Rendu final

Kïn venait de trouver un journal fraichement jeté et le lisait tranquillement assis sur un banc du parc. Ses jambes ne touchaient pas le sol et se balançaient en un mouvement enfantin que démentaient les rides autour de ses yeux.
Kïn n’était pas vraiment gâté par la nature d’un point de vue physique. D’une part, c’était un nain. Non pas de la race noble des nains, mais simplement un humain raté. Evidemment, avec un peu d’efforts, il pourrait peut être se faire passer pour l’un de ses fiers à bras barbus. Mais ce n’était pas son genre.
Le second point où la nature avait bâclé son travail était ses yeux. Non contente de l’affubler d’une taille affligeante et qui en faisait une curiosité, Mère Nature avait trouvé drôle de lui donner deux yeux d’une couleur différente, le gauche étant vert émeraude et le droit d’un bleu froid, que ne cachaient pas ses courts cheveux bruns, grisonnant maintenant. Et cela, bien plus que sa petitesse, créait le malaise avec ses interlocuteurs. Non seulement ils devaient baisser la tête pour lui parler mais leur regard passait d’un œil à l’autre sans arrêt en se demandant s’ils devaient en fixer un en particulier ou bien si cela ferait mauvais genre.

Kïn haussa un sourcil en lisant un article du Canard. Un nouveau nom y apparaissait. Il le nota dans un coin de sa tête en se disant qu’il faudrait qu’il fasse quelques recherches sur lui. Souvent rejeté, Kîn avait développé 2 grands traits : une curiosité sans fond envers les gens, aimant fouiller dans les moindres recoins de leur vie pour en extraire tous les secrets, et une méticulosité dans ses recherches qui lui avaient valu de se faire remarquer dans certains cercles. S’il n’avait encore eu de demande concernant ce nouveau nom, il savait que cela viendrait et son propre intérêt était éveillé par ce court article.

Repliant soigneusement le journal, il le mit sous son bras et sortit tranquillement du parc, faisant déjà d’innombrables suppositions sur cet inconnu. Sa démarche dandinante, renforcée par son costume sombre, lui attira les regards des passants, qu’il ignora par la force de l’habitude, mémorisant toutefois les visages de chacun d’entre eux. La prudence était de mise.

Confortablement installé au pied d'un arbre, le jeune homme regardait les cieux d'un oeil rêveur. Les étoiles du ciel nocturne dansaient devant ses yeux, comme autant de petites lucioles lui murmurant des songes à l'oreille. La brise lui caressait agréablement le visage alors qu'il ruminait de sombres pensées. Lui, Khrominsia, fée de son état, n'était pas ce qu'on pouvait appeler l'archétype même de la fée de troisième classe, comme il était censé l'être. Plus petit que ses congénères, un peu plus large d'épaules, son visage reflétait une profonde joie de vivre, propre à sa race. Ses fines ailes irisées d'indigo pulsaient dans son dos au rythme de sa respiration.

Khrominsia avait la fâcheuse tendance à se laisser porter par ses pensées à n'importe quel moment, provoquant de légères absences. Absences qui pouvaient parfois durer jusqu'à 30 secondes complètes ce qui, dans certaines situations, pouvait s'avérer handicapant. C'est pendant l'une de ses absences qu'il se retrouva avec un morceau de journal collé contre son visage, emporté par une bourrasque plus violente que les autres. Sans même y prendre garde, il le jeta sur le côté et se leva. Après tout, la nuit était belle, non ? Il pouvait bien en profiter. Il était comme cela, de nature bohème, toujours à vouloir bouger ou se poser, au gré de ses envies. Et là, ce qu'il avait envie, c'était d'aller dans un endroit animé.

Ni une, ni deux, il se leva, fit quelques pas avant de trébucher sur une racine de l'arbre contre lequel il était appuyé. En son fort intérieur, Khrominsia pesta contre sa maladresse. On avait souvent plaisanté sur son propos, à cause de son physique, ingrat pour une fée, mais parfaitement respectable, voire plutôt pas mal, pour un humain normal. Cela se doublait d'une certaine critique sur sa maladresse et sa naïveté, dont l'ensemble pouvait bien devenir légendaire.

Mais pour l'instant, Khrominsia n'avait qu'une envie : profiter de la nuit, suivre cette gaîté qui l'habitait par instant, ces moments où il ne tenait plus en place, où il n'avait qu'une envie, celle de sauter partout. Peut-être la nuit allait-elle se montrer bondissante à son égard...

Couleur de dialogue : #66CC99

Invité

Ysé respirait de plus en plus vite, son souffle saccadé l'empêchait de se concentrer correctement sur sa mission. Ses mains tremblaient faisant faire à son journal une drôle de danse. Elle essayait, en vain, de ne se focaliser que sur la voix de cet homme mais la tâche était rude, tant de personnes gravitant autour d'eux.

Ysé était une de ces filles banales, sans atouts physiques particuliers, mais dégageait cependant un certain charme. Elle détestait son visage qu'elle cachait sous une épaisse chevelure rousse, qui tombait en cascade jusqu'au creux de ses reins. Si le Créateur ne l'avait pas choyée physiquement, il en était tout autrement de son caractère. Ysé avait reçu un don. Elle avait été un humain parmi des milliards à être élue.
En effet cette jeune femme été douée d'une empathie phénoménale, en termes clairs elle entendait ce qui se passait dans la tête des gens à proximité. Cela avait été amusant, lorsqu'au collège elle écoutait le raisonnement mathématiques des meilleurs élèves, mais ce don était rapidement devenu une contrainte, une gêne, un calvaire. Ysé n'appuyait pas sur un quelconque bouton pour mettre en fonction ses capacités comme on allumerait une radio, non. Ysé recevait systématiquement les pensées d'autrui qu'elle le veuille ou non. Entendre des centaines de voix murmurant à l'unisson au rythme de leurs penseurs lui donnait l'impression de violer toutes ces âmes et rapidement elle se mettait à faire des crises d'angoisse. Elle avait bien essayé de consulter un psychiatre afin de l'aider à mieux apprivoiser ce cadeau empoisonné de la nature mais bien évidemment ce fut un échec. Elle s'efforçait de vaincre sa peur de la foule, comme par exemple elle le faisait aujourd'hui. Tout en entendant l'homme vivre, elle essaya progressivement de se calmer et de retrouver une respiration moins hâchée.

*Tour de Garde 15h dans deux jours. Clac.*

Elle savait ce qu'elle voulait. Ysé se leva, jeta son journal dans une poubelle du parc et partit en direction de la sortie. Demain elle pourrait rendre son rapport.

Depuis la fenêtre, l’elfe regardait la rue, plaisante et ombragée, qui bordait l’hôtel particulier dans lequel il se trouvait. Un long soupir lui échappa : lui, Sinderion Ap Cuchulaìnn, héritier d’une des dignes maisons nobles de la ville, se devait de s’intéresser d’abord à la bonne marche des affaires avant de seulement penser à ses loisirs. Un lourd livre de comptes était posé non loin sur un pupitre : il détaillait avec une précision écœurante les relations commerciales entre la famille et ses partenaires commerciaux étrangers. Sinderion s’en approcha et passa le doigt sur la couverture avec dégoût, le retirant couvert d’une épaisse poussière. Son père lui avait assuré que cette lecture était primordiale pour les négociations prévues dans les prochains jours, mais lui ne voyait qu’une chose : la torture psychologique qui lui était infligée jour après jour dans le but officiel de le former à tenir son rang. En vérité, une seule chose trouvait grâce à ses yeux dans cette formation : l’escrime qu’il pratiquait journellement pour se maintenir en forme. Il oubliait alors tout et s’abandonnait entièrement à l’extase de la lame. Les duels avec de jeunes nobles rivaux étaient loin de lui être étrangers, ainsi que, par extension, les bureaux du guet lorsque quelque chose tournait mal. Tout simplement, il aimait faire couler le sang.

L’air était bon dehors. Il pouvait sentir les rayons du soleil jouer gaiement sur sa chevelure noire, promesse d’une journée relaxante à se promener dans la ville et, peut-être, d’un duel au moment où le soleil devient sang. Soupirant une deuxième fois, Sinderion essaya de s’intéresser aux colonnes de chiffres qui représentaient des marchandises en tous genres, de l’huile d’olive au prisonnier de guerre. Après quelques très courts instants, l’écriture se brouilla et se déforma, changea pour laisser la place au visage de son tendre ami du moment, un humain des bas quartiers.

Ses traits altiers se fendirent d’un sourire et son regard devint vague, l’espace d’un instant. Ses yeux uniformément verts à l’exception de la pupille s’arrêtèrent sur la fenêtre, avant de revenir au livre. Il finit par s’écarter du pupitre, et empoigna un couvre chef et son épée préférée qu’il boucla à sa ceinture le temps de sortir du bâtiment. Le ciel était beau, l’air était bon, et rien ni personne ne pourraient l’empêcher d’en jouir de la façon qu’il lui plairait.

Meksgab farfouillait dans les piètres ruelles d'une quelconque ville d'Aelis.
Comme tout bon gobelin qui se respectait, il était de petite taille, légèrement verdâtre au niveau de la peau.
Ses grands yeux globuleux d’un noir profond, semblait sonder quiconque les croisaient.
Ses longs bras peu musculeux pendouillaient autour de son corps. Vêtue d’une simple tunique, souvent crasseuse, maintenue par un semblant de ceinture en cuir.

Meksgab, n’avait qu’un seul but dans la vie, la récolte d’informations pour assouvir ses vengeances. Pour cela quoi de mieux que les endroits sombres, remplis de mendiant et autres canailles.
A cela près, que Meksgab ne fréquentait ses endroits que par intérêt. Il détestait cette crasse, mais les informations nécessaires semblaient toutes s’y trouver.
Avec ce quota de nouvelles, le gobelin pouvait survivre, les revendant dans les tavernes au plus offrant.
Et aussi, et c’est ce qui lui importait le plus, obtenir de quoi réduire le nombre de vengeance qu’il traînait avec lui. D’une rancune presque aussi tenace que celle des nains, il emportait toujours avec lui son petit livre personnel de rancune. Faire un trait sur l’une d’elle le remplissait d’une joie féroce, sentiment d’un devoir accomplis. Pourvut que cela soit fait avec quelques fourberies gobelines. Il ne renoncerait jamais à ses tâches.
Pour accomplir cela, Meksgab utilisait ses maigres talents d’assassins.

Il se lançait dans n’importe quelle histoire, tant que celle-ci pouvait avoir un quelconque intérêt.
Ce soir le gobelin, allait dans les hautes sphères des villes, se renseigner sur ses futures cibles et vendre quelques informations.
Tout sourire, dévoilant ses petites dents pointues, il allait pouvait rayer un nouveau nom autour d’un repas.

Couleur de dialogue : Royal Blue

L'Avis du Jury :

Un travail de groupe peu existant, c'est dommage. Cependant vous évoluez dans le même univers et c'est un point positif. Il y a eu un début de lien avec le journal, et c'est une chose qui aurait pu être très très intéressante si elle avait été suivie : est-ce un hasard?
Vous avez été assez court et concis, tous, et c'est une performance à saluer.
Une remarque : est ce une volonté de votre part de tous faire des personnages désavantagés par la nature? Dans tous les cas c'est rafraichissant de voir qu'il existe autre chose dans le rôle play que de belles naïades.
Nous avouons ne pas avoir très bien compris la description d'Electre : est ce une espionne?
Nous tenons à saluer la description de Grendelor, qui a décrit un personnage très efficace, et surtout celle de De Vaanne, qui a failli verser dans la banalité mais qui en fleurtant avec le danger à réussit une belle performance. De plus, un personnage de rôle play gay sur ce forum, c'est du jamais vu je crois ! Chapeau bas.

Juste un mot, au sujet d'une phrase dans le rôle play de Grendelor qui nous a choqué :
"D’une part, c’était un nain. Non pas de la race noble des nains, mais simplement un humain raté."
Nous espérons avoir mal compris, et que tu n'as pas vraiment voulu dire ce que tu as dit ...

Résultat : Bien

Rendu final Tronco10

Sephi 4*4 a écrit:: Meksgab était sorti de l’auberge ce matin là, les premières lueurs de l’aube pointant à peine leurs faces sur la ville commerciale de Belal. Il claqua la porte de bois et d’acier derrière lui, abandonnant l’auberge de facture récente, la mode actuelle étant alliages de bétons et de bois. Un parchemin dans la main, le gobelin prit la direction des docks, les maisons qui défilaient autour de lui étaient de taille moyenne, suffisamment grandes pour montrer une certaine aisance de vie, sans pour autant afficher d’innombrables richesses. Nombres de boutiques et de taverne s’étalaient dans les rues, les marchands s’affairaient déjà à préparer leur stand, la vie commençait tôt ici. Les rues seraient bientôt remplies par une foule de gens de toutes sortes achetant, vendant, parlant affaires. Se pressant un peu, emmitouflé dans sa cape dans la fraîcheur matinale habituelle dans ces contrées de plaine verdoyante.

Le gobelin finit par arriver sur place. L’immensité de l’endroit le laissait quelques peu pantois, il cherchait juste une navette pour Sûl Nar, au milieu de ces grands quais dépourvus de gens mais remplis d’immenses et petites machines permettant un déchargement et embarquement plus rapide. Slalomant entre les engins et les rares personnes présentes à cette heure matinale, il finit par trouver le poste d’envoi, petit baraquement d’acier et de béton coincé entre deux grands entrepôts. Meksgab rentra dans le bâtiment. Intérieurement celui-ci était dépourvu de toute forme de décoration superficielle, seul le mobilier nécessaire et de facture moyenne était présent. Après un rapide conciliabule avec l’homme, le gobelin sembla content. La lettre qu’il adressait à Kïn lui parviendrait rapidement. Même si cela lui avait coûté une assez grande quantité d’argent, il sentait que cela serait bénéfique. Kïn l’avait déjà grassement payé pour quelques informations par le passé, et vu l’intérêt de celle-ci, il ne doutait pas d'être largement remboursé. Bien que l’affaire de ce De falque le concerne, Meksgab avait jugé plus utile de se faire des alliés pour approcher l’homme plus facilement. Le plus dur serait de convaincre le nain de l’aider à retrouver ce perturbateur, car bien qu’il possédait quelques renseignement, la piste était encore lointaine, jusqu’au repaire de celui-ci. Puisque tout endroit où était un individu était un repaire pour le gobelin.

Une fois cette tâche accomplie, après un vague regard à l’aéronef qui se préparait à décoller de l’astroport. Autour les machines commençaient à charger les grands transporteurs de tout type de marchandises. De grands conteneurs étaient déplacés en continue, comprenant tissus, fruits exotiques de Sûl Nar, poissons de Galvorn, voir d’Atalantë, ainsi qu’une multitude d’autres produits des quatre coins de Ter Aelis. Le gobelin tourna le dos à la vaste vision des plaines de Belthil, tournant le dos au soleil levant répandant ses lueurs sur le fleuve et ses alentours. Il reprit tranquillement la direction de l’auberge, où il attendrait Kïn devant une quelconque boisson et écoutant les divers ragots du coin, parfois l’on pouvait tomber sur une conversation intéressante. Autour de lui déjà la population émergeait de toute part. Les commerces fonctionnaient déjà à plein régime, le regard acéré du gobelin lui permit de remarquer les quelques pickpockets et autres menus voleurs qui commençaient déjà leurs activités matinales. S’enroulant un peu plus dans sa cape noire, Meksgab poursuivit son chemin, traçant son chemin dans la foule.

De retour à l’auberge, il poussa la porte, jeta un coup d’œil circulaire aux alentours. Nombres de gens étaient attablés, certains en pleine partie de cartes, tricheurs arnaquant les pauvres marchands tentant de fructifier leur capital, quelques hommes discutant affaires attablés devant une des fenêtres. Le gobelin écarta d’emblée l’idée de se mettre dans le coin de ces tables, les discussions ne l’intéresseraient pas. Un peu plus loin, quelques habitants discutaient autour d’une boisson matinale avec quelques marchands avides de nouvelles, juste derrière eux le gobelin repéra une petite table libre. Souriant légèrement il se dirigea vers elle. Le gobelin s’assit à la table, de manière à voir la porte d’entrée, il enleva sa capuche, ainsi le petit homme le reconnaitrait quand il entrerait. Meksgab commanda une bière, et se mit au devoir d’écouter la conversation de ses voisins, ainsi la journée ne serait peut être pas totalement perdue, et qui sait Kïn arriverait peut être rapidement.

Grendelor a écrit:: Le premier à le contacter avec des infos sur Andy de Falque ne fut pas celui que Kïn croyait. Avec ce qu’il avait découvert, il aurait pensé que l’administration viendrait rapidement le trouver. Mais le plus rapide fut un gobelin qui lui avait déjà fourni quelques informations par le passé. Kïn s’était renseigné sur lui et la principale activité de cet être plutôt dégoutant semblait être de se venger, d’une manière plus ou moins ignoble, de toutes les méchancetés, réelles ou imaginaires, qu’on pouvait lui faire.

Relisant une nouvelle fois le message arrivé par le service postal de pigeons voyageurs Aimpé, Kïn soupira. Il irait voir Meksgab, quand bien même le lieu de rendez-vous lui déplaisait, parce que le petit gobelin, dans sa soif de vengeance, avait bien souvent des renseignements intéressants. Sa mission était suffisamment délicate pour qu’il ne néglige aucune piste.

L’homme de petite taille, puisque c’est ainsi qu’il se définissait lui-même, prépara donc soigneusement ses affaires. L’endroit où il se rendait était une taverne de seconde zone aussi laissa-t-il de côté son costume pour des vêtements moins voyants, même si toujours bien coupés et repassés avec soin. Une chemise noire et un simple pantalon de toile grise feraient l’affaire. Dans un petit sac-à-dos, il emmenait les produits de premières nécessités lorsqu’on va dans les bas quartiers : de l’argent en quantité suffisante pour graisser la patte mais réparti en petites sommes qui n’attirent pas l’attention ; une perruque et de quoi se grimer s’il avait besoin de filer discrètement ; quelques armes de défense ; un parapluie et une veste chaude parce qu’il faut tout prévoir, même le temps. Ses chaussures étaient simples mais solides et permettaient de courir sans risque, même si ce genre d’activité n’était pas des préférées pour Kïn. Vérifiant une dernière fois qu’il avait tout, le petit homme sortit de sa maison sul-narienne.

Située dans le quartier nord de la ville, elle était typique du désert : en terre, basse, avec peu d’ouvertures, une cours intérieure avec un puits en son centre, un toit en terrasse pour dormir à la fraîche. Rien ne la différenciait des autres maisons si ce n’était la silhouette dandinante qui s’en éloignait. Il était tôt le matin et la chaleur était encore supportable. Les rues étaient bordées de palmier qui offraient ombre et fraîcheur aux passants. La foule était bigarrée et l’on trouvait aussi bien des nomades cachés dans leurs longues tuniques colorées que des « hommes d’affaires » en costumes sévères. Parfois, la silhouette d’une créature plus exotique se dessinait, long corps orné d’ailes, éphémères translucides ou petits diables en maraude, rappelant que Ter Aelis était une terre d’accueil dans le vaste univers. Kïn tenait particulièrement à l’œil ces êtres : les anges, comme les elfes, avaient tendance à le regarder avec pitié et compassion, ce qui l’enrageait terriblement, alors que les diablotins trouvaient qu’il faisait une cible indiscutable pour leurs facéties. Traversant la ville pour rejoindre l’air d’envol, il faisait donc particulièrement attention, ses yeux toujours en mouvement, repérant ceux qui le regardaient plus longtemps que la normale, retenant visages et vêtements pour le cas où il serait suivi. Espionner était souvent passionnant mais parfois dangereux aussi. Mais les larges rues de Sûl-Nar étaient comme à leur habitude, populeuses et bariolées. Rien ne choqua son œil exercé et une fois au petit astroport, il prit sereinement la navette pour Belal, ville commerçante et prospère de la grande plaine fertile de Belthil.

La navette filait à quelques mètres au dessus du sol, emportant sa dizaine de passagers pour quelques heures de vol. Très vite, ils laissèrent derrière eux les dunes du désert sûl-narien pour des paysages plus verdoyants. La végétation s’éleva, la terre passa du jaune sable à l’ocre puis à un marron terne qui se couvrit d’herbages. Une petite forêt apparut sur leur gauche et quelques troupeaux paissant levèrent la tête pour suivre le passage du transporteur. Sur la droite, une langue de ce qui peut être considéré comme les contreforts des Monts d’Echoriath empêchait le désert de progresser en direction de la plaine fertile. Enfin, ils approchèrent du grand fleuve, celui qui était la source de la richesse de cette terre maintenant noire et féconde. Le soleil était haut dans le ciel, se reflétant sur l’énorme masse placide, aveuglant les passagers. L’aéronef survolait à présent de vastes étendues de champs qui commençaient à germer, rectangles quadrillant la plaine, leurs côtés marqués par de petites haies. Enfin, ils arrivèrent en vue de Belal, cité neuve qui semblait vouloir rivaliser avec sa prestigieuse consœur, Belthil. De hautes tours d’acier s’élevaient, resplendissantes dans la lumière, la circulation était intense à l’image des échanges commerciaux qui s’effectuaient. La navette se fraya un chemin jusqu’à l’astroport et déchargea ses passagers.

C’était le début d’après-midi et Kïn n’avait rendez-vous que le soir aussi prit-il son temps pour se rendre à son hôtel et ensuite descendre dans les bas quartiers. En quittant l’astroport, le petit homme se retrouva happé par la foule et, n’eut été son habitude, il se serait fait piétiner sans vergogne par tous ces gens pressés. Avec un grognement indigné, Kïn se dirigea vers l’ouest et les beaux quartiers où des maisons cossues faisaient étalage de la richesse de leurs propriétaires. Ici se côtoyaient petits manoirs et maisons à l’architecture fantasque ; bois et acier ; pierre et béton. Tout était permis dans l’extravagance des familles qui avaient fait la renommée commerciale de Belal. Kïn ne put empêcher un reniflement dédaigneux face à cette débauche et ce encore moins quand une bande de ces gosses de riches qui se croient tout permis l’avait dévisagé avec une horreur non dissimulée, le montrant du doigt ouvertement en chuchotant. Il grava soigneusement les visages de ces chérubins dans sa mémoire. Il ferait ses recherches sur eux plus tard. Redescendant vers le sud, Kïn passa près des vastes halles où le bruit et la cohue étaient tels qu’il repiqua bien vite vers l’est et les docks. Ceux-ci, modernes, employaient bien moins de monde que leur taille ne le laissait envisager : engins de levage et autres machines remplaçaient les dockers musclés et bagarreurs. Cependant, la maxime disant que c’est près de l’eau qu’on trouve le plus de tavernes restaient vraie et c’est vers l’une d’entre elles que se dirigea Kïn alors que l’après-midi touchait à sa fin. La ruelle n’était pas des plus propres mais on pouvait encore y marcher sans devoir respirer par le nez. Repérant l’enseigne aux 3 épis de blé, Kïn poussa la porte en bois et entra. La taverne était modeste mais mieux tenue que la plupart de ses congénères dans la rue. Le parquet avait encore la couleur du bois et si le barman était costaud, il n’affichait pas cet air patibulaire qu’ont ceux qui surveillent leurs clients comme le lait sur le feu. L’ambiance était d’ailleurs assez calme pour le moment, les quelques buveurs présents étant regroupés autour de quelques tables et semblaient plus occupés à marchander qu’à boire. C’était principalement de petits commerçants, mais aussi quelques personnes plus louches, qui menaient leurs affaires dans ces murs.

A son entrée, tous les regards convergèrent sur lui mais, malgré sa taille et ses yeux, se détournèrent rapidement pour reprendre leurs tractations. Kïn lui fouilla la salle pour découvrir le gobelin assis dans un coin sombre. Il se dirigea vers lui à petits pas pressés et s’installa sur la chaise en face après avoir pris le soin de passer son mouchoir dessus pour éviter toute saleté. Il ne dit rien, attendant que le serveur vienne prendre sa commande, une bière douce, avant de pouvoir parler.

Sharah'In a écrit:: Il était difficile de dire depuis combien de temps il était attablé dans la taverne. Une heure ? Deux heures ? Toute la nuit ? Il n’en avait pas la moindre idée, même si état était plus prompt à lui indiquer un temps plus que respectable. En fait, sa nuit avait débuté dans un parc, installé contre le tronc d’un arbre. Puis le vague à l’âme l’emportant peu à peu sur la poésie de l’instant, le jeune Khrominsia avait décidé d’oublier tout cela devant une bonne chopine. De pérégrinations, en pérégrinations, il s’était retrouvé là, dans cette auberge de Belal. Entre deux gorgées, il s’était amusé à noter les allées et venues, notant le client qui louait une chambre et celui qui, comme lui, ne faisait que boire.

Autour de lui, la salle était pleine, se vidant par intermittence pour se remplir quelques instants plus tard. A moins que ce ne fusse des heures. Son parcours pour arriver en ce lieu avait été somme toute un peu flou. Il n'était pas originaire de ce lieu. Lui, il venait de plus loin, en dehors de ce pays. Ter Aelis avait toujours été pour lui un lieu de rêves à accomplir. Un lieu où il pourrait enfin se démarquer. Il avait tout d'abord échouer dans un parc qui sentait bon les différentes essences des fleurs, puis avait marché, sans s'en rendre compte ou même apprécier la distance. Il avait traversé de belles rues flamboyantes avant de se retrancher dans une rue moins glorieuse, mais tout aussi pittoresque. C'est donc au hasard de son périple pauvre en péripéties qu'il s'était retrouvé à boire un verre, puis deux, puis trois dans l'auberge, observant les entrées et les sorties des clients, tout en rêvassant.

Le seul personnage notablement intéressant, lui semblait-il, se révélait être un gobelin, qu’il avait déjà vu faire un aller-retour, pour finir par s’asseoir à une table non loin de la sienne. Il semblait attendre quelqu’un. L’esprit embué par l’alcool de Khrominsia n’eut pas besoin de plus pour échafauder toutes les théories possibles : complot, rendez-vous d’affaire secret, complot encore une fois, ou simplement rendez-vous galant… A chaque fois, perdu dans ses rêves d’opération de grande ampleur, il se voyait y tenir un rôle important, prouvant ainsi sa valeur, redorant son blason trop terne. Il voyait les choses en grand, devenant tantôt l’une des fées les plus respectés, tantôt l’une des plus craintes. Il hésitait entre devenir un héros et un abominable personnage. La seule récurrence, c’était sans doute la reconnaissance, sa sortie définitive de son anonymat qui lui causait tant de problème.

Tout à ses rêves de conquêtes et de renommé, il vit d’un œil vitreux un nain entrer dans l’auberge et s’installer autour du personnage qui lui avait servi de muse pendant quelque temps. Son intérêt, s’il s’était jamais éteint, se raviva l’instant d’après. Le nouveau venu venait de déposer un mouchoir sur sa chaise avant de s’asseoir. Une attitude qui ne manqua pas d’éveiller encore plus l’intérêt de la fée. Malgré sa tête qui lui tournait quelque peu, il déplaça sa chaise, le plus discrètement possible, à savoir dans un fracas sans nom de grincements et de raclement contre le bois, de façon à écouter une conversation qui ne le concernait pas.

Grendelor a écrit:: Après un long regard circulaire sur la salle, Kïn revint au gobelin, se penchant légèrement vers lui.

-De Falque. Combien?

Sa voix était basse et froide, précise. Avec les informateurs, il fallait toujours en dévoiler le moins possible, chaque mot pouvant être monnayé à d'autres plus tard.*
Meksag regarda son interlocuteur. Comme les autres fois, celui-ci était peu bavard. Il allait encore devoir tenter de soutirer des informations doucement.

-Vu le personnage, et ce qui se trame autour de lui, beaucoup. Le gobelin se pencha un peu plus vers Kin, dévoilant ses dents pointues et jaunâtre dans un sourire narquois. -Et m'accepter à vos côtés, je dois personnellement rencontrer cet homme aussi. Mais il est bien difficile de l'approcher seul.

La taverne était remplie de bruit de bières qui se vidaient, de quelques disputes. Quelques parties de carte avaient lieu. Personne ne semblait faire attention aux deux personnes posées dans un des recoins du bar.
Meksag était roublard, ce qui le rendait presque sympathique aux yeux du petit homme qui détestait que la partie soit facile. Le serveur arrivant avec sa bière, il attendit qu'il reparte avant de parler, laissant sa chope de côté. Il prit son temps pour répondre, comme s'il envisageait sérieusement de rencontrer cet homme.

-Les autres décideront une fois que nous saurons où il se terre. Cette approche demande de la préparation.

Tout portait à croire que Kïn était au sein d'un groupe qui traquait ce de Falque. Attendant la réaction du gobelin, il prit une gorgée de bière.
Celui-ci sembla pensif un instant. Cet homme était rude dans la négociation, mais il payait bien. Cependant, pour cette fois, Meksgab devait obtenir ce qu'il voulait.
Se raclant la gorge, il commanda un breuvage particulier au serveur. Attendant que ce dernier s'éloigne quelque peu, il reprit.

-Je doute que vous connaissiez certaines personnes qui sont à sa recherche. Cependant, je ne vous vendrais l'information que si vous acceptez ma clause. D'autres pourraient être intéressés. Il fit mine de se lever, puis se rassit. Sa voix prit un ton neutre. - A moins que, il étira sa bouche en un sourire moqueur et ses yeux semblèrent sonder Kin, vous ne m'accompagniez pour finir de récolter certaines informations. L'accès à certains endroits n'est pas sûr seul.
Le gobelin se reposa contre le dossier de sa chaise, observant l'homme. Attendant une quelconque réaction.

Sharah'In a écrit:: Dans l'esprit de Khrominsia, les mots "recherche", "information" et le ton comploteur qu'utilisait les deux hommes sonnaient comme la promesse de lendemains meilleurs. Tout à ses rêves de grandeur, il se voyait déjà en chevalier servant, héroïque, venant apporter son aide à ces pauvres personnages, devenus dans son esprit, complètement déboussolés par le manque d'informations.

Malgré son taux d'alcool dans le sang assez élevé, Khrominsia se leva, bonda le torse, prenant l'allure fière, et déploya légèrement ses ailes irisées. Bien que selon les normes des fées, il était plutôt ingrat, selon les normes humaines, il était ce qu'on pouvait appeler un homme séduisant. Il lui manquait la grâce des fées, une partie de leurs traits épurées au niveau du visage... Bref, il avait, selon ses semblables, juste le physique d'un humain séduisant. Les normes inter-raciales sont décidément assez complexes. Aussi, avait-il été très surpris de voir les femmes se retourner sur son passage une ou deux fois pendant la nuit.

Toujours était-il que, malgré ces quelques constatations, Khrominsia, une fois debout, passa sa main dans ses cheveux mi-long bruns, tentant de se composer un visage moins fatigué qu'il ne l'était en réalité, et s'approcha de la table, un sourire aux lèvres.

- Messieurs, bien le bonjour !

Les deux autres lui lancèrent un regard à la fois étonné, à la fois mécontent d'avoir été coupé en pleine conversation.

- J'ai cru entendre que vous cherchiez des informations sur un certain individu, n'est-il pas ?

Il se garda bien de prononcer le moindre nom, de peur de trahir son manque de mémoire en la matière. En effet, il ne se souvenait pas du tout de ce qu'ils avaient dit plus tôt.

- Vous savez quelque chose ?

Le gobelin se méfiait, Khrominsia pouvait le sentir. Il fallait qu'il trouve quelque chose, qu'il réussisse à se greffer à l'aventure qui se préparait, quelle qu'elle fut. Pour lui, c'était un regain d'espoir de pouvoir se démarquer. Il attaqua, au bluff.

- Il semblerait que vous souhaitez aller dans un endroit peu sûr. Je vous propose mon assistance.

- Un mercenaire ?

- Pas vraiment, non. Juste une lame qui souhaiterait se mettre à votre service, dans le but noble de vous aider. Mais aussi de régler quelques affaires personnelles, je dois bien vous l'avouer.

- Pourquoi ne pas l'avoir dit tout de suite ?

C'était sa première intervention, certes, mais elle ne manquait pas de piquant. Et de plus, il était tout à fait dans le vrai. Khrominsia réfléchit quelques instants. Qu'était-il prêt à faire pour s'auréoler une bonne fois pour toute de cette gloire à laquelle il n'avait jamais eu droit ? Il n'était plus à un petit mensonge près. De toute façon, la seule chose qui comptait, c'était bien qu'il fasse partie de l'aventure, peu importait le pourquoi du comment après tout.

- Disons... simplement que je n'aime pas... mettre en avant mes raisons personnelles... Cela vous convient ?

Devant le peu de réaction de ses interlocuteurs, Khrominsia considéra que les choses étaient claires et acceptées. Aussi prit-il une chaise qu'il installa à la même table que ses nouveaux compagnons, toujours avec le sourire aux lèvres.

Electre a écrit:: La jeune femme rousse se leva vers 10 heures du matin, elle sortit rapidement de son lit afin d'aller sous un filet d'eau fraiche. La saison chaude commençait et le moindre soupçon de fraicheur et de légèreté était fortement apprécié. Ysé resta pensive de longues minutes tandis que l'eau roulait sur ses épaules musclées. Tout en attachant ses longs cheveux en un chignon discret, la jeune femme planifiait pour la dixième fois sa journée, puis elle vérifia à travers les volets entrouverts les conditions climatiques et sans trop de surprises elle constata que le soleil commençait déjà à brûler de nombreux passants. Elle se déplaça jusqu'à une pile de vêtements propres et enfila rapidement un tee-shirt et un short, alla s'asseoir au bord du lit afin de mettre des sandales et attrapa son sac bandoulière situé non loin de là. Ysé l’inspecta en vitesse pour vérifier que tout était bien là, elle se leva et claqua la porte de son appartement.

Marchant le plus possible à l'ombre, Ysé alla se poser à la terrasse d'un des nombreux cafés de la ville. Elle avait longuement vagabondé et commençait à ressentir la faim. Un serveur lui apporta la carte et elle ne put s'empêcher de la lui arracher des mains quand il estima *qu'elle n'était pas si belle que ça de près* Foutu don. Elle parcouru les lignes où se mêlaient divers plats tant du monde Terrien que de celui des Aélissiens. Elle se décida finalement pour une salade Atalantë, qui semblait sentir bon l'iode. Tandis qu'elle attendait son plat, elle profita de ces quelques instants de répit pour regarder autour d'elle. Deux femmes non loin d'elle discutaient de leur prochaine tenue en vue d'une quelconque soirée ce qui lassa assez vite Ysé. La salade ne tarda pas à arriver et elle pu enfin attaquer son repas. Une fois terminé elle devrait marcher jusqu'aux frontières de l'Ancien Monde afin d'aller à la Tour de Garde. Elle ne savait pas exactement à quoi elle devait s'attendre mais elle se doutait que l'information serait surement de la plus haute importance pour son chef.

Après avoir réglé l'addition, aussi salée que la mer d'Atalantë, la jeune rousse se dirigea vers l'arrêt de bus le plus proche. Après avoir étudié le plan, elle l’attendit et monta dans ce dernier seulement quelques minutes plus tard. Tout le long du trajet elle somnola doucement, transportée par les pensées vagabondes de ses voisins. Une demi-heure plus tard environ, la Tour de Garde se dessinait à l'horizon et elle descendit du bus. Ysé marchait tout en regardant sa montre; elle était en avance. Bien. Le soleil tapait dur sur les pavés irréguliers et elle regretta de ne pas avoir pris de casquette. Arrivant près du monument, elle s'adossa nonchalamment au mur d'une maison face à la Tour afin d'observer les va-et-vient incessants. L'endroit avait été vraisemblablement choisi judicieusement, la Tour faisant office de douane et de banque de change vers les deux mondes, il y avait donc de nombreux passages et la possibilité pour deux personnes de s’échanger facilement tout type de renseignement. Ysé essayait désespérément de capter une brise légère mais la tâche était utopique.
Il était à présent 15h10 et elle s'impatientait. Ysé commençait à écouter les pensées des passants afin de passer le temps quand soudain elle reconnu l’homme tant attendu. Il semblait parfaitement connaitre les lieux car il se dirigeait d’un pas sûr vers une petite rue étroite jouxtant la Tour. Ysé lui emboita le pas. Il s’arrêta au niveau d’un petit commerce délabré et alluma une cigarette. Ysé continua son chemin sans lui jeter un regard et rentra dans une petite boutique non loin de là. Il y avait peu de monde et elle pouvait clairement entendre ce qui se passait dans la tête de cet inconnu. Quelques instants plus tard un autre homme commença une conversation.
*De Falque est vivant, Monsieur, ils disent qu’il est parti à Ter Aelis, ça attire les fouineurs ça moi j’vous l’dis. La faute aux journaux encore. Il parait qu’un des derniers endroits où on l’a vu c’est près des docks de Belial, y’a des tavernes à foison j’suis sûr que ça papote.*

Dix minutes plus tard Ysé passait la Tour de Garde afin d’entrer dans Ter Aelis. Elle se dirigea vers l’astroport et monta dans une bulle, l’équivalent des taxis de l’autre Monde. Pendant que le bulleur la conduisait sur les docks elle s’attarda à admirer le paysage, en effet les vastes plaines étaient recouvertes de champs géométriques colorés formant un patchwork attrayant.
Une fois arrivée, elle remarqua sans difficulté les nombreuses tavernes qui occupaient le décor. Elle ne savait se décider dans laquelle entrer, et finalement opta pour l’établissement à l’aspect le moins repoussant. Poussant la porte des 3 épis, Ysé entra.

Elle fut assaillie par une multitude de pensées, mélangées aux odeurs de bières et aux jeux de cartes. Elle chercha à s’asseoir afin d’observer tout ce beau monde et trouva une table au fond de la salle, à coté de deux hommes conversant dans le secret et d’un troisième qui semblait avoir soudainement fait son apparition à la table, ce qui semblait agacer les deux autres. Elle prit place, posa son sac sur la table et étira ses jambes. Le regard d’un nain lui transperçait la peau, elle n’avait même pas besoin de tourner la tête; il l’observait, l’analysait dans le but de faire des recherches sur elle plus tard, il semblait très inquiet de sa proximité, inquiétude qui gagna son acolyte, tous les deux n’avaient qu’une envie, qu’elle s’en aille vite. Quant à la fée qui troublait elle aussi leur discussion, l’alcool avait eu raison de lui et ses pensées étaient floues. Ysé scrutait la taverne mal éclairée, mais aucun d’entre eux ne paraissaient en pleine possession de leurs moyens, la bière aidant pour beaucoup. Elle commanda une Pinchöila au serveur et resta pensive. Le nain d’à coté la fixant toujours, elle commençait à s’agacer de cette situation, elle se tourna donc vers lui et le regarda froidement pendant quelques secondes avant de dire d'une voix atone.

- Ma présence te gêne, nain?

Kïn ne fut pas démonté la moins du monde par la personnalité froide d'Ysé. La situation commençait à l'agacer prodigieusement et l'immixtion d'un protagoniste de plus lui déplaisait au plus haut point.

- Exactement, répondit-il, vous avez beau faire des efforts, je vois bien que vous nous écoutez. Une jeune femme comme vous devrait être ailleurs que dans une taverne sombre.

La paranoïa du petit homme était à son comble et il avait l'impression que tout le monde dans la taverne les regardait et les écoutait. Il lui démangeait de partir mais il avait besoin du gobelin et peut être même de l'effiminé saoul. Aussi se força-t-il à un certain calme.

Ysé ne s'attendait pas à trouver sur son chemin un petit être si hargneux, elle répliqua donc piquée au vif

- Je n'ai nullement besoin de faire d'efforts pour sonder votre âme, voulez-vous peut-être que je répète ce que vous pensez ?

Ysé ne s'était pas rapprochée trop près de la table, un coup de couteau partait vite, même si le destinataire était féminin, de plus la fée sentait fort la bière et les relents d'alcool et de saleté lui provoquaient des hauts-le-cœur.

Kïn tiqua tout de suite ce qu'avait dit la rousse. *Ce qu'il pensait*. Une télépathe ? Voilà qui pourrait leur être utile, bien plus qu'une fée titubante, qui cependant ferait un très bon rempart contre un coup malencontreux. Redevenant plus conciliant, il fit un signe apaisant de la main.

- Vous ne chercheriez pas du travail par hasard ? Nous sommes sur une mission qui demande du doigté et si vous avez le talent que vous dites, cela nous serait bien utile.

Ysé se fit une place entre le gobelin jusque là resté silencieux et la fée pour s'asseoir en face du nain. Elle planta son regard dans le sien tout en essayant de ne pas être surprise que le nom de De Falque lui parvienne. Ainsi donc cet homme jusqu'alors inconnu se trouvait rechercher la même personne que lui. Elle décida d'en savoir plus.

- J'ai moi même une mission qui m'attend ... pourquoi vous serais-je utile ? Que puis-je y gagner ?

Kïn se rassit confortablement en entendant les questions de la jeune femme. Elle était intéressée, ils allaient pouvoir négocier.

- L'homme que nous recherchons, bien qu'il semble avoir plus d'ennemis que d'amis si j'en crois les réactions que j'ai croisées, est difficile à trouver et bien entouré. Débusquer des informations à son sujet tout en restant discret demande du temps or il semblerait que nous en manquions. Meksag et moi-même, fit-il en désignant le gobelin, avons déjà rassemblé bon nombre d'éléments et nous sommes proches du but. Mais il semblerait que la prochaine étape soit dangereuse, ce qui semble être la raison de nous accompagner de cet énergumène, ajouta-t-il en désignant la fée. Il y a donc deux solutions : la force ou la finesse. Votre présence donnerait une chance de plus à la finesse d'agir en glanant des informations qu'il nous faudrait arracher de force sinon. De votre côté, je sens bien que votre propre mission est en rapport avec la notre, sinon vous ne seriez pas devant moi à essayer d'en savoir plus. Vous gagneriez donc les informations que nous avons déjà à notre disposition et une meilleure chance d'obtenir celles manquantes.

Ce qu'il disait était vrai. Au cours de ses nombreuses recherches, il avait appris que mentir devant un télépathe ne menait à rien. Par contre, omettre des choses était possible si on savait cacher ses pensées. Ce qui restait difficile sans entrainement. La seule parade qu'il connaissait était de faire écran avec une pensée-boucle, pour son cas, une comptine que lui chantait sa mère lorsqu'il était enfant. Ainsi ses pensées superficielles étaient occultées.

- Votre De Falque auquel vous pensiez incessamment tout à l'heure, je sais quelques petites choses sur lui, c'est ce qui m'a mené ici, c'est d'accord répliqua Ysé, tout en ponctuant sa phrase d'une poignée de main.

Le gobelin semblait avoir accepté l'idée, même si une femme n'avait pas l'air de l'enchanter, des pensées floutées indicants quelques soupçons de fierté mal placée. La fée quand à elle se rêvait glorifiée et ne pensait pas à autre chose.

De Vaanne a écrit:: Sinderion n’était pas du genre à féliciter indûment sa nombreuse parentèle. Cependant, il lui fallait admettre que l’hôtel particulier des Cuchulaìnn était objectivement parmi les plus beaux de Belal : spacieux et lumineux à l’intérieur, il imposait au passant toute sa majesté due à un mélange réussi entre la délicatesse elfique et l’art plus fonctionnel des humains. Sinderion n’avait pourtant aucune envie d’être objectif : pour lui, l’hôtel représentait des amas de livre et de poussière, la promesse d’un ennui mortel et la vue de certaines personnes qui lui levaient le cœur. La fuite momentanée de cet endroit lui apparaissait donc comme la plus saine des solutions.
Pour mettre ce plan à exécution, il évita l’entrée principale toujours monopolisée par ces fats complaisants amollis par les plaisirs et proclamés cousins qui n’auraient pas manqué de lui poser des questions indiscrètes. Il passa donc par les cuisines, volant au passage une brioche destiné à un goûter quelconque dans les recoins de l’immense demeure.
Profitant de ce que les nombreuses fenêtres avaient la vue bouchée par les magnifiques platanes, il remonta toute la rue avant d’obliquer sur sa gauche afin de contourner la colline sur laquelle étaient construites les maisons des nobles et l’astroport pour descendre vers la rivière qui serpentait dans la plaine.

Le trajet aurait pu être direct : une grande artère reliait le haut de la colline et les docks, mais pour Sinderion cet itinéraire n’avait aucun intérêt. Arrivé à mi-chemin, il se déporta pour entrer dans un quartier beaucoup moins recommandable, composé d’entrepôts géants et massifs, celui des abattoirs. Les fines broderies de son habit paraissaient totalement inadaptées dans ce contexte, au regard des vêtements confortables et tachés de sang des travailleurs, mais Sinderion n’en avait cure : seule comptait pour lui l’odeur du sang, cette fragrance qui lui laissait dans la bouche ce magnifique arrière-goût métallique. Pour le voir, le sentir et le goûter, il était prêt à tout, et même à devenir un épéiste émérite. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il était le seul de sa famille à apprécier cet état de fait. Mais là encore, Sinderion n’en avait cure.
Pour éviter les déplacements en plein air de la viande, fût-elle hautement salée, les abattoirs étaient accolés directement aux docks, au grand dam des dockers d’ailleurs. L’odeur omniprésente de sang et de mort était pour eux révulsante et n’irait pas en s’arrangeant puisque l’activité portuaire de Belal était apparemment promise à un grand avenir grâce aux dites exportations de viande. Même si Sinderion serait mort plutôt que de l’avouer, ces pensées étaient présentes à son esprit alors qu’il enjambait avec grâce les rigoles de sang qui couraient se jeter dans la rivière, signe que son éducation commençait enfin à porter ses fruits.
Passant abruptement des abattoirs aux docks, l’odeur qu’il appréciait tant disparut brutalement pour être remplacée par celles d’épices exotiques. C’était ce que les dockers avaient imaginé pour combattre ce qu’ils appelaient une puanteur : combattre le feu par le feu. Ce n’était pas le pire : un peu plus loin, la bière remplaçait le poivre et le safran, et tout ou presque y respirait la pauvreté, l’alcool éventé et l’absence de finesse. Heureusement, un établissement sortait du lot : la taverne des Trois Epis, nommée ainsi non pas à cause d’un quelconque rapport avec les céréales de l’enseigne, mais en raison des trois pilotis renforcés qui évitaient au bâtiment de sombrer dans les flots qui s’abattaient sur la terrasse à la moindre inondation. Le bâtiment lui-même n’avait rien de particulièrement enthousiasmant : pierre de taille, toits en tuile et grandes fenêtres pour l’extérieur, plafond haut, poutres apparentes et plancher d’une propreté louable pour l’intérieur. Sinderion connaissait bien le tenancier, depuis le temps qu’il fréquentait l’auberge : ce n’était pas une brute mais la propreté de son bien lui tenait à cœur. En contrepartie, il pouvait se targuer de fournir quelques uns des meilleurs breuvages de la ville, dans une gamme de prix allant de l’abordable au prohibitif.

Sinderion le gratifia en entrant d’un ample salut avec son chapeau, ce à quoi celui-ci répondit d’un signe de tête moqueur puis lui désigna la table où ses amis se trouvaient déjà. Quelques nobles, attirés là par un whisky de Sa’ac importé à grands frais, mais surtout son très peu officiel compagnon qui venait de terminer sa journée de travail aux docks, Vany. Sinderion, arrivant dans son dos, en profita pour lui ébouriffer les cheveux et lui subtiliser sa bière avant de s’asseoir. Les récriminations du jeune travailleur furent atténuées par son large sourire et cessèrent complètement lorsque ladite bière fut remplacée par un liquide que seule une bourse de noble pouvait offrir. Tous trinquèrent joyeusement, les verres s’entrechoquant au dessus de la table : la soirée pouvait commencer.

Quelques heures plus tard, Sinderion, le bras droit négligemment passé autour des épaules de Vany, étudiait avec concentration les cartes qu’il tenait de la gauche. Son amant, poussant un faux soupir d’exaspération, lui en arracha une des mains pour la jeter sur la table.

- J’ai encore beaucoup à apprendre, grinça Sinderion. Les règles de ce jeu sont encore plus imperméables qu’un livre de comptes.

- Ben voyons, répliqua un de ses adversaires. Un elfe aussi intelligent que toi devrait arriver à comprendre ce jeu simplissime…

Mais déjà, Sinderion n’écoutait plus : ses oreilles d’elfe avaient perçu une fort intéressante conversation à quelques tables de là, dans une alcôve. Un groupe se mettait en place pour une mission qui s’annonçait dangereuse, et qui disait danger disait probables blessures, et donc sang avec la possibilité d’en répandre. N’y tenant plus, il donna ses cartes à Vany en s’attirant un regard interloqué et approcha de la table où la discussion continuait.
Partisan d’une image forte plutôt que de mille mots, il dégrafa sa ceinture et posa bruyamment l’épée sur la table en faisant s’entrechoquer les verres. La conversation s’éteignit immédiatement : celui qui était apparemment le chef du groupe, un humain de petite taille mal embouché le regarda d’un œil rien moins qu’amène, comme s’il pensait que l’elfe allait le mordre.

- Quoi encore ? Ne peut-on pas avoir une conversation tranquille dans cette taverne ?

Pour toute réponse, Sinderion désigna l’épée.

- Je vous l’offre.

Le regard du nain était étonné cette fois. Même les yeux de la fée, qui avait selon toute vraisemblance lourdement abusé de la boisson, devinrent moins vitreux.

- Avec son porteur, bien sûr. Considérez-moi comme une sécurité au cas où le danger de votre entreprise se réaliserait. De même, s’il faut en venir aux armes, je serai une aide appréciable.

- Tu en prends bien trop à ton aise, l’elfe, répliqua le gobelin de la table. Pourquoi devrions-nous t’écouter ? Et d’ailleurs, comment nous as-tu écoutés ? Vu ton accoutrement, tu sembles plus capable de te servir de cette épée comme d’une aiguille à tricoter que comme d’une arme.

Le visage de Sinderion se contracta de rage sous l’insulte. L’humaine, Ysé avait-il cru entendre, pâlit et plaça un bras devant le gobelin.

- Meksag, arrête. Il ne plaisante pas.

- Absolument, jeune dame, répondit l’elfe avec une courbette lorsqu’il eut repris son calme. Je suis un bon épéiste, très bon même. Je suis également, comme mes vêtements l’indiquent, noble, et je n’aurais aucun scrupule à l’être jusqu’au bout des ongles. Je peux être incroyablement pot-de-colle si je le veux : quoique vous fassiez, je ne vous lâcherais pas d’une semelle. Troisième considération, je vous ferais remarquer que votre petite chasse à l’homme, pour honorable qu’elle vous paraisse, me semble à moi hautement illégale. Imaginez que quelqu’un de mal intentionné prévienne le guet… Ce serait un drame, n’est-il pas ?

- Et vos raisons de vous joindre à nous ? demanda Kïn en cherchant à reprendre le contrôle de la conversation.

- Des raisons de noble, ou une absence de raisons valables, à vous de décider.

Les quatre autres se consultèrent du regard pour en arriver à la conclusion qu’aucun d’entre eux n’avait envie de se frotter à un jeune noble borné.

- La cause est entendue alors, dit Sinderion avec un grand sourire. Laissez-moi quelques instants pour récupérer mon chapeau et je suis tout à vous.

De retour à sa table, Vany l’accueillit avec un regard soupçonneux. Manifestement, la fine silhouette de la fée, bien qu’avachie sur la table, ne lui avait pas échappée.

- Un peu d’aventure et d’action, voilà tout, lui murmura Sinderion à l’oreille. J’espère que tu m’attendras.

- J’espère seulement que tu pourras attendre aussi, répondit Vany en vidant son verre d’un trait.

Grendelor a écrit:: A vrai dire, Kïn n'était pas vraiment mécontent de l'aide providentielle de cette bande d'enquiquineurs. Tout ce qu'il avait pu récolter sur De Falque montrait que c'était un homme dangereux, déjà recherché sur plusieurs mondes sans grand effet, si ce n'était les disparitions successives des diverses personnes envoyées à sa poursuite. Le groupe hétéroclite alliait force et finesse, certains semblant même posséder un cerveau. Avec un hochement de tête, le petit homme se tourna vers Megsab. C'était lui qui connaissait le lieu de leur prochaine étape avant, vraisemblablement d'atteindre leur homme. Le gobelin se pencha vers ses compagnons et murmura quelques mots. Kïn hocha à nouveau la tête, gardant un air calme, mais il était consterné.

Nombre de messages : 5651 Date d'inscription : 22/11/2007

L'Avis du Jury :

Avant toute chose, et cela va être franc : c'est long, trop long. Pour être en plus très honnête, moi (Ram') ne suis pas arrivé à terminer le post de De Vaanne. Trop-trop-trop long, je suis vraiment désolé.
L'avant-dernier post de Grendelor est par contre très bien rythmé.
Des incohérences curieuses jalonnent les écrits (Aimpé en pigeons voyageurs alors qu'on parle d'astroport et d'astronef, notamment) et des maladresses en raccourcis (on évoque une lettre envoyée mais on va directement voir son correspondant au bar, c'est curieusement évoqué) font que les histoires s'enchaînent un peu mal.
L'histoire s'articule sur des mécanismes tout de même convenus, une réunion dans un bar typique où tout le monde, finalement, trouve son compte amicalement. Point négatif : l'histoire perd en crédibilité avec une pseudo-cité concurrente de Belthil, où l'on se demande quel a été l'intérêt d'une telle création.
Point positif : l'idée de l'ange éméché, c'est tout simplement génial.

Résultat : Assez-Bien

Rendu final Tronco10

Alors que Sinderion allait retirer son chapeau de la patère à l’entrée de l’auberge, Meksgab regarda les autres membres du groupe nouvellement formé. Cette bande de bras cassés ne lui plaisait pas particulièrement, mais il allait devoir faire avec. Il fallait bien régler cette histoire de vengeance, et cela passait par recruter quelques sbires.

- Vous avez quelque chose à prendre, vous ? Dépêchez-vous, on part dès que la gravure de mode a récupéré son attirail.

Lui-même se leva et récupéra un sac à dos qu’il avait laissé à ses pieds. Il remarqua qu’il fut le seul à bouger, les autres le regardant faire, surtout la fée qui, malgré tous ses efforts, gardait les yeux complètement vitreux. Meksgab soupira : il fallait falloir prendre des mesures.

- Eh bien, allons-y ! Je vais vous mener tout de suite à l’entrée des cavernes, c’est là que se terre l’informateur.

- C’est un jeu de piste ? demanda Sinderion qui revenait justement.

- En quelque sorte.. Et vu que ledit informateur doit être à l’heure qu’il est le meilleur pourvoyeur d’emploi de Belal dans la section « gros bras/ gardiennage », il va falloir la jouer discret, monsieur l’épéiste.

L’elfe se renfrogna visiblement tandis que Meksgab passait sous son nez en se dirigeant vers la porte. Il donna quelques pièces à l’aubergiste et sortit rapidement du bâtiment pour retrouver l’air frais de la nuit. A peine arrivé dans la rue, il entendit des chevaux hennir doucement dans une écurie toute proche. Cela lui donnait une idée, et il se retourna pour voir un groupe hétéroclite sortir de la taverne, de la grande forme noble et un brin efféminée de l’elfe à l’apparence beaucoup plus ramassée de Kïn.

- Khrominsia, viens avec moi.

Un peu hébété, le jeune homme le suivit sans poser de questions. Ysé, qui avait lu les pensées du gobelin, pâlit légèrement et leva un sourcil.

- Toi, tais-toi, dit Meksgab qui avait remarqué le manège.

Le reste du groupe les vit entrer dans l’écurie et la porte se refermer. Pendant quelques instants, rien ne se passa, puis un bruit de lutte arriva à leurs oreilles, suivi d’éclaboussures. Les bruits se firent entendre près d’une minute puis cessèrent. Vaguement inquiets, l’elfe et l’humain regardèrent Ysé qui secoua la tête. Comme pour lui apporter confirmation, les deux autres membres sortirent de l’écurie, Meksgab légèrement mouillé et Khrominsia plus que trempé, jurant à en perdre le souffle. Sinderion se hâta de lui offrir son manteau en lui demandant avec toutes les apparences de la sollicitude ce qui s’était passé.

- Ce… ce… m’a à moitié noyé dans un abreuvoir, voilà ce qu’il y a ! Et il m’a pris en traître en plus !

- Mais au moins il t’a réveillé, fit remarquer Kïn, ce qui devait être le but premier. Bon, y va maintenant, Meksgab ?

Pour toute réponse, le gobelin s’élança vers les ombres qui garnissaient la rue en dehors des rares endroits éclairés par les torches municipales, dans la direction de la colline. Après un instant d’hésitation les autres le suivirent.

Le chemin jusqu'à l'entrée des grottes parut durer des heures à Khrominsia qui ruminait la vile attaque du gobelin. Dans un premier temps, il avait hésité à laver l'affront par l'épée puis, la réflexion plus claire grâce à l'eau fraîche, il s'était dit qu'il ne tirerait aucune gloire à se battre avec un gobelin qui avait réussi à lui maintenir la tête dans un abreuvoir pour le dessouler. Autant garder cette honte pour lui et se racheter au cours de leur aventure.

Le groupe restait plutôt silencieux, Meksab et Kïn ouvrant la marche, petites silhouettes sombres dans la nuit, suivis de Ysé qui semblait perdue dans ses pensées (ou bien celles des autres?). Sinderion se tenait aux côtés de la fée d'une manière peut être un peu trop proche à son goût... Khrominsia faisait de son mieux pour être aussi silencieux que ses compagnons mais plus d'une fois son pied heurta une pierre, la faisant rebondir le long des rues, provoquant des regards courroucés de la part du nain, faisant courber les épaules de la fée qui tentait de passer inaperçu.

Enfin, Meksab les fit s'arrêter et désigna un coin plus sombre sur le flanc de colline. L'entrée des grottes.

Il y a deux gardes à l'entrée. Juste à l'intérieur. Impossible de les éviter.

Avant même que Sinderion ne fasse un pas (une lueur joyeuse s'était allumée dans ses yeux), Khrominsia s'avançait vers l'ouverture, bien en vue, l'épée en main. A quelques mètres de l'entrée, deux silhouettes s'élancèrent sur lui, sans un bruit, un rictus aux lèvres. La fée semblait une proie facile. S'était sans compter avec sa maîtrise, sa maladresse et l'alcool encore présent dans son sang.

Dans un miroitement irisé, Khrominsia évita la première attaque, se fendant pour toucher son adversaire à la cuisse. En se redressant, un vertige le prit, le faisant tituber, ce qui lui permit de ne pas finir embroché par le second larron. Celui-ci se trouva à nouveau dans le dos de la fée alors que son comparse blessé se dressait en face. Encore étourdi, Khrominsia para mollement un coup sur son flanc et fit un pas sur le côté pour faire face à ses deux adversaires. Il se jeta sur celui de droite, le blessé, tandis qu'une tornade ricanante attaquait le second : Sinderion était entré en action.

Khrominsia se fendit, esquiva, feinta... et son pied le trahit à nouveau, l'envoyant au sol avec un grognement sourd et heurta la jambe en sang du brigand. Son adversaire, déséquilibré, tomba à son tour, permettant à la fée de l'achever. Se relevant avec un sourire triomphant, Khrominsia constata que le reste du groupe les avait rejoints et commençait déjà à entrer dans la grotte tandis que Sinderion essuyait son épée sur les vêtements du second attaquant, proprement décapité. Son sentiment de fierté retomba aussitôt et c'est l'air abattu qu'il rattrapa les autres.

Apparemment ils ont été assez bêtes pour ne pas donner l'alarme en te voyant seul, commenta Kïn. Allons-y.

Les 5 compagnons s'engouffrèrent dans un dédale de galeries faiblement éclairées.

Cela faisait maintenant plusieurs heures qu'ils avançaient dans les galeries, passant et repassant sur leurs propres traces. Plus les minutes passaient, plus chacun grommelait. A tour de rôle, ils avaient chacun râlé suffisamment pour se retrouver en tête de colonne, tentant de trouver un chemin fiable. Pour se retrouver derrière une vingtaine de minutes plus tard, tout penaud, sous les grognements des autres. A chaque changement, ils se perdaient un peu plus. Une fois même, ils s'étaient retrouvé à l'entrée des galeries. Mauvais timing pour retrouver la sortie.

Actuellement en tête de colonne, Meksgab ouvrait le chemin, suivit de Kïn et de Ysé, silencieuse. Presque à la traine, derrière, Sinderion épaulait Khrominsia, lui demandant si tout allait bien. La fée avait l'air morose, et cet état de fait s'aggravait depuis qu'il avait lui-même tenter de les diriger. L'elfe semblait s'inquiéter.

- Tu es sûr que tout va bien ?

L'autre hocha la tête, sans dire un mot. L'elfe ne pu s'empêcher de froncer les sourcils.

La galerie était silencieuse, trop peut-être, il n'aurait su le dire. A dire vrai, son ouie d'elfe lui permettait d'entendre mieux que le commun des humains, et l'absence de bruit lui paraissait suspecte. Après les gardes de l'entrée, le vide des galeries lui semblait presque trop facile. Il sentait un potentiel danger mais ne le voyait pas. Rien que cet état de fait et son épée le démangeait, quand bien même il n'y aurait qu'un petit garde à pourfendre.

- C'est trop calme. Fit-il de façon à ce que tous entendent.

Il ne reçu pour simple réponse que des grognements divers. Soudain, Meksgab eut un mouvement du bras, leur signifiant l'arrêt. Sur la gauche s'ouvrait une galerie un peu plus vaste, sorte de pièce dans laquelle une tablée jouait aux cartes. Une fois que Meksgab eut scruté la salle, il fit passer le mot, décrivant ce qu'il venait de voir. Le visage de Sinderion s'étira en un grand sourire. Bravache, il s'avança, entrainant Khrominsia dans son sillage. Il entra dans la salle, s'écriant :

- Alors, on ne m'attend pas pour jouer ?

Les autres relevèrent la tête, surpris. L'elfe en profita pour tirer l'épée et la passer sous la gorge du premier homme. Les deux hommes s'arrêtèrent dans leur mouvement, voyant arriver derrière l'elfe Kïn et les autres. Même si la compagnie ne payait pas de mine, ils étaient à deux contre cinq, donc en mauvaise posture.

- Vous allez nous aider... On cherche quelqu'un. Vous savez peut-être où on peut le trouver ?

Un sourire joyeux flottait sur ses lèvres alors que derrière lui, Meksgab soupirait bruyamment, en secouant la tête, excédé.

Invité

Le couteau de Sinderion jouait dangereusement avec la jugulaire du premier homme, une lueur perverse traversant ses yeux à chaque fois que le pouls du malheureux dansait avec sa lame. Kïn s'avança, il ne fallait pas perdre de temps, peut-être que la garde se relevait et si l'on voyait deux hommes morts cela risquait d'attirer d'autres ennuis. Kïn comptait les minutes passées à chercher un chemin et ruminait intérieurement de ne pas avoir fait plus attention aux détails l'entourant.

- Ne soyez pas bêtes mes amis, commença Kïn, nous ne vous voulons aucun mal, à part peut-être l'épéiste fou pensa-t-il au fond de lui-même.

Un des deux autres hommes pris la parole.

- Que voulez-vous ? Qui êtes-vous ?

De Falque, vous connaissez ce nom ...

- Non, jamais entendu répliqua aussitôt l'autre homme.

Ce n'était pas une question monsieur, mais une affirmation. Ne jouez pas avec nous, ce que je ne sais pas encore de vous aujourd'hui je le saurai demain.

L'ambiance était pesante, les deux hommes suaient à grosses gouttes, mais ce n'était rien comparé à celui dont le futur semblait incertain. Sinderion en revanche semblait apprécier ce moment, humant l'odeur du sang mêlée à la peur de cet homme, si serré contre lui ...
Meksgab, toujours excédé, s'était rangé dans un coin de la pièce et jetait des coups d'oeils insistants à Ysé curieusement en retrait.

- De Falque ... oui De Falque ... et bien j'espère que vous avez de quoi nous payer répondit l'homme en partant dans un rire bruyant accompagné de son acolyte.

Kïn n'aimait pas ça, vraiment pas, il pivota et se dirigea vers Ysé, lui chuchotant quelques mots sur le ton de la confidence. Ils allaient revenir au groupe quand soudain les rires gras des deux hommes se transformèrent en cris d'horreur. Kïn accompagné d'Ysé se retourna et vit l'épée de Sinderion à nouveau tâchée de sang, le troisième homme à terre, gisant mort, sa tête gigotant maladroitement rattachée encore à quelques morceaux de peau.

Quelle lenteur ! lacha Sinderion avec dédain, parcourant sa lame ensanglantée avec un plaisir non dissimulé.

Les quelques mots murmurés par Kïn étaient clairs. Ysé allait se concentrer sur les pensées d'un seul homme histoire d’en apprendre un peu, quand le cri d’horreur des hommes la fit se retourner.
Elle vit avec dégoût, la tête de l’homme se balancer au bout de son cor. Sindérion l’avait tué avec froideur, Ysé percevait les pensées de ce compagnon, un peu violent parfois.

Depuis ce geste, les pensées des deux hommes restaient fixées sur la peur de mourir, toute pensée sur ce De falque avait temporairement disparue. Ysé regarda avec dédain Sinderion.

Tu ne pouvait pas attendre un peu … Tu les as terrorisés …

La jeune femme se retourna vers Kïn, le nain dut comprendre son regard, il se rapprocha des deux hommes terrorisés. Meksgab n’avait pas perdu de temps non plus, sautant sur l’occasion. Le gobelin asticota les deux hommes, Ysé était répugnée par des pratiques aussi malsaine.

Vous feriez mieux de parler, sinon cet Elfe s’amusera avec plaisir avec vos têtes …

Le sourire cynique du gobelin voulait tout dire. Ysé se retourna, les deux hommes semblaient muets … Cherchant plus un moyen de s’enfuir que de parler avec eux, l’humaine ne pouvait rien faire pour le moment .
Kïn se rapprocha des deux hommes.

De Falque ? C’est votre seul chance. Ajouta-t-il d’une voix terne, fixant les deux hommes.

Les pensées des hommes s’accélèraient, se regardant ils hésitaient à parler. L’information semblait de grande importance. Ysé distingua des bribes de pensée, une ville, l’auberge et le nom d’un homme de main de ce De Falque. Ils avaient les informations nécessaires à leur besoin, elle a réussit à distinguer les parties importantes.

J’ai les informations.

Sur ces paroles Ysé commença à sortir de la grotte, l’odeur du sang l’envahissait et la dégoûtait quelque peu.
Elle perçut la soif de sang de Sindérion, le regardant allé vers les informateurs avec dégoût, elle n’osa pas l’arrêter, ses pensées meurtrières étaient bien trop implantées dans son esprit.
Le gobelin la rattrapa, d’une voix nasillarde il la questionna, Kïn se rapprocha aussi suivit de Khrominsia.

Alors où est ce De falque ? Le regard du gobelin semblait luire de malice et d’envie de vengeance, Ysé pouvait sentir le désir du Gobelin monté en lui.

Ils ne savent pas où il est exactement dans Belthil, mais son homme de main se trouve dans une des tavernes marchandes les plus riches de la ville. Un certain John, un humain apparemment.

Sur ces mots, on entendit le rire joyeux de l’elfe alors qu’il décapitait l’un après l’autre les deux hommes recouvrant lame et vêtement du sang des victimes. L’elfe les rejoignit alors qu’ils sortaient de la grotte.

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