Il se lève, je me retrouve sur le ventre, jambes écartées, le menton, droit, posé à même le sol. Je lui indique là ma volonté de ne pas le regarder. Il doit me prendre et d’une certaine manière me surprendre. C’est un jeu, sans suite, furieux, entre deux hommes. Il plonge en moi. Voici l’épée et le ravin. Je suis devenu immense. Un instant en moi, je me suis senti hors de tout.
A ce moment précis j’étais au début de l’impasse et lui à la fin. Gisant. Notre prochaine rencontre serait la dernière.
Il m’a pris, façonné, séduit, caressé, j’ai cru au partage. On m’a produit, j’allais réussir, on m’abandonne.
Pas de corps qui s'entremêlent pour dire au revoir ni même adieu. Pas de baisers. Pas de bras.
Objet. Fantasme. Fiction. Foutaise.On courait à la perte mais on courait à deux.
A deux c'est mieux. C'est plus simple, on se jette ensemble dans le vide. On s’écrase ensemble sur les pavés.
Le vide : C'est l'enfant du néant et le père de l'inclination.
Il avait sans doute toutes les qualités de ces êtres qui n’ont que des défauts, dans notre dissemblance nous nous assemblions. Mais du reste on n’atteint jamais la conscience de quelqu’un. Cette histoire était ma création, mon œuvre ultime. Me prouvant au moins une fois que c’était impossible puisque je n’avais cessé de le clamer. Par toi je révélais la vanité de ma démarche.
On se laisse aller à la barbarie des sentiments, à la cruauté des hommes, à la bestialité des vies. On s’abandonne, misérables marionnettes, pantins désarticulés tirés par des fils invisibles qui nous poussent à nous abhorrer. Consumé par les doigts d’un autre, on brûle au milieu des draps de satin qui deviennent notre cercueil. Comme si nous voulions satisfaire un désir d’autodestruction. Ce que je venais de tuer en moi ou ce que je venais de suicider en toi n’était au fond qu’une histoire banal. Combien de noms sont devenus des malédictions au fil du temps ?
« Je ne serai jamais la princesse de Clèves des pissotières » disait l’autre.
Adieu. L'histoire s'achève sans même avoir commencé. C'est une histoire morte née. Sans promesse et sans sentiment. C'est l'histoire d'un homme qui trompe un homme avec un homme. Mais on n’y voit pas les regrets. Habilement brisé en moi le sentiment de l’immobile. Je rampe avec mon corps. C’est tout. Et c’est beaucoup.
« Le problème ce n'est pas le coup de foudre, c'est après. » Mais c'est une histoire compliquée. De celle que l'on conte autour d'un verre de vin. Les vérités sont mortes sous les amas de mensonges, ceux que l'on fait aux autres dans la moiteur des corps et ceux que l'on se fait le reste du temps.
Un pacte est une histoire qui s'écrit dans la violence, mais ce qui est né dans la violence ne doit pas se terminer dans celle-ci. C’était la première leçon du maître, la dernière leçon du père.
« Entends-tu les battements du cœur qui s'ahane. T'a-t-on déjà lu de la poésie? De celle, dont les mots, qui se gravent dans la chair deviennent impérissables ?
Je sors du rêve. Je sors et j'entends la voix d’une chimère.
Adieu.
Adieu.
Le père est mort. L'amant est mort. Il ne reste rien. Pas même un pleur, pas même un repentir. As-tu déjà entendu de la poésie?
Adieu.
Adieu.
3 mois c'est un adieu. »