu’il préparait quelques bougies, les posant précautionneusement sur le chariot à sustentateur flottant doucement à quelques centimètres du sol qui avait surgit d’un des murs, prêt pour l’office, ou presque.

-Oh oui, c’était une erreur de la mentionner…répéta-t-il, murmurant presque, s’écartant vers une table sur laquelle était posée un magnifique encensoir antigravitationnel d’or fin, dont il ouvrit le battant ouvragé d‘argent représentant une des images classiques du Sacré-Cœur, révélant la petit chambre à combustion, qu’il entreprit de remplir d’encens et de myrrhe.

Mais Francis insistait; énergiquement, il fit plusieurs pas en avant, et déclara au profil du prieur, sur un ton de respect mêlé de curiosité que rien ne pouvait arrêter:

-Mais maintenant que nous sommes au courant, il n’y a pas de mal à nous en parler. J’apprécierais beaucoup que vous le fassiez.

Sans rien dire, Vanas continua à fourrer la chambre à combustion, qui fut bientôt remplie. Alors, il referma sans difficulté le portillon, et saisi le bout de la chainette de métal noble, et souleva l’ensemble. Derrière le Sacré-Cœur, quelques petits orifices transparents laissaient passer la fumée odorante du tout, et l’on devinait derrière le léger rougeoiement du feu déclenché par la bougie interne. Le prieur ferma un instant les yeux, maintenant l’encensoir pendant à quelques centimètres de son visage ancien, puis retourna au chariot, où il le posa, entre le calice et une série de plaquettes noires étranges. Suivant le regard interrogateur de Fendlein, Vanas s’expliqua, sans répondre à Eramstead, qui restait mystifié:

-Ce sont des supports mélodiques.

Ils restaient perplexes par cette réponse, mais ne posèrent pas de question à son sujet. De nouveau, le milliardaire était sur le point de dire quelques chose quand le prieur le prit de vitesse:

-Je vais vous parler de ce qui s’est passé il y a trois années. Suivez-moi, cela prendra quelques temps, et il ne faut pas que l’office prenne du retard pour autant.

Cela disant, il poussa du pied le petit cran qui se détachait de la charnière qui effectuait la jonction entre la petite poignée servant à tirer le chariot et le châssis de celui-ci, ce qui libéra le dispositif. Il commença à bouger doucement, et suivi allégrement le prieur, qui n’avait aucune difficulté à la tirer, l’imprimant qu’une très faible traction.
Ils quittèrent ce qui était un bâtard sacristie-placard à balais, et traversèrent l’immense couloir circulaire vers le magnifique portail de l’église abbatiale . Un des battants était ouvert à présent, et on distinguait une très grande nef, montant jusqu’à la coupole, par laquelle des rayons de lumière pénétraient. Ceux-ci, grâce à un habile jeu de miroirs dissimulés, mettaient en valeurs d’autres décorations de plafonds, montrant des personnages de la bible dans des postures sainte, dont les vives couleurs rayonnaient dans cette clarté naturelle que les projecteurs ioniques modernes ne parvenaient pas à copier, avant d’être réunis en un seul faisceau, qui faisait du maître-autel, au-delà du transept, un îlot de lumière où les dorures brillaient d’un fort bel éclat. Les murs, de pierre blanche très ouvragée, présentaient des alcôves dans lesquelles on trouvait des statues de divers saints, ainsi que des icônes, dont un remarquable Christ Pentocrator aux couleurs d’allure anciennes, séparées par des tableaux non moins remarquables. La nef en elle-même était composée d’une série de bancs flottant au dessus du sol, et le centre d’un chemin processionnel qui partait des deux bâtons jusqu’au maître-autel, garni par un long tapis pourpre. Enfin, non loin du cœur, sur la droite, une chaire antigravitationnelle désactivée était installée sur son support, tel un animal endormi, dont les courbes en bois ouvragé semblaient al continuité des colonnes gothiques élancées qui séparaient la nef centrale des bas-côtés, où l’on entrevoyait quelques chapelles.
Calmement, à la suite du prieur tirant son chariot, ils pénétrèrent dans ce lieu saint digne de plus belles basiliques planétaires, à l’exception peut-être, de Saint-Marc d’Himalia, sur Christiansa, qui était sans égal. Après quelques pas dans le silence extraordinaire dû à une conception architecturale très spécifique, le milliardaire se retourna, et admira la tribune, au-dessus de laquelle se détachait un gigantesque buffet d’orgue, dont les tuyaux surchargés de dorures formaient une masse compacte, sorte de concentré de puissance musicale .

-C’est extraordinaire, souffla-t-il, ne sachant plus où en donner de la tête, votre monastère doit être formidablement riche, me trompe-je?

Épidus eut un faible sourire:

-]Nous avons bénéficié lors de la fondation d’un héritage gigantesque, qui a été investi dans cette demeure de dieu, et qui l’entretient toujours. Nos productions donnent un petit surplus, et de temps en temps, des philanthropes laissent quelques crédits après leur passage. Ceci est toujours époustouflant au premier abord, c’est l’atmosphère de cet endroit qui a décidé ma vocation.
-C’était il y a trois ans et quelques mois, durant un automne très chaud. Une grande tempête de sable avait balayé la côte nord peu avant, et nous avons reçu des centaines de réfugiés Tessaks. Une année rude.

Sans les regarder, tout en poussant le chariot lévitant vers le maître-autel, le prieur avait parlé, d’une voix lente, mais sans aucune hésitation, et, avant que Eramstead n’ait eut quelque chose à ajouter, il poursuivait déjà:

-Ils s’étaient arrêté une après-midi dans la cour de l’Abbaye, c’était un certain Dimitiev, professeur à une université de la planète Christiansa. Il avait visité l’Abbatiale, et fait quelques remarques, admiré notre monastère, lui aussi. Mais ça n’était pas cela qui l’amenait. Il voulait savoir des choses au sujet des plateaux du nord.

Il s’arrêta de raconter, comme s’il essayait de rassembler ses idées dans les filets de sa mémoire, des choses dont il ne voulait pas se souvenir.

-Ils existent trois larges plateaux rocheux dominant les sables et la mer, à quarante cinq stades au nord de notre ermitage, des endroits désolés, où les Tessaks croient que leurs dieux païens se cachent. On ne peut pas fondamentalement en vouloir à ces malheureux, l’endroit, balayé par les tempêtes de sable, n’a que pour seul intérêt quelques pierres mystérieuses…A l’origine. C’était celles-là que les Christianiens voulaient étudier, il me semble. J’ai dit au savant ce que je viens de vous dire. Il a hoché la tête, et est reparti, apparemment confirmé dans ce qu’il pensait. Souvent, dans les semaines qui suivirent, nous vîmes des hélijets survoler notre abbaye pour se diriger vers les plateaux…

Ils étaient arrivé à l’autel, dans la clarté renvoyée par les miroirs, donnant une étrange impression, comme celle qu’on éprouve lorsque l’astronef perçait les couches nuageuses, et rencontrait un espace d’ensoleillement absolu, détaché de toute connotation terrestre ou autre. Juste le vide lumineux. Les yeux s’habituèrent après quelques instants, pour apprécier l’immense plaque de marbre, surmontée d’une construction élaborée, pleine de métaux et de pierres précieuses, où brillait une petite lampe ionique rouge, à côté d’images saintes. Vanas arrêta son chariot, et commença par prendre l’encensoir, dans le dos duquel il activa un petit bouton. L’objet sacré vibra dans ses mains, et, lentement, s’éleva dans la lumière du soleil de Ressirgo, fumant doucement, et répandant des senteurs exotiques aux nez habitués au smog de Tsarysyn et d‘Assedo. Tandis qu’il s’emparait du Calice, le prieur reprit:

-C’est un mois et demi après cela qu’un de leurs jeunes gens de Christiansa est arrivé à notre Abbaye, et nous a informé qu’un grave accident c’était produit, qu’on avait besoin d’un aumônier. Étant donné que j’avais déjà eut à faire à Dimitiev, je me suis porté volontaire, et l’Abbé a confirmé. A peine le temps de prendre une fiole d’eau bénite et un chapelet, et déjà on m’emmenait à bord d’un hélijet.

Il retourna dans le silence en installant avec un soin maniaque le ciboire à proximité du calice, sur la partie droite de l’hôtel, et entreprit ensuite de placer convenablement le reste de ses fournitures.

-Je suis arrivé sur un des plateaux rocheux…
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeJeu 2 Avr - 19:27

Suite à l’anarchie, la question de la société s’est posée. Pour conserver la stabilité nouvelle acquise, on a convenu de la Doctrine.
Extrait d’une circulaire du Conseil d’Etat, Amiral Liung Wu Xun



-- -- --


An 3859, E.d.U (Eon de l’Union).
Ressirgo IV



Le camp, ravagé par la panique, n’avait même pas été remis convenablement en place. Tout les travailleurs qu’on avait pu retrouver avaient étés mis au déblayage, dans l’espoir de retrouver des survivants, espoir qui s’amenuisait d’instant en instant. On avait déjà retrouvé les cadavres de cinq ouvriers, écrasés par le poids de la masse rocheuse. Le professeur Hugen ne se remettait que très lentement du traumatisme physique, et était moralement brisé. Dimitiev l’avait immédiatement vu, et l’avait laissé se reposer sur le lit de se tente, alors qu’il passait dans celle, voisine, du professeur . Celui-ci restait inanimé, sérieusement touché, et une infirmière, en fait une étudiante ayant reçu une formation dans ce sens l’année précédant, restait à son chevet, tachant de manipuler le régénérateur cellulaire du kit de secours en attendant que les appareils de Ressirgo-City puissent venir le chercher pour l‘emmener au centre hospitalier planétaire. Après ça, il y avait bien entendu le cas Syllas. Rea disparue, l’unique contremaître maîtrisant à peu près le galactique également envolé, se faire comprendre des indigènes devenait un vrai parcours du combattant. A grand renfort de signes et de mise en commun du vocabulaire, on n’arrivait qu’à peine à donner quelques instructions simples. Mais bon, à part cela…elle était une de leurs meilleures spécialistes…et la femme de l’Archi-Amiral de Christiansa, qui risquait de bientôt devenir également Grand Amiral de l’Union. Et qui disposait de soutiens en très haut lieu. Cet incident avait de bonnes chances de coûter à Dimitiev, en plus de ses crédits, son poste, de même qu’à une bonne partie des autres même du corps enseignant engagé (et survivant). Le chef d’expédition n’était pas un sentimental, et ne s’attachait jamais aux gens, car les séparations dans le central d’attribution universitaire brisaient généralement les amitiés, ou les mettait en léthargie. Ce professionnalisme l’avait amené là où il était maintenant—même si sa position de l‘instant n‘était guère enviable.
Bien entendu, l’expédition était terminée. Toute entière, foutue, sauf si dans leur matériel collecté, ils arrivaient à trouver la formule de transmutation du plomb en or des alchimistes, ou encore la preuve formelle de l’existence d’une vie intelligente non-humaine ayant précédé la colonisation. Une bérézina. Mais à cause de quoi? Qu’est-ce qui avait déclenché cela?
Malgré tout, Dimitiev restait très respectueux la religion—il admirait les hommes de foi. Lorsque Hugen avait demandé un aumônier, il avait envoyé Jules avec l’hélijet à destination de Ressirgo, qui devait passer au monastère proche sur le retour, pour chercher un clerc afin de calmer le professeur.
En quittant le camp de tente, il vit l’aéronef effecteur une dernière rotation au dessus d’eux, avant de se poser sur un espace dégagé à cet effet un peu à l’écart, relativement difficilement à cause de la puissante bourrasque de nord-ouest qui s‘était déclarée peu de temps auparavant. Courant en tenant son chapeau thermique blanc, le professeur se dirigea dans cette direction, et arriva à temps pour voir la porte s’ouvrir. En premier descendit Jules, qui se précipita vers le chef d’expédition.

-Ils envoient du monde d’ici une demi-heure. Mais, professeur, il faut que je vous parle de quelque chose d’autre…
-Je n’ais pas le temps, le repoussa son interlocuteur, l’écartant, pour se diriger vers la carlingue, d’où d’autres gens débarquaient. En premier, un petit religieux, portant autour de son coup une croix de métal sur laquelle figurait un Christ. Il salua doucement:
-Je me nomme Vanas…je suis l’aumônier.

Mais déjà une autre personne sautait sur le sol poussiéreux et rocailleux du plateau, et se dirigeait vers Dimitiev.

-Vous devez être le professeur, déclara sur un ton neutre l’étrange personnage, dont les yeux enfoncés dans leurs orbites, derrière les épaisses montures d’une petite paire de lunettes en or massif, scrutaient chaque centimètre de son interlocuteur.
-Je n’avais demandé qu’un religieux, répliqua Dimitiev, son regard s’étant attardé sur la minuscule croix pendant au bout d’une chainette, dorée elle aussi.

Mais l’autre eut un petit sourire bénin, comme lorsqu’on entend un enfant dire quelque chose qui est incorrect sans pour autant être gravissime, et déclara:

-Je ne suis pas venu en réponse à une quelconque demande de votre part. Je me nomme Honorius Calender. Je suis, comme vous, titulaire d’une chaire à l’université de Christiansa. Mais ici, je représente la Sainte Inquisition.

Lentement, la tête de Dimitiev se tourna vers Jules, qui était encore à côté de lui, mais le regard de celui-ci disait « j’avais essayé de vous le dire, m’sieur ». Revenant vers l’étrange visiteur, qui affichait toujours le même air, l’archéologue tiqua:

-Je pensais que l’inquisition était morte depuis des siècles. En tout les cas, vous pouvez immédiatement rembarquer, chez monsieur Calander, nous n’avons personne de possédé ici, fit-il sur un ton acide, avant d’ajouter, avec ironie: Sauf bien sûr si vous êtes venu nous aider à porter des pierres, ce qui doit être dans vos cordes toutefois.
-Si je suis venu ici, c’est qu’il y a naturellement une raison, dont vous ne semblez pas encore être au fait pour l’instant. Naturellement, j’ai l’intention de rester pour vous éclairez le moment venu, et m’acquitter de ce dont la Très Sainte Curie Hagienne et la Congrégation Galactique pour la Doctrine de la Foi m’ont chargés de faire: traquer, et éliminer le Démon et ses suppôts.

Dimitiev poussa un long soupir, et déclara, sur un ton plus ferme, et autoritaire:

-Monsieur Calander, je pense que nous nous sommes pas compris. Je me passerais de vos « services » , et vous demande de quitter cet endroit immédiatement!

Mais l’inquisiteur semblait inamovible, solidement planté dans la pierre du plateau, et il répliqua:

-Nous sommes ici en un lieu public, à ce que je sache, la concession d’exploitation archéologique ne vous donne pas la propriété de l’endroit. Jusqu’à ce que vous ayez une dérogation, je suis libre de rester si j’ai ais l’intention. Ce qui est le cas.

Le professeur pinça ses lèvres jusqu’à ce qu’elles blanchissent, et se tourna vers Jules:

-Pourquoi ce guignol est-il monté à bord?

L’étudiant eut un geste d’impuissance.

-Bon, ben tenez le à l’œil.

Il revint à Calender:

-Je vous interdit de vous approcher et du camp et du chantier, ou sinon, je vous ferais mettre dehors à coup de pieds, peu m’importe que nous soyons dans un lieu public. J’ai déjà assez de problèmes pour que vous veniez fouiner ici.

Violement, il fit signe au moine de le suivre, et tourna les talons, pour partir vers la ravine de la fosse. Mais alors qu’il avait fait la moitié du chemin, il sentit un soudain changement dans l’atmosphère. Quelque chose d’étrange.
D’un bond, il se retourna. Ils étaient encore là où il les avait quitté quelques instants plus tôt, debout à l’observer. Mais derrière eux…un nuage de poussière dans le désert. Le vent. Il venait de l’intérieur des terres; il devait avoir tourné trop rapidement pour que quiconque s’en aperçoive. Le nuage de poussière…il grandissait…Et se rapprochait.
Déjà, derrière lui, il y avait des cris des Tessaks, de nouveau apeurés, qui couraient, abandonnant pelles et pioches, en direction de la mer, où ils avaient leurs abris, cachés aux creux des falaises; ces gens là sentaient la chose venir de loin. Des Christianiens étaient également sortis, et lançaient des regards désemparés. C’était leur première tempête; il n’y en avait normalement jamais en cette saison, et personne n’avait de tentes de protection adaptées. De toute façon, leur camp étant en ruine, il ne les protégerait pas. Le regard du professeur s’arrêta une seconde du l’hélijet…mais cette idée était suicidaire. Les silhouettes déjà flouées par le sable soulevée s’abattant sur le plateau parurent en mouvement, tandis que derrière elle, l’ombre de l’aéronef disparaissait. Comme par magie, Jules apparut soudain devant lui.

-Professeur! Il faut se mettre à l’abri…!
-Mais où? Rétorqua-t-il en criant pour couvrir le puissant bruit du souffle.
-Je ne…l’excavation!

Dimitiev eut un mouvement nerveux:

-Mais nous allons nous y faire enterrer vivants!
-C’est la seule possibilité…il faut chercher les gens au camp, les autres seront restés dans la fosse!

Entraîné par la forces des choses, il se retrouva bientôt à talonner son étudiant, en direction des tentes, dont plusieurs ne tenaient plus que par un unique pieu magnétique dans le sol, alors que le vent du désert devenait de plus en plus fort. Normalement, pendant cette saison, il devait venir de la mer, et faiblement…c’était troublant. Mais ils n’avaient pas assez de temps pour se poser la question.
Dans le camp, la plupart des gens avaient dû avoir le réflexe d’aller se cacher dans l’excavation, et ils ne trouvèrent du monde que dans la tente de Goldenberg. Il était encore inconscient, mais Hugen se trouvait à son chevet, les yeux exorbités, et la face blanche, au point de faire peur à l’étudiante au régénérateur cellulaire, qui s’en était éloigné le plus possible, se retenant de fuir à toutes jambes. A travers l’ouverture, Dimitiev gueula:

-Venez, il faut aller à la fosse, sinon nous allons mourir ensablés!

Cinq minutes plus tard, ils se retrouvèrent à porter le corps du géologue, et soutenir Hugen, avançant péniblement vers l’entrée déjà à moitié refermée de la fosse. Le sable meurtrissait leur peau comme si des millions de balles de mitraillette pénétraient chaque centimètre carré découvert, et déchiquetait les vêtements trop fins. Dimitiev faillit perdre l’équilibrée et entraîner tout le monde dans un creux en une chute qui se sériât terminée au fond, sur des cailloux pointus, et aurait assurément causé une chute massive de sable sur eux, mais parvint à se maintenir en place, puis dévaler à la suite de Jules et de l’infirmière de fortune au dessus de ce qui avait été la passerelle d’accès, et glisser dans le trou Goldenberg, avant d’y entrer lui-même.
La poussière dans la première antichambre était retombée, et l’atmosphère était tout à fait respirable. L’immensité de la grotte créait un petit courant d’air d’une température respirable. D’abord aveugles, ils furent bientôt éclairés par un faisceau de lumière ionique.

-Professeur Dimitiev, nous pensions que vous n’aviez pas eut le temps de vous mettre en sécurité! S’exclama, soulagée, la voix d’Ira Xuanis, qui travaillait d’habitude sur les poteries retrouvées.

Il s’apprêtait à répondre tout grattant son front incrusté de sable quand il eut un bruit de glissement sur le sable derrière.
Le prieur Vanas et le bougre d’inquisiteur les avaient rejoints. Le second aurait tout à fait pu rester dehors, cela les aurait soulagés d’un poids

-Fichtre! jura finalement Dimitiev en tapant du pied au milieu du groupe d’une quinzaine de réfugiés, il ne nous manquait plus que ça!
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeVen 3 Avr - 19:11

Qui meurt sans disparaitre est éternel.
Lao-Tsé, verset 33 (original)


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An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre
Île-Longue



Dans la lumière verdâtre du système de vision nocturne du casque du bloc de Hel, les interminables corridors de béton gris de cet étrange endroit où Scaliger voulait à tout prix pénétrer, enfoncé dans des ténèbres encore plus oppressantes qu’à l’extérieur, où l’on sentait filtrer un courant d’air rempli d’une atmosphère néfaste que même les meilleurs filtres de son bloc ne parvenaient pas à effacer.
La jeune femme suivait de près Janeshki, qui semblait tout sauf sûr de lui, tenant le projecteur inutile également pour lui à bout de bras, et regardant frénétiquement autour. Leurs lumières ne perçaient que de petites sections, sans qu’on n’ait une vue d’ensemble, ce qui était énervant et inquiétant. Même le système de vision avait ses limites—il était fait pour l’extérieur, où il avait toujours un minimum de lumière, et ici perdait une grande partie de son efficacité—ne livrant également qu’un étroit champ de vision, tout juste suffisant pour ne pas buter contre les obstacles éparpillés partout au sol et les tuyaux qui pendaient parfois au plafond de béton.
Car ici régnait un chaos indescriptible; les couloirs étaient jonchés d’objets de métal tordus, plus ou moins grands, ainsi que de bouts de béton tombés des murs, tandis que des morceaux entiers de paroi portaient parfois les traces du ricochet d’un tir d’arme à impulsion de grande puissance, tache blanchâtre sur de la pierre désintégrée. Les rares inscriptions épargnés n’étaient que des lettres violacées sans sens apparent. Après leur entrée, ils avaient rencontré un croisement, puis un deuxième. Là, une porte de fer défoncée donnait sur une petite pièce, totalement ravagée, où quelques restes de matériel informes ne les avaient guère avancés.
Poursuivant dans le couloir, il avaient l’impression de s’enfoncer de plus en plus profondément vers l’intérieur de la montage, tout en s’éloignant de la sortie. La plupart des mercenaires n’avaient pas le sens de l’orientation, et à cet instant, Hel elle-même se félicitait d’avoir fait ces escapades nocturnes dans la forêt derrière le manoir qui avait stimulées ce dernier chez elle, de façon qu’elle se souvenait exactement de l’itinéraire qu’ils avaient emprunté, même si elle n‘était guère certaine de pouvoir le refaire en cas de panne de leurs torches. Derrière, Antonelli était passablement agité, et marmonnait nerveusement de temps à autres des paroles incompréhensibles, d’où parfois ressortait un « Lubbock, ‘spèce de salaud », que les récepteurs auditifs du bloc, placés à l’avant et à l’arrière du casque sous forme de petites pastilles grises, rendaient perceptible avec le riche accent Kamenskite tout à fait adapté aux grossièretés les plus crues.
Parmi les miliciens, une rumeur de protestation montait de nouveau. Il y avait un point à partir duquel ces soldats de fortune n’étaient plus prêt à suivre leur employeur, et il ne tarderait pas à être franchit. Tant que celui-ci tiendrait un projecteur, ils devraient coopérer. Mais certainement, ils nourrissaient un plan pour le lui arracher, et se débiner, à leur tête, cela ne faisait aucun doute.
Mais voici qu’ils avaient atteint un nouveau croisement. Avec quelques gestes violents, les deux motards écartèrent à coups de pied les gros débris de métal qui bloquaient le voie, et s’avancèrent.
Leur corridor était perpendiculaire à un second, qui semblait se prolonger à l’infini aussi bien à gauche qu’à droite. Avec un grognement, Scaliger montra la seconde direction, sa politique de joueur de casino invétéré étant de toujours être du côté de la chance: à droite. Mais, avant qu’ils ne se soient ébranlés, Hel poussa un petit cri:

-Attendez!
-Quoi? Glapit Antonelli, que le nervosité rendait tatillon, véritablement insupportable.
-Le mur! J’crois qu’ya n’inscription!

Le hetman et le chef de la pègre braquèrent leurs projecteurs sur l’endroit que la motarde montrait du doigt, à hauteur des yeux, en face du couloir par lequel ils venaient de déboucher.
« SAPE - Secteur de Sécurité » était inscrit en grosses lettres d’un rouge passablement usé, surmonté d’une flèche noire vers la gauche, et d’une plus petite phrase qui fut bien difficile à déchiffrer. Quelque peu en dessous de cela se trouvait un symbole en forme de C. Ils n’auraient pas su dire si il s’agissait d’une tête de mort pour le tout ou de trois orbes qui se trouvaient à l’intérieur du C.

- « Zone de Danger Extrême - Uniquement pour le personnel autorisé - PRGCD », finit par lire à haute voix Janeshki, provoquant de nouveaux remous parmi les hommes de main, réprimés par un regard assassin de Scaliger.
-Qu’est-ce que c’est que ce charabia!? Commenta-t-il, avant de se raviser: d’toute façon, s’en fout, on prend cette direction.

Il se savait forcer la chance, mais peu lui importait. D’une boutade, il relança les motards. Même le Hetman, homme pourtant patient au fond, commença à montrer des signes de renâclement apparents. Hel le suivait, mais était également peu curieuse de ce qui avait conduit les militaires à si bien planquer leur truc dangereux, et l’annoncer de la sorte pour ceux qui malgré tout viendraient le chercher.
Le corridor de gauche était encore plus subtilement dévasté; des lattes de fer rouillées pendaient au plafond, et il fallait se baisser pour les éviter, alors que de petites cascades de sables et de graviers partaient de ces fissures pour parfois obstruer jusqu’à la moitié de la galerie, forçant les intrépides explorateurs qui, s’ils ressortaient vivants de ce trous, demanderaient une augmentation de salaire à quatre zéros, à passer dans les positions les plus gênantes. Il était assurément difficile de rebrousser chemin ici. Ils venaient justement de passer un monticule de sable; les motards discutaient à voix basse par leur système de communication intégré, Janeshki confirmant à son amie qu’il sentait leur histoire ici de plus en plus mal, Scaliger réprimant de nouveau ses pleutres de miliciens, apeurés comme des enfants devant l’inconnu, quand le dernier homme, qui était encore de l’autre côté du monticule bouchant la vue, émit un faible cri étouffé.

-Quoi, bordel de bordel? T’te dépêche, lavette! S’écria, coléreux, Scaliger, tu vas te dépêcher, sinon j’vais t’en foutre une dont tu te souviendra encore pendant longtemps…

Il y eut un étrange bruissement, suivit d’une sorte de vague qui balaya l’atmosphère du lieu. Un puissant courant d’air se déclencha d’un instant à l’autre, partant du trou par lequel il venaient de passer dans le sable, avec un son qui n’était pas sans rappeler à Hel le son puissant de l’orgue sur lequel travaillait son père, quand il appuyait une seule fois sur une touche, de façon prolongée, mais sans qu‘elle sût réellement en percevoir la tonalité, grave ou aigüe. . Mais il était ici insaisissable, irréel, et très bas. L’instant d’après, elle douta de l’avoir entendu, d’autant plus que les visages des miliciens n’indiquaient rien. Elle entendit craquer le com., montrant que le hetman allait lui parler, mais il fut coupé. Quelque chose avait bougé au haut du tas de sable. En plissant les yeux, alors que le projecteur de Scaliger se dirigeait par là, ils distinguèrent une main. Celle du milicien de queue, c‘était ses gants troués par lesquels on voyait les doigts poilus. Elle se serra un instant, puis glissa, lentement, sans un bruit, alors que tous assistaient paralysés à cela, pour finalement disparaitre. Il y eut un bruit de quelque chose se traînant sur le sable, l’homme probablement, toujours sans une parole. Soudain, ils perçurent un nouveau mouvement d’air, plus léger, dans le sens inverse, suivi d’un léger son, mat et étouffé, puis plus rien. En fait, tout s’était déroulé dans un terrible silence.
D’un bond fulgurant, Janeshki s’était élancé, et était au haut du monticule. Scaliger le suivit, et Hel arriva en troisième, pour constater que de l’autre côté, aussi loin que portaient les torches ioniques…il n’y avait rien. Sur le sable, des traces de l’homme étaient visibles, mais elle s’interrompaient avec le retour du béton. La jeune femme senti derrière elle les autres miliciens, désormais réduit au nombre de trois, après qu‘un des leurs soit resté sur la bateau—le veinard, se disait de nouveau chacun—, l‘autre dans la crevasse…et le dernier était manifestement pas beaucoup plus enviable.

-Qu’est-ce que vous attendez, finit pas râler Scaliger, on ontinue, allez, allez!

Mais il disait cela sur un ton différent. Manifestement, cela l’avait vraiment perturbé, et il serait sûrement plus prudent…mais restait attaché à son dessein. Cet homme était borné au point de risquer leur vie à tous. C’était de la folie.

-T’a entendu aussi? Lui souffla le hetman en circuit fermé, d’une voix où perçait l’inquiétude.
-J’crains qu’oui.

Tout en avançant de nouveau dans les ténèbres, entendant derrière soit les pas brutaux de Scaliger, et ceux, plus hésitant des miliciens, elle se mordit nerveusement la lèvre inférieure, indécise.

-Et qu’est-ce qu’on fait? Demanda-t-elle finalement.

Mais avant qu’il n’ait pu répondre, quelque chose apparu au loin. Ils s’approchèrent en silence, découvrant le cadre d’une porte blindée qui gisait, éventrée, plusieurs mètres plus loin. Sur le duracier, on lisait une partie de l’inscription « Danger te- », en dessous de laquelle les lettres noires de « Périmètre d’- » n’étaient pas mieux loties. Manifestement, quelque chose avait frappé avec la plus extrême violence le battant, qui s’était arraché ces puissants gonds de durane, et avait atterri, calciné, dans le périmètre.
Déjà Janeshki s’accroupissait à côté, et soulevait un petit bout de métal déchiqueté par plus grand qu’un doigt, qui se trouvait à cet endroit sur le seuil dévasté. Il l’éclaira longuement avec son projecteur, le tournant dans ses doigts, à hauteur de ses yeux, réfléchissant manifestement à toute allure. Filament, la voix déformée par le casque déclara:

-Je n’aime pas ça. Je n’ais jamais vu ce métal…mais vu comme il est amoché, ça a du être quelque chose de sacrément dangereux qui l’a détruit. …Il y a plein de petites rayures sur la surface. Regardez.

Scaliger s’approcha des deux motards, pendant que ses hommes observaient de loin, loin d’être rassurés par tout ce cirque. Comme ils le virent, le morceau tordu était couvert de petits traits rectilignes qui s’enfonçaient profondément dans le métal. Les bouts paraissaient même avoir étés rongés.

-Et si je…commença le hetman, tout en appuyant des deux côtés du bout, qui résista quelques temps, avant de se briser, révélant deux bord craquelés, …si je le casse, c’est également présent à l’intérieur.

Antonelli eut une moue sceptique, et finit par dire sur un ton dédaigneux:

-Ouais, et qu’est-ce que ça nous apporte?

Janeshki se tourna entièrement vers son employeur:

-Je ne sais pas comment ils ont fait ça, mais ça ne me plait pas du tout. Cet endroit aussi est très dangereux. S’il y a le moindre problème…on est foutus, c‘est quasiment impossible de retrouver le chemin de la sortie. Est-ce que ce qu’on cherche en vaut vraiment la peine?

Scaliger eut peine à se contenir, et chercha tout d’un coup l’air, comme le faisaient les asthmatiques non-traités, tout en serrant les poings. Finalement, il parvint à se dominer, et à articuler:

-J’vous paye bien, pour assurer niveau sécurité, et ne pas poser de question. Faites votre job’, et tout ira bien.

Les épaules protégées de plaques d’hexanox s’affaissèrent, et la voix lassée reprit derrière la visière:

-Sauf votre respect, c’est-ce que j’essaye de faire…

Antonelli eut un reniflement méprisant, mais ne dit rien. Il releva son projecteur, et les quitta, s’avançant à travers la porte d‘une démarche de conquérant décidé à mettre l‘univers à ses pieds.
A peine il avait posé le pied de l’autre côté du seuil qu’il y eut un puissant éclair autour de chacun des projecteurs, et que l’instant d’après, ils s’éteignaient, laissant le groupe dans les ténèbres les plus opaques.

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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeVen 3 Avr - 19:11

Il existe deux états d’esprit: celui où l’on distingue une cause, un déroulement, et une conséquence à une action, tout à fait cloisonnées et à sens unique, en somme, presque indépendante, et celui, plus flexible, où l’action est un tout, linéaire, qui peut être affecté en cours pour changer sa finalité.
Réflexion communément attribuée à Aetius Syllas


-- -- --

An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Tsarysyn
La Chancellerie
Salle 265, dite moquetée

-…Lee le met en échec sur le Potomac, et les attaques n’y font rien. On pense que la guerre va durer…Grant compte sur autre chose: Sherman, qui remonte par le sud à marche forcée, traverse la Géorgie…

Le doigt du Président se déplaça d’un trait sur la table, tandis que son visage sanguin fendu d’un grand sourire franc semblait voir sur le duracier de celle-ci des terres, des fleuves, et des montagnes.

-…et submerge Vicksburg. Ah! Une grand victoire, la fin du sud. Il poursuit, et remonte toujours, à travers les Carolines…

Nouveau grand mouvement, que les yeux de Von Heigins suivirent à peine. Il luttait contre le sommeil, ses collègues, pas beaucoup plus frais, le voyait bien.

-…vainc tout ce qui s’oppose à lui, et menace de prendre Richmond et Lee par derrière, conclut-il avec un geste triomphal, c’est de là qu’est venu Appomattox! Ah! Quelle stratégie géniale…d’ailleurs, on peut la rapporter à celle de l’infanterie coloniale d’Assedo lors de la guerre des Trois Marches contre la Fédération.

Son bras balaya la table, toujours et encore, bouleversant monts et mers pour mettre en place le nouveau champ de bataille.

-Howell au sud, Yagüe et Bourgain-Desvilles au sud-est, sur les collines, du mauvais côté du soleil et ne disposant d’aucun soutient aérospatial. Spencer, avec la plus grande partie des troupes, n‘est encore qu‘à cinq jours de marche motorisée plus au nord, et n‘arrivera jamais à temps. En face, Paul-Emile, Gaishans, et Lidus. Mais seul Paul-Emile est un vétéran: il a fait Deneb, Kilea Prime, Tugan-Sarëi IV, et de nombreux autres conflits. Gaishans doit ses étoiles de général à ses grandes capacités d‘organisation dans le génie, et Lidus à son ancienneté sans gloire. Leurs forces sont cinq fois supérieures, et ils peuvent demander une frappe orbitale quand ça les chante. Ismer conseille alors à Bourgain-Desvilles de faire mouvement vers les plaines de l’est, en direction du chemin de retraite ennemie, pendant que Howell prépare ses troupes au choc de façon ostensible. Quant à Yagüe lui-même, il prend cinquante coloniaux, et se lance dans une opérations de harcèlement derrière les lignes Fédérales. Dès les premiers assauts, celles-ci sont déjà affaiblies, et ne percent pas. Gaishans est très inquiet: le mouvement de Bourgain-Desvilles sur l’est qui menace de les couper de la retraite vers les cités lourdement défendues est suspect; il doute d’un piège, qu’en fait, les forces de Howell soient bien supérieures à leurs estimations. Il fait part de ses craintes à ses collègues. Paul-Emile propose une retraite, mais par le nord-est, afin de contourner la colonne de Bourgain-Desvilles, et de retomber sur celle-ci par le flan, s’assurant le chemin avant que le gros des coloniaux puissent porter secours à leur détachement. Mais Lidus penche plutôt pour l’installation d’un retranchement de défense en l’attente de nouveaux renforts. Gaishans se range de son côté, ce qui empêche leur camp de bénéficier de leur supériorité numérique. Néanmoins, pour faire cesser les harcèlements, Paul-Emile prend une partie de son IIIème corps, et mène des opérations lui-aussi sur l’arrière…

Le président Tostoal était un merveilleux animateur, mais pour l’instant, son auditoire était tout bonnement épuisé, et ne trouvait plus cela drôle, après avoir dû se farcir la majorité des guerres coloniales de la Fédération Terrienne Unie, ensuite celles de Christiansa contre les ligues pirates et Botmélie, celle de l’Union contre Erikea, suivies d’une retour en arrière à l’époque pré spatiale, repartant ensuite des millénaires plus en avant vers celle d’une obscure république des franges dont seul Basil semblait avoir vaguement entendu parler contre une voisine pas beaucoup plus célèbre, mais que leur interlocuteur considérait comme une perle de l’art de la guerre. Syllas, dont le livre, « La guerre moderne », était le traité de Stratégie de référence des vingt dernières années et des cinq dernières guerres, et manifestement le livre de chevet de Tostoal, trouvait cela rébarbatif et stérile. Von Heigins, connaissant les cordes de l’amirauté fort bien, n’avait plus besoin qu’on ne lui apprenne rien en tactique militaire ni politique stratégique. Law n’avait jamais eut un intérêt quelconque pour les questions touchant à cela, et fait sa carrière en organisant les armées sur l‘arrière et optimisant les garnisons. Liung Wu y était intellectuellement bien supérieur, et excellait partout, cela se savait. Costa montrait ostensiblement son ennui par des bâillements réguliers et de plus en plus intenses. Basil était selon tout les signes en phase avancée d‘assoupissement. Cetreçesçu ne révérait que Syllas, et reniflait avec mépris devant cet amateur.

-…et là, surprise générale, Yagüe surgit derrière tandis que Bourgain-Desvilles se rabat…
-Monsieur le président, le coupa tout à coup la voix de Basil, toujours attentif, malgré son aspect endormi, ce qui lui donnait un air de somnambule, il est bientôt trois heures du matin. Or, vous départ étant fixé dans moins d’une heure et demi, je propose que nous interrompions ces réminiscences des grandes campagnes de l’histoire d’Assedo, pour nous consacrer à la situation géopolitique actuelle. Je pense que mes collègues sont également de cet avis.

Brutalement réveillé, le chef d’état hocha vigoureusement la tête, en même temps que Syllas. L’éventail de Liung Wu paraissait signifier la même chose. Le visage un instant désarçonné du président s’illumina:

-Mais bien sûr, suis-je bête de vous entretenir de tout cela, ce n’est guère le moment, d’autant plus qu’il y a tant de besogne…

Ce fut une vrai discussion, dispute ardente d’éventuelles frontières, projections sur les mouvements futurs, ébauches de plans d’alliances, remarques sur le caractères d’autres chefs d’états, sans pour autant manquer une occasion de s’éloigner vers d’autres choses, telles que les planètes, les femmes, les grandes campagnes…mais à chaque fois, Liung Wu ou Syllas veillaient au grain afin de le remettre dans les rails.
Au terme d’une interminable bataille, Von Heigins et leur homme quittèrent la salle, le premier devant accompagné le second devant les médias pour quelques souvenirs et autres publications qui submergeraient la presse intergalactique dès le lendemain, puis l’emmener au Spatioport. Les sept autres amiraux, épuisés par leur horaire surchargé des dernières semaines, restaient au fond de leurs fauteuils moelleux, dans la salle 265. Un grand feu crépitait dans l’âtre, et apportait de la douce chaleur, tandis que dehors, derrière l’immense verrière, on voyait la neige tomber à gros flocons. Les quatre derniers amiraux manquant étaient des chanceux ayant pu se dispenser cette dernière corvée, soit occupés ailleurs, soit en repos.
Une série de ronflements caractéristiques annonça que Ruis s’était endormi. Assurément, ils n’avaient plus vingt-cinq ans, l’âge où ils restaient des journées entières au quart à scruter l’espace ou se lancer dans des discours enflammés dans le mess des officiers. Ou encore, même lorsque Syllas était Vice-Amiral, cette éprouvante et mystifiante mission en galaxie 9 à bord du Kanopus, durant laquelle il encaissait nuit blanche sur nuit blanche, malgré l’ennui et les quart très réduits. Paradoxalement, c’était durant les périodes de grand désœuvrement qu’il écrivait le mieux. C’était durant cet interminable mission que son immense œuvre « La guerre moderne » avait vu le jour. Mais à l’instant, quelques chose l’empêchait de ne serait-ce que se laisser aller. Même si ses paupières tendaient à se fermer naturellement, son esprit n’éprouvait nullement le besoin de sommeil. Ses yeux bleu-vert grands ouverts scrutaient l’immensité grise de la table où, une heure auparavant, le général Lee tenait en échec Grant à Fredericksburg. Il y eut un faible mouvement, suivi d’un courant d’air, à sa droite.
Liung s’installait sur le fauteuil voisin que le chef d’état venait de quitter, son éventail remuant doucement l’air parfumé par le feu de bois.

-Comment avancent les choses? Souffla-t-il, pour que Basil, des sens toujours en éveil duquel on se méfiait malgré tout, n’en entende mot.

En guise de réponse, le ministre de la marine se contenta de hocher la tête. Un signe négatif.

-C’est pire. Je ne sais pas ce qui y a de nouveau, mais ça n’est plus pareil.

Derrière les mouvements réguliers de l’éventail sur lequel était gravé en couleurs ternes un motif d’oiseaux, Liung eut une infinitésimale moue de désappointement.

-Ne vaudrait-il pas mieux se rendre sur place?
-Je ne peux me permettre de laisser tout en plan ici…il y a encore beaucoup de chose à faire, et cette manœuvre navale…une plaie que tout cela, pendant que l’avenir se joue ailleurs.
-C’est gênant, en effet. Y a-t-il déjà des détails?
-Pas grand chose malheureusement. On a du d’ailleurs réquisitionner d’après le dernier rapport. Le nettoyage doit aussi avoir commencé.

Il eut un mouvement de roulement de ses épaules raidies, tout en se tassant légèrement, se murant dans un profond silence. Liung continua de l’observer, tout en surveillant en coin les autres. Cetreçesçu s’était levé, et servi un petit verre de Korr. Basil avait sorti un livre à la couverture blanc cassé sur lequel un titre illisible était marqué en rouge, et semblait profondément enfoui dans sa lecture, tandis que pas si loin à sa gauche, Huys piquait du nez. Lui, renversé dans son fauteuil, rêvassait, les yeux ailleurs. Enfin, Costa s’était levé, et avait quitté la salle, glissant un mot au passage au ministre de la marine, qui ne l’avait enregistré que très distraitement. Les derniers jours avaient étés très éprouvant, on voyait cela.

-Il s’est trompé.

Liung sursauta, et tourna la tête vers Syllas, qui avait prononcé ces trois mots à voix haute, fixant toujours la table, dans une position volontairement raide pour s’empêcher de s’endormir. Plus loin, Basil avait relevé son nez du livre, tandis que Cetreçesçu s’était tourné, son verre à la main, vers son mentor.

-Tostoal s’est trompé: C’était Spencer qui tenait le sud, et Howell qui conduisait les renforts du nord. D’ailleurs, le mouvement de Bourgain-Desvilles était beaucoup plus ample et flexible qu’il ne l’avait montré. Enfin, il était clair que Paul-Emile s’était opposé bien plus vigoureusement à l’initiative de Gaishans.

Ils furent un instant cois. Puis, Liung eut un sourire, qui fut repris par Basil. Réveillant Huys et Ruis, Cetreçesçu éclata d’un grand rire franc comme il en avait l’habitude.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeSam 4 Avr - 21:53

La charge
La charge est à l’origine l’apanage de la cavalerie. Elle a pour objectif de briser la cohérence des rangs ennemis, et de causer ainsi la rupture du front. On utilisait une importante concentration de cavaliers lourds, à défaut plus légers, mais dans ce cas là, les chances de réussites s’amenuisaient. En effet, au contact des troupes souvent plus nombreuses et établies en position défensives, la valeur de l’unité est vitale. Si elle n’est qu’égale en capacité offensive et en protection corporelle à celle qui défend, cette dernière ne pourra être submergée et défaite, et laissera le temps au défenseur d’amener des réserves, consommant ainsi l’échec. De plus, l’attaquant, ses lignes étant clairsemées par les pertes qui souvent sont quasi-totales, se voit alors exposé au risque d’une contre-charge, qui serait alors dévastatrice. De nos jours, la charge s’effectue encore dans l’infanterie: des corps d’élites sont envoyés à l’assaut de retranchement, avec des armes automatique lourdes, baïonnette au canon. Une charge généralisée du corps d’armée est en fait une avance militaire lourdement assistée, et, si elle est menée avec des forces supérieures, et dans une situation tactique et stratégique favorable, permet de forcer l’ennemi à abandonner ses positions pour se retirer. Néanmoins, cela ne retire rien au danger de la manœuvre: en effet,…

Nikolaï Syllas d’Acre, Archi-Amiral de la Sérénissime République de Christiansa. Extrait de la seconde partie de « La guerre moderne »



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An 3859, E.d.U (Eon de l’Union).
Ressirgo IV



Encore une fois, Dimitiev pesta:

-Ah, cette fois ci, je…non, nous, sommes foutus. Déjà que cette catastrophe était dramatique, maintenant, nous aurons tout perdu. Des centaines de milliers de crédits de matériel perdus…et sûrement ma place. Je vais me retrouver à devoir enseigner dans une de ces affreuses universités de province à des ignorants comment on compile un holomémoire…

Mais la voix d’Ira le réprima, agacée:

-Antonín, arrête. Ca aurait pu arriver à n’importe qui. De toute façon, nous lamenter n’aidera pas. Ca serait déjà bien qu’on s’en sorte vivants!

A côté de lui, le prieur, les yeux perdus dans l’infini, observait le sable projeté par la tempête combler peu à peu la sortie. Au passage, des cascades tombaient langue après langue à l’intérieur. Sa voix s’éleva, douce et sans colère:

-J’ai confiance en notre Seigneur. Si Sa volonté est accomplie, quelle qu’elle soit, j’en suis rempli de joie.

Dimitiev retint un son méprisant et hargneux. D’une certaine façon, il était jaloux de cet homme d’âge respectable, qui était là, en soutane, à observer leur fin, et claironnait sa confiance totale en son Dieu. Le dieu du professeur, une encyclopédie des civilisations galactiques et des traces de civilisation « étrangères », lui, ne pouvait absolument rien faire dans cette situation, et le condamnait au désespoir. D’ailleurs, tant qu’on en était au désespoir, qu’est-ce que foutait l’autre satané prélat? Tournant frénétiquement son regard autour de lui, il finit par le voir, une petite lampe dans une main, à l’autre bout de la grotte. Il ne les regardait pas, et paraissait examiner l’endroit où se trouvait auparavant le passage vers la salle centrale.
D’un pas résolut à lui compliquer la vie, afin de détourner son attention de sa propre misère, Dimitiev s’avança dans cette direction, en l’interpellant de loin. Mais il ne réagit pas. Rageur, il arriva à côté de lui, et dit presque en criant, sa voix se répercutant sous la voute ancestrale:

-Vous pourriez me répondre!

L’inquisiteur se retourna, braquant sa lampe sur les yeux du professeur, qui fut un instant ébloui.

-Allons, ne vous emportez pas. Plutôt, dites moi si c’est ici que se trouvait le passage vers le complexe souterrain.

Le chef d’expédition poussa un soupir lassé, et lâcha sur un ton dédaigneux:

-Oui. Essayez de vous y engager, j’espère que vous vous prendrez une bloc sur la tête, qu’on ait la paix.

Calender hocha la tête tout en haussant les épaules, et entreprit de pousser un gros rocher lézardé qui était coincé entre le mur granitique et un impressionnant bout de voute tombé là. Poussant un grognement, Dimitiev se retourna, et jeta un coup d’œil derrière. La tempête de sable se déchaînait toujours, mais il semblait que le sable avait cessé de s’empiler au risque de les enterrer. Le petit groupe de réfugiés, un peu en retrait, s’était finalement installé sur des blocs de pierre, attendant l’accalmie, discutant à voix basse, en fait, échangeait des propos laconiques.
Entre temps, l’infatigable inquisiteur avait obtenu quelques résultats. Un bon coup de pied qui avait fait sursauter le professeur brisa le rocher en deux morceaux néanmoins encore de taille, dont il dégagea un avec l’aide de ses deux mains. Le bloc révélait un trou béant derrière, noir et sinistre.

-Vos ouvriers avaient déjà presque tout dégagé, expliqua-t-il, conscient que Dimitiev le regardait, il ne restait que…ceci.

Il repartit à l’attaque, et parvint à rouler le dernier reste sur le côté, le poussant entre le bout de voute écrasé et un tas de plus petites pierres, manifestement ce qui subsistait d’un autre arc ayant eut moins de chance. Le passage sur le côté de la paroi granitique était à présent praticable, a peine plus d’un mètre de large certes, mais cela suffisait. Calender braqua sa petite lampe ionique dedans, dévoilant un sol parsemé de sable et de galets, jusqu’à ce que le rayon se perde dans les ténèbres.

-La voie est libre. Vous me suivez? demanda-t-il, sans même se retourner.

De nouveau, le chef d’expédition poussa un grognement, mais, placé devant le fait, se dit que s’il existait la plus infime chance de retrouver ceux qui avaient étés piégés là-dedans, et que ce type la lui offrait sur un plateau, il n’y avait plus assez de raisons pour l’empêcher de jouer son va-tout. Toujours mieux que de ressasser ses sombres pensées devant l‘entrée.

-Bon d’accord, vous avez gagné, grogna le professeur en éclairant avec son propre projecteur ionique le sombre passage; j’y vais en premier.

Joignant le geste à la parole, il s’accroupi, tout en continuant d’illuminer le boyau, et s’y engagea. Le sol tapissé de cailloux tous plus pointus les uns que les autres lui cisaillait les genoux et mains, et il remontait des profondeurs du mastaba un courant d’air chargé d’une odeur sèche et rance extrêmement désagréable, odeur jamais sentie ici auparavant. Sûrement l’éboulement avait brisé des vases contenant des essences anciennes. Quelle perte, irremplaçable qui plus est!
Derrière lui, un autre crissement l’averti que Calender lui emboitait le pas.

-Je suis avec vous, confirma-t-il quelques instants après, alors que le point lumineux de sa torche, passant au dessus du professeur, éclairait la voute basse, et ajouta: le passage est instable, il faudra néanmoins faire attention.
-Je vous le disais il y a quelques instants, fit remarquer Dmitiev, aigre.
-J’en suis conscient, mais nous n’allons pas causer de bouleversements au point de créer un nouvel éboulement, n’est-ce pas?

Remâchant son impuissance à rappeler à la raison ce guignol, le chef d’expédition se concentra sur le boyau. Devant, quelques grosses pierres réduisaient le passage; il en écarta plusieurs, les passant sans ménagement derrière, jusqu’à se dégager assez de place pour traverser.

-Nous devrions très bientôt déboucher dans la salle centrale, si elle existe toujours, annonça-t-il finalement, après de longues minutes à ramper, en silence, et libérer les barrages.

Elle existait encore; l’instant d’après, dans le tournant, la lumière de sa torche se perdit dans l’espace. Vivement, il progressa encore de quelques mètres, et se releva, en baladant le rayon autour de lui. Il révéla une quantité considérable d’éboulis obstruant la grande majorité des entrées—dont celle du fatidique puit huit. Une véritable montagne de sable s’était même amoncelée à cet endroit, retenue de couvrir le sol libre par à peine quelques gros blocs tombés de la voute disloquée, et faisant office de barrage, laissant néanmoins passer de larges langues brillant d’un éclat jaune mauvais dans la lumière.
Tout à coup, il sentit derrière lui la respiration bouillante de Calender, qui avait lui aussi émergé du boyau, et s’était mis debout. Effectivement, rapidement, le petit point lumineux de la torche ionique de ce dernier se joignit au large cercle de la sienne.

-Quel chaos! Souffla le religieux, sans qu’on ne perçoive pour autant une quelconque émotion.
-Je vous l’avait dit, le rabroua Dimitiev, trop content de trouver une occasion de la faire, personne ne sort d’ici vivant.

Mais l’inquisiteur de pacotille ne l’avait même pas écouté manifestement; déjà il s’était avancé, évitant les trous dans le sol. De son côté, le professeur se dirigea dans l’autre direction, vers une arche de pierre trapue, formée par un étrange hasard. Éclairant en dessous, il remarqua que peu de sable s’y était infiltré, et que le sol d’origine ressortait clairement.
Il sursauta. De nouveau, Calender s’était approché de lui silencieusement, par derrière, ce qu’il n’aimait pas du tout. Comme pour le reste du personnage en fait. Il fut soulagé de le voir revenir dans son champ de vision, s’accroupissant à côté. La lampe éclairait, par reflet sur la pierre et le sable, également son visage. D’un même éclat brillaient les lunettes d’or et les yeux intelligents du personnage, qui passait sa main délicate sur la pierre libre de sable, en dessous de l’arche. Comme hypnotisé, Dimitiev suivait son mouvement, ample, balayant d’une extrémité à l’autre. C’était tellement apaisant, comme hypnotique…une sensation très étrange. Il fut sorti de ce perturbant état par l’arrêt brusque du bras. Les doigts se refermèrent sur quelque chose qu’il n’avait pas remarqué au premier regard, et l’élevèrent au niveau de leurs yeux, tandis que le petit cercle lumineux se centrait dessus. Un petit morceau de poterie vert, percé d’un trou en son milieu, d‘où pendait un reste de fil. Un idéogramme blanc était gravé dessus.

-Vous savez ce que c’est? Demanda le religieux, légèrement intrigué.

Le professeur tendit la main pour l’examiner; Calender le laissa tomber dans e paume. Il passa quelques instants à le tourner et retourner dans sa main.

-C’est un porte-bonheur Tessak, ils appellent ça un Fzar, expliqua-t-il finalement, en rendant l’objet au théologien.
-Qu’est-ce qui est inscrit dessus? Interrogea de nouveau ce dernier, fixant le pendentif.

Dimitiev se permit un petit sourire. Certes, il était incapable de mener une conversation des plus anodines avec un Tessak, mais ses longues études sur le sujet faisaient de lui le meilleur spécialiste de leur langue écrite en Union; il en connaissait autant que les chamans locaux, pour qui la symbolique idéographique était un art divinatoire.

-C’est le symbole qui désigne la prospérité. C’est également celui qui signifie « la Terre ». Bien ironique: nous ferions mieux de l’enterrer.

Les sourcils de l’inquisiteur se relevèrent au dessus des lourdes montures de métal précieux, tandis qu’il continuait d’examiner sa découverte sous toutes les coutures. Mais, alors qu’il suivait avec impatience ce manège, quelque vint tout d’un coup au chef d’expédition. Un détail de sa mémoire.

-Attendez…il me semble que notre spécialiste des coutumes locales et des excavations en portait un semblable.
-Vous employez des indigènes pour autre chose que le gros œuvre? Fit Calender, daignant quitter la contemplation du Fzar pour dévisager le chef d‘expédition.
-Non non, réfuta Dimitiev, il s’agissait du professeur Rea Syllas, tout ce qu’il y a de plus respectable…en apparence. Mais depuis quelques temps elle se montrait très proche des travailleurs et des contremaîtres, un peu trop pour mon goût même, allant jusqu’à adopter certaines des coutumes qu’elle était sensée étudier et fixer par écrit, ce qui pouvait tourner au ridicule et me gênait parfois considérablement face à mes collègues de l‘université, ou elle devenait un objet de plaisanterie. Mais nous devions la ménager à cause de son amiral de mari, qui a le bras fort long.
-Vous deviez? Interrogea l’inquisiteur, se tournant vers le chef d’expédition
-Elle a été piégée dans l’éboulement, répondit simplement ce dernier.

Le regard perçant de son interlocuteur sonda les yeux du chef d’expédition, puis retourna au pendentif, qu’il examina une dernière fois, avant de le fourrer dans une des poches invisibles de son habit biscornu. Sa main retourna au sol, mais déployant uniquement l’index, montrant le sable éparpillé.

-Regardez ceci. On voit clairement que quelques chose a été traîné, ou s’est traîné jusqu’ici. Quelque chose qui n’y est plus…et avec ce qu’on n’y a trouvé, on peut se demander si quelqu’un, en l’occurrence votre Professeur Syllas, n’a pas survécu au cataclysme.
-Et où est-ce que cette mystérieuse personne serait-elle dont maintenant? Répliqua ironiquement Dimitiev en se relevant.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeSam 4 Avr - 21:53

De nouveau, le théologien ne répondit pas, se redressant également après un dernier regard à l’emplacement, pour, sans bruit, se diriger vers la montagne de sable du fond. Avec un soupir, et se disant malicieusement que le bonhomme ne le surprendra plus par derrière, le chef d’expédition le suivit, enjamba tant bien que mal une clé de voute fissurée de toutes part, une large langue sablonneuse se dirigeant tel un bras monstrueux vers le boyau d’accès, et, s’adossant à un des gros blocs retenant l’avalanche générale, observa le religieux examiner celle-ci dans l’interstice qui séparait ce rocher du prochain. Après quelques instants à bouger frénétiquement sa torche, Calender commença soudain à essayer d’escalader le sable, et malgré quelques cascades qui vinrent s‘émousser sur le sol rocailleux, y parvint, s’appuyant contre le roc, ses lourds vêtements totalement inadaptés au premier regard lui procurant une adhérence et une agilité extraordinaire. Vaguement inquiet, et suivant toujours son idée de garder l’inquisiteur à l’œil, le professeur s’y essaya à son tour, avec un peu plus de succès en raison de son expérience déjà considérable de ce détestable désert—il avait toujours espéré travailler dans des chantiers de fouilles sur des mondes plats et tempérés, à déterrer des couches entières de sédiments à la recherche d’une éventuelle trace de civilisation, en marge d‘une route fréquentée, pouvant dormir dans une vraie chambre le soir, et aller au restaurant, sans parler d‘éviter des indigènes détestables, ces expéditions là étaient pourtant ce qu’abhorrait la majorité des étudiants, mais le hasard l’avait mis là où il était à présent, à suer au milieu de châteaux de sables tous plus inintéressant les uns que les autres.
Au prix une dégringolade massive de sable, Calender, quelques mètres plus haut, à mi-chemin du sommet de la voute, s’était arrangé pour créer un semblant de terrain plat à flan de montagne, en poussant du le côté et damant un peu, et paraissait en train de chercher quelque chose dans celui-ci. Grognant, se mettant plein de poudre grattante dans les vêtements légers et aérés, Dimitiev se hissa jusqu’à son niveau, et agrandit l’espace praticable pour lui-même. Manifestement, à l’aide d’une minuscule pelle répulsive surgie de nulle part—comprendre de l‘improbable manteau du bonhomme—, l’inquisiteur était en train de creuser un trou déjà profond d’un demi-mètre, s’aidant de sa non moins petite lampe.

-Mais qu’est-ce qu’il y a? finit par demander le professeur, après avoir évité qu’un affaissement de leur précaire plate-forme le précipite au bas de la montagne, contre un des rochers.

Le religieux secoua brutalement la tête en disant d’une voix soudain saccadée:

-J’ai senti quelques chose ici…quelque chose de résolument mauvais.

Nouveau soupir de la part du chef d’expédition, tandis qu’il redirigeait son projecteur vers le haut de la montagne, examinant les quelques morceaux de la voute encore en l’état, tachant de reconnaitre l’endroit où ils se trouvaient dans la salle bouleversée. Au prix d’un certain effort de mémoire et d’un encore plus considérable effort d’imagination, il finit par dire:

-Ici nous sommes au dessus du puit 8. Les fouilles n’y étaient pas encore très avancées. Plusieurs des nôtres y étaient au moment de l’éboulement; seul le professeur Goldenberg et le jeune Jules s’en sont tirés.

Pour seule réponse, il entendit un « Ah! » de la part de Calender. Se retournant, il le découvrit, pelletant de plus belle. D’une détente, il était de nouveau au plus près de lui, et éclairait le trou entre temps plus large et plus profond avec sa torche ionique. Effectivement, quelque chose semblait ressortir, quelque chose contre quoi la pelle répulsive bloquait. Par une série de petits mouvements experts comme même Dimitiev n’en aurait pas fait bien mieux, caractéristique des travaux de la terre, il libéra progressivement les contours de l’objets, découvrant de nouveaux points contre lesquels l’outil butait.

-Où avez-vous appris à faire cela? Interrogea le chef d’expédition, désignant de la tête le bras travaillant.
-Vous savez, j’ai été conduit plusieurs fois à exhumer moi-même des corps pour procéder à des opérations salvatrices, répondit Calender sans le regarder ni préciser ce qu’il entendait par ces « opérations ».

Entre temps, il avait dégagé une bonne partie de sa trouvaille, qui formait comme une bosse, avant de redescendre suivant un arc, et de remonter un peu pour se perdre dans une zone pas encore totalement libre de sable, mais d’où ressortaient également quelques angles. Méticuleusement, l’inquisiteur poursuivit, et libéra peu à peu, tandis que le terrible terrain semblait s’épaissir et devenir comme…humide et ocre.
Intrigué, Dimitiev posa de nouveau une question impatiente:

-Mais qu’est-ce que c’est que ça?

Les lèvres de Calender se serrèrent, tandis qu’il donnait les derniers coup de sa truelle hautement technologique, dégageant l’épaisseur finale de sable. « Jugez par vous-même » furent ses seuls mots.
Pendant quelques instants, le chef d’expéditions se pencha sur la fosse que le théologien avait dégagée en un temps record, et l’étrange forme qui dépassait au fond, en l’éclairant autant que possible de sa torche. Il mit quelques instants à saisir, puis poussa un son dégouté, comme un crachat.
C’était une horreur; cette bosse était…une épaule humaine, sur laquelle était tendu un vêtement bleu en partie déchiré, qui courait jusqu’à la moitié de ce qui semblait être un cou balafré, d’où la peau labourée remontait vers une tête totalement défigurée: A la place du visage, il n’y avait qu’une marre informe de sable mêlé à du sang coagulé, et à de la chair basanée écorchée.

-C’est affreux, murmura-t-il, en se tournant vers Calender.

Déjà la pelle avait disparu, et celui-ci était en train de terminer de se signer, les yeux écarquillés derrière les lourdes montures, et finit par souffler d’une voix étrange, comme transformée:

-Je le sent distinctement maintenant…je le percevait depuis mon entrée ici, mais là, c’est tellement intense…c’est le Démon…

Dimitiev secoua brutalement la tête, et, récupérant de la vision d’horreur qu’il évitait à présent en regardait ailleurs, fit:

-Cessez vos histoires! Le machin bleu, c’est un habit Tessak, c’est rien qu’un ouvrier qui n’a pas pu sortir à temps. Pas très propre, j’vous l’accorde, mais…

Il n’était pas satisfait de sa réponse, car jamais le sable n’aurait pu écraser le visage de la sorte, et sentait bien que quelque chose clochait, mais il n’allait pas pour autant croire aux sornettes de son guignol de compagnon d’infortune, qui reprenait, bougeant à peine les lèvres:

-Les forces du Démon sont à l’œuvre ici…Elles sont si fortes…jamais je n’ais été confronté à ce point là…vite!

Il eut un mouvement vif et maladroit, ce qui n’était pas coutume, et fouilla quelques instants dans une poche, pour en tirer un objet surprenant. C’était une sorte de boule d’or lisse et brillant de mille feux dans la lueur même faible de la torche, entourée de cercles d’un métal aux reflets bleus de lapis-lazuli et vert de jade, desquels se dégageait comme un petit bec doré et ouvragé, sur lequel était inscrit un mot latin. Le tout était tenu par le religieux au bout d’une petite chaine.

-Ceci est un Hagydroir, expliqua l’inquisiteur, serrant très fort sa prise, avant de continuer d’une voix saccadée: il est rempli d’un doigt d’eau bénite par le dernier Pontife de la Terre, issue du Saint Bénitier d’Hagia Triada. Un petit synthétiseur la copie en continu lors de l‘utilisation…c’est une arme puissante contre les forces de Lucifer!

Brusquement, il l’agita au dessus du corps, à mi-profondeur du trou. Dans le mouvement vif, l’or semblait scintiller encore davantage, et lentement, les cercles autour bouger…sans que Dimitiev ne s’en rendre vraiment compte, ceux-ci formèrent bientôt une deuxième boule aux reflets bleus et verts autour de la première, à cause de la vitesse du mouvement surnaturel, et bientôt il remarqua des petites gouttes qui tombaient à la verticale du fantastique dispositif, sur le cou labouré de cicatrices et couvert de sang. Alors, le pourtant très rationnel chef d’expédition cru rêver. L’eau, en tombant, semblait s’étendre dans un éclat argenté, et pénétrer dans la chair, disparaissant. De nouveau hypnotisé par le mouvement, il ne sut pas combien de temps ce manège dura, même si ce fut sûrement assez longtemps, mais à la fin, on aurait dit que le corps n’était pas le moins du monde mouillé; il semblait dans son état d’origine.
Alors que ses yeux suivaient toujours un mouvement d’un Hagydroir invisible, le vrai avait disparu dans le manteau du religieux, pour laisser place à autre chose.
Avant même que le professeur n’ait le temps de réagir et d’observer plus en détail ce que tenait Calender, déjà celui-ci plongeait sa main à une vitesse que l’on aurait pas cru possible de sa part dans la fosse, jusqu’au corps…Et dans icelui. Le bras se rétracta, laissant apparaitre comme une garde formée par la partie supérieure une grande et lourde croix en argent massif, ornée de motifs traditionnels runiques anciens. La partie la plus longue du tronc avait manifestement pénétré dans la chaire de l’épaule comme dans du beurre, déchirant les bords sans difficulté, et arrosant les environs de sang, sans pour autant que l’étrange arme ne soit touchée par une de ces répugnantes projections.
Les secondes qui suivirent furent tout au long de la vie du professeur Dimitiev un sujet à questionnements. Longuement encore, il repousserait cela au fin fond de son esprit, tachant de l’oublier, mais ça reviendrait à la charge, et il aurait à s’y confronter.
Il n’avait pas relevé à moitié ses yeux ébahis vers l’inquisiteur pour l’entendre soudain parler, prier, les yeux fermés derrières ses lunettes dorées, tenant dans ses mains jointes devant son visage un petit chapelet d’or aussi, tandis que bientôt se dégageaient des paroles audibles, en latin, dont le professeur ne distingua d’abord que « …Daemonicusque », faute de connaissances en la matière, qu’un mouvement attira son attention.
La chair putréfiée et crucifiée s’était soudain mise à vibrer. Elle avait des tremblement violents, déstabilisant les parois de sable de la fosse, bougeant toujours plus fort.

-…spiritus…

Avec une boutade, Dimitiev s’écarta. Une paroi entière de la fosse, à quelques centimètres des genoux de Calender, s’était désagrégée, et le sable tombé dans un nuage de poussière vers le fond, qui était toujours animé d’un mouvement surréaliste.
Lorsqu’il osa de nouveau, fasciné, braquer son projecteur vers la fosse devenue bien plus grande, il n’en crut pas ses yeux. Le sable qui aurait du y chuter et tout combler n’y était pas. A la place, le cadavre avait un bras entier dégagé, et on entrevoyait le flan. Le bras…il bougeait. Des moulinets frénétiques dans le fond, les doigts se rouvrant et se refermant, agrippant de larges poignées de sable, trépignant en une étrange danse diabolique.

-…ad Lapidem…

Cette puissance mystique devenait de plus en plus puissante, elle gonflait à vue d’œil, chacun des muscles partiellement décomposés se tendant et se détendant, effectuant des mouvements violents de tous les côtés. Bientôt, la tête écrasée, ballotée dans tout les sens, sautait d’une épaule à l’autre, heurtant la croix et étant aussitôt rejetée, comme électrisée, et l’autre bras se dégageait, balayant l’espace avec une égale fureur.

-…Christus…

Soudain, la seconde des deux mains, dans son sabbat incontrôlé, heurta une des branches du crucifix, et immédiatement les doigts sanglants et sableux se refermèrent dessus, le poignet vibrant, et faisant bouger le croix d’argent.

-…hostias…irae…!

Le dernier mot, totalement incompréhensible du professeur, provoqua une soudaine contorsion, comme un saut entier, qui arracha presque le cadavre en furie au sol, faisant à la main lâcher la croix, comme si il sautait d’un terrifiant bond dans leur direction, le dévoilant jusqu’aux cuisses, laissant flotter dans un vent inexistant ses vêtements déchirés et les quelques restes de cheveux, sans qu‘il ne retombe dans son sépulcre.
De nouveau Dimitiev, terrifié, recula, presque acculé au bord de l’étroite plate-forme, en observant ce pantin disloqué continuer à s’élever, sa tête au visage de sang et de sable lamentablement tombée sur une des épaules, tournée vers Calender, qui, tenant toujours son chapelet, le brandissant plutôt, s’était progressivement mis debout pour faire face à l’objet démoniaque, lui aussi entouré d’un vent mystérieux faisant bouger ses vêtements.

-…Satanas…

Parcourus de spasmes, les bras se relevèrent, et s’avancèrent, comme s’il se tendaient vers l’inquisiteur, dont les mains, blanches à cause de la force avec laquelle il enserrait son chapelet, se tendaient vers le corps satanique, entouré subitement d‘une sorte de halo verdâtre sinistre.

-…Sanctus…ad aeternam! Termina Calender, criant presque dans la tempête qui se déchaînait subitement, soulevant une tornade de sable, dans laquelle le professeur vit à peine sa main droite jaillir, s’emparer de la partie supérieure de la massive croix d’argent plantée dans l’épaule du démon, et la retirer d’un coup sec.

A l’instant, tout s’arrêta. Lourdement, le corps tomba dans la fosse, dont le fond était occulté par le nuage ambiant qui s’était formé, tandis l’inquisiteur faisait un pas en arrière, approchant sa main gauche, où les veines ressortaient à présent nettement, de son visage, et baisant le chapelet. Ce fut l’image qui le marqua, celle de Honorius Calender embrassant le petit crucifix doré, avec sur lui l’expression sereine du devoir accompli autant que celle de l’horreur affrontée. Il le fixa longuement, et finit par revenir, avec appréhension, au trou, qui était devenu une large excavation. Le sable volant mis de longs instants à retomber, sa lampe n’arrivant pas à percer le rideau. Peu à peu, sa vue traversa, sans qu’il ne s’en rende compte. Après de longues secondes, il dût se rendre à l’évidence. Il n’y avait plus rien. Un peu de sable ocre, et un large trou à l’apparence bouleversée, mais plus rien d’autre. Pas de corps.
Violement, il tourna la tête vers l’inquisiteur, qui tenait toujours par la main droite tendue la croix d’argent ouvragée. Et il y avait bien du sang sur la partie qui était quelques instants plus tôt enfoncée dans le corps.
Sans que Dimitiev ne puisse parler, l’exorciste essuya alors son arme avec un mouchoir blanc sorti de nulle par, à mouvements lents et mesurés, la rangea, avant de remettre son chapelet autour du cou. Seulement alors il rouvrit les yeux, et rencontra le regard du chef d’expédition. Sans rien dire, il se retourna, et entreprit de descendre. Après un dernier regard à la fosse, le professeur l’imita rapidement.
Au bas de la petite montagne, dans l’espace entre les gros rochers, se tenaient deux silhouettes. Les faces blanches, tétanisés de terreur, Ira Xuanis et le Prieur Vanas se tenaient là, chacun une petite lampe ionique à la main, les regardant descendre.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeSam 4 Avr - 21:54

« La guerre repose sur le mensonge. »
NSA: En effet, toute vérité s’y efface, est remplacé par la tromperie dont on espère qu’elle fera à l’ennemi commettre l’erreur qui précipitera sa fin, et nous permettra d’obtenir notre victoire. Le secret, le mensonge, et l’incitation à l’erreur sont des principes essentiels de l’art militaire.

Édition de l’Art de la Guerre de Sun Tzu, chapitre premier (original), commentée par l’Amiral Nikolaï Syllas d’Acre. Ouvrage de référence à la lecture obligatoire à l’académie des officiers de Christiansa.


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An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre
Île-Longue



Un terrible hurlement. Qu’un criait comme s’il avait le diable à ses trousses. Dans ces terribles meuglements se détachaient des syllabes, mais rien n’était articulé. C’était une terrifiante plainte, provenant du fond du cœur de quelqu’un qui connaissait une peur telle qu’il ne l’avait jamais connue dans sa vie. Puis, peu à peu, il s’atténua, leur permettant de retrouver leurs esprits. Quelque chose avait sonné Hel, comme une décharge dans son cerveau. Elle était totalement désorientée…tout s’embrouillait dans sa tête…était-elle réellement dans ce trou, ou alors ne faisait-elle qu’avoir un mauvais rêver. En réalité, elle était dans son maigre lit de l‘entrepôt Kamenskite…non. Sa tête sonnait trop encore, mais elle se repassait les événements de façon vague, sélectionnant ceux qui étaient crées par son imagination, et la réalité. La réalité, c’est qu’en fait…elle ne savait pas ce qui s’était passé. Elle avait l’impression d’avoir passé des heures là, au sol, car, manifestement, elle n’était pas debout…
Elle tenta de bouger, mais son corps fut entravé par une masse lourde. Elle…portait son bloc. Ça lui revenait. Sans succès, elle tentant de cligner des yeux. Le noir absolu. Même la composition de l’air était étrange…tellement sèche, et pauvre. Elle haletait. Tout cela était très perturbant. La jeune femme passa sa main droite le long de son bras gauche, et finit par trouver une petite encoche. Mais sa dextérité et sa concentration n’étaient toujours pas totalement rétablies; il lui fallut plusieurs essais pour réussir à passer l’index dedans. Il n‘y eut pas le faible cliquetis habituel. En fait, le silence était total. Les amplificateurs de son devaient êtres désactivés, tout comme la vision nocturne. Presque tout était désactivé.
Enfin, il y eut une très faible clarté qui attira ses yeux. Le panneau de contrôle s’était ouvert sur l’avant bras, mais ne fonctionnait qu’à un niveau très réduit. Une lueur bleu blafarde en émanait, permettant à peine de reconnaitre les boutons. Un compteur donnait un restant minimal d’énergie, à peine en état de faire fonctionner les systèmes de mouvement de base et ne pas la paralyser complétement . Plus d’audio, ni de vision, encore moins d’accélérateur musculaire, d‘améliorateur de réflexe, ni d‘énergie. Même le système de rétraction du bloc était HS, elle était coincée dedans. Soudain, elle perçut avec horreur quelque chose se poser sur sa cuisse, puis remonter. Elle sentait son cœur battre très fort, mais était encore incapable de se lever. Mais, quand l’étrange sensation passa près du bras gauche, la lueur éclaira ce qu’elle identifia immédiatement comme la main gantée de rouge du hetman. Elle soulagement, elle respira, mais demeura immobile, ne sachant pas vraiment quoi faire ou quoi dire.
Il y eut un petit claquement au niveau du haut du cou, à droite et à gauche. Soudain, le silence total fut rompu, et des bruits lui parvinrent Des souffles, des grognements, et bientôt, la voix légèrement déformée et aussi très lointaine de Janeshki.

-J’ai ouvert tes voies d’aération. Tu va pouvoir parler…Et respirer.

Soudain, elle remarqua à quel point l’air provenant de l’extérieur était frai…Et agréable. Sans s’en rendre compte, elle était au bord de l’étouffement dans le casque où les entrées d’air s’étaient refermées. Après de longues secondes d’engourdissement supplémentaire, son esprit finit par se débarrasser des derniers volutes de la suffocation qui aurait pu lui être fatale, et se secouer.

-Qu’est-ce qui…? Hésita-t-elle, secouant un peut la tête, dont les mouvements étaient entravés par le casque soudain devenu un fardeau.

Mais ce fut une autre voix qu’elle entendit. D’abord, elle ne la reconnut pas, d’une part parce qu’elle était déformée par les uniques petits orifices de respirations qui ne laissaient guère passer de son, d’autre part parce qu’elle était très différente de celle, habituelle, d’Antonelli, comme l‘indiquaient le composés du mot « bordel » :

-J’en sais bordélement rien! Mais on est dans un pétrin pas possible, bordelique oui!

Elle sentit des doigts tapoter contre la bottine de son bloc, avec un mélange d’impatience et d’impuissance. Assurément, Scaliger sentait qu’il s’était fourré dans une situation inextricable par son entêtement.

-Je pense que quelque chose à fait planter tout les systèmes électroniques, se manifesta de nouveau la voix du hetman, les torches sont mortes, et les réseaux de nos blocs aussi. Heureusement que je me suis ressaisi à temps pour ouvrir les voies d’aération, sinon on serait morts étouffés.

D’une certaine façon, ce qu’il faisait était un reproche au patron, qui n’aurait rien su faire pour eux. Mais il se garda bien de le souligner davantage. Soudain, il y eut un nouveau gémissement étouffé s’élevant dans leur terrible monde des ténèbres. Hel, se rendant compte qu’elle était couchée au sol, redressa péniblement son torse, mais heureusement, rapidement, les accumulateurs reçurent grâce au mouvement assez de jus pour fonctionner à capacité minimale, rendant les prochain mouvements un peu moins difficiles.

-Qui a crié tout a l’heure? Interrogea-t-elle dans la direction d’où lui semblaient venir les voix, tout en cherchant à tâtons du bras gauche le mur contre lequel s’adosser.
-Un d’mes hommes, répondit Scaliger, l’avait une jambe cybernétique en attendant qu’on lui implante une nouvelle.
-Manifestement, ce machin a stimulé les douleurs au maximum. Le pauvre est encore à moitié dans les pommes, commenta le hetman, à l’instant même où le bras de Hel touchait la surface bétonnée de la paroi.

Avec plusieurs boutades, elle parvint à se tirer jusqu’à cette dernière, et s’installer contre, triant encore ses idées. Plus loin, la jeune femme entendait les deux miliciens restants parler à voix basse. Des crissement de plaques d’Hexanox sur le sol, plus ou moins éloignés, l’avertissaient que le hetman explorait les environs. Antonelli devait encore être à côté, à ronger son frein.
Remarquant le clapet de son panneau et sa trop faible lumière encore ouverts, elle les referma d’un geste qui se voulut sec. Les faibles bruissements de pas se rapprochaient de nouveaux, et s’arrêtèrent à quelques pas d’elle.

-Je ne sais pas comment ça se fait, mais nous ne sommes plus au même endroit que tout à l’heure. La configuration est totalement différente…et il n’y a plus de trace de la porte arrachée. C’est un autre couloir

Scaliger émit un grognement, suivi d’un petit bruit guttural:

-Mais comment c’que c’est possible? On n’a pas bougé!

On devinait le geste d’impuissance de Janeshki:

-Je n’en ais aucune idée…

A peine avait-il finit son soupir qu’un nouveau hurlement à réveiller les morts s’éleva du milicien à la jambe cybernétique, dont la souffrance était manifestement tout bonnement atroce. Elle fut suivi immédiatement d’un long reniflement excédé de la part de Scaliger, dont la voix calqua comme un fouet:

-Purée! C’est pas bientôt fini! Vous autres, faite le la fermer, sinon j’vous règle votre compte illico!

Sa remarque fut suivi d’un crissement sur le sol de béton, et de quelques propos échangés à toute vitesse par les deux survivants. La voix de l’un s’éleva. C’était celui qui avait parlé à l’entrée également:

-Boss, n’en a marre d’ça. Il morfle ! On n’obéira plus sagement à d’autres ordres qu’celui qui nous sortira d’ici. Sinon, v’pouvez allez vous faire foutre!

Antonelli eut un hoquet outragé et furieux, et on l’entendit se relever d’un bond. Ce fut suivi d’une série de crissement sur le sol, et du bruit distinct de corps se touchant, cherchant à se donne des coups, puis le bruit d’une gâchette.

-Bordel, les flingues sont morts aussi! Constata le mafieux..
-Normal, fit le hetman, et vous'd'vriez arrêter ça, ça ne nous avance à rien.

Entendant que Scaliger se calmait manifestement avec un gigantesque effort de contrôle de soi, Hel se hasarda:

-Bon, et qu’est-ce qu’on fait maintenant?

Un « hum » déforme par le casque lui parvint de l’endroit où Janeshki était accroupi.

-J’ai entendu qu’un des principes pour sortir d’un labyrinthe est de suivre de façon continue un des murs…ça nous mènera bien quelque part. Le tout est de prendre le sens le plus court.
-Pour faire ça faut p’voir marcher! Remarqua la voix cinglante du milicien qui avait déjà parlé quelque instants plus tôt, et Rik’, n’est pas au point à c’niveau là.

Comme pour confirmer ce qu’il disait, l’unijambiste poussa un nouveau gémissement, long et plaintif. Scaliger tempêta:

-Pas question qu’j’me laisse avoir ici parce qu’un d’ces cons a perdu sa putain de jambe!

Ils l’entendirent se relever de nouveau, plein de hargne.

-Vous v’nez, les autres? Sinon j’vous laisse ici et basta.

Doucement, Hel se releva; Heureusement que les ligatures entre les plaques étaient faites en matière synthétique fort flexible, sinon elle aurait été aussi raide et immobile que l’homme à la jambe cybernétique. Lentement, avec l’énergie initiale du mouvement, les quelques batteries indépendantes facilitaient la suite. Ca n’était plus tout le poids, qui était assez important, à porter, mais juste une, certes grande, part.

-Allez, on prend à droite, déclara, incorrigible, Scaliger, tandis que le blessé émettait une protestation.

Mais, manifestement, les deux autres s‘étaient également levés, et un bruit de vêtement froissés suivi d‘une suite de grognement indiquaient qu‘ils soutenaient le blessé. Dans l‘oppressante nuit, ils se prirent en route, chacun touchant le mur du bout de la main.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeSam 18 Avr - 19:22

Force est de constater qu’à l’époque de la communication subspatiales intergalactique, les mondes, s’ils ne font pas partie d’une puissance organisation centralisée, ont tendance à se refermer sur eux-mêmes, à tenter le protectionnisme est l’autarcie. Or, cela est un cercle vicieux: l’absence de débouchés force les mondes exportateurs à faire de même, et bientôt, les importateurs subsistant n’ont plus personne à qui s’adresser. Seul une main ferme peut empêcher une crise généralisée.
Note interne du ministère du Trésor et de l’économie signée par l’amiral Law.


-- -- --

An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Ressirgo V
Désert occidental


Le prieur conclut son récit en poussant son chariot à sustentateur hors de l’abbatiale où les religieux se rassemblaient déjà pour l’office qui n’allait désormais guère tarder. Le suivant, Eramstead, manifestant pourtant un vif intérêt et une grande ouverture d’esprit, demanda, sceptique et sincèrement étonné d’entendre cela de la bouche de Vanas:

-Mais n’y a-t-il pas moyen que vous vous soyez trompé, dans le noir de la caverne?

Le prieur hocha la tête, sans même les regarder, engageant le chariot dans la petite sacristie, où deux autres servants préparaient manifestement l’écharpe cérémonielle de l’abbé, avec de nombreux égards pour la précieuse étoffe de pourpre et d’or , avant de répondre doucement:

-Non, il n’y avait aucun doute. Sans parler, nous sommes revenus sur nos pas, et n’avons plus fait allusion à ce que nous avions vu. L’honorable Inquisiteur a continué à examiner le mastaba, mais a disparut dès que nous avons de nouveau eut la possibilité de sortir. D’ailleurs, après avoir donné l’extrême-onction aux mourants, rassuré le professeur Hugen, je ne me suis pas attardé dans cet endroit diabolique, et, jamais je n’y retournerais.

Il fit un petit signe de tête à l’adresse des deux autres religieux, gara son chariot, et se retourna:

-Maintenant, je vais aller assister à l’office. A moins que vous désiriez faire de même, je pense qu’en interrogeant les nôtres sur votre chemin, vous trouverez les quartiers des visiteurs.

Il était déjà en train de s’éloigner quand le Lord l’interpella:

-Attendez…savez-vous si on peu encore accéder au mastaba? Et trouver un guide?

S’arrêtant net, Vanas parut devenir rigide. Puis, lentement, il se retourna, sur le seuil de la sacristie:

-Probablement… pas, il aura été comblé par le temps. Mais sachez qu’aucun des nôtres vous y conduira. Ils savent.

Sans dire un mot de plus, il sortit d’un pas preste, laissant Fendlein et Eramstead sur leur faim.


[i]Il existe deux états d’esprit: celui où l’on distingue une cause, un déroulement, et une conséquence à une action, tout à fait cloisonnées et à sens unique, en somme, presque indépendante, et celui, plus flexible, où l’action est un tout, linéaire, qui peut être affecté en cours pour changer sa finalité.[/i}
Réflexion communément attribuée à Aetius Syllas


[center]-- -- --

An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre


Jadis, en fait il y a déjà deux ans de cela, Primo de la Rivera avait eut un excellent ami. Ils s’étaient connus depuis leurs enfance, dans une école d’Acreopolis. Son ami avait vécu jusqu’à ses dix ans dans Kamensk, avant que ses parents—en fait sa mère, son père ayant été tué lors d’un combat de rue durant une des campagnes de pacifications menées par les brigades de la mort du Cartel contre les clans Scaliger et Hunsa qui s’étaient pour la énième fois révoltés—n’aillent habiter dans la paisible capitale d’Acre, où le Gouverneur Général de la République maintenait scrupuleusement l’ordre à l’heure à laquelle de larges parties de Tsarysyn étaient livrées à l’anarchie. Dès l’école, les deux hommes se connurent, et se rapprochèrent, et même s’il empruntèrent par la suite des voies complètement différentes, ils restèrent en contact permanent, et se revoyaient le plus souvent possible. Kascenda Flamin était rapidement monté dans la hiérarchie, jusqu’à devenir juge d’une subdivision judicaire près d’Eupatoria, puis, loin de là, sur Tsarysyn, quartier 245 où il avait connu l’épreuve du feu, face à une délinquance omniprésente. Il avait lutté vaillamment, alors que De la Rivera commandait son premier régiment de ligne, et finalement, la Révolution Militaire avait contribué à donner le coup de balai final dans les faubourgs de la capitale des deux tiers de la galaxie. Récompensé par le nouveau gouvernement pour son attitude intransigeante et son travail sans relâche, il se vit offrir un poste élevé, celui de Procureur général du Fullakomtarquat d’Acre par l’Amiral Syllas en personne, mais déclina l’offre, et fit part au ministre de la marine de ce qui pouvait le plus lui faire plaisir: mettre un terme aux exactions à Kamensk. C’était une tache énorme, et l’amiral avait été assez réticent au départ, mais finalement, convaincu par l’ardeur du jeune magistrat, lui avait accordé la charge au Palais de Justice des Badlands. On était en 58. Dès ses premières semaines là-bas, le vent frai du changement souffla, pour bientôt devenir un cyclone qui bouscula la vieille cité délinquante se remettant tout juste du coup fatal que l’implacable Von Heigins avait donné au Cartel, en faisant assassiner ses gros bonnets par la Phalange des combattants de Juan de San Ferdino, se débarrassant par la même occasion de ce gêneur. En quatre ans, plus de quatre milles neuf cent arrestations d’hommes hauts placés de la mafia et condamnations totalisaient près de soixante-douze mille neuf cent ans de prison, dont une quarantaine avec pour objectif de servir la science dans les douteux laboratoires d’expérimentions plus ou moins secrets mis en place depuis peu, aux tests obscurs mais manifestement consistant en la plus haute sanction avant le commando d’exécution, qui fut l’apanage d’uniquement huit hauts responsables mafieux, dont Icolius Hunsa, dit le « purgeur », bras droit du chef de son clan, lui envoyé chez les docteurs. Ce fut justement à ce moment là que Primo de la Rivera arriva en ville, à la faveur d’un heureux hasard des mutations, et insista pour conduire lui-même le commando d’exécution qui nettoya la surface d’Acre de ce déchet. Bien entendu, l’excès de zèle et l’incorruptibilité de Flamin causèrent une panique généralisée parmi les trois clans, qui mirent leurs divergences de côtés, pour le sabrer au plus vite. Il échappa à pas moins de vingt tentatives d’assassinat dans l’année, tout en continuant d’instruire procès sur procès dans la mesure que les très réticentes—et compromises—forces de l’ordre lui permettaient.
Entre temps, les mafieux tentaient l’approche indirecte pour se débarrasser du gêneur: on tenta toutes sortes de pressions pour le faire destituer, mais le fait que la place ait été accordée par l’amiral Syllas en personne bloquait totalement la partie. Ils en revinrent donc au bonnes vieilles méthodes. Les menaces s’accumulèrent, mais il ne lâcha pas le morceau. En 62, trois hommes armés s’introduisirent dans sa maison de famille, pourtant bien gardée, à Acreopolis, et tuèrent sa femme, sa vieille mère, et ses deux enfants, défigurant ces derniers à l’acide, en laissant une lettre expliquant qu’ils s’agissaient des normales conséquences de ses « actes criminels » envers les hommes d‘honneur Kamenskites. Le soir, quand il apprit cela, Flamin fut effondré, et vint se réfugier auprès de la Primo de la Rivera, entre temps devenu chef de garnison, et pleura longuement. Mais lorsqu’il émergea de sa tristesse au bout de la nuit, s’était avec la ferme intention d’attaque encore plus violement ceux qui étaient devenus ses ennemis mortels, et y travailla pendant près d’une décennie, arrêtant chaque chef de clan plusieurs fois, clairsemant leurs rangs, coupant leurs voies d’approvisionnement. Mais les institutions étaient trop implantées, trop séculaires. Ils lui échappèrent finalement, tandis qu’il perdait patience. Finalement, un Panzerfaust 650 volé dans une des usines et tombé entre les mains des Hunsa régla l’histoire, toute la salle d’audience, pourtant protégée par d’épais murs blindés, sauta, tuant une cinquantaine de personnes. C’était en 71, l’année où Primo de la Rivera fut nommé Lieutenant-Général, et gouverneur militaire de Kamensk. Au cours d’un poignant discours à l’enterrement du corps carbonisé de son ami, il prévint ses assassins: le juge Flamin ne saurait rester invengé, et être mort pour rien. Dès son retour, il donna des instructions secrètes à ses hommes, pour qu’à chaque prétexte, ils compliquent la vie des mafieux. Chaque arme, même entrevue, en leur possession, serait une provocation, entraînant des conséquences immédiates, et violentes. Le regard, à l‘enterrement, de l’amiral Syllas, écoutant son allocution, lui semblait un accord tacite et une caution: la terreur, c’était au tour des ennemis de l’intérieur de la ressentir.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeSam 18 Avr - 19:22

Et pourtant, il était là, à l’avant d’un gros antigrav’ militaire, observant la route obscure devant lui, tout en sachant que Falco Scaliger et sa trafiquante—elle était fichée comme telle auprès de certain de ses informateurs qu’il avait contacté dès qu’il avait eut quelques secondes de libres—d’acolyte étaient derrière, entre deux de ses soldats. Ils taillaient la route, vers le lac Tisça, où, selon ces criminels, l’étrange groupement paramilitaire de tout à l’heure se dirigeait. Même s’il restait méfiant—C’est pour cela que huit autres véhicules lourdement armés se trouvaient devant et derrière eux—, de nombreux indices laissaient à penser que ce qu’ils racontaient n’était pas totalement faux. Enfin, et même, si c’était un guet-apens, le général tenait un prétexte en or pour mettre une balle dans la tête de cette infâme crapule de Falco Scaliger. Le bonhomme, en plus de le savoir, devait le sentir.
A côté, le chauffeur, un grand gaillard blond en treillis, observait la route, mauvaise, comme toujours dans les Badlands, les yeux écarquillés. Le tension était palpable dans l’habitacle. Il allait arrive quelque chose, ça n’était plus qu’une question de temps. D’instants.

-Bon, où est-ce qu’ils vont, vous me le dites maintenant? Demanda, sans même se retourner, le général à Scaliger.
-Patience, fit la voix un peu narquoise de ce dernier, nous y seront à temps je pense. Il suffit de suivre la route du lac, vers le plateau des chèvres…

Tout en écoutant la fin de la réponse, Primo de la Rivera surprit un petit grincement de la part du conducteur.

-Qu’est-ce qui se passe? L’interrogea-t-il.

Toujours très concentré, le soldat répondit, sans quitter un instant la route des yeux, ses lèvres pincée jusqu’à en devenir blanches:

-Je ne sais pas, mon général. L’antigrav est de plus en plus difficile à conduire, je n’ais jamais vu ça, il faut que je soit sans cesse sur les commandes pour l’empêcher de quitter la route.

Effectivement, ses deux grosses mains étaient totalement crispées sur les poignées de contrôle qui entouraient le tableau de bord tridimensionnel, sur lequel quelques compteurs indiquaient a vitesse, le charge plasmique du moteur, les réserves d’octanox, et la position sur la surface de la planète.

-Bon sang, ne nous faites pas non plus accident, grogna le général en s’emparant de sa balise com., posée sur le couvercle d’un vide-poche à moitié ouvert, et l’activer: Dites là bas, vous avec aussi des difficultés à tenir le cap?

Il y eut un bref crissement du subespace, puis plusieurs voix répondirent:

-Affirmatif.
-Je confirme, quelques problèmes.
-C’est difficile de maintenir, oui.

De la Rivera eut une moue intriguée et ennuyée. Il ne manquait plus que ça, un plantage en série des ordinateurs de bord. Restait plus qu’à se retrouver coincé au beau milieu du désert…avec Falco Scaliger.


Falco Scaliger…Cette crapule. Il se dit « homme d’honneur », mais ce n’est rien qu’un bandit de grand chemin. Il faut le coincer à tout prix, qu’il expie ses fautes!
Kascenda Flamin, Procureur général de Kamensk, une semaine avant son assassinat (3771).



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An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre
Dépression Tisça


-Ici Hussard 2. Le contact a disparu.

Ishaa gratta avec perplexité son poignet, tout en observant son tableau de bord multidimensionnel.

-Avez-vous la moindre idée de ce dont il s’agit? Demanda-t-elle finalement.
-Négatif, répondit laconiquement Hussard 2, mais c’était massif. On avait des difficultés à tenir le cap; cela causait des perturbation dans l’air et dans les réacteurs.
-Que disent les senseurs sur la partie basse du spectre de Galrop?

Heinz remarqua que les cils de Ishaa s’étaient soulevés légèrement pendant qu’elle attendait la réponse, contemplant les spots de leurs deux aéronefs en vol rotatifs au dessus de Nickelsk, la cité abandonnée sur le lac géant.

-On a une perturbation mineure sur le quatrième ligne, mais rien sur les trois premières, ni les deux dernières. J’pense q’celle de la quatrième vient du Point Gamma.
-Affirmatif, confirma la commandante, rien sur les scanners du Point?

Nouvel instant de flottement.

-Les perturbations que nous avions dans le premier rapport. Toutes les lignes sont troublées. C’est l’enfer là-bas, commenta avec un timbre neutre Hussard 2.
-Okay, déclara Ishaa, on descend vers l’Île, on a du sale boulot à faire, mais d‘abord faut voir ce qu‘il en est, puis contacter le QG. Vitesse trois cent cinquante nœuds, vecteur 7-1-4. On y va prudemment, scanne systématiquement, puis on descend vers la base de campagne. Je n’ais pas envie qu’un de ces machins nous prenne de nouveau au dépourvu.

En jetant un regard à travers la verrière en direction des quelques points lumineux automatiques de Nickelsk, où se trouverait sous peu le QG de campagne, Lubbock les vit rapidement accélérer, jusqu’à disparaitre de son champ de vision. Après plusieurs secondes, il distingua à la lumière des projecteurs de l’impulsoplan les flots noirs calmes du lac. Mais pour l’instant, il y avait autre chose là-dedans. Un goudron sombre…qui isolait le Point Gamma du reste de l’univers.
Les Condor V filaient à une vitesse phénoménale; déjà les terres arides dont la texture brunâtre était à peine visible dans les ténèbres avait laissé place au lac. Ils étaient au dessus de l’Île-Longue.

-Quatre contacts, annonça l’opérateur senseur de Hussard 2, à trois heures. Ils sont à neuf cent mètres du Point Gamma.
-Ici Dragon, je confirme, répondit Ishaa, je reçoit des informations contradictoires. Nature des contacts de votre côté?

L’impulsoplan s’était mis à monter, et bientôt les soldats à bord distinguaient vaguement les contours de l’île comme une tache encore plus noire que l’eau environnante.

-C’est biologique d‘après les senseurs avancés, mais les perturbations sur la quatrième ligne sont extrêmement fortes. On ne reçoit rien d’autre comme information concrète.

Les doigts de la commandante tambourinèrent quelques instants l’accoudoir de son siège pendant que Heinz se penchait en avant, cherchant à lire les petits messages défilant à toute vitesse sur les écrans holographiques de la station d’Ishaa.

-On nettoie! Annonça subitement celle-ci, avant de s‘adresser à son pilote, Tanit! Déverrouillage tube un et deux. Agent N et incendiaire.

La tête bardée du casque de timonerie du pilote tiqua, et sa main jaillit d’un levier pour pianoter à une vitesse extraordinaire sur une commande annexe, avant de revenir aux gaz.

-Paré, déclara Tanit d’une voix métallique encore plus déformée par l‘appareillage placé sur sa tête.

L’expression de l’ancienne fille de Kamensk se fit dure, tandis que le mouvement de tambourinement sur l‘accoudoir s‘arrêtait.

-Feu.

L’impulsoplan vibra alors que les deux fusées quittaient les tubes, piquant vers le sol selon un vecteur atypique. Lubbock se pencha à nouveau vers l’étroit hublot, pour distinguer à peine deux points filer vers le centre de l’Île, dans le cratère. C’est là que, soudain, une déflagration zébra la nuit, immense flamme qui éclaira un bref instant les environs, sans qu’on ne distingue néanmoins rien depuis leur altitude.

-Il n’y a plus aucun contact, commenta la voix désincarnée de l’opérateur de Hussard 2.
-Parfait, enclenchez les stabilisateurs, on descend voir. Vecteur 2-4-4, tout doucement, okay? On utilise la même plate-forme que la dernière fois, position 51-20-6, 18° nord-est du Point Gamma. Restez vigilent. Tanit, préparez notre armement au cas ou, et gardez les sustentateurs prêt à partir, comme prévu.

Tous ressentirent dans leur estomac le moment où l’appareil décrocha pour se diriger vers le sol…et le Point.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeLun 1 Juin - 14:07

Qu’est-ce que l’Histoire, si ce n’est la sommes des expériences passées jugées dignes d’être conservées?
Patrick Wallas, essai sur les Etats.


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An 3862, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre
Île-Longue



Une nouvelle fois, le blessé geignit. Son gémissement, long et plaintif, certes moins aigu que tout à l’heure, était encore chargé de douleur, et se répercutait au loin dans les interminables couloirs. Scaliger émit un léger bruit de succion, mais ne dit rien. Il était trop occupé à suivre le mur, et Hel percevait distinctement ses petits pas nerveux, comme ceux de Janeshki et des siens, plus amples, et doublés du crissement des plaques au sol, suivis enfin des deux miliciens chargés de leur ami, se traînant tant bien que mal. On ne parlait que peu, et tendait l’oreille. Marchant ainsi depuis une heure, suivant les méandres de la muraille, ils avaient passé une bonne demi-douzaine de croisements, et probablement le seuil d’une autre porte blindée ouverte, sans rencontrer de lumière, ni de courant d’air plus fort que celui à leur point de départ. De loin en loin, Scaliger grognait, mais déjà chacun commençait à sentir ses facultés décliner. Les ténèbres abrutissaient, c’était extraordinaire. Elle n’arrivait plus à se concentrer complètement sur autre chose…comme si le noir envahissait son esprit. La fatigue avait aussi fait son apparition, mais pas de façon excessive pour l’instant. Néanmoins, fatigue et déshydratation risquaient de devenir dangereux si ce petit manège se poursuivait.
Soudain, il y eut un grand bruit de glissement, et claquement sourd d‘un corps contre la pierre, suivis d’un « merde » prononcé avec toute la hargne dont Scaliger était capable.

-Purée de bordel de merde! C’est quoi ce machin! Hurla le mafieux.

Instinctivement, Hel s’était arrêtée, ce qui semblait être le cas de toute le monde, étant donné que personne ne lui était rentré dedans par derrière.

-Il y a des marches, commenta la voix déformée du Hetman, quelques pas devant elle.
-Ca ouais qu’y a des marches, putain de purée, saleté!

Scaliger cracha, et manifestement, se releva.

-J’ai du sang partout j’parie! Mes vêtements sont foutus! Grogna-t-il.

Leur parvint le bruit d’une série de claquements secs et rapide sur les habits du patron, qui manifestement essayait de mes épousseter, ce qui ne risquait guère de réussir si c’était avec du sang qu’ils étaient salis. Finalement, il siffla:

-Bon, on continue, t’façon ça servirait à rien d’revenir en arrière. Et faite attention d’pas vous étaler sur moi!

Il y eut une seconde de flottement, puis Nik, le milicien blessé, dit d‘une voix haletante:

-J’pense pas que c’est en descendant qu’on retrouvera le chemin de la surface.

Rien n’y faisait, déjà les pas d’Antonelli poursuivaient vers le bas, s’éloignant sans un mot.

-Mais revenir en arrière…est-ce que c’est une bonne solution? Pensa tout haut Hel.
-Ouais…si j’avais une meilleure solution, je la donnerai. Ca me plait pas du tout, mais là je crois qu’il faut le suivre.

Quelques soupirs excédés suivirent le commentaire du Hetman, mais finalement le groupe s’ébranla, pour rejoindre une trentaine de mètres plus loin le patron, qui manifestement s’était fait mal à la jambe en tombant auparavant, et n’était plus aussi rapide qu’avant. Il accueillit avec un grognement le retour du groupe, et tenta d’accélerer, mais fut rapidement contraint de revenir à une vitesse plus basse.
La descente continuait. Cinq minutes. Dix minutes. Au bout d’un quart d’heure en silence, alors que tout le monde était rodé à prendre les marches régulières de béton deux par deux sans chuter, ce qui avait faillit arriver à Hel au début, Janeshki remarqua brièvement:

-Hum…on doit être sous le lac depuis un petit moment déjà. Si quelqu’un sent de l’humidité, faut le dire, pour qu’on évite de se retrouver sous l’eau.
-Manqu’rait plus qu’ça, déclara laconiquement Scaliger, on crèv’ra pas de soif comme ça.

Ils ne répondirent rien, et poursuivirent la descente. Les marches se succédaient, monotones, les bruits mats de leurs pas sur le métagranit bétonnée étant à présent le seul son perceptible. C’était long. C’était ennuyeux, et fatiguant. Bientôt, les miliciens, supportant le fardeau de leur collègue, commencèrent à haleter. Hel également soufflait et se sentait un peu trop au chaud dans son bloc dont tout les systèmes de régulation de température étaient éteints, rendant la marche pénible. Elle aurait aimé pouvoir s’éponger le front, ne serait-ce que du bout de la main, mais c’était impossible, et elle sentait des fines gouttes sueur glisser le long de son visage.

-C’est quoi ce délire!? S’exclama soudain Scaliger, ça n’en finit pas!

De nouveau, personne ne répondit. Il n’y avait rien à répondre; c’était de la folie pure et simple, mais on ne savait rien de plus. Le dénivelé devait bien avait atteint quelques centaines de mètres entre temps.

-Purée, c’est pas vrai! Poursuivit Antonelli, ressentant manifestement le besoin de s’énerver, même contre le vide.

Comme pour contredire le mafieux, l’escalier s’arrêta à l’instant. Revenir à l’horizontale fut une seconde perturbant pour tout le monde, mais déjà, narquois, il déclarait:

-C’est pas trop tôt! C’es bon signe, allez, du nerf!

Après quelques plates protestations, signe de l’effet néfaste des ténèbres sur la volonté des mercenaires, la marche reprit, mais pas pour longtemps. Ils ne devaient guère avoir fait plus de dix mètres que la voix de Janeshki s’éleva:

-Ici! Y a quelque chose!

On s’arrêta net. A cet instant, tout le monde serait sauté sur le moindre prétexte pour se distraire, et, encore plus, se reposer.

-Où êtes vous? Interrogea Scaliger.

Le hetman se manifesta, et rapidement le patron et Hel étaient à ses côtés, pendant que, épuisés, les deux hommes de mains se laissaient tomber à côté de leur collègue, très silencieux.
Lentement, ils tâtèrent l’endroit que Janeshki leur avait indiqué en prenant leurs bras et le plaçant dessus. Dans un renfoncement léger du mur, quelque chose manifestement lisse, qui faisait un bruit métallique quand on tapotait dessus. Les sens du toucher de la jeune femme étaient totalement atrophiés par le gant d’hexanox plaqué lorsque lse capteurs de ceux-ci étaient HS, ainsi, elle ne perçut pas tout de suite; ce fut le mafieux qui s’écria:

-Une porte!
-Oui, confirma le hetman, c’est la première depuis tout à l’heure. Vous avez trouvé la poignée?

Ce fut au tour de Hel de la déceler. Elle était justement en train de s’adosser pour se reposer quand elle sentit son dos être touché par une point de métal. Après s’être retournée et avoir signalé, elle l’empoigna. Une poignée rotative standard, la même que l’entrée de la cave du Manoir, de celle de son entrepôt à Tsarysyn, et de celle du placard à balais du colonel Custer.
La main de Janeski s’approcha, et tâta à son tour. Elle sentit ses doits passer entre les siens, et scanner chaque centimètre du dispositif, puis, sa poigne se refermer, pour tourner lentement.

-Elle est ouverte, annonça-t-il simplement, en poussant la battant.

Celui-ci s’ouvrit avec un très léger grincement. Derrière eux, un crissement témoignait du fait que l’un des deux miliciens se levait. Doucement, ils pénétrèrent dans la pièce. L’odeur de stérilisant était encore plus forte ici. Le pied droite de Hel heurta quelque chose. Un « hein? » de Scaliger indiqua que c’était également son cas. Elle s’accroupit, et passa sa main gantée dans le mystérieux obstacle. C’était bas, quelques centimètres, manifestement fragile, quoique rigide et déplaçable. Il devait également y avoir de la matière synthétique froissable. Soudain, sa main, fouillant de nouveau toucha un boitier. La forme plus ou moins carrée rendait la chose claire.

-J’ai trouvé quelque chose.

Des pas ses rapprochèrent, faisant craquer cette étrange matière au sol.

-Ici, fit-elle en guidant la première main venue jusqu’à sa trouvaille.

Manifestement celle du patron, elle explora l’étrange parallélépipède, avant d’émettre son verdict:

-J’sais pas c’que c’est.

Ce fut au tour de celle du hetman de s’inviter. Pendant de longs instants, il furent là, accroupis, à tâter l’objet. Si leur situation n’avait pas été aussi dramatique, cela aurait pu être totalement ridicule, mais là, personne n’avait envie de rire.

-[colo=rnavajowhite]Il y a…un bouton![/color] Déclara soudain Janeshki, l’est caché dans un sommet…si je tourne comme ça…

Tous fermèrent les yeux. A l’instant même où le motard avait fini sa phrase, il y avait eut une lumière. Ils mirent de longues secondes à s’habituer, puis contemplèrent, béats, le petit témoin bleu qui s’était allumé. Il créait un mince cercle lumineux autour. L’objet était gris, et deux sommets étaient des boutons blancs, dont celui sur lequel les doigts oranges du bloc du hetman se trouvaient encore. Le sol était éclairé, il y avait du béton, et quelque chose de blanc.

-Mais c’sont des os! S’écria Scaliger.

La main de Hel s’approcha du lambeau blanchâtre le plus proche, et l’exposa le plus près possible du témoin lumineux. Puis, doucement, elle frotta du bout des doigts. Cela s’effrita, retombant sous forme de poussière au sol.

-J’crois pas qu’ce soit des os…
-J’dirais une sorte de métal carbonisé, aouta l’autre motard.

Le mafieux émit un « ouais » sceptique, puis s’empara doucement de l’objet, et le porta jusqu’à son visage. Les trois autres purent voir ses traits, des yeux très fatigués, et une peau griffée. Manifestement, sa chute avait été vilaine. Puis, il la tendit vers Janeshki, dont la visière fut brièvement éclairée, ensuite à Hel, et enfin au milicien, dont les lèvres formaient un pli indiquant à coup sûr une grande inquiétude.
Les cinq minutes suivantes furent consacrées à inspecter méthodiquement la pièce. Manifestement, elle n’était pas très grande, et bourrée de ces copeaux de ferraille blanchâtre disparaissant sous leurs pieds. Finalement, le bilan fut la découverte d’un papier et d’un petit insigne en métal. Le premier était quasiment illisible, brûlé, et seules les quatre lettres « -heim », étaient visibles, en bas à droite, en écriture manuscrite. Quand au badge, en acier, il était passablement brûlé, mais une série de chiffres et le nom « 56 IM » apparaissant toujours, brillante. Après avoir conjecturé sur ce que cela pouvait signifier et tenté sans succès de tourner le deuxième bouton de leur principale découverte, ils ressortirent, appelant les deux autres. Ceux-ci ne répondirent pas. Il fallut les chercher contre le mur opposé pendant quelques secondes. Scaliger buta contre, et rameuta tout le monde, se penchant déjà, leur petite lumière à la main. Hel arriva au pas de course, et rejoignit le petit point bleu. Ce denier « éclairait » le visage d’un des hommes de main assis, qui était là, les yeux fermés, la bouche entrouverte. La tête bougea.

-Allez, réveille toi, ‘spèce de l’avette! Gueula le mafieux en lui donnant une nouvelle boutade, sans résultat.

Fronçant les sourcils, Hel approcha ses doigts du visage, et, doucement, souleva les paupières. Aucune réaction.

-Chef, fit lentement la voix hésitante du dernier milicien restant, je crois qu’ils sont morts.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeLun 1 Juin - 14:07

L’égoïsme, la prétention et le vice font autant partie de l‘homme que les doigts de sa main, à la seule différence que l‘amputation est impossible.
Guuis Quyndla, Philosophe renommé.


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-Haakon Jealing, enchanté, Milord, fit le petit bonhomme blond, un grand sourire aux lèvres, en serrant la main d’Eramstead, quelle agréable surprise de voir quelqu’un d’autre que ces indigènes méfiants, et un compatriote qui plus est! ajouta-t-il.

Le richissime aventurier eut un geste modeste tout en déclarant:

-Oh, je crains de n’être que de passage pour quelques heures. Nous sommes déjà sur Ressirgo IV depuis trois jours, et je suis déjà passé au monastère; les possibilités de promenade sont limitées.
-C’est bien dommage, nous manquons tellement de compagnie ici. Venez, venez, mon cher!

Avec l’insoutenable force de sa nature joviale, Jealing les poussa à le suivre jusque sous sa tente. C’était un modèle moderne en fibre multiphases conçu par KDI, d’après la marque jaune et rouge près de l’isolant thermique qui protégeait l’air à l’intérieur de températures abrutissantes du midi sur Ressirgo. Derrière, à côté de leur propre véhicule, loué à un prix déraisonnable auprès d’un perfide commerçant qui avait eut la chance d’être le seul disponible, trônaient les trois autres de l’expédition Jealing.

-Vous ne devez pas vous en souvenir, mon cher, mais nous avons déjà étés en présence l’un de l’autre. C’était lors de la réception annuelle de Lord Albion dans son château d’Oshire, sur Assedo. Cela doit bien dater de quelques années…

En faisant rapidement la comptabilité de ses participations à l’événement mondain par excellence de la société d’Assedo, et en le comparant aux périodes où il avait échappé à la pénible tache de devoir mettre un costume correct et porter certains bijoux de famille — comme l’abject haut-de-forme traditionnel arborant ostensiblement la marque du couturier et l’année de fabrication —pour discuter de la mort d’untel ou de la banqueroute d’untel auprès de personnes totalement superficielles, Eramstead aboutit au chiffre de neuf ans, qu’il donna, obtenant un joyeux hochement de tête de confirmation de la part de Jealing.

-C’est cela, c’est cela, mon cher.

L’intérieur était relativement rustique: quelques couchettes posées sur le tapis répulsif, tablettes éparpillées partout, surchargées de papiers, quelques ordinateurs, un immense cube empaqueté bardés d’étiquettes diverses, le tout baignant dans une douce musique émanant de l’ordinateur sonique, astucieusement caché sous des tissus repoussés dans un coin, à côté d’une réserve autoréfrigérée de victuailles.

-Faites comme chez vous, vous devez être affamés par le voyage dans le désert. Que désirez vous? J’ai du thé standard et des biscuits tert, ou encore les rations calorifiques de tout bon voyageur. Je crains que faire quelque chose de chaud ne soit pas possible dans l’immédiat.

Il eut un sourire franc et rieur, et pointa négligemment du bout du doigt une petite machine formée d‘un plateau d‘une trentaine de centimètres de large, surmontée d‘une plus petite soucoupe, flottant au dessus de son centre, sur laquelle les quelques boutons colorés d’une minuscule console de commande apparaissaient.

-Je n’ais jamais réussit à me servir du réchauffeur universel, et pour l’instant mon assistant est en train de faire le tour du plateau, et ne reviendra qu‘après.

Eramstead et Fendlein, éreintés par la longue route sur les sièges de l’antigrav dont la dureté granitique était rappelée régulièrement lors des cahots, ne se firent pas prier une seconde fois, et se laissèrent tomber au dessus de la couche. Immédiatement le champ répulsif fit sont effet, et ils flottèrent doucement au dessus, dans une position confortable et fraiche, comme sur un siège de bulles.

-Je me contenterai d’un thé, déclara le milliardaire, que Fendlein suivait d’un signe de tête dans sa démarche.

Son sourire toujours collé aux lèvres, le responsable local se tourna, et s’attaqua fermement à la « cuisine » tandis que ses invités jetaient un coup d’œil plus approfondi. Le regard du Lord s’arrêta sur l’immense bloc, rangé au fond, puis continua vaguement sur les papiers.

-Mais qu’est-ce que vous faites dont ici pour causer autant de paperasse?

Tout en enfournant le bec du générateur hydrique dans un gobelet, Jealing eut un geste résigné:

-Ah, vous savez, mon cher, ce sont les petites tracasseries administratives. On a eut deux procès sur le dos, l’un de la part des moines, l’autre des indigènes. Cela a causé une montagne insoupçonnée d’ennuis, mais nous nous en sommes tirés. Le dernier acte de cette tragi-comédie s’est justement terminé la semaine dernière. Le tribunal suprême de la Sérénissime a rejeté l’ultime recours des locaux.

Le milliardaire eut une moue sceptique:

-Mais qu’est-ce que vous pouvez bien faire pour les effaroucher à ce point? D’après ce que j’en ais vu, ces gens là doivent considérer le fait de se déplacer jusqu’à Christiansa comme l’effort suprême!

Leur hôte eut un bref rire, puis expliqua, plaçant la pochette autochauffante dans les deux verres, avant de revenir, ceux-ci à la main.

-Nous avons obtenus le permis il y a quatre ans. Je représente ici les intérêts de la compagnie Christeel, mon cher. Nous avons effectué des prospections, et découvert d’intéressants gisement de minerai de fer et surtout de duranium, sans parler de nickel un peu plus loin, dans la région de Durz. Leur valeur en fait un excellent investissement, et notre projet est d’installer un complexe minier à ciel ouvert de catégorie 4, qui produira pour une bonne partie du marché de ce secteur. À l’origine, nous pensions que les principaux obstacles seraient les autorités locales et les universitaires de la Générale’ de Christiansa, mais ces derniers ont étrangement donné leur accord sans problèmes, bizarre d‘ailleurs qu‘ils jettent ça aussi facilement, il me semblait qu‘il y avait des ruines anciennes ayant déjà donné lieu à plusieurs expéditions. Enfin bon, ne nous plaignons pas. Quant aux premiers, ils veulent même payer le placement du chemin de magnétrain depuis Ressirgo-City. Par contre, les Tessaks ont étés jusqu’à saboter les premières machines de forage, et même maintenant, nous restons vigilants.

Eramstead sirota doucement son thé au citron, manifestement du vrai, originaire des plantations d’Assedo. Qu’on en dise ce qu’on veut, ce Jealing avait du goût.

-Et qu’elle est votre tache ici? Demanda aimablement Fendlein, tenant lui aussi sa tasse avec la perfection exigée dans les grandes maisons d’Assedo, dont il était d’ailleurs originaire. Ca n’étaient que les aléas de la vie —comprendre la passion effrénée de son père pour le jeu d’argent dans les pires casinos — qui l’avait dépouillé d’une bonne partie de sa richesse, ne lui laissant que les manières et les noms d’un aristocrate.

En fait, ils s’étaient connus lors d’un des voyages du milliardaire, encore jeune à l’époque. Il venait tout juste d’hériter, et de régler ces histoires d’argent en effectuant des placement sûrs et durable. Ni une ni deux, un beau yacht était acheté aux armateurs d’Assedo, et le voilà partie dans les étoiles. C’était sur Engut Secondus, situé entre Eitso et Teeslavonia, autant dire au milieu de rien, où Fendlein avait finit, recherchant une cargaison de bois issue de sa dernière entreprise spéculative. Ce bois, assez exotique, de chêne pleureur, une espèce locale aux feuilles allongées et caduques caractéristiques, se monnayait relativement bien, mais il s’était fait escroquer par son intermédiaire local, qui avait vendu et avait mis les voiles avec l’avance sur recette et la recette — autant dire le beurre et l‘argent du beurre. Fendlein cherchait désespérément parmi la population locale, des bucherons et des petits fermiers principalement, rustres et hostiles, et n’avait récolté qu’un vilain bleu sur la joue gauche — encore, le pire avait été évité, le paysan n’ayant pas eut son fusil à impulsion de chasse sous la main. Le soir, à l’estaminet local, alors qu’ils mangeait jusque là d’un air sombre l’unique plat local disponible — des betteraves cuites jusqu’à en être carbonisées —, il avait été ravi de trouver un autre Assedien, qui plus est de la haute société, auquel raconter ses malheurs. Ils taillèrent ensuite le pays des semaines durant— fort heureusement la population totale de la planète n‘excédait pas trente mille âmes —, jusqu’à retrouver l’intermédiaire, personnage ventru et fielleux qu’il fallut menacer d’une action devant le tribunal National de Tsarysyn pour le contraindre à rendre l’argent et les autorisations d’exports pour la cargaison. Quoique Fendlein réalisa sur le bois de Engut Secondus un bon bénéfice, les créanciers lui reprochaient toujours la dette de son père à cause d’un obscur accord que celui-ci avait signé, au plus profond de son alcoolisme désespéré, reportant sur le malheureux fils des millions de crédits de retard de paiement de créances. Pendant des semaines, Fendlein avait refusé les offres de son nouvel ami, qui dû se résoudre, afin d’éviter au jeune homme de devoir se défendre devant un tribunal de sa situation financière — encore heureux qu’ils n’aient pas été de l’état fédéral d’Eitso, où la prison pour dettes existait encore —, à payer sans lui dire les créanciers. Des années plus tard, lorsqu’il l’avoua, celui qui était devenu son compagnon lui confia que son honneur ne l’aurait pas supporté, et que, heureusement, leur amitié était devenue assez forte pour dépasser cela à présent.
Jealing eut un petit mouvement de la main après avoir posé les tasses.

-Je supervise l’équipe d’artificiers, mon cher. Nous comptons briser les roches granitiques d’ici demain afin d’ouvrir la voie aux machines d’excavation de classe intermédiaire. Dans quelques mois, il y aura ici la plus grande mine à ciel ouvert de Ressirgo si le plan se poursuit comme prévu.

Il suivi le regard d’Eramstead, qui, après s’être concentré sur son thé, alla jusqu’à l’énorme ballot cubique trônant plus loin.

-Ce sont les cartouches d’épyrite que nous avons déjà commencer à fourrer dans les endroits prévus cet après-midi. Et voici le détonateur.

Il tira joyeusement de sa poche un tube long et argenté, au bout duquel se trouvaient trois anneaux étroits, un rouge, un jaune et un bleu.

-Nous nous retirerons à quelques kilomètres d’ici, et pourrons admirer le spectacle. Ca promet d’être joyeux. Pourquoi ne resteriez vous pas?

Le lord eut un sourire:

-Ce serait avec joie, mais avant tout, nous aimerions vous demander une faveur…

Le visage de Jealing se fit encore plus aimable:

-Bien entendu, je suis à votre service messieurs!
-Et bien, nous aimerions jeter un coup d’œil aux systèmes de cavernes antiques situé en dessous.

Les traits de leur hôte devinrent perplexeq.

-Heu…vous savez…il m’est interdit de laisser des gens qui ne sont pas de la firme descendre dans la cave. C’est dangereux, et s’il vous arrive le moindre accident, je crains pour mon travail…
-Allons monsieur Jealing, j’aimerais bien visiter, ne serait-ce que brièvement cela, avant que ça ne soit définitivement perdu, ce serait tellement dommage d‘être venu sans n‘avoir rien vu de l‘intérieur.

Pendant une bonne minute, il se gratta le menton, désappointé, puis fini par dire:

-Bon, aujourd’hui je suis seul ici avec mon assistant; les autres ne reviendront que ce soir, nous pouvons y descendre pour un petit quart d’heure, ça ne fait de mal à personne…

Son visage retrouva des couleurs:

-…mais pas plus, il ne faut pas tenter le diable, qui, soi-disant, habite là-bas d‘ailleurs.

Tous eurent un sourire.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeVen 5 Juin - 16:33

Le temps se tord, se divise, se recompose et s’échelonne selon les veut de l’homme, mais au final, il ne fait qu’un.
Pr. Dr. Zagan Thusta, Equipe du projet « Condor ». Notes de laboratoire.


-- -- --

An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre


-Alors c’est ça votre machin fatal? Interrogea avec mépris le Général de la Rivera, en montrant du bout du doigt l’Île-Longue, entourée du voile de la brume noire de la nuit d’Acre.

Hel, appuyée avec nonchalance contre la vitre de leur véhicule, passa lentement a main gauche dans ses longs cheveux ondulés, tout en regardant par-dessus l’épaule du conducteur le centre de ces malheurs, qui n’avait en rien changé depuis onze ans. Elle n’avait rien perdu de son aura. Cette dernière était même renforcée par ce qu’elle savait.

-Exact, fut tout ce qu’elle dit, un léger sourire aux lèvres, comportement aussi mécanique qu’involontaire chez elle depuis qu’elle était dans les affaires.
-C’est là que mon frère est mort, murmura Falco Scaliger, le menton posé sur ses mains croisées.

De la Rivera fit une grimace, et, désignant quelque chose du doigt par terre, murmura:

-Me demande bien c’qu’il foutait là-bas.

En se penchant un peu, la jeune femme remarqua le même panneau que jadis, dont seules les couleurs rouges étaient un peu défraichie, mais dont le symbole de mort était toujours aussi fort:

« ZONE MILITAIRE - ACCES INTERDIT - LES FORCES PRESENTES TIRERONT SANS SOMMATION SUR LES CONTREVENANTS ».


Falco ne répondit rien, et se borna à faire craquer les articulations de sa main. LE génral lui jeta un coup d’oeil furtif, puis, s’empara d’un geste violent de la com., qu’il activa:

-Commandant Gustin, mettez tout à l’eau, en vitesse.
-D’accord, mon général, répondit une voix étrangement fluette.

Depuis leur véhicule blindé, ils purent suivre le manège des camions qui, s’approchant du bord, mettaient à l’eau d’étranges embarcations, qui flottaient doucement sur l’eau calme du lac. Il y en avait au total quatre. Lorsqu’un des hommes fit le signe « Okay » à l’intention de De la Rivera depuis la rampe descendant dans l’eau calme, le général grogna à l’intention de ses passagers:

-Allez, on descend.

L’instant d’après, Hel posait le pied dans l’herbe sèche des berges du lac Tisça, qui y glissa sans bruit, tout au plus un froissement. Une odeur humide un peu malsaine flottait dans l’air, couplée à celle, forte et caractéristique, du methanox des moteurs des camions et, manifestement, des embarcations. L‘air était frai la nuit, et il y avait des petits gouttes givrées sur les touffes; elle ne regrettait pas de s‘être habillée de vêtement isolant comme elle les portait dans les bas-fond de Tsarysyn où la température descendait souvent en dessous du point de congélation. Manifestement, Falco n’était pas aussi expérimenté; il se frotta les mains dès son premier pas à l’extérieur, et regarda tour à tour le général brailler ses ordres, puis Hel, adossée au lourd tout-terrain antigravitationnel que le chauffeur avait eut tant de mal à conserver en route.

-Cette histoire est Ant‘, y a onze ans…tu as tout emporté? Glissa furtivement le mafieux, couvrant ses paroles du bruit de ses mains qui toujours se frottaient vivement, s’étant rapproché de sa vieille connaissance.
-T’inquiète, j’ai tout. Pas question d’se faire piéger. On ne tombera plus dans le panneau.

Alors qu’elle portait machinalement sa main à son pendentif, De la Rivera, manifestement agacé par ces messes basses, se retourna, et dit — non, cria:

-Bon, allez, dépêchez-vous, on descend sur la berge!

C’était un ton qui n’admettait aucun « mais », et les lèvres du chef de clan des Scaliger se serrèrent un instant. Du coin de l’œil, il vit les sourcils de Hel se soulever légèrement, mais rien d’autre. Dans le froid piquant de l’hiver sur Acre, ils se dirigèrent vers l’endroit où étaient amarrées les petites embarcations, côte sableuse, pas très loin d’un endroit où aboutissait un ruisseau, probablement en provenance d’une de ces mines dans les hauteurs, plus loin, dont les motopompes fonctionnaient encore.
Leur voyage sur les eaux du lac allait s’effectuer à bord d’étranges plateaux flottants, au centre desquels se trouvaient toujours un cylindre intégré à la coque. Quelques soldats manient les commandes qui y étaient incorporées. L’un d’eux se leva à leur approche, et déclara :

-Mon général, je ne sais pas ce qui se passe, mais les contrôles de deux de nos flotteurs sont grillés. Pas moyen de réparer ou même de remplacer, sont définitivement morts.

De la Rivera jura, écrasant un bosquet de roseaux de sa botte, son visage se tordant en une légère grimace:

-Les autres fonctionnent sinon? Articula-t-il

Son interlocuteur hocha brièvement la tête:

-Oui, mon Général. Tout est en place à bord. Néanmoins, comme pour nos camions, ils sont bizarrement difficiles à manier cet an ci. Il faudra être prudent.

Nouvelle grimace. Sa botte se souleva, et retomba une dernière fois sur la plante martyre .

-Bon, on y va, dit-il simplement.

De la Rivera avait manifestement la manie de s’exprimer laconiquement, et n’avait prononcé un mot de trop depuis leur départ. Tout aussi silencieusement, il sauta à bord d’un des flotteurs, et invita d’un regard hostile Falco et Hel à le rejoindre, ce qu’ils firent prudemment, pas encore convaincu de la fiabilité de cette étrange embarcation. Néanmoins, après avoir sondé du pied, la jeune femme sauta à son tour, et s’installa presque immédiatement contre le bastingage, dans une position qui lui permettait d’embrasser l’île sans la vision parasitique des soldats s’activant de ce côté-ci du lac Tisça. Toujours aussi sombre et lointaine.
Elle sentit le flotteur vibrer lorsque Falco monta à bord, puis une nouvelle fois lorsqu’il s’installa à côté d’elle. Même si il n’était pas spécialement lourd, il adorait cultiver son corps et faisait de l’exercice comme une bête, de même qu’il avait une passion non refrénée pour la viande saignante. Enfin bon, heureusement, c’était de la vianda animale. Dans le cas de feu Syagrius Hunsa, ça n’était pas aussi doux. A sa grande époque, les disparitions inexpliquées avaient atteint une telle ampleur qu’il devait acheter sa nourriture sur d’autres planètes.
Sans qu’elle ne se rende compte, la petite expédition avait entre temps démarré. De la Rivera était debout au milieu du flotteur, risquant de tomber à la moindre seconde, à côté du pilote, qui semblait peiner à maintenir la barre dans la bonne direction. Contre toute attente, leurs embarcations étaient très rapides, bien plus que l’antique radeau utilisé lors de la traversée, il y a douze ans. Ce ne fut qu’une question de minutes avant d’arriver à la rive la plus proche de l’Île-Longue, où ils faillirent s’abimer sur les rochers. Suivant la carte holographique du Général, ils finirent par découvrir une petite crique si bien dissimulée qu‘il eut été impossible de la trouver sans à moins de procéder à de longues recherches, où un rocher plat leur servi de quai.

-C’est parti, murmura Hel entre ses dents en posa pied à terre.
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MessageSujet: Re: Réminiscences (Union IV)   Réminiscences (Union IV) - Page 3 Icon_minitimeVen 5 Juin - 16:34

La puissance de l’état, la volonté des dirigeants et les nécessités de la conjonctures s’articulent autour de l’application de la Doctrine.
Amiral Liung Wu Xun; Entretients.


[center]-- -- --

An 3873, E.d.U (Eon de l’Union).
Badlands d’Acre
Île-Longue[/cente]


Zhao fit une moue, et chuchota doucement:

-T’avait raison, y a quelque chose qui ne tourne pas rond du tout ici.

Maxam cessa de bricoler leur projecteur défectueux et releva la tête par-dessus le petit talus qui leur servait de cache. Soudain, ses mains s’arrêtèrent de tripoter les contrôles énergétiques de la machin.

-Et merde, ils envoient la cavalerie, commenta-t-il.

De leur position, au sommet de la crête de l’île, ils pouvaient voir le petit quai rocheux en contrebas. Deux étranges embarcation s’étaient immobilisée, et déversaient un flot d’une vingtaine de soldats au moins, avec équipement.

-J’pensais pas qu’ils enverraient autant de monde. Ce machin, c’est un gros poisson apparemment.

Mécaniquement, sa tête redescendit vers le projecteur. C’était un appareil simplissime, acheté dans une boutique spécialisée Rontars, à l’extrême est du désert, d’où ils étaient parti la veille. Un mécanisme de première génération: une pile à énergie, reliée par un circuit plasmique jusqu’au tube ionique, qui éclairait avec quelques miroirs pour renforcer la puissance, le tout sur un support en plastique, et un bouton. Mais Maxam avait toutes les peines du monde à se servir correctement de ses doigts pour activer ça. La pile glissait toujours entre les quatre foyers polaires, la minuscule conduite de plasma ne voulait pas entrer dans sa gaine, et le tube ionique se mettre en place dans l’encoche prévue à cet effet.. Il avait fonctionné pendant cinq minutes, puis s’était brutalement éteint. Chaque tentative du programmateur pour le réparer s’était soldée par de nouveaux dégâts. C’était vraiment une cruelle ironie; il était capable, avec un ordinateur et une machine de précision, de construire les nano-dispositifs les plus sophistiqués, et également de créer des algorithmes de gestion réseau comme on ne les avait jamais pensé auparavant, mais restait impuissant à mains nues devant une simple torche à trois crédits trente-cinq. Ses doigts étaient probablement trop épais pour agir correctement. Il n’avait jamais eut de véritable synchronisation moteur, contrairement à Kalamata…où Zhao.
La main de ce dernier s’immisça dans son casse-tête, et à la lumière de l’autre torche, ils se glissèrent entre les foyers, et les rétablirent d’un coup sec, avant de se tordre pour maintenir la conduite, et finalement faire rentrer le tube dans l’encoche, sous le regard écœuré de Maxam.

-Je te hais, grinça-t-il, relevant la tête vers le visage souriant de son compagnon, qui avait déjà retiré sa main.

Zhao était plus maigre et menu, mais capable de meilleures performances sportives: il l’avait montré tout à l’heure, lorsque leur canot s’était retourné, et qu’ils avaient fini le chemin à la nage. Heureusement que leur matériel se trouvait dans un sac qui était miraculeusement resté étanche.

La rive atteinte, ils avaient juste eut le loisir d’assister à un magnifique feu d’artifice: attaque au missile incendiaire et au gaz de combat, d’après les relents de pierre brûlée et de produits chimiques qui leur étaient parvenu, donnant presque la nausée. Le sifflement des impulsoplans s’était ensuite atténué, signe qu’ils s’étaient manifestement posés quelque part sur la crête. La montée avait été dure, mais finalement, tout donnait à croire que le pire était derrière eux: un fonctionnaire de la Sûreté avait examiné longuement leur pass, pour les inviter à un interrogatoire plus poussé avec son collègue, avant de finalement les relâcher et les laisser entrer dans les Badlands, où le véhicule de location était tombé en panne. Les huit dernières kilomètres à pied avaient étés ressentis comme une souffrance terrible, d’autant plus que le canot, certes monté sur sustentateurs, était à tirer.

-Arrête la lumière, je crois qu’ils vont prendre le même chemin que nous! S’écria-t-il en voyant le petit groupe de soldats en contrebas attaquer avec détermination la côte.

Zhao hocha la tête, et se releva promptement, sans pour autant se redresser complètement:

-Viens, on descend dans le cratère. C’est là que sont partis les types de tout à l’heure.

Maxam acquiesça, ramassa leur sac, et emboita la pas à son ami, hors du sentier, pour autant qu’on puisse appeler comme ça l’espace plus ou moins désherbé et duquel on avait écarté les plus grosses pierre.
Zhao avait fait partie des premiers, avec Kal’, à croire en son projet. Il venait d’entrer à l’université Jag’ de Christiansa, avec trois ans d’avance, à l’époque. Originaire d’une obscure planète non loin d’Assedo — Zanton, ou quelque chose comme ça—, il avait grimpé les échelons de la scolarité à une vitesse exceptionnelle, grâce à une extraordinaire aptitude à digérer les données, et les restituer. Kal’ lui a raconté qu’il avait une fois, sur un simple défi, restituer bon nombre de décimales de phi d’une seule traite, mais il ne l’avait jamais confirmé. A trois, ils avaient monté leur truc, sous le patronage bienveillant de Dimitiev, professeur d’archéologie raté qui s’était rabattu sur les ordinateurs et la logique, afin de pouvoir rester toute l’année dans un bureau, tranquillement. Leur premier projet avait été un synthétiseur informatique Tessak. La langue, la culture, les croyances, tout avait été informatisé. En quelque sorte la répétition générale de la future Station 2071, dont le succès avait été inespéré. Leur études étaient maintenant terminées, mais ils restaient liés par contrat à la Jag’, qui profitait de la publicité notable obtenue grâce à la réussite exceptionnelle de la Station de Maxam. Ce dernier était même passé une fois sur le Réseau Holo officiel, interviewé par un célèbre journaliste, et avait reçu les félicitations du Secrétaire d’état à l‘emploi et aux entreprises. Sous la forme de son moi virtuel, bien entendu. Mine de rien, son apparence réelle le complexait en quelques sortes.

-Dépèche! S’exclama Zhao, sautant vivement par-dessus un roc.

Maxam pressa le pas. En fait, Zhao était un relais de qualité quelconque, et ne serait probablement jamais aussi efficace de Kal, qui effectuait à ses pointes de vitesse autant d’opérations qu’un ordinateur, mais c’était sa capacité de mise en équation, et d’imagination qui le rendait si précieux.
Lentement, le programmateur se sentait de nouveau rodé, et rattrapait son ami. La brume, vaguement présente au sommet, devenait toujours plus opaque au fur à mesure que l’on descendait. L’unique lumière qu’ils avaient laissé en marche, une petite torche que Zhao tenait, ne suffisait presque pas, mais ils avaient tout deux peur qu’on les découvre. Si Maxam avait toujours échappé aux ennuis et à la capture sur le réseau, c’était pas pour finir entre les mains des militaires ici.
Des cris. Quelqu’un appelait derrière, indubitablement. Des bruits s’adjoignaient aux leurs. Une autre cavalcade sur la pierre. Et puis, soudain, un éclair, et une déflagration.

-Abandonnez toutes armes et rendez-vous. Cette zone est sous juridiction spéciale. Il n’y aura pas de sommations supplémentaires, rendez-vous immédiatement! Tonna une voix amplifiée par électronique derrière eux.

A peine Maxam avait juré que déjà une nouvelle rafale de charges à impulsion s’écrasa, très près d’eux, désintégrant un roc d’une taille qui ne laissait guère de doute sur ce qui arriverait si ne serait-ce qu’un seul tir les touchait.
Poussé par Zhao, il se gara sur la gauche, derrière un autre rocher, alors qu’une explosion retentissait, de nouveau très près. En catastrophe, ils se relevèrent, et coururent vers le fond. Cette fois, ce fut une combination de salves à impulsion et laser qui désintégrèrent la parois à quelques mètres d’eux.
D’un bond désespéré, ils sautèrent dans une crevasse. Par chance, elle n’était pas très profonde et son sol tapissé de sable. Il entrevirent quelques boules d’énergies blafardes passer à vitesse supersonique au dessus d’eux, et exploser plus loin.

-Je crois que…tenta Zhao, immédiatement coupé par une autre salve.

Il n’avait pas fini de rouvrir sa bouche que de nouveaux cris retentirent, et les bruit d’un troupe courant dans leur direction. Des bottes sur le sol, et des hurlement, les officiers tentant de se faire comprendre auprès de leurs soldats manifestement déchaînés, tirant à tord et à travers.
En une détente, ils furent de nouveaux débout, et entrevirent un chemin, sur la droite, dans la continuité de leur cache. Zhao s’élança, suivi de son ami…dont le pied heurta une pierre dissimulée par la couche sablonneuse. Il trébucha, pendant que l’autre continuait, sans se rendre compte, disparaissant bientôt avec l’unique source de lumière.

-Ici, j’ai un contact à vingt-cinq mètres! S’exclama une voix rauque derrière, précisément à cette distance.
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