Nouvelle vie (Rôle Play en Ter Aelis)

Ils étaient dans une pièce lumineuse et qui sentait le lilas. Les tons bleu-violet pastels étaient apaisants et le soleil canalisé par une petite fenêtre réchauffait sans excès. Un lit et une table de chevet étaient les seuls meubles apparents. Pourtant, la chambre ne faisait pas impersonnelle, au contraire. La décoration, quelques tableaux venant d’Atalantë et des bouquets de fleurs séchées, révélait sans difficulté la personnalité de la maîtresse de maison. Douceur et amour.

L’apparition de Grendelor et d’Aspha, le peintre essayant tant bien que mal de ne pas s’écrouler sur sa belle-sœur, troubla la quiétude ambiante. Allongeant comme elle le put Aspha sur le lit, elle entreprit de lui enlever ses affaires tout en le pressant de s’expliquer. Ce qu’elle vit sur son bras et son torse l’horrifia.

Explique-moi, murmura-t-elle, tout en posant une main fraîche sur son front afin de commencer un rapide diagnostic.

Aspha essayait de regrouper ses pensées pour pouvoir fournir une explication claire… Ce qui dans son état n’était pas évident quand vous sentez vos forces partir et un démon se réveiller en vous. Tout en gardant son œil atteint fermé il lui murmura :

- J’ai encore un peu trop forcé sur les sorts interdits durant mon voyage. Mon bras est plus ou moins encore en miette et ne tient que par le sceau…

La douleur lui fit serrer les dents. Cependant l’air ambiant calmait son esprit et les paroles devinrent un peu moins confuses.

- Ce sceau est un sceau maudit, rempli de la haine et de la violence d’un ancien Roi… La seule chose qui peut le rompre, c’est le contact avec quelque chose que ce Roi détestait… Tout ce qui pouvait être joyeux dans ce monde, tout ce qui lie les êtres entre eux…

La magie du Roi avait grandi en lui. Et il l’empêchait délibérément de prononcer les mots exacts. Il était impossible pour le peintre de dire «Amour » ou encore « Douceur ». Rien que pour dire sa dernière phrase il avait du faire un effort pour trouver des mots non interdits par l’esprit du Roi qui n’aimait pas du tout l’environnement autour d’eux.

Pendant son explication, Grendelor avait senti la magie agir, cherchant à la repousser lorsque son esprit s’insinuait dans le corps du peintre. Plus elle tentait d’y aller en douceur, plus la résistance était grande.

Je comprends, ne t’en fais pas, je m’occupe de toi. Essaye de te laisser faire. Je vais commencer par ton bras, il serait dommage que tu le perdes parce que j’aurais réussi à enlever ce sceau.

Cette petite pointe d’humour et le sourire encourageant qu’elle lui fit cachaient du mieux qu’ils pouvaient l’angoisse qui l’étreignait. Le travail serait difficile. Un minimum de préparation s’imposait. Laissant Aspha seul dans la chambre pendant quelques minutes, la guérisseuse descendit et on l’entendit se mouvoir rapidement dans la maison. Elle réapparut avec dans l’une de ses mains une petite fiole contenant un liquide transparent et dans l’autre une orbe d’un rose doux. Elle posa l’orbe sur le ventre du peintre et lui fit boire le liquide, qui coula, fleuri et léger, dans sa gorge.

Il va te détendre, sans t’endormir. C’est juste pour que tes propres défenses n’interfèrent pas avec ma magie. Je vais déjà avoir bien assez à m’occuper de ce sceau, je ne voudrais pas que tu me résistes au mauvais moment.

S’installant tant bien que mal sur le lit à côté de lui, regrettant de ne pas avoir un fauteuil, Grendelor récupéra l’orbe. La main droite sur le front d’Aspha, l’autre tenant le cristal, la guérisseuse entama le processus. Délicatement, tout en douceur, affaiblissant déjà l’emprise du sceau par sa méthode de travail. Elle commença par le plus gros, l’intégrité des os et affinant de plus en plus. Tendons, muscles, vaisseaux. Il était vraiment dans un sale état. Heureusement, la magie du Roi avait maintenu les cellules vivantes. Au fur et à mesure que le temps passait, l’orbe changeait progressivement de couleur, passant par le mauve et gagnant en noirceur. Malgré l’aide du cristal, la jeune femme ressentait les effets d’une utilisation massive d’énergie, pâlissant. Le froid se propageait dans son corps alors qu’il régnait une douce chaleur dans la pièce. Enfin l’orbe devint totalement noire, vidée de sa substance. Le bras d’Aspha, lui, avait recouvré un aspect normal et le sceau n’avait pas progressé pendant les 3 heures qu’avait durées la guérison. La nuit était tombée, emportant avec elle la lumière bienfaisante du soleil.

Posant l’orbe sur la table de chevet, la jeune femme se leva avec difficulté, luttant contre vertiges et engourdissement. Cependant, son regard bleu était serein et son aura diffusait uniquement les solides sentiments qu’elle éprouvait pour son beau-frère et ami. Nulle part il n’y avait trace de faiblesse, de peur ou d’angoisse. Ces émotions n’avaient pas lieu de citer dans l’environnement du sceau. Quand elle se leva, Aspha bougea légèrement pour la suivre de son œil valide. Il avait lutté sans broncher pendant tout ce temps, s’efforçant au mieux de laisser sa belle-sœur agir.

Je reviens et nous nous occuperons de ce sceau. Ne bouge pas.

Même si l’idée lui avait traversé l’esprit, le tutélaire n’aurait pu se lever du lit. Et encore moins descendre l’escalier. C’est ce que fit Grendelor, précautionneusement, soutenant son ventre d’une main, de l’autre se tenant au mur. En bas, les bruits indiquèrent qu’elle était dans la cuisine, puis dans la salle de bain. Quand elle remonta, ses traits étaient un peu moins tirés et son visage humide. Elle portait un bol fumant qu’elle présenta à Aspha.

Il faut que tu reprennes un peu des forces avant la suite. Alors, fais plaisir à maman et mange ta soupe, dit-elle avec un sourire. Fait avec beaucoup d’amour et assaisonné de quelques herbes fortifiantes. Même si je n’ai pas pu utiliser ta propre énergie pour la guérison, le processus t’a encore plus affaibli à cause de l’action du sceau.

Elle aida le peintre à se redresser et à boire. Il se laissa faire comme un chaton sans force, peinant à rester conscient malgré l’amélioration de son état.

L’intermède était fini, il fallait en finir au plus vite sinon le sceau gagnerait trop de terrain. Remontant avec difficulté sur le lit, les membres lourds et son ventre la tirant, Grendelor s’allongea auprès d’Aspha, lui mettant sa tête au creux de son épaule.

Je vais lui montrer ce que c’est que d’aimer les gens à ton Roi, murmura-t-elle en guise de défi.

Lui caressant machinalement le front, comme une mère le ferait avec son enfant malade, la guérisseuse lia son esprit à celui du tutélaire. Une sorte de musique, harmonieuse, légère, chaude, l’imprégna, baignant son âme dans un cocon doux et cotonneux. Pendant que la jeune femme cherchait la source du sceau, elle partageait avec son beau-frère tous ces instants magiques de bonheur, ces petites choses qui illuminent la vie, luttant contre les impressions nauséabondes qui se dégageaient de la magie noire du Roi.

De l’extérieur, il semblait qu’il ne se passait rien dans cette chambre, doucement éclairée par une lame murale. Ils étaient tous deux allongés, sans bouger, les yeux fermés. Le seul mouvement paraissait être celui de la main de Grendelor sur le front d’Aspha. Pourtant, de subtiles différences apparaissaient alors que les minutes passaient, de plus en plus flagrantes alors que les minutes se transformaient en heures. Les marques sur le corps du peintre bougeaient toujours. Mais au lieu de s’étaler, elles se resserraient, se rétractaient. Alors qu’avant des grimaces de douleur le parcouraient régulièrement, le visage du tutélaire se décontractait et reprenait vie. Sa respiration n’était plus retenue.
A côté de lui, la guérisseuse, elle, s’étiolait. Ses traits étaient marqués, sa peau devenait crayeuse. Une fine couche de sueur la recouvrait et de plus en plus souvent sa seconde main se crispait sur son ventre. Sa respiration se faisait plus courte, haletante.

Les premières lueurs de l’aube apparaissaient quand Aspha ouvrit les yeux. Il s’était endormi, bercé dans le cocon dont l’entourait Grendelor. C’était un bruit, un gémissement qui l’avait éveillé. Encore désorienté, il chercha dans un réflexe son arme, mais ne trouva que de la chair. Il se redressa en sursaut, son arrivée en Ter Aelis lui revenant en mémoire. Tâtant son corps, il constata que le sceau, avait plus ou moins retrouvé sa taille d’origine et ne pulsait plus. Semblant emprisonné, il ne le torturait plus pour l’instant. Aspha semblait avoir retrouver une bonne partie de sa force vitale. Au passage il s’aperçut que son bras fonctionnait parfaitement, il n’avait même aucune douleur. Il s’en émerveillait encore quand un cri le fit se retourner.

Trempée, la lèvre en sang de se l’être mordue pour ne pas crier les heures d’avant, les yeux fermés, Grendelor semblait au plus mal. Sentant le mouvement d’Aspha, elle ouvrit brusquement les yeux et tenta de lui sourire quand elle croisa son regard.

Aspha, le bébé… Trouve Sephi et Cassi, cela fait des heures déjà, souffla-t-elle avant de se crisper à nouveau sous l’assaut d’une contraction. Vite.

Epuisée par les efforts de la nuit, Gren’ commençait à perdre pieds. L’aide d’Aspha avant leur transport lui permit de remonter un peu ses défenses mentales. Mais l’effet ne fut que de courte durée, elles s’effritaient rapidement sous l’action de ses émotions. Ce que pensait et ressentait Aspha lui apparaissait de plus en plus souvent et clairement. Son appel mental avait explosé dans son esprit, lui tirant un gémissement alors qu’elle portait par réflexes ses mains à sa tête.

Allongée dans la crypte, la chaleur que transmettait le peintre lui évitait de devoir lutter contre le froid en plus du reste. Les minutes s’étiraient comme des heures, rythmées par les contractions. Elle avait beau se détendre, la panique montait inexorablement à mesure que le temps s’écoulait. Chez elle, les accouchements de magiciennes se font dans un environnement protégé et contrôlé. Ses pouvoirs auraient dû être bloqués pour éviter tout débordement.

L'elfe était tranquillement attablé au comptoir d'un des bars de Galvorn, son ami nain, Kordrok l'y ayant rejoint suite à sa demande.
Ils s'étaient retrouvés quelques heures plutôt, mettant au point le futur voyage. Une fois qu'il aurait récupéré des derniers évènements d'Alkhazzar.
Les bières du nain descendait aussi surement que le temps passait.

Un appel à l'aide, surgit brusquement dans la tête de Sephi.
Elle était en danger, le moment était venue ? Il ne savait, mais il devait y allez.
Expliquant rapidement la situation à son ami, l'elfe sortit de la taverne, encore légèrement pâle.
La suite s'annonçait compliqué.

L'elfe sortit de la taverne, alors qu'un léger papillon de foudre s'arrêtait devant lui. Lui indiquant le chemin à suivre. Gerbe de feu étincelant à ses côtés, laissant apparaitre un magnifique phénix au plumage de feu.
L'oiseau avait interprété l'inquiétude du Maitre des Images et l'avait immédiatement rejoint.
Attrapant le papillon de foudre comme il put, sans se faire trop électrocuter, l'elfe attrapa la pate de son oiseau.

Ils disparurent à nouveau dans une immense gerbe rouge et or, pour réapparaitre sur la côte d'Atalantë. Relâchant le papillon, l'elfe se mit à la suivre, s'approchant inexorablement de Grendelor, et d'Aspha. Dans quel état serait-elle? La question le torturait.

L'elfe courait derrière le papillon, le suivre était un véritable enfer pour l'elfe. La paleur de son visage s'étalait petit à petit. Les dernières actions l'avaient vidés, et l'avenir ne présageait rien de bien glorieux pour ses forces vitales.
Inlassablement il suivit le papillon. Arrivé devant l'entrée de la Crypte, il eut un demi instant de trouble, au loin il aperçut le dragon de Cassiopée, ainsi elle était déjà là.

L'elfe rentra, traversant rapidement la zone, se retrouvant ainsi juste derrière Cassiopée, une main posé sur le montant pour ne pas tomber.
Elle était là tremblante, entouré de la chaleur d'Aspha qui laissait largement filtré son inquiétude.
Sephi arriva juste à temps pour entendre les dernières paroles de Cassiopée, alors que celle-ci commençait à s'occuper de sa sœur, l'elfe s'approcha, légèrement fébrile.
Il tanguait légèrement, sur place, l'équilibre disparaissant, il fallait recouvrir rapidement des forces.

Sephi se placa de l'autre côté de son amie, laissant le champ libre à la dame de la mer. Attendant la réponse d'Aspha. Attrapant la main de Grendelor, il sentit nombre de sentiment l'envahir, comme des séries de vagues s'engouffrant en lui, laissant oubliant la fraicheur glacial de la main.

Le démon filtrait trop... Beaucoup trop... Les barrières de Grendy commençait à lâcher et le Roi allait resurgir.

- Elle a perdu son énergie en me soignant et en essayant de renfermer une âme qui traine dans mon corps.

Sa respiration se coupa. Une fois reprise il se tourna vers eux, son œil commençait déjà a redevenir pourpre de sang, la pupille blanche au milieu d'un lac noir de chaos.

- Peu importe ce qui va m'arriver. Vous ne vous occupez pas de moi mais d'elle. La chaleur que j'ai dégagé devrait suffire pour la duré de l'accouchement.

Dans un flux magique noir très puissant la marque surgit se brisant contre le sceau d'amour de Grendy. Il fut stoppé bien plus tôt que le Roi ne le pensait. Mais il avait réussi à filtrer, à recouvrir certaines parties de son corps, notamment une bonne partie de son dos, le haut de son épaule droite et un morceau de son cou, les marques s'arrêtaient un peu avant sa mâchoire. Aspharoth se plia de douleur, le sceau rougeoyant était visible à travers sa fine chemise. Sa respiration était saccadé. Il devait se relever, partir loin, avant que le roi tente de se réincarner dans le corps de son neveu...

* Ne vous occupez pas de moi... *

Les vagues étaient de plus en plus puissantes, rapprochées, inexorables. L’arrivée de Cassi et de Sephi, même si elle lui apporta du réconfort, augmenta le trouble de Grendelor. Leurs pensées s’engouffraient dans son esprit et leurs inquiétudes s’amplifiaient sur les siennes. Le contact de l’elfe fut la touche finale qui balaya ses résistances. En lien direct avec lui, la fatigue due à sa dernière excursion dans ses souvenirs s’ajouta à celle que la dame ressentait à cause de la guérison effectuée sur Aspha. Ses vertiges devinrent les siens, sa douleur s’empara du gardien. Elle se retenait de ne pas agripper la main de son ami, comme une noyée à une bouée.
Les pensées d’Aspha l’atteignirent alors de plein fouet. La douleur du sceau multiplia celle d’une contraction, arrachant un cri à la jeune femme. L’idée que l’entité maléfique puisse tenter de s’emparer du corps de son fils la paniqua totalement. Une flambée de peur fusa dans la pièce.

Pars, vite, ne reste pas là ! s’écria Gren’, mi-ordre, mi-supplication, en jetant un regard affolé à son beau-frère.

Elle se rendait compte qu’elle n’avait plus aucun contrôle sur ses émotions. Ce n’était pas bon. Elle ressentait, s’appropriait, amplifiait et diffusait les sentiments présents dans la pièce et les siens propres. Le tout formait un tourbillon qui pouvait facilement paralyser un être humain et qui la tenait elle-même enchainée dans cette spirale. Dans le maelstrom de ses pensées, elle ne put que faire passer un message.

*Protégez-vous de moi. Coupez-vous de moi.*

Luttant pour garder sa lucidité, une comptine enfantine se forma dans son esprit, son refrain comme un rempart fragile contre le monde extérieur. Il fallait absolument qu’elle se calme. Sinon Sephi ne pourrait pas agir et faire revenir l’âme de l’enfant. Si la naissance avait lieu avant… un corps sans âme ne vit pas longtemps, surtout celui d’un nouveau-né.

Sa main vola vers celle de sa sœur.

Cassi, aide-moi.

L’imploration de Grendelor pour qu’Aspharoth parte, envoya une vague mentale encore plus puissante vers l’elfe. Qui sembla sur le point de tomber dans les pommes durant un court instant ! Le contact qu’il avait avec son amie, était obligatoire, mais tellement plus dangereux. Les pouvoirs de Grendelor, l’attaquaient avec plus de facilité malgré ses tentatives de contrôle. Les défenses de Sephi n’étaient pas là, et les ériger seraient compliqué.
Sous les incessantes intrusions, le visage de l’elfe palissait, l’effort qu’il devait fournir pour ne pas sombrer était immense.
Il savait que le contact avec Grendelor augmentait la puissance de ces intrusions mais il ne pouvait se couper, il avait besoin du contact pour accomplir sa tâche. Et abandonner ce pauvre garçon à une vie sans âme était hors de question, il ne supporterait de voir une poupée automate immobile, forme vivante non pensante.
Les dents crispées par l’effort, visage ruisselant de multiples gouttelettes de sueur perlant sur ses cheveux argentés, dégoulinant sur son pâle visage aux traits tirés.
Ses yeux d’un bleu abysse semblaient totalement absents, comme perdus dans l’au-delà, cherchant le réconfort, loin de la souffrance actuelle qu’il imposait à corps et esprit.

Lentement, une mince barrière apparaissait entourant son esprit, absorbant l’ensemble des vagues envoyé par l’humain, les incluant provisoirement dans la protection mouvante qui suivrait les déplacements de son âme dans le corps de l’enfant, le protégeant de Grendelor, à court terme. Il ne pourrait absorber indéfiniment. Il espérait juste qu’elle tiendrait le temps qu’il rende son du à l’enfant.

Levant les yeux, il chercha Cassiopée du regard.

Je ne vais pas tarder à libérer l’enfant, le risque d’un double déferlement de magie est plus que probable. Occupe-toi d’elle, je me chargerais de l’enfant tant que je pourrais. Je contiendrais si possible la puissance de l’enfant, mais assure-toi qu’il ne s’attarde pas en sa mère. Je crains qu’alors les conséquences soient inimaginables.
Dès que tu es prête !

L’elfe se reconcentra, assurant sa protection, repoussant sa lassitude, à l’extrême. Il sentait les vagues magiques tout autour, la densité de magie dans l’air était phénoménale.
Loin au-dessus d’eux résonna un unique cri, chant d’espoir, rengorgeant les cœurs de courage, apaisant les gens.
Le phénix volait au-dessus d’eux, répandant des sources de réconfort et de calme autour de lui.

Elle essayait. De toutes ses forces. De fermer, claquemurer, isoler son esprit de son corps et des esprits qui l’entouraient. La voix de Cassiopée et les efforts de Sephi avaient ramené la tension à un niveau plus acceptable pour l’esprit torturé de Grendy. Malgré cela, elle n’arrivait pas à se maintenir, le début de concentration qu’elle pouvait mettre en place à chaque fois brisé par la lame brûlante d’une contraction. La jeune femme haletait, pâle, transpirante, les forces lui manquant déjà alors que le plus dur restait à faire.

La magie ambiante lui piquait la peau et pourtant ses propres réserves étaient dangereusement basses. Une légère lueur bleutée commençait à apparaître sur ses avant-bras, à peine perceptible pour le moment.

Ses yeux bleu ne quittaient pas ceux de son amie, sa sœur, sa bouée en ce moment si difficile. Même le contact de l’elfe lui semblait lointain, presque étranger. Il était toujours là, présent, et d’ailleurs elle s’était accrochée à son bras dans un réflexe, le serrant certainement bien trop fort mais n’en ayant même pas confiance. Mais c’était dans le monde étoilé de la nymphe qu’elle tentait de puiser réconfort et calme. L’angoisse baissa d’un cran, libérant son souffle saccadé. La tension était encore palpable, chacun des 3 protagonistes concentré sur son action.

Sans s’en rendre compte, Grendy avait plié les jambes. Son corps agissait pour elle, d’instinct. Le moment était presque là.
Sur ses avant-bras, la lueur augmenta, chauffant sa chair. Dans l’état de confusion où était la guérisseuse, elle ne s’en aperçut pas. Mauvais signe.

Une main lui serra violemment le bras, ajoutant une douleur supplémentaire sur le coup à l’elfe. Elle semblait vraiment souffrir, il voyait ses bras bleuir, y voyant un signe néfaste, il se replongea dans sa concentration.
La protection gonflait sous l’ampleur de la magie qu’elle absorbait, son temps de survie s’affaiblissait.
Détachant son esprit de son corps, il plongea dans la fournaise du bras de son amie, chemin menant vers l’enfant.
S’introduire directement par la peau du ventre aurait été dangereux. Il devait tout millimétré pour ne pas créer de problème ou d’accélération des évènements.
Les deux bras de l’humaine ne semblaient plus que magie pur, avec une consistance, la violence des chocs sur le bouclier l’épuisait méthodiquement, comme un être cherchant à le briser lentement.

Lentement il s’approchait de l’enfant, il laissa sa protection se briser lentement lui envoya les ondes qu’il contenait. Le choc fut presque incontenable pour l’elfe. Son esprit prit un coup, mais son corps tomba lentement à terre, respirant tout juste.
Il se trouvait face au corps enfantin, il se glissa à l’intérieur, léger esprit s’infiltrant vers le but final.
L’enfant lui offrait protection contre son amie, qui ne se maîtrisait plus totalement. Il approchait doucement du but, bientôt son esprit et le sceau serait en vue.

Plus haut le phénix tournait dans les cieux, puis descendit doucement, se poser à côté du corps de l’elfe, l’entourant de son aura qui semblait repousser sans mal les effluves de magie environnantes.
Lui permettant un léger répit qui lui serait précieux à l’heure du retour.

L'elfe sentait intérieurement qu'il devait faire vite. L'enfant semblait demander physiquement à sortir.
Il ne devait plus lui rester beaucoup de temps quand il arriva devant le sceau.
Le défaisant sans problème, d'un toucher. Comme la venue du libérateur.
l'elfe plongea au cœur du royaume intérieur chercher l'esprit de l'enfant et le guider à la sortie.

Les gémissements et pleurs de solitude qu'on entendait dans le lointain, lui indiquèrent la direction.
Le temps passait plus vite en ces lieux qu'au dehors, mais ce n'était pas une raison pour trainer.
Les âmes était le reflet physique exact de leur physique avec en plus la puissance psychique.
L'enfant était imposant, l'elfe s'assit en douceur à ses côtés, lui expliquant qu'il allait le ramener chez lui.

Lorsque le petit se tourna vers lui, il lut l'interrogation, la froideur et la joie, multiples émotions qui parcourait l'âme. Sephi remarqua, l'immense dragon qui s'étalait sur sa poitrine, la forme en imposait. Comme réceptacle d'un pouvoir qui lui était inconnue.

Attrapant la main de la jeune âme, il la raccompagna, l'aidant à franchir le portail, et réintégrer parfaitement son corps. L'elfe restait là, ombre invisible à ses côtés, vérifiant que l'âme s'adaptait rapidement à son nouvel et véritable environnement. L'enfant acceptait pour le moment sa présence, comme si elle le réconfortait, lui assurant qu'il ne ferait que ce qu'il devait faire.
Découvrir un corps que l'on n'avait parcouru depuis plusieurs mois, n'est pas simple si jeune.

Progressivement l'elfe s'éloignait, prêt à partir au moment ou la dernière partie de l'enfant quitterait e corps de son amie. Car il n'avait de lien physique avec celui-ci, seul moyen de retrouver son corps à lui. La protection de l'enfant, de la puissance de sa mère, l'empêchait de savoir ce qui se passait au dehors. Le déroulement des évènements restait inconnue de l'elfe. Ce qui l'inquiétait le plus, était l'état physique de son corps.

Elle avait l'impression d'être hors de son corps. Pourtant la douleur qui la déchirait était bien la sienne, le contact de l'elfe bien concret, le calme dont l'enveloppait sa sœur bien présent. La fatigue, à la limite de l'épuisement, lui procurait un détachement bienfaisant, laissant les réflexes de son corps agir.

Alors qu'il reprenait place dans son corps, guidé par Sephi, une interférence se créa entre les 2 courants de magie. Les réserves de Gren', déjà basses, furent brutalement vidées, tandis que le corps de l'enfant s'emplissait, se saturait, préparant l'arrivée de son âme double. Sa tête commença à apparaître. Des cheveux bruns, collés, mais qui déjà montraient des reflets cuivrés. La main de Cassiopée se tendit, effleurant la peau maculée de liquide. Au contact, la nymphe sentit une partie de son énergie la quitter, absorbée par le petit être qui faisait son entrée dans le monde.

Grendelor avait clos ses yeux, coquille vide. Dans un état second, elle sentait ses avants-bras la bruler alors qu'elle était assaillie par les pensées de ses compagnons. Elle entendit même Issac, quand bien même la portée de ses paroles lui échappa, trop engourdie. La lumière s'intensifia, remonta sur ses bras. Seule la main de Sephi dans la sienne lui apportait un peu de fraicheur. L'idée tenta de se frayer un chemin vers sa conscience. Il n'aurait pas du être aussi froid. Alors qu'elle se redressait une nouvelle fois pour expulser un peu plus ce corps qui se séparait d'elle, Gren' ouvrit les yeux, posant son regard turquoise sur l'elfe. Pâle, trop pâle. Faible, trop faible. mais elle ne pouvait rien faire. Elle était vide. A peine éclose, cette pensée enfanta un nouveau flux de magie. De son fils à elle, de elle au gardien, appel pour le faire revenir. Mais la double âme ne se laissait pas faire. Elle ne savait atteindre Sephi, encore inconsciente de ses facultés. Mais rapide et puissante, elle reprenait une grande partie de l'énergie avant qu'elle ne passe dans le peintre. Et s'abreuvait à la source de la nymphe tant qu'elle pouvait.

La dame turquoise, elle, n'était plus consciente, renvoyée dans les limbes de son esprit par l'entité qui sommeillait en elle. Son corps était maintenant recouvert d'un réseau de marques d'un bleu nuit et son regard était d'encre.

Alors que les dernières parties de l'enfant quittaient le corps de sa mère, l'elfe le quitta, enlevant sa calme présence du corps de l'enfant.
En un instant la douleur l'envahis, il percevait à nouveau son corps, l'immense faiblesse de celui-ci.
L'intérieur même du corps de son amie était parcouru de cette chaleur et lueur bleutée. Ce qu'elle représentait le peintre ne le sait, et sa première priorité, était de retrouvé son corps.
Lentement le peintre parcourait le corps, cherchant à rejoindre le point de liaison, utilisant ses dernières forces comme protection contre la nature ardente l'entourant.

La reprise de conscience fut douloureuse, ses yeux se révulsèrent, il cracha une gerbe de sang. Tentant avec peine de se redresser. Enfin l'ampleur de la situation lui apparut. Cassiopée tenait l'enfant entre ses bras, elle parlait mais il ne l'entendait. Grendelor, semblait absente, comme si elle n'était plus elle même. Un sursaut de peur l'envahis, seul un cri de son oiseau le rappela. Il était là devant lui, chantant une douce mélodie annonçant la venue au monde de l'enfant, réconfortant les gens, ressourçant lentement son maitre.

L'elfe sentait l'énergie le remplir de nouveau, ébahis presque, tant l'enfant en imposait.
Jambes légèrement tremblantes il s'appuyait contre le mur pour tenir debout, laissant son phénix le revigoré encore peu. Il pourrait avoir besoin de lui, hors de question dans ces conditions d'utilisé sa régénération rapide. Sephi ne pouvait s'empêcher de tourner les yeux vers son amie, elle qui pour le moment semblait inconsciente, alors que son fils venait de naitre.

L’entité avait répondu au besoin impérieux de Grendelor. Son fils quittait sa chair mais avant qu’il n’emporte avec lui sa mère, le flux de magie s’était inversé, abreuvant le corps de l’elfe et de l’humaine. Le gardien put réintégrer son enveloppe malgré sa faiblesse. Au premier cri du nouveau-né, elle s’enfuit, réintégrant sa cache, rendant son âme à la guérisseuse. Son rôle était joué, la vie avait repris ses droits. En un instant, aidé par les tissages de la nymphe, les lignes bleues disparurent et les yeux noirs retrouvèrent leur éclat.

Une douleur lourde imprégnait son ventre, une lassitude sans nom envahissait ses membres. Pourtant, le sentiment qui la prit à la vue de son fils répandit une énergie nouvelle sur ses traits, animant son visage blafard, illuminant son regard, chassant la tension qui régnait encore. Joie débordante, fierté et amour inconditionnel. Il était là, beau, puissant, dans les mains de sa sœur. Au lointain, un appel retentit, écho du cri de l’enfant.

-Prends l’enfant, il est nôtre !!!

Le cri du dragon brisa la quiétude du moment. Tendant les bras vers Cassiopée pour recevoir son fils, elle parla d’une voix faible mais ferme.

Oui, il est des vôtres, par la folie de Sanz lors de ce jour fatidique sur la Digue. Mais Sargas ne vous appartient pas. Il est une étoile, il est ma lumière mais il est à lui-même. Il suivra sa voie. Il sera éduqué ; ma sœur, tu seras là pour m’aider. Un jour, il choisira, il partira. Un tremblement s’entendit avant qu’elle ne reprenne le contrôle de ses émotions. C’est à ce moment là qu’elle se rendit compte qu’une réelle énergie l’habitait et qu’elle avait à nouveau la maîtrise de ses pouvoirs. Ramenant ses perceptions à elle-même, le vacarme qui envahissait son cerveau cessa, la laissant dans un silence bienfaisant. En attendant ce jour, ce n’est qu’un tout petit et il restera avec moi.

Ce fut dit d’un ton farouche. Elle le défendrait à tous prix, même le plus cher. Il était sa chair, son sang et elle tuerait sans l’ombre d’une hésitation pour lui. Les yeux plantés dans ceux de la nymphe, Grendelor attendait, bras tendus. Son aura n’était pas celle du combat, mais celle de la paix, sous laquelle perçait sa détermination.
Une pensée chaleureuse, réconfortante et emplie de reconnaissance s’immisça dans l’esprit de Sephi.

*Merci*

La lutte intérieure de sa sœur était visible et Gren’ redouta pendant un instant de devoir se battre contre elle. Enfin, avec un effort visible qui arracha un rugissement au dragon qui retourna en son sein, la nymphe déposa l’enfant dans les bras de sa mère.

Il était là, contre elle. Cherchant un appui pour se redresser, la guérisseuse réussit à reculer suffisamment pour atteindre un mur, l’effort lui coupant le souffle. Sargas la regardait de ses yeux bleus de nouveau-né. Si ses pensées n’étaient pas formées, il exprimait clairement la curiosité ainsi qu’un certain malaise, que Grendelor identifia pour lui : l’air de la crypte s’était rafraichi et il avait faim. Une faim dévorante, en partie due aux efforts magiques déployés lors de sa naissance. Le serrant un peu plus contre elle pour le réchauffer, elle glissa son petit doigt contre ses lèvres, qui s’ouvrirent pour le téter avidement. Un sourire passa sur le visage de la mère. S’arrachant difficilement à sa contemplation, Gren’ se tourna vers Sephi, appuyé à quelques pas de là contre le même mur.

Il faudrait quelque chose pour le tenir au chaud, et aussi que je trouve un moyen de rentrer chez moi, nous ne pouvons pas rester là le temps que je me remette. Crois-tu que tu pourrais arranger ça ?

C’était bête à dire mais, malgré tout, la jeune femme ne voulait pas nourrir son fils devant son ami. Une certaine gêne la prenait à cette idée, alors même qu’il était passé par son corps pour rejoindre l’esprit de Sargas. Enfin, elle se tourna à nouveau vers Cassiopée, lui faisant signe de venir près d’elle.

Tu m’aideras, n’est-ce pas ? Je suis toute seule et je ne comprends pas les âmes-doubles. Il aura besoin de toi aussi et d’Issac, même si je me méfie de lui.

Sa demande pouvait paraître ironique. Pourtant, Grendelor n’avait pas conscience de l’entité qui sommeillait en elle. Il lui semblait que seules la fatigue et la douleur avaient jeté ce voile sur sa conscience lors de l’accouchement. Elle n’avait pas senti la magie s’inverser et la traverser pour maintenir Sephi. Tout ce qu’elle voyait, c’était son fils, qui commençait à sérieusement s’agiter, provocant de petites étincelles au bout de ses doigts. Souriant, la magicienne passa sa main sur le front de l’enfant puis sur son corps, s’attardant un instant sur la marque sur sa poitrine. Le mouvement et les sensations provoquées attirèrent son attention et le crépitement cessa.

Il va falloir te surveiller comme le lait sur le feu toi, murmura Grendelor.

Elle se sentait apaisée et cette sensation se répandait dans la crypte, comme un baume.

L’apparition soudaine perturba l’elfe. Pendant un instant, trop long, il sembla prisonnier du lion d’or entouré à ses pieds.
La vague de pétales de rose et l’arrivée de celui qui était connu sous le nom de Sanz, dura un court instant. Vitesse vertigineuse, la scène si infime semblait s’éterniser. L’elfe se bloquait lui-même, tant la vision réelle de cet homme l'arrêtait. Comme impressionné ! Il était tétanisé, non pas par le lion, qui ne l’affectait en rien. Son âme avait réagit elle-même s’évaporant, se mêlant à l’air, en de fragment si infimes qu’ils ne pouvaient être considérés comme des morceaux de l’âme de l’elfe.

Sanz disparut après avoir emmené l’enfant de son amie dans un éclat de lumière. L’elfe ressentait encore, pour le moment, encore la présence de l’enfant. Il n’avait pas quitté l’esprit depuis suffisamment longtemps pour avoir perdu le lien qui les avait uni un court instant.

La digue Saint-Adobe. Ainsi c’est donc sous les eaux qu’ils devraient aller chercher l’enfant.
Dans une lenteur infinie, le noble phénix se posa sur son épaule écoutant le doux murmure de son maître.
Dans une brusque étincelle il disparut. S’envolant ailleurs. Laissant planer un silence de marbre dans la crypte.
L’elfe attrapa la main de son amie, la levant.

Viens, il est temps. Ton fils t’attend, pour le moment.

La voix de l’elfe était calme, posé et froide. Ses yeux resplendissaient d’un bleu profond malgré l’obscurité.
Il s’approcha de Cassiopée, entraînant les deux femmes à l’extérieur, vers la violence des éléments.
Sephi soupira légèrement.
* Dans l’eau, hein … Si c’est ainsi*

L’elfe regarda le ciel un instant, observant calmement l’avancée des sombres nuages annonçant une tempête d’une violence insoupçonnée encore.

* Il est regrettable, que je n’ai pu retourner dans ma Terre Natale. Faites que ce vieil homme puisse m’attendre. *

Un profond regret apparut dans ses yeux, les remplissant de nostalgie. Alors qu’il venait juste de comprendre ce qu’il était …

Une immense gerbe de flamme le tira de ses pensées, il était là, dans un fouillis de poils orange et bleus. Comme toujours, grognant et pestant contre tout et rien.

Pouah, toujours à te fourrer dans des ennuis ? Tu m’as coupé en plein concours de bière …

Souriant malgré lui, le phénix sur son épaule, l’elfe prit juste le temps de répondre, avant que le phénix ne les entraînent dans une nouvelle étincelle.

Des ennuis, apparemment … Et imprévus. Désolé pour les bières.

Une bourrasque les mit presque à terre à l’arrivée, les vents violents battaient mer comme terre.
Soulevant gerbes d’eau et éclats de roche. Autour des 4, un tourbillon se formait, bulle d’air respirable sous les eaux, le temps de trouver l’enfant. Il serait toujours temps d’agrandir l’espace vital plus tard. Chacun d’eux pouvait sentir l’air les traverser, les transporter, alors que l’écume de l’eau s’approchait.
L’air percuta la mer avec une violence inouïe la perforant complètement. Particule se mouvant dans l’eau avec grâce, cheminant lentement vers les profondeurs.
Le visage de l’elfe montrait sa concentration, bien qu’il fut flou, l’air n’étant que peu présent dans les basses profondeurs de la digue.

Peu à peu la forteresse de glace apparut, trouble, puis distinct. L’elfe posa le pied sur la glace. Le tourbillon s’agrandit, vidant l’intérieur de la moindre parcelle d’eau, seule une mince couché salée persistait à rester au sol.
Sephi s’arrêta un instant, se concentrant complètement alors que ses amies l’observaient. Puis soudain, une arrivée d’air, comme une violente bourrasque apparut au sommet du tourbillon, emplissant celui-ci d’une vague d’air, agrandissant l’espace, repoussant l’eau par vague.

Nous allons pouvoir y aller. Ton fils nous attend au cœur de ce palais. Ajouta-t-il regardant son amie.
Lentement l’eau était refoulée, repoussée en cet endroit, en emplissant un autre certainement.

Quand il était apparu, Grendelor s’était figée. Le loup n’aurait pas été là, qu’elle n’aurait pas bougé plus, glacée, déjà meurtrie. Ainsi ce que n’avait pu faire Issac par l’intermédiaire de Cassiopée, il venait l’accomplir lui-même. Enveloppé dans les Réminiscences, Sargas s’apaisa et même le contact du sang sur son front ne lui tira une réaction. La mère, elle, contemplait la scène avec une intensité douloureuse, impuissante.
Les Âmes parties, elle ne retrouva pas pour autant l’usage de son corps, bien trop épuisé par l’accouchement. Ce fut Sephi qui réagit le premier, prenant la direction des opérations avec plus d’énergie qu’il n’en avait eue quand il était arrivé à la crypte. Grendelor se laissa lever, s’appuyant lourdement contre son ami. Une douleur cuisante irradia dans son ventre. Totalement abattue par les évènements, elle ne réagit même pas. Un nouvel écoulement sanguin se fraya un chemin le long de ses cuisses. D’une main tremblante, la guérisseuse tenta de refermer sa tunique maculée.
Elle regardait autour d’elle sans rien voir, choquée. Ses yeux bleus écarquillés ne sillèrent pas lorsqu’ils passèrent sous l’eau. Son esprit embrumé n’enregistrait rien du voyage ou des mots échangés. Bloqué sur une unique pensée qui essayait de se former totalement. Les marques sur les bras de la jeune femme brillaient à chaque fois, pulsation lente ; cœur qui repart doucement. Qui enfle comme la marée.

*Tu.
Tu n’as.
Tu.
Tu n’as pas.
Toi.
Tu.
TU.
TU N’AS.
TOI !
TU N’AS PAS.*

Alors qu’ils entraient finalement dans la citadelle de glace, elle éclot. Rouge. Noire. Violente. Annihilant Grendelor.

*TU N’AS PAS LE DROIT !*

Le cri mental résonna, puissant, rugissement de la mer se fracassant sur la côte.

Dans un sursaut, Sephi s’écarta de son amie, dont le contact venait de le brûler légèrement. Elle avait à nouveau changé. Plus grande que lui maintenant, ses yeux d’un noir abyssal exprimaient une haine profonde mais froide. Les arabesques sur son corps étaient couleur de la nuit. L’aura qui se dégageait de l’entité était écrasante maintenant que la possession était totale. D’un regard qu’aucune douceur ou compassion ne semblait avoir visité, l’entité toisa Sephi et son phénix avant de se porter sur Cassiopée.

Choisi ton camp, nymphe. Maintenant.

La voix tonna, impérieuse.