Egorann devoir numéro 1 pour TrOn

Nombre de messages : 2050 Age : 27 Date d'inscription : 07/02/2008

Sujet:

Citation :: Décris-toi

J’ai dix ans, dix grains de maïs ou dix sucres d’orges sur une table. Je m’appelle Bérénice, mais je ne suis pas Reine de Palestine et mon amoureux ne se nomme pas Titus. D’ailleurs, il n’est pas dis que la reine a un nom, et moi, je le dis tout haut, mon nom est connu : Marciset.

J’ai de longs cheveux châtain foncés, qui deviennent clairs en été, en mouvement en permanence, tel un océan de sable. J’ai un visage entre le rond et le normal, un visage, simplement. J’ai un front haut, droit, parsemé de très légères rides. Mes yeux sont d’un marron tellement foncé que parfois on les dirait noir. Mon nez, droit, est légèrement retroussé, je ne peux pas m’en plaindre. J’ai de hautes pommettes, qui varient de couleur selon mon humeur. Mes lèvres se détachent sur une peau légèrement bronzée que j’ai depuis la naissance. Mes dents sont bien alignées, en ce moment c’est la période ou je les perds, elles tombent comme les notes d’un piano.

J’ai de longs bras fins, au bout desquels se trouve une paire de mains, couronnées de cinq doigts. Ils ont, eux-mêmes des ongles rarement taillés, qui mes servent d’arme. J’ai un buste droit, des hanches étroites et de longues jambes fines. Tout cela est recouvert d’une peau mate, qui devient dorée quand je bronze.

J'ai fait exprès de mettre beaucoup de figures de style, pour te montrer que je sait en faire!!

Citation :: J’ai dix ans, dix grains de maïs ou dix sucres d’orges sur une table. Je m’appelle Bérénice, mais je ne suis pas Reine de Palestine et mon amoureux ne se nomme pas Titus. D’ailleurs, il n’est pas dis que la reine a un nom, et moi, je le dis tout haut, mon nom est connu : Marciset.

Faute d'orthographe à "dix sucres d'orge". L'orge n'est pas une quantité dénombrable et donc pas de pluralité. Après la préposition de, comme en ou sans d'ailleurs, si le mot qui suit n'est pas "comptable" (l'orge ici par exemple) alors il n'y a aucun accord à faire. Je ne m'apesantirais pas plus que ça sur l'orthographe. Tu peux trouver facilement par toi même les autres..

"Dix ans. Dix grains de maïs. Dix sucres d'orge." n'est-ce pas une structure plus adaptée ? Je m'explique. On est dans la répétition du mot "dix". Pas une énumération ni une conglobation. C'est une figure de style d'insistance. L'effet que tu recherches est donc de marquer les miettes qui composent dix années de trois manières différentes. La première, simple, "dix ans". La seconde en comparant à des petites graines minuscules qui sont bien peu de chose je te l'accorde, et la troisième à des larmettes de sucres d'orge que les écoliers adoraient. Excellente idée, mais tu n'utilises pas tout le potentiel de la répétition qui se doit d'être marquante à cause de la concentration sur la comparaison que tu veux faire. Certe ce n'est pas évident de trouver l'expression la plus adéquate et ça reste subjectif. Mais, le processus de complexification naturel de la figure de style se doit d'être souvent repris pour acquérir la justesse dans le verbe. Dans cette phrase là, le problème c'est son apparente simplicité de mots pour une structure compliquée. Trois éléments forment ta répétition et ta comparaison. Tu enrobes autour, avec un peu trop de coulis à mon goût et un complément inutile de "sur une table" qui ne participe ni à la comparaison ni à la répétition.

Citation :: "Je m'appelle Bérénice".

Soit. Ca me va. "mais". Aïe ça m'écorche les oreilles, pourquoi rajouter un élément coordinatif avec ce qui suit ? Répétitition. Présentation. Point. Le rappel culturel devrait être séparé pour une meilleure structuration. "Je m'appelle Bérénice. Je ne suis pas Reine de Palestine et mon amoureux ne se nomme pas Titus". C'est joliement dit. Mais, tu tiens là une idée pour développer des images sur ton prénom. Tiens tu pourrais même te mettre à utiliser du latin et cette célèbre expression de Racine "Invitus Invitam", malgré lui, malgré elle. Ne sens tu pas un potentiel qui peut naître de la référence culturelle et la comparer à ta propre vie ? Tu pourrais révéler une partie de ton caractère par le biais de cette phrase plutôt que de finir par une élévation du ton et de la fierté avec un "moi j'ai un nom, et je le dis tout haut". C'est un choix de reprise de vers de Racine intéressant, mais dont la tournure est malhabile.

Citation :: J’ai de longs cheveux châtain foncés, qui deviennent clairs en été, en mouvement en permanence, tel un océan de sable.

"en mouvement en permanence". Répétition peu oppurtune du "en". Tu pourrais retravailler cette phrase et cette métaphore au niveau de l'expression. Deux compléments que tu mets en apposition, c'est lourd dans le style, et ça ne favorise pas le "naturel" de l'océan de sable ainsi que les images de l'été. C'est "forcé". La constipation passagère c'est pas mon truc. En général il est plus agréable de "noyer" la métaphore et de ne pas la mettre en fin de phrase après deux compléments déjà lourds. L'énumération d'un tout que sont tes cheveux n'est pas une technique anodine. Pour la maîtriser il faut trouver les mots justes, trancher dans le vif.

J'ai de longs cheveux châtains foncés
- qui deviennent clairs en été : "devenir clairs" c'est moyen. Ils s'éclaircissent par exemple. Essaie d'éviter les verbes de changement d'état qui sont très, voire trop courant. Il existe souvent un terme de vocabulaire plus proche qui exprime l'état de manière plus précise. Devenir clair, c'est vague, ça m'accroche pas.
- en mouvement en permanence
- tel un océan de sable

Tant qu'on y est tu peux rajouter encore et encore des détails, mais tu ne fais qu'alourdir si tu les mets dans la même structure. Coupe tes phrases dans la description, va droit au but et la métaphore ne doit jamais être poussive. Tu pourrais par exemple accès ta description des cheveux de la manière suivante.

- Présentation simple : "J'ai de longs cheveux châtains."
- Seconde phrase qui marque le changement d'état :"Ils s'éclaircissent en été".
- Troisième phrase : "Ils sont toujours en mouvement"
- Attirer l'oeil du lecteur : introduction de la métaphore
- Métaphore
- Reprise de la description des cheveux.

6 phrases au minimum. Epaissis l'aspect descriptif, la figure de style n'est pas un hochet qu'on brandit et qui rend joli un texte. C'est son incorporation dans la structure qui la rend "belle". En poésie par exemple, les syllabes et rythmiques ont des positions précises pour rendre les vers "jolis". Là l'idée est très bonne, la structure moyenne, et le positionnement interne très mauvais.

Citation :: J’ai un visage entre le rond et le normal, un visage, simplement. J’ai un front haut, droit, parsemé de très légères rides. Mes yeux sont d’un marron tellement foncé que parfois on les dirait noir. Mon nez, droit, est légèrement retroussé, je ne peux pas m’en plaindre. J’ai de hautes pommettes, qui varient de couleur selon mon humeur. Mes lèvres se détachent sur une peau légèrement bronzée que j’ai depuis la naissance. Mes dents sont bien alignées, en ce moment c’est la période ou je les perds, elles tombent comme les notes d’un piano.

Citation :: "entre le rond et le normal, un visage, simplement"

Critique déguisait ? Autant la définir plutôt que de la cacher. Entre le rond et le normal... Ca n'a pas un nom particulier ? Un adjectif ? Et là j'y reviendrais tout à l'heure du fait que ta description devient banale. "Simplement" oui. Ca pourrait être bien. C'est pas si mal que ça. C'est le début qui ne va pas, qui ne sonne pas bien. Difficile de trouver les mots pour qualifier son propre visage. Le choix est d'ailleurs capital et c'est peu de le dire. Tu choisis la description pure et dure sans originalité (on pourrait imaginer bien d'autres façons de se décrire soi au travers de paysages par exemple etc). Alors un visage entre le rond et le normal ? C'est quoi ? Enfantin ? Quant au mot normal... La normalité n'existe pas, chaque visage est unique. La normalité par rapport à ta vision d'un visage pas par rapport à la mienne. Comment puis je deviné de la forme réelle de ce visage ?

"légèrement", "simplement", "tellement". Des mots qu'on croise trop souvent. Etoffe. Etaye. Ce sont des adverbes qu'il faut utiliser avec parcimonie. Négligemment, délicatement, assurément, indubitalement sont déjà plus rares et rendraient ton écrit plus "original".

"que j'ai depuis ma naissance". Même remarque globale. C'est fade. Depuis ma plus tendre enfance. Berceau, aurore, etc. sont des mots que tu pourrais utiliser pour éviter la simplicité, et pour la féérie que tu recherches tant.

Citation :: "J’ai de longs bras fins, au bout desquels se trouve une paire de mains, couronnées de cinq doigts."

Style expansif comme dans tout le texte. C'est un souci classique dans la construction d'une description. A vouloir trop bien faire, on s'égare. C'est plutôt bien, mais très classique.

Citation :: Ils ont, eux-mêmes des ongles rarement taillés, qui mes servent d’arme."

Ah. Voilà LA faute typique du néophyte. Il en rajoute. "eux mêmes". Hum. Si tu en viens à croire que ce mot est nécessaire c'est que tu ressens qu'il est nécessaire de bien "appuyer" sur ce fait là. Donc c'est qu'inconsciemment tu sais que tu t'es égaré sur la phrase précédente.

Pour corriger ça, c'est, on ne peut plus simple, relis et élague. Comme les arbres en hiver, il faut bien tout couper pour faire repousser ensuite. Retourne à la base, vierge et posée. Ensuite greffe par dessus, mais ne t'étends pas comme une maman étend le linge sur son séchoir. Si tu n'as pas appris à le faire tu auras trop de linge sur le fil, et plus assez dans le bac. C'est une histoire d'équilibre. Si tu veux ajouter de la beauté à tes mots, il faut partir d'une phrase simple et structurer pour en arriver à trouver la position idéale des idées, et la métaphase du verbe. En somme, une phrase se travaille. Là ça ne va pas. Tu as mis trop de linge sur ta corde précédente et tu n'as plus rien à dire sur ta seconde corde.

Ne restructure pas. Là ici c'est l'agencement entre les parties qui ne va pas.

- Du bras vers l'ongle : c'est bien.
- Description du bras : "longs et fins" ça me va.
- Incorporation de la main dans le bras : ok c'est fait.
- Incorporation des doigts dans la main : c'est pas mal.
<< souci à ce niveau là, la coordination n'est pas faite, tu utilises une banalité genre eux mêmes >> => A retravailler.
- Descriptif des ongles : tu peux y aller gaiement avec des mots comme écorcher ou pourquoi pas même, estamper les visages de rivales ! Rentre dans le détail non pas que physique. Tu peux t'en servir pour donner et révéler petit à petit des indices véritables sur ta personnalité.

Citation :: J’ai un buste droit, des hanches étroites et de longues jambes fines. Tout cela est recouvert d’une peau mate, qui devient dorée quand je bronze.

Répétition du mot fine. C'est bien ce que je te reproche. Du vocabulaire. "tout cela" c'est encore de la banalité, ça casse la magie qui pourrait naître des métaphores.

Conclusion :

7/20

C'est plutôt bien écrit et on voit un effort pour incorporer des figures de style en effet. Mais attention tu le fais au détriment de la structure. Le sujet "Décris toi" est justement un petit piège. Un visage, un corps, une âme sont une structure corporelle, physique, qui nécessite deux axes de développement au choix. Soit tu pars dans l'élaboration d'une description imaginative et original en faisant l'analogie avec un paysage par exemple, soit tu pars dans la description corporelle pure et dure. Il devient alors très dangereux de réussir à mettre des "images" et des "comparaisons". Globalement y a de l'idée, mais leur positionnement (la poésie apprend par exemple des règles de structures pour rendre un texte plus équilibré) n'est pas bon. Il pourrait être bien meilleur. Le vocabulaire est trop "basique" et il va falloir effectuer un travail sur le mot pour éviter que ça bloque ou que ça tombe dans le vulgaris. Trouver des mots qui correspondent est le travail de l'écrivain, toujours en constante recherche du ton juste, du mot juste. Ca s'apprend en travaillant durement sur le vocabulaire.

Je vais donc te demander de retravailler ce texte selon deux axes.

1. Je veux plus de vocabulaire. Tu as le droit d'utiliser un dictionnaire des synonymes (tu en as sur internet, demande si tu n'en connais pas). Dans l'aspect descriptif je veux que tu trouves les mots "justes" et que tu évites toute banalité (comme j'en ai souligné quelques unes).

2. Je veux que tu réfléchisses au positionnement des mots dans tes phrases. Essaie d'inverser, de ponctuer, de couper un peu plus, ne t'épanche pas sur de la longueur qui te fait au bout de quelques mots perdre le fil. Coupe. La métaphore que tu veux employer, met là dans une autre phrase en évitant les "tels" ou "comme". Essaie de penser à la jointure entre toutes les idées que tu développes pour plus de fluidité.

Tu réfléchiras ensuite sur cette phrase de Borges

"Un homme se propose la tâche de dessiner le monde. A mesure que les années passent, il peuple un espace d’images de provinces, de royaumes, de montagnes, de baies, de navires, d’îles, de poissons, de chambres, d’instruments, d’astres, de chevaux et de personnes. Un peu avant de mourir, il découvre que ce patient labyrinthe de lignes trace l’image de son propre visage."

Et tu me donneras des idées abstraites de paysages, d'animaux, de musiques qui pourraient te correspondre. Une fois que tu en auras trouvé quelques unes, nous verrons comment il est possible de les incorporer dans des comparaisons et des métaphores dans ce texte que tu as écrit et qui nous servira de base.

» Alwenn [TrOn] devoir numero trois