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 Monologuer a deux

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Sanz
Littéraire et rôliste
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Sanz


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MessageSujet: Monologuer a deux   Monologuer a deux Icon_minitimeJeu 6 Jan - 20:55


l'air est plein d'un terrible alcool
filtré des étoiles mi-closes
les obus caressent le mol
parfum nocturne où tu reposes
mortification des roses

Fête, Apollinaire



Il avait des dents jaunes et des rides ajointées sur le nez. Lavés, s’aidant générique d’un joint, son air blasé sur ses lunettes de jaspe, ses yeux blanchis par la poudre blanche regardaient s’immoler l’air hideux dans le ciel. Il pouvait vous promettre que la terre était belle, les maisons radieuses, qu’il en fallait du temps a ramper un peu, ramper pour rien, et puis s’amuser ; mais qu’il ne fallait pas toucher aux nuages.

Ces beaux nuages.

Il glissa sur le fil de fer courant le long de l’escalier, la rampe l’écorcha, il écorcha son nom en le zézayant face à l’inconnue surgie du noir, nouant l’aube arrachée le long d’une robe parfaite en longue volettes poudreuses et en nuages :

- Maman ! Elle a touché aux nuages !

Maman ! Maman, elle est allé dans le ciel et puis elle a disparu. Pourtant elle le savait. Parfois il faut être à terre, comme atterre, enterré. Par le cri que font les enfants quand ils rêvent.
Les enfants, ça ne rêve plus vraiment.

- Elle a appris. Elle ne touchera plus aux nuages.

- Pourtant le moutonnement sous ta jupe fendue crie haut tout le contraire !

Il pleurait, sur la grève de ses voyages oniriques jamais il n’avait osé aborder le vaste récif que forment les nuages, massifs, qui fuient dans le ciel les regards atrophiés, atterrés, des criques que l’ennui ont déformé d’abord et que les poussières d’or que sont les mers de sable n’ont jamais pu voiler.

- Je veux dire que lavé, ajointé de poudre, il pouvait nous compter que les pierres sont peut-être sale, et tristes, perdues au fond d’un trou, immobile même si tu chantes, toi l’enfant, mais on pourrait la prendre dans sa main, la caresser, briser l’angle et lui donner figure, lui donner allure, la faire ramper un peu et la voir , belle, immuable dans sa veste d’apparat ; belle comme un immeuble. Un nuage, un nuage, qu’en ferais-ton ?

On pourrait se noyer dans un nuage.

Voilà, on pourrait s’y noyer, et c’était ça justement qui faisait peur à l’enfant. Ho ! caresser il n’était pas contre, le troupeau immobile de ses passions aurait tremblé un peu sous sa main, vite-fait, pas plus. Chanter, il le pourrait aussi, pourquoi pas briser sa voix contre l’éclat du ciel ? l’immuabilité, par contre, il n’y comprenait rien. La rampe qui venait de glisser contre sa raie des fesses et de tracer l’arrête sourde et précise de la construction freudienne de son intime en soie, en velours, de son humidité et de sa féminité, lui rappela qu’il n’était pas grand-chose, et qu’après tout, cette belle chose en face de lui, n’en savait peut-être pas plus. C’était peut-être une salope après tout.
Après tout. Ce n’était pas une question de nuage. Elle aurait touché finalement aux nuages que l’on en aurait rien su. Mais elle a aimé un nuage. Un nuage de velours – une belle chose !

- Une belle chose.

- Attends ! tu n’en savais rien au moment où tu l’as touchée ! tu glissais tes doigts mais le plaisir était encore innocent, tu ne savais pas qu’il fallait aimer…

- Une chose est douce, ou ne l’est pas. C’est ce que je me suis dit après coup, pour justifier mon geste. Et puis j’ai appris l’inanité du désir. J’ai su saisir l’instant de l’être qui se fourvoie sur la route de ses tourments, dans les doutes et les errements.

- Tu t’es laissé embobiner, oui, par un chien, comme d’habitude…

- Oui, mais tu n’aurais pas fait différemment, tu me l’as avoué l’autre jour, avec ta langue…

C’était un jour de chien, quand on crevait la gueule tordue, comme ces vieux rêves qu’on fait en embrassant le trottoir. Nous savons bien, ce trottoir-là, nous l’avons piétiné hier. C’était un jour de chien quand il fallait tout apprendre. Moi j’ai bien appris, qu’avoir les dents jaunes et l’air à terre – A terre Mademoiselle, je vais vous apprendre les pierres, et le temps, et l’Amour – ca ne suffisait pas toujours.

- La vie n’est qu’un nuage, tu sais bien.

- C’était un jour de chien.

- Ouais, mais les chiens font pas des chats.

- Et le lendemain, on a marché dans la rue comme des péripatéticiennes, à s’en rendre malades.

- Tu savais, toi, que « péripatéticiens » ça venait des philosophes grecs qui tournaient en rond ?

- Tu veux dire qu’Aristote… faisait la pute ?

- Je veux dire… que je sais pas ce qu’on a fait, mais que si on y réfléchit… c’était pas bien.
Le débat était clot. Il se rouvrit.

- Ce n’était pas bien d’y réfléchir ?

Au fond les trottoirs ont toujours tourné en rond. Et je ne faisais que les suivre, les embrasser de ma langue avide, vide peut être aussi du temps qu’il fait quand il n’y a pas de nuage. Des pluies sans nuages. J’aimais la pluie, comme on aime un trottoir, sans voir et sans comprendre. Il fallait bien réfléchir, peut-être des trous béants de nos vies, à raccommoder.

- On tourne en rond, à tout réfléchir.

- On réfléchit, c’est tout, qu’y veux-tu ivoire d’autre ?

- Givre voire désir toiser… je veux dire des histoires !

- Moi j’aimais bien marcher sur les trottoirs la nuit, il y avait de la glace par terre, alors on s’étalait de tout son long, et c’était froid et chaud.

- T’es trop sensationnel, c’est tout. Ou sensationnelle, je sais plus comment je dois t’appeler… merde ! On se connaît non ?

- Et vie d’amant, ça te connaît ?

Comme une vieille femme racornie au coin d’un mur, qui dresse encore la patte pour ressembler à quelque chose, à l’image, au temps. A vouloir se reconnaître, connaître du monde dans ces trottoirs ajointés comme ses rides. Ajointés comme les heures qu’elle passe à se demander. Un amant, un aimant, quelque chose, quelqu’un, qui m’agrippe, me tienne chienne, évidement. J’ai bien appris, je suis de celles qui n’ont pas dit non, quand on les appelait Monsieur. Je savais déjà. Les nuages, eux, ne mentent pas.

Gueule de bois, après tout, excuse tout, tu le crois. Tes joints ton style, tu t’es fait tèj’, qu’est-ce t’y croyais ? nan mais les monologues intérieurs ne sont que pour les damnés, pour les dames nées déjà vieilles, racornies par le feu qui les ronge, comme sur une photo au fond des cheminées. L’air hideux vous surprend, d’ailleurs, quand vous les regardez, vous vous attendriez à vous y être préparés, à force, mais c’est comme un premier instant, ou une pénétration, ça troue la conscience d’un trou de balle bien net. Les quelques choses désormais dressés face au vent, gorgés du sang vainqueur n’ont plus que ça en tête, plus que ça à la bouche, et ils se le retournent entre leurs mains moites, ils brisent en instant tout les tabous pour baiser un peu d’insomnie et arpenter les trottoirs à leur tour. Ils sont vieux, moches et dégoûtants, mais ils ont trop vécu pour être encore idiots, au moins.

- Tu as pris des photos ? quand nous faisions l’amour ?

- Nous étions trop moches. Nous l’avons toujours été.

Moi les dents jaunes, toi l’innocence. Moi et mes joints, toi et tes coins. Tes coins de larme au dispensaire quand il fallait tourner en rond encore, pour ne pas voir, pour ne pas rire. Que veux-tu en rire. Les photos. Il en reste dans un couloir, à voler vers les trottoirs. Il aurait fallu rêver.

Rêver les voir épinglé sur un mur, entre le taffetas et ton mixeur, a droite, un peu plus haut. Sous l’étagère. Enfin, chez toi. Quand c’est chez moi. Quand t’es chez l’étrangère, que Kafka n’aurait pas su décrire, quand t’effraies les fangeuses ignominies, que tu t’essuies les mains sur tout ce qui peut passer à ta portée, que t’apporteras ton demain ? quelle pourriture tiens-tu là ? tes dents sont jaunes de fumer mes joints, tes froncements hâtifs ont tracé sur ton front l’histoire de tes subliminaux éclairs de génie… j’ai nié jeunir, rajeunir aussi. J’ai noyé mes yeux dans l’eau et nagé dans ma gêne… je ne voudrais pas faire un pas de plus si il ne fallait pas tourner en rond, si ce n’était pas trop toi, ce trottoir, si narrer n’arrivait pas à calmer mes nerfs foutus, blanchis de poudre blanche, rosis comme par le vent au sortir du sommeil ferait rosir la peau. J’ai dormi toute ma vie dans mon corps comme dans des tentes, pour pouvoir en sortir et revoir le soleil. J’ai mangé mes champignons pour pouvoir vomir et sentir couler sur mon front, enfin, cette abominable goutte de sueur qui me prouverait que j’étais déjà en vie, alors que je ne me souviens déjà plus de ne serait-ce qu’être né ! nez ! ho la splendide candeur de ce nez qui s’étale sous tes yeux est létale ! tu ne vois donc plus rien ? laisse moi te conter mes nuits dedans mon cœur et mes jours de népal et si tu n’as pas peur, laisses moi t’inventer des séjours que natalité n’achève par fatalité que dans ton cul fœtal, dans ton analité, cette normalité…

J’ai glissé. Et puis, qu’en faire ?

- Un jour, nous arrêterons tout ça. Un jour nous aurons grandi, et il y aura un monde sans trottoir, un monde sans nuage, un monde sans pierre ; il y aura ta mère, et puis ton père, et puis le reste, enfin il y aura ma famille, dans leur trou ; moi, moi j’aurai oublié. Je n’aurai même plus les dents jaunes, ni les rêves ; un jour tout ça grandira. La ville, les murs, la ville, les rues. Les chiens seront des chiens, les putes seront des putes. Les pierres resteront des pierres. A trop tourner, ce n’est plus bien droit.

J’ai glissé dans ma vie comme on tombe d’une chaise. On a mal, on se frotte les fesses, parfois on insulte. Le bon dieu, ta mère, ta chaise, ton gosse. J’ai toujours rêvé d’un gosse qui ne saurait que marcher tout droit. A tourner en rond, on construit des nuages. Avec de l’air, un air dégueulasse, qu’on voudrait pas connaître, un air qui rend idiot.

- En même temps, l’air, si il rend pas idiot il rend quoi ? bête ? on va pas me couper l’air bête sous le pieds moi je dis toujours ! alors la famille, tu vois un peu, hein !

- De toutes façons, tout ça, ça a jamais été qu’un gros délire de ta part, et dans tout ça, nous, on existe pas.

- Non vous existez pas, effectivement, mais à la rigueur…

- On s’en fout de la rigueur ! tu vois pas que tout ce que tu dis n’a plus aucun sens ? il faudrait t’aliéner, tiens !

- M’enfermer, plutôt, aliéné je le suis déjà, et vous en êtes la preuve, toi et mes dents jeunes.

- Et jeune maintenant ? mais tu déformes tout ma parole ! t’es un légume, c’est ça ?

- Je suis une lentille…

- C’est ce que je disais.

- Tu me copieras cent fois pour demain matin : « je ne confondrai pas mon trou du cul et un traité d’optique » tiens, ça t’apprendra…

Mais au fond, tout ça tout ça, je crois bien que pour lui c’était juste marrant. Je me suis regardé dans le miroir, dans celui qui traîne sous l’étagère, ou par terre, enfin celui qui m’ressemble à être en bazar, à dix à la fois. Je voyais mon bras à droite, sou l’évier et ma jambe ailleurs près de l’étagère. La même étagère qui ressemble à mon trottoir. Je sais bien qu’il n’y a personne, je sais bien qu’on m’attend pas, qu’on m’entend pas, je sais bien qu’il est parti. Il a pris la porte comme on prend un mouchoir, sans regarder peut être, juste en pressant sa main sur le tissu et puis en s’oubliant. Moi j’ai rien oublié. Moi je suis resté. Dans un trou, avec du verre cassé, à regarder parfois par le fenêtre, en tournant la tête, en me disant qu’il faut bien. Il faut bien que moi aussi, je raconte. Comme ils ont toujours raconté, à la télé. Sur mes dents jeunes, sur mon innocence.

Sur les beaux nuages, la bas, les beaux nuages.

L’herbe aux nuages, est tendre. M’étendre dessus, prétendre que je n’en ai rien su. J’ai précipité ma course et fait rouler dans mes jambes la douleur qui s’incarnait doucement. Rouge m’a dit : « vous volez bas ce soir » et je lui ai répondu : « va t’faire foutre ». il l’a bien pris, j’espère. Je n’avais même plus une once de cerveau mais je me suis récapitulé les évènements, voyons-voir… un torché descend un escalier en glissant : plaisir solitaire. Deux camés discutent : plaisirs solitaires. Ils ont rien compris : déplaisir commun. Je me fous de leur gueule, et ça, c’est pas de la merde question plaisir solitaire, c’est même, je le dirai, solaire… j’ai envie de brûler, maintenant, et ça dans une cave…

Dans une heure ou deux, j’aurai fini.

Dans une heure ou deux. Ce s’ra fini.

J’aurai roulé, roulé comme un nuage.

Comme une bosse sur le dos d’Quasimodo.

J’aurai roulé, roué de coups ma voix, j’aurai loué les dieux de leur clémence, et je serai descendu, faire descendre, je serai que des cendres, je serai cool bébé.

Cool.


.S.phlaurian
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Lilith
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MessageSujet: Re: Monologuer a deux   Monologuer a deux Icon_minitimeMer 19 Jan - 20:01

Sur les trottoirs gelés on avance a petits pas, comme si ça allait nous sauver de ne pas aller franchement vers la chute. On marche, on marche et le nez aux nuages, c'était inévitable. On tombe. Alors les fleurs bleues s'épanouissent sur nos genoux et nos hanches et leurs corolles moirées, sombres et violettes sont du plus bel effet.


J'aime beaucoup ce dialogue, dense et aléatoire. Pas tant que ça. Comme l'impression que, pourtant.
J'aime l'idée qu' Aristote puisse tapiner au coin d'un forum de la grèce antique ^^

J'aime ça.
Citation :
Un jour, nous arrêterons tout ça. Un jour nous aurons grandi, et il y aura un monde sans trottoir, un monde sans nuage, un monde sans pierre ; il y aura ta mère, et puis ton père, et puis le reste, enfin il y aura ma famille, dans leur trou ; moi, moi j’aurai oublié. Je n’aurai même plus les dents jaunes, ni les rêves ; un jour tout ça grandira. La ville, les murs, la ville, les rues. Les chiens seront des chiens, les putes seront des putes. Les pierres resteront des pierres. A trop tourner, ce n’est plus bien droit.

Parce qu'en mon esprit je circonvolutionne, parfois un quidam me fait penser droit et je me perds. Mon esprit envisage au détour d'une rue, une avenue sans trottoir. Comme ici, ils seraient grignottés, petit à petit mangés, dévorés par la neige et la glace. Et leur absence ferait naitre ces fleurs noires qui décoreraient si bien la blancheur des nuages.
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