Industriée de bleus et de blancs cassés.

Perdues dans cette eau à la teinte brune, mes lèvres parlent d'un futur pas si lointain dans lequel elle m'appartenait. L'envie folle de s'appartenir, de danser dans les ranch sudistes au son cadencé d'un violon de diable. Ce message intime qui s'explose de visage en visage le long des commerces vides des dimanches que l'on passe à compter nos aînés. Puis, toute la puissance que l'on aura ainsi bazardée se lézardera et les convictions feront profil bas face à la réalité commune de cette société goulue. Parce que les images que l'on balance n'ont de sens que celui que l'on se vole à soi-même dans ces moments de réflexion personnels qui n'ont bien peu d'intérêt pour les autres. Ces autres qui nous sucent, sucent la moelle, bien au delà de notre force productrice même.

Car le rêve, nous l'avons gentiment banni, détourné de son opinion première pour le poser en ornement d'une industrie contrôlée d'une imagerie, d'un cinéma, d'une presse aveugle et morte. Sa domestication a été faite et s'applique à défaire les ambitions personnelles d'exploration de nouveaux horizons. S'appliquer à tourner la page, tout est dans le geste, avec souplesse et délicatesse, sans intérêt pour ce qui se lit, juste appuyer la technicité sans même se rendre compte des mots qui défilent sur le papier. Voilà ce à quoi on veut nous restreindre et le pire c'est l'autre qui te tape parce que tu ne tournes pas les pages, mais lis avidement ce qu'il se dit. Complices sermonneurs, la population crée ce sentiment d'angoisse permanente pour ce qui ne tourne pas la page en cadence, faut posséder la technique, s'orienter technologique, partir en vacances à la mer et si possible à Deauville.

Alors je préfère rester seul si ça me permet de pas prendre de coups, si ça me procure le droit de ne pas avoir à faire comme chacun, à faire semblant de m'extasier devant des folies mises en boîte pour lesquelles on me demande de payer. Dans les ranchs sudistes, assis sur cet harmonica, je ne fais pourtant que passer, je contemple avec ces yeux ahuris ce monde étrange auquel je suis censé appartenir. Je me fais cette réflexion, les dieux n'ont décidément pas fait tout le monde dans le même bois, il y a les crapauds en grenouillères qui s'exténuent à demander des génuflexions, et puis il y a ces statues de marbre que l'on aura gravée tellement profondément qu'elles sueront rage et stigmatisation.

On ne se donne pas le temps, pas le droit de faire ce que l'on doit. Pas de payer ses impôts, pas de sauter dans le métro ou voter en avril ou en mai. Faire des émules de recherche humaine que l'on transmettrait à ses enfants, ce besoin tout intime qui nous intime de poser des questions, de virevolter dans la connaissance pour passer outre l'instruction, pour passer outre ces barrières imperméables de l'éducation nationale. Travailler son rêve et lui donner des coups, l'entraîner à survivre en tout temps, tout honneur, le faire grossir sous un soleil aimable et le faire parfois pleurer entre deux caniveaux. Mais il faudra passer par là, si personne ne se donne ce droit de faire ses devoirs, y aura-t-il des humains pour penser cette terre quand les miens seront morts ?

Y a d'la vie dans ma mort. Même si c'est une morsure, j'aurais aimé qu'elle ne soit pas certaine.
Il y a beaucoup de choses que j'ai aimé.
D'abord t'embrasser sans attendre une douche froide.
Ensuite te monter en épingle pour tricoter des plans de comète.
Enfin t'accepter telle que tu es.