Dayto-Devoir N°1 + N°1prime[Irrumo]

En ce vingt huit Mars dernier,
Mon maître me tint à peu près ce langage :
« Pour ton premier devoir, je veux que tu t’exerces à la structure fermée du sonnet. Bon : tu feras une allégorie de la peur. »

Citation :

surtout attention : dans une allégorie il n'y a pas nécessairement personnification, et ce n'est pas ça qui la définit

Citation :

réfléchis bien à la peur, à la manière dont elle se crée, se manifeste, etc. et je crois que le plus facile sera de lui donner une forme plus ou moins humaine.

(délai à respecter : aucun)

"C’est tout d’abord une eau, que l’un boit par mégarde
Et qui remplit son corps sans plus se prononcer.
Puis l’eau se fait taulier, se met à chuchoter
Sans prendre l’air de dire, et lève ainsi sa garde.

Forte de son écoute, innocente renarde,
Elle installe sa place et commence à prêcher.
Une fois converti, elle aime à l’obséder
Jusqu’à le rendre soûl de son idée bâtarde.

Et l’Ivresse, infamie, le fait coupable alors
De tristes sentiments qu’il répand au dehors ;
Rancœur, haine et folie sont convives de l’eau.

Mais l’hôte est déjà loin de cette âme avariée :
Et traquant le défaut d’autres proies contrariées,
La Peur le long des rues glisse comme un ruisseau."

Dayto a écrit:

En ce vingt huit Mars dernier,
Mon maître me tint à peu près ce langage :
« Pour ton premier devoir, je veux que tu t’exerces à la structure fermée du sonnet. Bon : tu feras une allégorie de la peur. »

Citation :

surtout attention : dans une allégorie il n'y a pas nécessairement personnification, et ce n'est pas ça qui la définit

Citation :

réfléchis bien à la peur, à la manière dont elle se crée, se manifeste, etc. et je crois que le plus facile sera de lui donner une forme plus ou moins humaine.

(délai à respecter : aucun)

"C’est tout d’abord une eau, que l’un boit par mégarde
Et qui remplit son corps sans plus se prononcer.
Puis l’eau se fait taulier, se met à chuchoter
Sans prendre l’air de dire, et lève ainsi sa garde.

Forte de son écoute, innocente renarde,
Elle installe sa place et commence à prêcher.
Une fois converti, elle aime à l’obséder
Jusqu’à le rendre soûl de son idée bâtarde.

Et l’Ivresse, infamie, le fait coupable alors
De tristes sentiments qu’il répand au dehors ;
Rancœur, haine et folie sont convives de l’eau.

Mais l’hôte est déjà loin de cette âme avariée :
Et traquant le défaut d’autres proies contrariées,
La Peur le long des rues glisse comme un ruisseau."

Alors je trouve que l'image de l'eau n'est pas assez suivie. L'eau ne prêche pas par exemple (métaphore humaine), elle ne cherche pas non plus des proies (métaphore animale). Il aurait fallu faire un tableau plus cohérent à partir de cette image, qui en vaut une autre, et qui peut se développer de mille manières. Si les métaphores isolément ne sont pas mauvaises, mises ensemble elles ne sont pas suffisamment cohérentes pour former une allégorie.
Ensuite les effets de l'âme sont apparamment sur le corps, un peu sur l'âme: eux aussi auraient pu être allégorisés, mais d'une manière cohérente avec celle du cours d'eau (par exemple en imaginant un terrain dans lequel l'eau s'infiltre, sur lequel elle déborde, ou bien je ne sais pas un objet particulier...). J'ai beaucoup de mal enfin, à imaginer comment l'ivresse peut naitre de tant d'eau.
C'est toute la cohérence qui est manquée d'une certaine manière. Si la peur prend effet sur quelquechose, le quelquechose doit aussi avoir son correspondant imagé.

Pour ce qui est de la forme, le sonnet est bien respecté, je regrette néanmoins la rime pauvre "ruisseau" "l'eau". Certains mots arrivent sans qu'on sache trop pourquoi : "bâtarde".
La deuxième strophe est à revoir, la syntaxe est franchement bizarre.
Les vers sont dans l'ensemble bien cadencés
"De tristes sentiments qu’il répand au dehors",
Enfin, les effets sonores du dernier vers sont intéressants.

(Sinon il y a une vilaine faute d'accord)

EXERCICE N°1-prime(consigne dans le spoiler)

Spoiler:

"
J’ai parcouru les monts et les mille merveilles
De plus de cent pays ; j’ai emprunté les cieux,
J’ai traversé les mers, et suis devenu vieux :
Nulle part j’ai trouvé de flemmarde pareille !

Ni son aimable train, ni ses lèvres vermeilles,
Ne lui comptaient autant que le bleu de ses yeux
Dont elle usait –quand même ! – à tout va, en tous lieux,
Faisant courber les sots amants comme des vieilles.

C’est après vous, pantins, que j’enrage surtout,
Vous, Ô dieux insolents, qui vous mêlez de tout :
Votre pâle équité m’aura causé des torts !

Car au lieu de m’offrir la mécène bravoure
Qui l’aurait mise à terre, accablée de remords,
Vous la laissiez siffler pour qu’aussitôt j’accoure !
"

Il est singulier qu'une grosse glandeuse devienne une femme fatale par sa séduction, une sorte de réincarnation d'Omphale qui asservit l'homme. (Au passage Dayto, ton prochain sonnet aura un thème mythologique, Omphale, et l'ensemble devra être écrit avec une certaine gravité dépourvue d'ironie).
Dans ce poème la flemmardise du personnage n'est plus qu'une petite incidente, un détail assez inutile, et il est dommage que les yeux bleus du personnage fassent oublier son gras.
Les contraintes formelles par contre sont bien respectées, c'est bien un sonnet, avec des vers très corrects. Je ne suis pas sûr que "mécène" convienne comme adjectif.
Enfin la chute n'est pas particulièremement intéressante, même si tu peux faire bien pire, on le sait.
Il me semble qu'en accentuant la laideur et l'ignominie du personnage au contraire, il y avait une chute à faire sur la multitude des amants par exemple.
Il y a bien une cadence mineure, mais celle ci n'est pas assez extrème: l'effet couperet est manqué.


Enfin la rime tout/ surtout n'est pas acceptable, de même parcourir/ courir, pris/surpris, fidèle/infidèle etc.