Un détour par les bois

Melaka s'était éloignée d'Atalantë quelques temps pour pouvoir profiter de la meute qui l'avait vu grandir. De retour vers la civilisation, la forêt qu'elle aimait tant commençait à s'évanouir au rythme de ses pas. Gipsy marchait tranquillement à ses côtés jusqu'à ce qu'il se fige subitement. Surprise par la réaction soudaine de son ami, la jeune fille observa dans sa direction avant d'apercevoir une silhouette. Une femme étrange faisait briller sa peau déjà dorée sous les rayons perçants du soleil. Des écailles dessinaient ses membres et une impressionnante chevelure rouge tombait en cascade sur ses épaules. L'elfe-vampyre resta bouche bée devant cette créature qu'elle n'aurait su nommer.

Allons la voir, lui souffla intérieurement Gipsy.

Melaka n'eut pas le temps de réagir à la proposition de son frère qu'il s'élançait déjà au devant de l'inconnue.

Un murmure à son oreille la tira de ses rêveries.

"Es tu donc inconsssciente ? Quelqu'un t'obssserves et toi tu ressstes là ! Plantée comme une bracasss des sssables."

Au premier sifflement, elle était déjà tapie dans les fourrés, le souffle imperceptible, l'oeil vif ; la cascade de ses tresses brunes avait perdu son éclat flamboyant.
D'un murmure a peine audible, elle répondit à l'impertinent :

"Vas tu cesser de siffler ainsi ?! Je vais t’effacer comme les autres !

Il reprit alors sa forme initiale, lové derrière son oreille, petit tatouage insignifiant.

Alors que l'étrangère pénétrait dans la clairière précédé d'un loup, Akhésaë la détailla pour déterminer sa Nature. "Des oreilles d'elfe, de fines canines, et elle semble liée au loup ... étrange." Songeât-elle.

"Qu'en penses tu ?
- Ne devais-je pas ressster muet ? ... mi-elfe mi-vampyre, sssatisssfaite ?
- Oui. Mais pour le loup ..."

- Qu'attends-tu ?! Tues là, elle t'a vue sssans tes protectssions !
- Ne me connais-tu qu'une nature assassine? Si je la tue, je tues le loup et ça me répugne."
- Au diable le loup! Sssacrifierais tu ton sssecret pour la vie d'un loup?
- Oui, Dzia!"

Aussitôt le trait d'encre s'immobilisa.

A peine entrée dans la clairière, Melaka chercha des yeux l'inconnue qui s'y prélassait quelques secondes auparavant. Même Gipsy semblait déboussolé par sa disparition. Néanmoins elle pouvait ressentir sa présence et son esprit lui soufflait des murmures imperceptibles, jusqu'à ce que quelques mots se distinguent de ce chuchotement :

Je tue le loup.

Un sursaut détacha la jeune femme de ses pensées et elle s'éloigna vivement en prévenant son ami.

Recule ! Vite ! hurla-t-elle mentalement.

L'animal ne se fit pas prier et la rejoint un peu plus loin. Melaka voulait en savoir plus sur la créature qu'elle avait aperçu et ne supporterait pas de repartir maintenant. Toujours sur ses gardes, elle l'interpela donc à haute voix.

Je sais qu'il y a quelqu'un ici ! Qui êtes vous et que voulez-vous ?

" Je sais qu'il y a quelqu'un ici ! Qui êtes vous et que voulez-vous ? "

- Bravo ! grâce à toi nous sommes repérés !
- Ah, mais qui a fait appel à mes ssservicsses plutôt que de me laissser dormir ?
- Tu aurais pu t'abstenir de tes derniers commentaires, voilà tout !

Il ne me reste que deux solutions, la fuite, ou l'affrontement. Je vais m'assurer qu'elle n'aille pas crier à tout va ce qu'elle a vu, songeât-elle en passant ses protections.
Après quoi, elle se leva et présenta ses mains, paumes ouvertes, en avançant vers la nouvelle venue.

- N'aie crainte, je ne blesserai pas ton compagnon.

Devant l'air interdit de l'efle-vampyre, la fille du désert poursuivit :

- J'ai observé ta réaction puis celle de ton loup. Aurais-tu communiqué avec lui par télépathie ? Tu n'as dû saisir qu'une fraction de mes paroles, pour être à ce point effrayée.

L'intruse eu un mouvement de recul.

- Je te prierai de ne pas t'enfuir, j'ai à m'entretenir avec toi sur ce que tu as vu, ou cru voir.

"tu pourrais lui révéler ton nom avant qu'elle ne décssède, sss sss sss.
-Dzia !"

L'inconnue s'était avancée devant Melaka de manière pacifique. Pourtant, son instinct de survie trônait toujours dans sa tête et elle dévisageait encore son interlocutrice avec méfiance.

- Je te prierai de ne pas t'enfuir, j'ai à m'entretenir avec toi sur ce que tu as vu, ou cru voir.

"tu pourrais lui révéler ton nom avant qu'elle ne décssède, sss sss sss.
-Dzia !"

L'elfe-vampyre transforma son mouvement de recul en un pas avant qui la mena face à l'étrangère. Le calme environnant se mêlait à celui des deux femmes qui se toisaient, chacune si différentes et pourtant réunies par le hasard. Se redressant pour mieux l'examiner, Melaka lui adressa enfin la parole.

Qu'est-ce que je suis sensée avoir vu ? Beaucoup de choses étranges se passent régulièrement par ici. Mais j'avoue n'avoir jamais rencontré quelqu'un qui te serait semblable. Et merci bien, je ne suis pas en sucre ! finit-elle en foudroyant du regard le serpent maintenant immobile sur la peau halée de son propriétaire.

A qui voudrais-tu que je répète ce que je viens de voir. Je ne suis même pas capable de l'expliquer clairement ...

La jeune femme était un peu surprise des mesures draconiennes que les deux acolytes voulaient prendre s'ils étaient dévoilés au grand public. D'un autre côté, elle comprenait que certaines choses doivent rester secrètes et que chacun fait en sorte de protéger ce qu'il est, à sa manière. Après un court instant de réflexion, Melaka poursuivit.

Comment peux-tu connaître ma nature ? Sais-tu quelque chose à propos de mon père ?

Un peu sur la défensive et surtout très curieuse, l'elfe-vampyre se laissa envahir par ses pensées. Les yeux de Melaka avaient alors pris une imperceptible teinte écarlate lorsque l'étrangère en était venue à évoquer ses origines. Son regard se vida du monde qui l'entourait pour se plonger dans des bribes de souvenirs incertains.

Melaka ... l'appela son jeune frère.

Son nom vibra dans son esprit et la ramena dans la réalité présente.

Je veux en savoir plus sur elle. Peut-être pourra-t-elle m'aider à obtenir de nouvelles informations concernant ma famille, souffla-t-elle à Gipsy.

Elle se tourna ensuite vers l'inconnue qui semblait l'observer tout autant qu'elle.

Je ne connais toujours pas ton nom. Qui es-tu ?

Je m'appelle Melaka. Et voici Gipsy, mon frère loup, répondit-elle.

La jeune femme réfléchissait à ce que venait de lui dire Akhésaë. Fille du désert et du soleil. Étrange qu'elle ne soit pas dans un lieu plus approprié à ses origines, comme Sûl Nar par exemple. D'autant plus qu'elle n'avait toujours pas révélé qui elle était véritablement ... Ses longs cheveux l'intriguaient particulièrement. Melaka n'en avait jamais vu de si beaux, leur couleur brune sous les arbres du bois les rendaient fascinants. D'autant plus qu'ils cachaient son regard qu'elle aimerait tant pouvoir découvrir également.

Alors, amie ou ennemie ? s'impatienta l'animal au pelage de jais.

Je ne sais pas ... Elle aurait eu cent fois l'occasion de nous tuer. Je ne pense pas qu'elle soit ennemie, rétorqua l'elfe-vampyre.

Comment se fait-il que tu sois seule, si loin du désert ? demanda-t-elle ensuite à Akhésaë.

Voyant que sa réflexion semblait gêner Akhésaë, l'elfe-vampyre poursuivit sur un ton plus léger.

Quoi qu'il en soit, je n'ai jamais vraiment fait attention à toutes ses règles ! rigola-t-elle. Lorsque je vais en ville, c'est uniquement pour récupérer quelques vêtements et un peu de nourriture.

Elle s'étira nonchalamment et surveilla inconsciemment les alentours. Ses pupilles émeraude pétillaient, en accord avec sa bonne humeur. Melaka appréciait les nouvelles rencontres, même si au départ elle se tenait toujours sur la défensive. Son éducation lui avait laissé quelques réflexes défensifs.

Au fait, qu'est-ce que tu vends ?

Venins, carapaces rares, et autres babioles. Quel travail fais tu ?

Melaka laissa échapper un petit rire cristallin.

Moi, je ne travaille pas. Je ne suis pas habituée à partager le quotidien des gens de là-bas.

Elle pointa Galvorn que l'on apercevait au loin.

Je vis dans un monde où il n'est nul besoin de travailler pour gagner sa vie.

Elle adressa un sourire complice à Gipsy qui se laissa caresser la tête. Le simple fait d'évoquer sa famille adoptive lui procurait toujours une sensation de bien-être, comme si en parler authentifiait la situation. Ses souvenirs dansaient dans sa tête, tous des évènements importants qui faisaient ce qu'elle était aujourd'hui.

Que veux-tu dire ? demanda Akhésaë.

Lorsque tu grandis dans la forêt et que tu apprends à te servir de ses ressources, la ville ne te sert presque à rien. Bien sûr je m'y rends quelque fois ... Je récupère ce dont j'ai besoin, mais je retourne rapidement d'où je viens. Je ne me sens pas à ma place là-bas.

- Vouszzêtes faites pour vous entendre ... murmura le tatouage serpentiforme.

Zéa ne pris pas la peine de relever le commentaire de son "ami".

- Je connais également ce mode de vie.
La patience étant pourtant son point fort, elle était décidément trop intriguée par le loup.

- D'où vient ce lien que tu partages avec le loup ?

D'où vient ce lien que tu partages avec le loup ?

Melaka sentait la curiosité frémir sous la peau de son interlocutrice. Pourtant il lui semblait qu'elle était partagée entre son envie d'en savoir plus et son instinct qui lui conseillait de ne pas trop en dévoiler sur sa propre personne.

Je ne sais pas vraiment d'où vient ce lien. Je suis télépathe. Mon don marche parfaitement avec mes amis loups, mais j'ai parfois du mal à l'utiliser quand il s'agit d'autres races. J'ai seulement le souvenir qu'il me provient de mon père.

L'elfe-vampyre était fière d'évoquer ce qui faisait d'elle une enfant de la forêt. En temps normal, elle se serait déjà enfuie, mais Akhésaë semblait être quelqu'un d'intéressant et surtout qui ne lui causerait pas de tort. Du moins pas dans l'immédiat. Elle avait à présent complètement baissé ses gardes et discutait légèrement avec sa nouvelle amie.

Je sens une autre présence à tes côtés. Toi aussi tu as un compagnon de route ?