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 Mémoires Aélissiennes [Recueil]

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Dounette
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Rodram
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Rodram




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MessageSujet: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeDim 28 Sep - 22:53

Petit explicatif :
Il serait utile de préciser, avant même l'introduction qui suit ci-dessous, le but de ce topic.

Sous ce nom de "Mémoires Aélissiennes" se découvre,
en fait, un recueil de nouvelles, guidées par un petit cheptel de règles simples.


Il s'agira de poster une nouvelle par post, entière, avec un début, un milieu, une fin.
Une histoire courte, un extrait de vie qui mettra en avant un Aelissien fictif, un personnage que vous aurez inventé, dans le respect absolu des Backgrounds des Cités (disponibles en Mémos IcI), tout en faisant intervenir en tant que personnages secondaires des Aelissiens existants (donc, des membres du forum).

Citation :

ex :
Post 1 (Auteur : A) :"La journée de Filicius Hexachrom, Artisencre dans l'ombre des Artisencres",
avec en guest-star les personnages de Teclis, Chikoun et Slider.

Post 2 (Auteur : B) :"Sombre nuit pour Miranda Inzessiti, Veilleuse du Consortium en Atälante.",
avec en guest-star les personnages de Smirtnoff et Skame.

Veillez donc à développer l'histoire de votre personnage fictif, les "Guest Stars" n'intervenant que pour crédibiliser votre texte.
Respectez leur comportement et passif, si vous les faites intervenir (pas d'incohérences notoires).
Le recueil étant là pour fortifier l'histoire de Ter Aelis, par l'ajout de nouveaux personnages.
N'oubliez pas de façonner un petit titre à votre petite histoire.
Ca n'en sera que plus simple pour le lecteur.



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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeLun 29 Sep - 1:07

Ouverture du livre




" La lumière tamisée des lampes à incandescence de la salle de lecture éclairait studieusement mon manuel. J’étais en nage, cela faisait bien huit heures que je n’avais pas quitté ce livre, même pour boire un coup. Malgré la sueur qui perlait à mon front et mes mains moites qui tachaient les pages, j’avais la gorge sèche et irritée. Sauf qu’à part de l’encre, il n’y avait rien de liquide pour étancher ma soif.

Je pris donc mon mal en patience et sermonnais ma faiblesse physique de trop de laxisme, j’avais besoin de ce concours à la fin du semestre et il était inconcevable que je puisse passer à côté. J’avais besoin de chaque heure, chaque minute, chaque seconde disponible pour réviser mes cours. Je devais être le meilleur. Je travaillais donc encore sur mon manuel linguistique, encore quelques heures…


Lorsque je repris mes esprits, j’étais écroulé par terre à côté de ma chaise. A priori, j’avais du tomber de fatigue et glisser au sol sans même m’en rendre compte. J’ignorais même l’heure qu’il était. Je me relevais lentement.

-…

Ma gorge était si sèche que j’en étais aphone, simplement incapable de proférer un seul son, même un juron vis-à-vis des fourmis dans mes jambes. Je me résolvais à aller boire, sans avoir idée d’où trouver ce que je cherchais. Je n’avais bizarrement aucun souvenir des couloirs et ceux-ci étaient vides. Comme j’étais dans l’indisponibilité d’appeler quelqu’un, je pris sur moi d’ouvrir les salles qui se présentaient à moi, au gré des lampadaires de papier orangé. Dans les quatre premières pièces je ne rencontrais que quelques tables, des chaises et des étagères pleines de livres. Je dépassais lentement les études scientifiques, contournait les essais chroniques, flirtais avec les commentaires démostatigraphiques et dépassais finalement les journaux de vulgarisation pour trouver une fontaine salvatrice.

Sachant qu’un peu de repos ne pourrait que me faire du bien, je restais un peu dans la pièce avec pour seule compagnie mon verre d’eau et la douce et chaude lumière murale. J’entrepris d’explorer l’endroit, je n’y avais jamais mit les pieds. Pourtant il était beau et dégageait une gracieuse puissance. Les livres entreposés ici étaient tous manuscrits et de facture admirable. Je revenais vers la porte pour y lire, inscrit sur une plaque dorée « Tomes Longs ». Je haussais un sourcil et retournais à mon exploration toute relative. Je soulevais un livre de temps à autre pour en apprécier la présentation ou la couverture, mais c’est à un seul moment que je fus vraiment stoppé net. Le manuscrit que j’ai alors découvert a changé de beaucoup la vision que j’avais de mon environnement. A partir de ce moment là, rien n’aurait jamais su continuer à être pareil. Les gens ne pourraient plus être simplement « les gens ». Tout a désormais une valeur nouvelle à mes yeux. Juste parce que j’ai lu les Mémoires Aelissiennes. Juste parce que j’ai lu la plus profonde intimité d’un peuple dans sa plus propre expression. "


XXX
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Rodram




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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeLun 29 Sep - 1:11

Sarah n'a pas peur.



Sarah n'aimait pas vraiment pêcher avec son père.
Elle lui prétextait invariablement qu'elle n'était pas un garçon, qu'il y avait bien d'autres choses à faire, à part pêcher, sur Atalantë !
Ainsi la petite Sarah, lorsqu'elle n'allait pas à l'école ou n'avait pas classe d'initiation artistique au Collège des Arts Graphiques, sortait, bardée de ses poupées, et s'installait sur le perron de sa maison, face à l'océan, selon un rituel bien rôdé.
Elle les alignait sagement, les unes à côté des autres, de la plus petite à la plus grande, et devisait joyeusement tout en leur préparant à manger : des sandwichs d'herbe, des saucisses de brindilles, le tout servi dans des coupelles de pots de fleurs. Autant dire que c'était un festin.
Sarah leur racontait tout ce qui s'était passé ces jours-ci, depuis Herbert qui l'avait bousculé dans la cour, en début de semaine, à Sissia qui se vantait d'avoir embrassé un garçon, ce matin-même.
Cette dernière nouvelle lui avait d'ailleurs arraché une grimace de dégoût, rien qu'à imaginer la scène.

Sarah avait horreur des garçons.
Ils lui faisaient peur, ils lui avaient toujours fait peur. Bien plus que les monstres des histoires, les krakens et les vampires, que son père se régalait à mimer affreusement devant sa fille, hilare au fond du canapé.
Sarah faisait la différence : les krakens et les vampires, ça n'existait pas. Les garçons, si, malheureusement.

Ma chérie ? Tu n'oublies pas : on a des invités ce soir ! Tu te feras toute belle ?
La voix de sa mère résonnait depuis la cuisine où elle s'affairait, comme une mouche sur un pudding atlante.
Sa petite fille stoppa le repas de ses poupées d'une main impériale.

Oui, maman ! C'est qui, qui vient ?, s'enquérit gentiment la fillette.
Tata Cassiopée, elle vient avec un ami. Ils arriveront dès la nuit tombée, pour le repas.
Ainsi, la petite fille sage, avisant l'heure simplement en jaugeant la hauteur du soleil sur l'océan, ne tarda pas à délicatement reprendre ses poupées sous son bras, regagna sa chambre pour enfiler la robe que sa maman avait préalablement sortie du placard, et passa devant un miroir pour se brosser les cheveux.

Lorsque l'heure de dresser la table fut venue, Sarah fut, bien évidemment, fortement conviée à s'en occuper.
Les incessantes allées et venues entre le buffet à vaisselle et la table, chargée d'assiettes et de couverts, étaient bien plus supportables en chantonnant et rêvassant. C'est bien pour cela que, virevoltant avec le sourire, une pyramide de verres pressée tel un romantique danseur contre sa poitrine, elle ne put entendre l'arrivée des invités ni voir les silhouettes entrer dans le salon.
La petite fille heurta un poitrail, son visage s'enfonçant dans un pan de cuir noir.
Prudente, elle avait serrée encore plus fort contre elle, les verres empilés. La catastrophe était évitée.
Ses joues s'empourprèrent lorsqu'elle leva la tête, prête à bafouiller une excuse gênée.

Coucou, Sarah. Je te présente un très bon ami à moi ...
Mais Sarah n'entendait pas le son de la voix de sa tante Cassiopée ... Ses yeux, en même temps que son esprit, étaient vissés sur le visage face à elle.Celui qu'elle avait heurtée, auquel elle s'apprêtait de s'excuser, la regardait bizarrement, un sourire narquois au bord des lèvres.
Son teint livide, sa peau diaphane, ses yeux si totalement noirs, qui se mêlaient à sa chevelure hirsute.
Cette aura néfaste, empreinte de mort, qui encadrait sa silhouette ténébreuse.
Il ouvrit à peine la bouche pour lui parler, mais cela suffit à la fillette pour entrevoir ses dents.
'Lut, p'tite. Moi c'est Smirtn ...

On ne sut qui, du fracas des verres sur le sol ou du hurlement suraïgu de la fillette, avait fait le plus de bruit.
Après ça, Sarah n'eut plus peur des garçons. Plus du tout.
Mais son père n'osa plus jamais lui raconter une histoire de krakens ou de ...


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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeMar 30 Sep - 16:34

Le secret des docks


Allez, encore un dernier et la journée sera finie !

Un concert de grognements répondit au chef des dockers pendant que 3 hommes soulevaient une énorme caisse pour la charger sur le bateau amarré au quai en face.
Mains sur le bas du dos, Jerry s’étira avec un soupir et s’épongea le front avec un mouchoir crasseux qu’il sortit de son pantalon trop large pour lui. Le soleil était sur le déclin, pourtant la chaleur était encore torride, surtout quand on passait la journée à charrier des containers. Petit, maigre, personne n’aurait pris Jerry pour un docker malgré son visage buriné et ses doigts pleins de cals. Pourtant, il accomplissait son travail avec autant d’efficacité que ses collègues mieux charpentés.
Quand il avait fait sa demande pour appartenir au clan des dockers, on lui avait ri au nez. Après une semaine, ses collègues avaient arrêté de se moquer de lui et le considéraient avec respect. Un moucheron portant une maison est bien plus impressionnant qu’un éléphant portant la même maison.
Saluant de la main ses camarades, Jerry rentra chez lui. Une marche d’environ 30mn, solitaire. Ce n’était pas un bavard et les dockers le considéraient comme quelqu’un de timide. Un cas rare dans cette caste. A observer avec méfiance. Tout le monde le connaissait, mais seulement deux ou trois savaient où il habitait et aucun n’en savait plus. Et surtout, aucun ne savait ce qu’il faisait tous les soirs depuis bientôt un an.

*S’ils savaient ils se moqueraient bien encore…*

Arrivé dans son petit appartement du centre ville de Galvorn, Jerry, dans un rituel bien rodé, mit ses affaires du jour à laver, prit une longue douche, se rasa et s’habilla. Pantalon noir et fin, chemise bien coupée, lentilles de couleur et moustache postiche le transformèrent sans le rendre plus visible. Il jeta un coup d’œil à sa montre.

*Huit heure moins dix, juste le temps d’y aller.*

Il ressortit et prit le chemin qui menait à la taverne L*P*lace. A huit heures tapantes, il en poussa la porte, saluant d’un signe de tête Henri avant de rejoindre sa place habituelle, une petite table dans un recoin sombre. Bien que la taverne soit bondée, la table était libre. Une fois, il était arrivé qu’un homme la prenne. Rien qu’une. Au début, il avait expliqué patiemment à l’homme que s’était sa place, de 20h à 22h et ce tous les soirs. L’homme, qui devait faire dans les 1m80 et peser facilement ses 80 kilos avait ri, avant de se plier en deux de douleur, se tenant l’estomac. Depuis, sa table était toujours libre.

Jerry s’installa, son verre habituel de bière ne tardant pas à arriver, et il repéra très vite ce qui l’amenait ici tous les soirs. La Dame de pique dansait au milieu de la salle, fredonnant doucement, hypnotisant la salle. Son tatouage décrivait des mouvements lascifs qui donnaient le tournis. Le docker regardait, dévorant des yeux la féline Schaft tout en se promettant de mettre une bonne raclée à tous ces goujats qui bavaient devant elle.

*Ce soir…*

Alors que Jerry amorçait le mouvement pour se lever de sa chaise, une femme rejoignit Schaft. Elle dansa avec la femme-chat tout en lui parlant, la faisant éclater de rire. Jerry serra les dents en reconnaissant les dagues suspendues à la ceinture de la femme. Shalimar, tante de la jeune femme. Les deux femmes dansaient toujours puis, finalement, quittèrent la piste pour s’installer à une table pour deviser.

Ce ne sera pas ce soir, non, pas ce soir. Mais demain… qui sait ?


Dernière édition par Grendelor le Jeu 16 Oct - 21:14, édité 1 fois
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Airet Syl
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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeMer 1 Oct - 20:12

Toile Cirée


– Magne-toi, Grippe. On va se faire chopper.
– Ca ne risque rien, cette société n’a pas encore développé le moindre concept de pillage. Tu vois Rino, on est des précurseurs.

Voler le consortium, voilà qui ne manquait pas d’audace.

– On cachera ça dans la fruitière le temps que ça se tasse.

Otorino Brau exhibait fièrement la toile enroulée. Il n’avait plus l’air d’un fromager, enrubanné dans son agile mimétisme.

– On file.

Atalantë se couchait tard, mais après cinq heures, peu avant le lever des artisans, il y avait un temps de répit. Une grosse demi-heure de calme. Les antiques couloirs n’émettaient plus aucun bruit. Il y avait bien quelques tonneaux de peinture sagement empilés, des ingrédients entassés sur des étagères. Curieuse alchimie.

Grippe Fournaise écoutait les sourds battements de son cœur. Le charcutier s’était improvisé cambrioleur juste le temps de cette affaire. Jamais, se promit-il, il n’oserait recommencer. Ils avaient l’œuvre et comptaient bien atteindre leurs quartiers en toute sérénité. Sauf que Rino claquait des dents et que niveau discrétion, il y avait des modèles plus généreux.

– Il va sentir la présure, fit Grippe.

Rien. Rino était trop tendu pour rire.

– T’as pris un os, Grippe, articula t’il malgré sa gêne. Tu sais, si y’a un chien.
– Je l’ai, Rino, je l’ai. Un morceau de sacrum. Les chiens peuvent pas résister.

Grippe consultait un bout de carte, tracé au crayon. Il menait la marche avec un entrain coupable. L’envie de rentrer pressait.
Atalantë noyait ses visiteurs dans un réseau englouti, plus ou moins asséché ; les vestiges d’une cité légendaire rénovée, avec ses colonnades dévorées par un lierre pétrifié, ses bronzes éternels et ses couloirs interminables.

– Hey, les gars, vous allez où comme ça ?

Une voix sépulcrale, à glacer le sang. Et un regard de braise à vous le sucer, constata amèrement Grippe. Etrange personnage, couvert de pigments graisseux, les doigts imbibés de tâches.

– On était venu récupérer ceci, fit Rino.

Bon sens de l’improvisation, le gars Rino. Le fromager tendait l’impeccable rouleau. La silhouette l’étendit calmement, avec un respect minutieux de l’ouvrage.

– Hum, fit la voix. Des élèves, hein ? Et du Grand Ramrod.

L’analyse terminée, Rino récupéra son bien. Délaissant le cryptique funambule de l’aurore, les compères reprirent leur allègre déambulation dans les méandres de l’archipel.

– Un client à toi, ce Graham Hérode ?
– Jamais vu à l’Entre-Côtes. Mais Hérode, ça me parle vaguement.
– Ces gens-là ne doivent pas se nourrir pareil. Tu as vu, il n’a rien demandé pour les déguisements.
– T’as failli nous planter avec ton histoire. Si le gars avait été soupçonneux, il nous aurait pas laisser filer comme ça.
– L’était comme qui dirait bizarre, d’ailleurs.

Très bizarre, songea Grippe. Ils osèrent enfin s’arrêter. Au cœur d’une vaste pièce, au plafond lointain et aux murs épais. Le genre de salle assommante. Dotée d’yeux, énigmatiquement accusateurs.

– Dis, Rino, on aurait pas fait une bêtise ?

Le fromager partit d’un grand rire. Une hilarité remarquable par son manque de conviction. Cette paisible société n’était pas en mesure de se confronter au vandalisme.

– Il nous reste un bon quart d’heure.

Dans la matinée, Ramrod retrouverait sa galerie comme il l’avait laissée, poussive et lumineuse. Inexplicablement, il découvrirait à l'entrée un panier garni de luisante cochonaille et de délicieux fromages.


Dernière édition par Airet Syl le Jeu 16 Oct - 20:54, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeMer 15 Oct - 17:29

Errer, se poser, chanter.


Balthazar était assis face à son bureau, la tête dans les mains. Quand serait-il digne des grands, tels Cicéron ou Hednot ? Affublé d’un tel prénom, il ne pouvait qu’aller loin. D’autant que son esprit ne tournait pas rond, à lui aussi.

Pourtant, depuis son arrivée en Aelis, il subsistait grâce au bon vouloir des Âmes Damnées, et cela le frustrait. Les habitants travaillent plus par plaisir que pour réellement survivre, et Balthazar était de ceux qui voulaient à tout prix apporter leur pierre à l’édifice.

Son échec à l’élection du dernier gardien l’avait obligé à rectifier le tir, et se trouver une autre voie où percer. Depuis, il passait son temps à confectionner un calendrier aelisséen.

Dur dur, d’autant qu’il fallait TOUT trouver. Sa méthode résidait donc en une promenade du matin jusqu’au crépuscule, et de noter tous les faits étonnants de la journée pour les rendre immortels. La dernière fois, c’étaient ces offrandes dédiées à Ramrod, sans raison apparente, qui avait retenu son attention. Depuis lors, ce jour-là était entré dans son calendrier comme étant LE jour de célébration du patron du pays.

Mais voilà…ils se passaient tellement de choses partout qu’il en devenait difficile de faire le tri. Le plus simple aurait presque été de faire un calendrier par ville, ce qui était durement concevable en étant seul.

Décidant de forcer un peu le destin, Balthazar se chargea donc de créer quelques évènements. Comme par exemple, la journée du chien des îles Shetland, en laissant traîner quelques photos de-ci de-là dans le Pays, se doutant bien que Dounette finirait par en tomber amoureuse. Au retour du Crieur, il tenterait de corrompre celui-ci en lui demandant d’annoncer le prochain mariage des Âmes Damnées, suite à un concours de circonstances : la dame était enceinte. Après une annonce pareille aux quatre coins du pays, le mariage – et peut-être même la naissance – serait bien obligées d’avoir lieu, sans quoi ils risquaient de décevoir la population. Il se frotta les mains de plaisir, à l’idée de provoquer ce qui pourrait peut-être devenir l’évènement du siècle en Ter Aelis.

Il souffla sa bougie, l’aube pointait le bout de sa rosée. Il regarda par la fenêtre du bureau, qui donnait sur le port de Galvorn. Il se sentit serein en cet instant, où Aelis semble s’éveiller d’un même geste, et les oiseaux annoncer l’heure d’un même chant. Les coups de l’horloge parlante vinrent s’adjoindre à la chansonnette du matin. Les dockers qui amerrissaient se mirent à décharger les cargaisons, tandis que des passants s’avançaient sur la digue, profitant de l’accalmie occasionnelle de la Mer d’Adobe. Bientôt, toute sorte de gens et créatures passeraient devant ses yeux, les uns parlant d’un écrit en cours, les autres d’un devoir important, d’un rendez-vous ou d’une réunion auxquels ils doivent se rendre. Ce qui était sûr, c’est que tout le monde parlerait au moins une fois d’art dans sa journée, car c’était l’art le souffle de vie d’Aelis.

Balthazar s’interrompit dans ses pensées. Le soleil venait de percer de derrière les montagnes d’Echoriath, au moment où une idée venait de pointer dans son esprit. Toujours il avait passé son temps à inventer – ou déformer – des histoires. Il avait toujours admiré ces gens qui occupaient leur journée à créer, inventer, produire.
Il ne ferait plus de calendrier, c’était décidé. Balthazar avait enfin trouvé sa vocation. Hednot écrivait l’Histoire, Cicéron disait comment vivre, les Aelissiens se nourrissaient d’art, lui chanteraient les trois. Histoire, Arts et Vies en Ter Aelis, voilà qui attireraient le public.

Il ouvrit la porte de l’atelier à la volée, et s’avança d’un pas décidé sur le port. Il grimpa sur une caisse vide, pour s’en servir d’estrade, et se mit à chanter. Les enfants vinrent s’asseoir à ses pieds, ravis, et son visage, d’un grand sourire, s’éclaircit. Ter Aelis est grande, s’y faire une place peut sembler difficile, mais il suffit en fait de ne pas trop chercher. Pour Balthazar, il lui suffisait de regarder par la fenêtre, pour trouver la place qui lui avait toujours été destinée, celle qui l’avait toujours attendue depuis qu’il était arrivé. Tout le monde était logé à la même enseigne, il y a toujours assez de place pour tout le monde, dans un rêve. Ce sont ces petites choses qui rendent la vie magique, qu’il leur chantait en cet instant.
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Dounette




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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeJeu 23 Oct - 10:28

Je suis le Grand Chevalier !


Le rapt du carton avait été facile, comparé aux trésors de finesse que Peter avait du déployer pour accéder à la chambre de sa mère. Madame Margarette, en femme prévoyante, serrait toujours ses trésors dans sa grande malle aux pieds de son lit, et fermait toujours soigneusement la porte de sa chambre lorsqu'elle en sortait. Vivre à Echoriath imposait quelques mesures de précaution, assurait elle à ses amies lors de leur brunch hebdomadaire du mercredi soir. Entre les nains des galeries, qui, parait il, sortaient le soir vadrouiller dans les rues sombres, et ces elfes dont on ne sait jamais rien, il était normal que des dames de bonnes familles craignent le vol, ou pire encore ! chuchotaient elles, toutes excitées.

C'était précisément un mercredi soir que l'occasion s'était enfin présentée pour Peter. Sa mère, après avoir passé une bonne heure devant sa coiffeuse, était rapidement sortie de sa chambre aux tintements de la sonnette d'entrée, annonçant ainsi l'arrivée de ses amies. Madame Margarette était tellement préoccupée par son tout nouveau style de chignon - très en vogue à Belthil d'après une autre de ses amies; pensez vous, Dounette elle même avait arboré ce style de coiffure lors de son apparition au mariage de Mido et d'Inalia ! - qu'elle avait laissé la porte entrebâillée, la clef au fond de la poche. Dans un froufroutement de jupes superposées, la maman de Peter s'était dépêchée d'ouvrir à ses amies, les accueillant dans un grand éclat de voix.

Peter, bien caché dans un angle du couloir, sentit monter en lui l'excitation de l'aventure. L'occasion était trop belle, et même un petit garçon de 9 ans sait quand il faut savoir saisir sa chance. A pas de sioux, il s'approcha de l'antre secrète de ses parents, et poussa un peu plus la porte, tout en tendant l'oreille vers les bruits filtrants depuis le petit salon dans lequel sa mère recevait toujours ses amies. Des éclats de rire se mêlaient aux tintements des tasses à thé en porcelaine. Peter entra donc carrément, et resta un instant timide sur le seuil de la porte. La chambre de ses parents représentait le seul lieu interdit dans la grande maison, et Peter se sentait comme un conquistador, découvrant de nouveaux et fascinants territoires. Au pied du lit - immense - trônait la fameuse malle, dans laquelle, Peter en était certain, sa mère avait serré l'objet de son désir. En trois pas, le petit garçon s'approcha et souleva avec quelques difficultés le lourd couvercle en bois.

La malle était assez grande pour qu'il puisse se blottir dedans, et se sentir encore à l'aise. Cependant, Peter repéra presque immédiatement ce qu'il était venu chercher : un grand rouleau de papier doré. Sa mère s'en était servit l'an passé pour faire de jolis ballotins de chocolats, qu'elle avait distribué autour d'elle pour la bonne année. L'or du papier était brillant, et était absolument parfait pour ce que Peter voulait en faire.

Serrant son trésor sur le cœur, Peter se dépêcha de quitter le lieu du vol, en ayant soin, tout de même, de soigneusement refermer la malle derrière lui. Avec un peu de chance, sa mère ne s'apercevrait du méfait que lorsque qu'il serait temps à nouveau de faire des ballotins?

Telle une fusée, Peter sortit en trombe de la maison, avec sous le bras de bien étranges trophées : un grand empan de carton et le précieux rouleau doré, et se mis à galoper dans les rues vers le lieu habituel où se retrouvaient tous les garnements du quartier. Au pied de l'arène - Madame Marguarette déplorait d'ailleurs bruyamment sa désagréable proximité, attirant, selon elle, la basse engeance et les voyous - se tenait le petit rassemblement de copains. Les jeux s'arrêtèrent lorsqu'ils virent ce que Peter ramenait.
- Ca alors !" s'extasia l'un d'eux, un grand. Peter eu un sourire de triomphe, puis commença à s'activer pour fabriquer son armure. Un trou pour la tête, les ficelles pour faire tenir, et un peu de colle, pour recouvrir le carton d'or en papier. Les garçons eurent tous plus ou moins les doigts encollés, mais bientôt Peter pu revêtir son armure de triomphe devant les regards envieux des copains moins chanceux.

- Regardez moi
, cria-t-il d'une voix aiguë, en se tournant vers les imposants murs de pierre de l'arène, je suis le Grand Nichiren, Chevalier au Lit On Dort !"
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Rodram




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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeJeu 23 Oct - 16:37

La Ligne.


Premier barreau ...
L'ascension va être longue, je prends une profonde inspiration. Je repense à ce que j'ai vu, ici, en bas : impensable que l'on trouve cela dans un tunnel de vidange. D'abord, à Echoriath, puis à Atalantë .. Maintenant à Galvorn.
Impensable.
Quatrième barreau ...
Le tunnel dessert le quartier Ouest de Galvorn, il achemine les égouts jusqu'à la côte, où ils sont traités. Par Hérodote, quelle puanteur. Quel endroit ... Je n'ai qu'une hâte : ressortir à l'air libre. S'immerger dans la fosse au large d'Atalantë, par 800 pieds de profondeur, avait été bien plus aisé, avec une combinaison abyssale atlante. Descendre dans la faille de givre qui domine Echoriath, se faisait sans difficulté avec un équipement alpin et un filet de sécurité.
Neuvième barreau ... Hmpf ...
Mais ici ... Je n'avais pas prévu que ce serait si dur.
Au moins, j'ai vu ce que je venais voir. Et ô Plutarque ... J'aurai préféré ne rien en déduire. La même chose ... la même marque, ici, comme sur les deux autres sites. La même marque, indiquant la même direction. Au degré près.
Impensable. Tout simplement impensable.
Seizième barreau ... Pfffffff ...
L'ascension me fatigue. Mon corps n'est plus jeune. La surface est encore loin ?
Oh, encore une belle volée de barreaux. Fichue échelle antédiluvienne ...
...Han ...
Si seulement je n'avais pas réfléchi. Si seulement je n'avais pas vu, à l'instant, que ces trois marques, symbolisées sur une carte, forment une ligne imaginaire parfaitement droite. Une ligne qui relie ensemble Atalantë, Galvorn et Echoriath.
Seigneur Dieu, que signifie ceci ? Qui a pu graver cela ? Depuis quand ? Pourquoi ?
Mr Hednot, bonjour !
Je lève immédiatement la tête vers l'entrée du tunnel, maintenant proche. Un visage me sourit, et ce n'est pas l'ami avec qui je suis venu. Je grimace, mes jambes me font mal. J'ai le souffle court et certainement le visage rougeaud lorsque je surgis enfin à la surface.

Mr Hednot, le Canard à Hélice aimerait vous poser quelques questions ...
Je l'ignore : les journalistes ne sont que des fouines pressées de tout savoir. Celui-ci en est un bel exemple : il est rédacteur en chef. Mes yeux plissent sous la lumière du soleil, mes pieds touchent enfin le sol.
Nichiren ? pouvez-vous m'aider, je vous prie ?
Mon ami s'approche gentiment, et passe un bras sous mes épaules pour me soutenir. Mon âge ne m'a jamais paru si lourd.
Ali ... Monsieur Hednot est fatigué, ne pourrais-tu pas ..
Ca ne prendra qu'une minute, Nichiren. Je t'assure.
Vous êtes plus obtu qu'une vache indienne ... Comment diable avez-vous su que j'étais ici ?
Il sort de sa poche un calepin, puis un crayon. Il arbore depuis tout à l'heure un sourire malin qui m'énerve. Il ne lâchera pas, maintenant qu'il est là.
Monsieur Hednot .. Sans vouloir vous manquer de respect, il faut que je sache ce que le célèbre Historien et Maître de conférence que vous êtes, fait dans le tunnel de vidange N°6 de Galvorn Ouest. Comprenez moi.
Je n'en réfère qu'au Conseil de Belthil, sieur Aligby.
... Le peuple de Ter Aelis aimerait sûrement qu'on se réfère à lui, également.
Ali ...
Mes agissements ne regardent que moi. Maintenant partez, je vous prie.
Allons. Dites-moi au moins ce que vous avez-vu, en bas ?
Ali ...
... Est-ce la raison qui vous a fait aller d'Atalantë à Echoriath, qui vous amène aussi à Galvorn ? Ici, dans un tunnel de vidange ? Un vieil homme de 60 ans passés par 15 mètres de profondeur ? Que faites-vous là ??
Ali !
Je sens l'exaspération dans le ton de voix de Nichiren, comme la curiosité profonde d'Aligby. Comme la colère qui monte subitement en moi. Je me redresse et plante des yeux furieux dans le regard du journaliste, qui ne bronche absolument pas.

Très bien, je vais vous dire pourquoi je suis ici.
Son sourire s'agrandit, il jubile intérieurement, alors que son crayon se fige déjà au-dessus du calepin.
Héhé. Je vous écoute, cher Maître.
... En bas de cette échelle, au bout du tunnel, au milieu de la mélasse digestive et glauque de Galvorn, se trouve un panneau. Un panneau planté dans la pierre, depuis bien longtemps, par des mains antérieures à la venue du peuple aéliséen.
Le crayon fuse sur le papier, les yeux d'Aligby allant et venant de son calepin à mon visage.
Un panneau où l'on lit clairement le mot "SORÉ". Alors qu'au fond d'une fosse à Atalantë, on trouve le même panneau où l'on peut lire le mot "VOUNE", et le même à Echoriath où est inscrit "JAMÉ". Troublant, n'est-ce pas ? Énigmatique ? Je suis certain que vous pourrez résolument gaver votre caneton bizuté à l'acide avec cette information capitale et ce panneau, voire même que vous tomberez DEDANS, sieur Ali-g-by !!! Maintenant, partons, Nichiren, je dois regagner Belthil !
Voune, Soré, J ...
Alors que je tourne les talons, le journaliste a les yeux rivés sur son calepin incompréhensif. Nichiren m'emboîte le pas, mes jambes, mûes par la colère, s'agitent pour nous faire regagner notre transporteur.
... et certainement convoquer les Âmes damnées.
L'heure est peut-être grave. Par Hérodote.

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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeMer 15 Avr - 19:20

La graisse crépitait tel un minuscule feu d’artifice, s’élevant en petites gerbes sifflantes vers ses mains alors que les bulles gonflées du fromage s’arrondissaient jusqu’à la limite de l’explosion pour redescendre doucement au contact de l’air ambiant de la cuisine. La pizza était cuite à point, dorée à souhait et Boris étala sur son visage un sourire béat de contentement en imaginant la soirée qui s’annonçait.

Il transporta avec délicatesse le plat grésillant dont les senteurs d’herbes chaudes, de tomates grillées mêlés aux parfums délicieux de la pâte parfaitement levée lui rappelaient les odeurs de la boulangerie quand il allait de bonne heure le matin acheter le pain qui sortait à peine du four.
Il avait préalablement installé les coussins sur son fauteuil préféré et placé un guéridon à proximité de sa main.

La pizza déposée à ses cotés, il se servit un verre de rosé, n’y trempant que le bout des lèvres afin de réserver tous les plaisirs pour le moment crucial.
Regardant sa montre, Boris constata que le temps passait bien lentement aujourd’hui. Il lui restait quatre minutes à attendre. Il s’installa pourtant, ajustant les coussins autour de lui afin d’être bien calé. Le téléviseur déversait un flot de paroles inutiles. Ce n’est que lorsque défila le générique que Boris riva son regard sur l’écran et ne le quitta plus. A cet instant, il en oublia même le fumet appétissant qui passait encore sous ses narines pour tenter de le captiver.

Allias jouait dans le film du soir « l’Aventure en Adalerin » et Boris s’en léchait les babines par avance. Il adorait cet acteur qui menait ses troupes tambour battant mais avec un charme infaillible et un sourire malicieux. Le film commença sur un gros plan des yeux du héros et Boris se sentit fondre littéralement. Il jouait le rôle d’un sergent recruteur qui préparait une expédition vers les régions frontalières. L’arrivée de Frôr le gros nain qui entra dans l’infirmerie pensant se présenter pour le recrutement fit sourire Boris. Ce début lui évoquait les 7 mercenaires, mais il adorait tous ces profils de gros durs. Quand la troupe partit dans les bois au-delà de Bûche-Ciel, Boris en profita pour enfourner une grosse bouchée de pizza dont le fromage commençait à s’agglomérer en morceaux légèrement plastifiés qu’il mâcha sans lâcher l’avancée des mercenaires. Et puis soudain, la troupe fut attaquée par de belliqueux adversaires. Le sergent se battait comme un dieu et Boris en restait bouche ouverte la pizza à peine mastiquée encore aux lèvres quand l’écran vira soudain au noir opaque et qu’un silence de plomb prit la place des hurlements des blessés.

Pour Boris, le temps s’arrêta.

Alors, il se leva d’un bond, envoyant de part en part tout ce qui le gênait sur son passage et se précipita sur le téléviseur, appuyant sur tous les boutons sans réussir à faire réapparaître l’image et le son disparus. Alors il débrancha, brancha, rebrancha tous les fils qu’il put trouver, mais comme rien ne se passait, il prit l’appareil à pleines mains et le soulevant à bout de bras le secoua tant et plus sans plus de satisfaction. Alors, jetant l’objet et levant les bras aux cieux, il poussa un hurlement bestial qui retentit dans tout Galvorn.
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Nahïs
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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeMer 5 Aoû - 16:20

Le Gardien de souvenirs



Les casseroles tintèrent. Il était midi. L’antique horloge égrenait les minutes dans l’atmosphère tranquille. Il l’entendit chantonner à voix basse la vieille comptine de son enfance. Dans un quart d’heure, elle viendrait se reposer contre son cœur de bois. Sa vieille compagne…

C'était il y a plus de 50 ans. Elle venait d'être acceptée comme élève à la prestigieuse Académie de Littérature. La précieuse attestation dans les mains, elle avait traversé la rue, s'était ruée dans une petite masure attenante à l'Ecole. Son nid d'amour.

- Je l'ai ! Je l'aiii ! Regarde, piaffait-t-elle de joie devant un mari éberlué, mais ravi. Je suis priiiiise ! riait-elle, la voix tirant dans les aigus, du soleil dans les yeux. Ils s'étaient embrassés, encore et encore, sous l'oeil attendri du fauteuil flambant neuf, acheté le jour même pour l'occasion. Ils s'étaient aimés, sur ce fauteuil synonyme d'amour, partenaire de leurs ébats. Encadré, accroché sur un mur peint de grosses fleurs orangées, un papier jaunissant témoignait encore de la réussite d'Hélène.

On l'avait déplacé. De la place chaude et rassurante près de la cheminée, on l'avait hissé à l'étage. De cette épreuve, il n'était pas sorti indemne. Son dossier rutilant avait essuyé maintes écorchures, frotté sans vergogne contre le mur de l'escalier. Un de ses pieds en spirale avait tremblé. Il s'en était fallu de peu qu'il soit remplacé. Le doux fauteuil au pelage brillant se tenait maintenant près de la fenêtre de la chambre à coucher. Il dorlotait les enfants, servait de refuge à leurs pleurs et leurs peines. Il connaissait par coeur les histoires de princes et de princesses, les aventures des héros d'Adalerin, les contes de la douce Grendelor.

Les années avaient passé. Les enfants d'Hélène avaient grandi. Le fauteuil commençait à se faire vieux. Le fauteuil commençait à gêner. Compagnon de leurs peurs, complice de leurs malices, il gardait leurs marques d'amour bien au chaud de sa douce fourrure. Des coeurs indélébiles au crayon feutre s'étalaient sur sa poitrine. Sur son bras, un jardin avait vu le jour. Une coccinelle tentait de s'envoler, retenue par une fleur gravée au ciseau. Il avait été l'ossature de leurs cabanes en draps, partageant leurs petits secrets et promettant de ne rien révéler.

La mine pensive en le regardant, Hélène discutait avec son mari. Il était temps de le vendre. Il rendrait bientôt l'âme. Non ! Ce serait un sacrilège enfin, notre fauteuil ! Il vaudrait mieux attendre encore que nos petits quittent le nid… Ainsi fut fait.

°°°°° °°°°°° °°°°°



Un grain de poussière pour chaque seconde. Chaque seconde le pousse un peu plus vers la tombe. Oublié, le vieux fauteuil se meurt. Les enfants étaient partis, depuis bien longtemps. Il ne saurait plus dire quand exactement. Au tout début, Hélène l'astiquait, l'aspirait, le brossait, lui donnait de l'amour. Chaque jour. Puis, les jours devinrent des semaines, des mois. A chaque visite, il voyait ses cernes se creuser, sa bouche se fermer, son front se rider. Jusqu'à ce qu'elle ne vienne plus. Alors le temps passa, long goutte à goutte sans fond, spirale infernale sans fin. Le temps passa, le recouvrant d'une écharpe chargée d'années.
Du fond de sa torpeur, le vieux fauteuil n'entendait ni ne voyait. Quand une infime secousse mit ses sens en alerte. Ses poils poussiéreux se dressèrent. Une onde de détresse parcourait la maison. La porte de la chambre s'ouvrit à la volée. Hélène, les cheveux blancs, lui jeta un regard de noyée. Négligeant la poussière qui le recouvrait, elle se blottit contre lui. Comme autrefois. Elle l'inonda de ses larmes, en proie à une peine immense, une tristesse inconsolable, un poids plus lourd que son âme ne pouvait supporter. Il comprit. Pour toujours, son mari était parti. Alors il la consola, comme au temps d'avant, quand les enfants gambadaient et riaient en tournant autour de lui. Il prit son chagrin, absorba chaque larme, se fit cocon pour sa plus vieille amie. Le papillon qu'elle était s'en retournait chenille. Un sillon sur chaque joue. Elle resta longtemps blottie dans le fauteuil de ses premiers amours. Il était de retour dans sa vie.

Le long voyage du retour commença. De nouveau, il fut hissé et tiré, malmené. Mais il entendait les supplications chevrotante d'Hélène qui les implorait de ne pas lui faire de mal. Marche par marche, il descendait par saccades, grinçant à chaque impact. La coccinelle sur son bras frémissait, regrettant de ne pas pouvoir prendre son envol. Il souffrait avec elle, le vieux fauteuil à la fourrure devenue rêche.

Cinquante ans exactement. Il avait bien vécu, au chaud de cette famille, adoré de son Hélène. Les pas menus trottèrent dans sa direction. Elle allait bientôt prendre place dans son alcôve douillette, tout près de la fenêtre. Derrière l'Ecole qui l'avait accueillie jadis. Face à la baie vitrée qu'elle distinguait au premier étage. Celle des appartements officieux de l‘ancien directeur TrOn. Aujourd'hui, ils étaient vides. Hélène lui avait raconté les frasques de ce directeur, connu pour sa mauvaise humeur. Elle pouffait, sachant des choses qui pourrait le faire rougir. Son string léopard, par exemple, qu’il laissait pendouiller à la poignée de sa fenêtre. Elle avait l’œil acéré, son Hélène ! Elle avait noté les moindres détails de ces petites manies, cachée par les rideaux à fleurs de sa cuisine. Le soir venu, elle chuchotait à son doux fauteuil les secrets découverts dans la journée. Puis elle oubliait, et recommençait à espionnait ce cher directeur. Il avait des chiens qui n’aimaient rien d’autre que la pâte à dentifrice ! Il enrageait, le directeur, de leur servir comme repas des croquettes aromatisées au Colgate. Si ses mentors l’apprenaient.. Il serait la risée. Hélène savait tout cela, puis oubliait encore une fois. L’École ferma. La vieille dame resta de plus en plus souvent calfeutrée dans son cher fauteuil, à marmotter des phrases sans queue ni tête. Jusqu’à la fin. Elle s’éteignit comme une bougie, doucement, sans faire de bruit. Elle ne lui soufflerait plus de mot doux. Elle emportait tous ses secrets avec elle, l’histoire de sa vie et de ses habitants. Il ne resta plus personne dans la maison. Juste un fauteuil.

Mais le fauteuil se souvenait...
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Hugo Zeppeline
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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeDim 25 Oct - 15:57

An 18627


« Ter Aelis n’est plus la jeune de jadis. Elle a beaucoup évolué depuis ses débuts, notamment grâce à l’invention de la machine à remonter dans le temps. Actuellement beaucoup de colons du passé arrivent dans Belthil. Comme vous le verrez au cours d’étude des différentes dimensions, leur monde est parallèle au nôtre. Le tourisme aelissien s’en est vu grandi… »

Sephilarh posa une main devant sa bouche, par politesse et pour éviter que sa mâchoire ne se décroche. Quel cours barbant. Le cours d’histoire, lui, n’avait pas évolué, depuis des siècles : il était soporifique. Et dire que son grand père avait été professeur ! Quoiqu’il paraît qu’il s’en sortait bien, il avait de la renommée… et évidemment, lui se retrouvait avec tout à prouver. Bonjour les réputations !

La sonnerie retentit sur leur bracelet d’argent, annonçant la fin des cours. L’hologramme du professeur disparut et tous ôtèrent leurs lunettes-syllabus. Deux autres petites merveilles. Les professeurs rendaient service à Ter Aelis durant la journée, et donnaient leur cours par transmission en trois dimension. Les cours étaient intégrés dans des lunettes de protection. La gauche permettait de lire le syllabus, tandis que la lunette droite permettait de prendre des notes mentalement. Efficacité prouvée.

Sephilarh salua Ramnette, Goldnis et Smircass, ses voisins de banc et boucla son gilet de sustentation. Les skateboard à énergie solaire permettaient un vol rapide mais risqué. Le gilet assurait une protection aux conducteurs. Wilwarinn était toujours très encombrée, tant au niveau piétonnier qu’au niveau aérien, mais Sephilarh prit un raccourci pour rentrer. Il passait dans des endroits peu fréquentables ou, disait-on, des harpies guettaient. Il tomba nez à nez avec l’une d’elle. La rumeur disait donc vrai…

Il avait failli se faire très mal. Déviant de sa trajectoire dans un réflexe salvateur, il contourna la harpie bionique qui s’élevait devant lui. Malheureusement pour lui, son gilet de sustentation l’immobilisa dans les airs, pour qu’il ne tombe pas, ce qui permit à la femme oiseau de s’emparer de lui. Un ricanement robotique sortit des cordes vocales de la créature, faisant naître la peur chez le jeune garçon.

- Laissez-moi ! Je suis le petit-fils du grand Sephiroth ! Si vous ne me lâchez pas, mon père et lui viendront vous massacrer !

Il doutait que son père vienne, puisqu’il avait disparu dans des circonstances mystérieuses, mais c’était dans sa nature de l’invoquer lorsqu’il avait des problèmes.

La harpie ricana de nouveau. Sephilarh sentit quelque chose de pointu le piquer dans la jambe, sa vue se troubla, et tout devint noir autour de lui : il plongea dans les limbes…

Il était en plein cauchemar. Quoique… Il semblait flotter dans un espace sans pesanteur, où se mêlaient plusieurs vies, plusieurs passés. Au nord, au nord est et ouest, au sud, sur est et ouest, à l’est, à l’ouest, partout des images, les flous contours de silhouettes qui semblaient répéter des scènes à l’infini. S’il avait eu le temps de réfléchir, Sephilarh aurait surement pensé qu’il était au cœur de la roue du temps.

- Grand-père… papa ? Où suis-je… ? Au…secours… Harpie. HARPIE !!!

Où était-elle ?! Comment se faisait-il qu’il ne la voyait plus? Quel était cet endroit? Il ne parvenait pas à se souvenir. Quelque chose étreignait son esprit pour l’empêcher de s’interroger plus profondément sur le sujet. Il aperçut alors une silhouette qui s’avançait vers lui, devenant de plus en plus distincte. Il crut à une harpie mais son esprit chassa bien vite cette idée… Était-il possible que..? Cette allure, vive et pourtant courbée, ce visage qui regardait vers l’avant, ses yeux qui percent l’obscurité, cette toge sombre élimées et ces bandelettes de tissus qui flottent derrière. Ce grand bâton en guise d’appui, qui semblait ne jamais fléchir. C’était son grand père. Bientôt, il put voir sa longue chevelure blanchie par les ans lui entourant le visage comme une crinière, le bleu pastel de ses yeux ridés par le rire, ce sourire assurant et bienveillant, cette peau toujours si blanche, si pure… Sephiroth. L’ancien tutélaire d’Aelis. L’ancien et premier prof d’étude des dimensions. Son grand-père. Comment l’avait-il suivi ???

- C'est une très bonne question, jeune homme. A laquelle je vais répondre, bien entendu. Tu es entre deux dimensions, mon cher petit-fils. Il serait bien compliqué de t’expliquer par quel moyen, d’autant que j’ignore ce qui a pu t’endormir aussi profondément pour te mener dans les limbes de tes origines…

- Pardon ?

- Oh, je vois… tu ne sais rien des limbes sephiriennes. Sommeil ou méditation des habitants de Sephyrie. Ce que tu vois ici, ce sont les divers moments de ma vie, de celle de ton père et… si tu poussais plus loin, celles des autres habitants de ma planète natale. Fabuleux, tu ne trouves pas ?

- Euh… je crois que ça me fait surtout peur, avoua le jeune garçon.

- Et c’est normal. Mais si je te dis que tu vas pouvoir probablement voir ton père, ça ne te fait pas plaisir ?

Son cœur rata un bond. Son père ? Il ne l’avait jamais vu ! Son père… son père, visible ? C’était un rêve, ce n’était pas la réalité, c’était impossible…

- En effet, il s’agit presque d’un rêve. Tu vas voir ses souvenirs. Tu ne pourras pas discuter avec lui ou même le serrer dans tes bras. Sauf si celui-ci aussi est en plein sommeil… mais je doute qu’à son âge il fasse la sieste. Il n’est pas un vieillard, lui. Oh… mais j’y pense, viens voir.

Sephiroth lui tendit la main et mena Sephilarh dans les souvenirs. Il lui montra son enfance, jeune garçon enfermé dans une bibliothèque… il n’en saurait pas plus. Puis son adolescence, jeune garçon rebel qui nourrissait de sombres projets. Puis l’âge adulte, son arrivée sur Ter Aelis, ses prises de fonctions puis sa grand-mère. Image fugace. L’espace d’un moment infinitésimal. Souvenir douloureux ? Sans doute… Et puis… et puis son père ! Son père bébé, son père à quatre pattes, son père jeune enfant, son père adolescent, son père… Pas d’image adulte. Rien de plus…

- Désolé mon grand, il y a des affaires qui doivent rester secrètes. Et puis… il serait peut-être temps de te réveiller, non ?

- Me réveiller ? Ah oui ! Grand-père, les harpies !!

Mais cette figure si aimable disparaissait, s’éloignait de plus en plus…

- Je sais… je sais… J’arrive. Il te faut la clé, pour quitter les limbes. Et tu sais qui elle est. Réfléchis. Revois les souvenirs. Qu’est-ce qui est commun à tous. Ne t’inquiète pas, surtout. Les harpies ont besoin de toi, elles ne te feront pas de mal.

Que voulait-il dire ? Il ne comprenait pas. Sephilarh resta planté là pendant un long moment, repassant ses souvenirs en mémoire. Qu’y avait-il de commun à tous ? Pas la personne… pas les décors… quoi, alors ? Il lui semblait que les heures s’écoulaient, à présent. Son sommeil devenait agité. Les souvenirs perdaient de leur substance. Le soporifique était trop fort, il allait le plonger dans le coma ou en tout cas lui paralyser ses fonctions cognitives. Un éclair l’aveugla dans un souvenir. C’était un reflet d’une courte seconde provoquée par l’épée de Sephiroth. L’épée… oui ! Elle figurait dans tous les souvenirs ! Et s’il avait bon souvenir, elle était le cœur du bâton sur lequel s’appuyait son grand-père ! Comment l’appelait-il, déjà ?

- Ma… macha… masa… masam… Masamune !

Mais ce n’était pas si facile… Il fallait qu’il trouve le nom « dérivé » de sa clé. De sa propre épée. Ce n’était pas Masamune qu’il appelait, mais sa propre future épée. Comment trouver ?

« Ton avenir dépend de tes choix… »La phrase fétiche de grand-père !

- Masanime ! Je te veux ! Je te choisis ton nom ! S’écria triomphalement Sephilarh.

Une petite lueur apparut dans le creux de sa main, comme une petite étincelle d’espoir. La lumière grossit, prit de l’ampleur et dessina les formes d’une épée. Masanime était née. Finement ouvragée, la lame légèrement courbée, d’une longueur raisonnable, adaptée à son propriétaire. Sephilarh fendit l’air, une seule fois et ce fut comme si l’espace se déchirait. Au même moment, il ouvrit les yeux et sentit que son arme avait coupé les cordes qui le liaient. Il y avait des cris perçants et des voix humanoïdes dans la pièce.

- Bracelet : visualisation.

Un plan d’où il se trouvait apparut, lui laissant voir le nombre de personnes dans la pièce. Apparemment, il y avait un combat. Il essaya d’ouvrir la porte du placard dans lequel il se trouvait, sans succès. Elle était blindée et l’ouverture se faisait à l’iris. Il regarda Masanime… déterminé, il fonça. Masanime se recouvrit d’une énergie bleue qui enlaça le sabre et celui-ci découpa la porte comme un fil coupe du beurre.

Un peu surpris de ce qu’il découvrait, Sephilarh fut encore plus choqué de voir ce qui se tramait dans la pièce où il venait de débouler. Son grand-père et un type qui lui ressemblait comme deux gouttes d’eau tenaient en respect une foule de harpies ! C’était son père, il en était sûr. Il était vêtu étrangement… Il portait une combinaison noire qui semblait avoir des propriétés inconnues, vu la multitudes de touches tactiles insérées au niveau du torse. Il avait un drôle de fusil d’où sortait une lame d’argent, lui permettant divers types de combats. Enfin, il portait des lunettes virtuelles noires qui devaient lui livrer bon nombre d’informations. On aurait dit… un agent « secret » ?!

Pas le temps de réfléchir plus, les harpies repartaient à l’assaut ! Il fonça aux côtés de son grand-père, dont la souplesse et l’agilité l’étonna. Les deux hommes lui sourirent et à trois, ils tailladèrent les harpies jusqu’à ce que leurs circuits ne leur permettent plus de se battre.

L’homme en noir dirigea un appareil vers elles et un filet paralysant les entoura, les liant toutes les unes aux autres.

- Il savait pour lui, fit l’homme en le désignant de la tête. J’ai du intervenir, plutôt que de céder au chantage. C’est la première fois que mon métier vous met en danger… j’espère que cela n’arrivera plus. Désolé, Masashine.

Il posa une main sur une harpie, un portail temporel s’ouvrit et l’homme y pénétra avant de disparaître.

- Pa…

Sephilarh s’arrêta. C’était inutile. Il n’en était pas sûr. Pourtant… l’étranger l’avait regardé avant de disparaître. Un regard qui lui avait semblé familier. Pendant un instant il était sûr que… Mais non. Son père l’aurait sûrement regardé plus longuement, serré dans ses bras, ou quelque chose du genre. C’est ce que font les pères, après tout.

- Il est parti si vite, soupira Sephiroth. Son métier n’est pas facile. Allez, viens, Sephilarh, tu as des devoirs à faire pour demain. Il ne faut pas négliger ton enseignement.

Et il avait raison. Deux ans plus tard, Sephilarh apprit que Masashine signifiait… « papa ».
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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeVen 26 Oct - 20:34

S'il est un métier difficile à exercer dans Ter Aelis lorsqu'on n'est qu'un pauvre petit citoyen sans histoires, c'est celui de fleuriste ou jardinier. Or, il s'avère que Bill était de ceux-là. Au milieu de sa vingtaine, il était un jeune homme dans la force de l'âge, aux bras vigoureux et à la gueule d'ange qui faisaient tous deux tomber les filles.

Tomber les filles, certes... mais sûrement pas pousser ses légumes! Le jeune homme désespérait d'un jour concurrencer les pseudo-jardiniers tels que Grendelor qui, grâce à leur magie dégoûtante, vous faisait pousser une salade du plus bel acabit en dix minutes! Ces êtres contre-nature prétendaient respecter la nature alors qu'ils la contraignaient à porter des fruits là où elle n'en avait pas forcément l'envie.
L'esprit rebelle et ne partageant pas ces aptitudes, Bill préférait les méthodes traditionnelles qu'était la bêche, la charrue, la jachère et le fumier.

Un jour, découragé en voyant ses tomates malades et impropres à la consommation, il laissa tomber sa bêche, claque la porte de sa ferme, avant d'en ressortir propre comme un sous neuf et le pas franc vers Belthil.

* A bas les principes, je ne serai jamais reconnu pour mon Art, si je n'emploie pas les grands moyens ! *

Arrivé dans la capitale, il abandonna les transports publics pour se diriger vers des ruelles plus sombres menant aux bas quartiers. Là-bas, il reconnut l'enseigne de ce groupe de cultivateurs extrémistes qui l'avaient approché de nombreuses fois. Il entra dans la bâtisse et dit au molosse qui gardait l'entrée:

- Que je meurs si je jette encore une seule tomate! Laissez-moi passer, je souhaite faire affaire avec Le Fumier.

C'était le nom de code que portait le chef de l'association, et son odorat constata très vite qu'il portait très bien ce nom. Ils échangèrent une poignée de main symbolique, de l'argent s'échangea, et Bill ressortit de l'établissement avec un sentiment revanchard mais aussi avec appréhension. Les graines génétiquement modifiées qu'il avait achetées à cet homme le mettait en conflit avec ses valeurs. Sur le chemin, il finit par décider qu'il n'utiliserait qu'une seule graine pour faire pousser une citrouille si belle, si grosse, que le peuple Aelissien serait obligé de reconnaître quel bon jardinier il était.

Bien à l'abri dans sa serre, il plante une unique graine. Pendant quinze jours, rien ne se produisit, pas la moindre pousse ne se signala. Mais il persista, en arrosant tous les jours, en important du fumier des marécages galvorniens pour enrichir le sien et fertiliser la terre. Lorsqu'au matin du seizième jour il entra dans la serre, ce fût l'étonnement total! Une belle et grosse citrouille trônait au milieu de la serre, étendant des feuilles menaçantes et laissant apparaître des yeux et une bouche halloweenesques très effrayants. Bill hésita à s'avance, et un cri perçant s'éleva de la citrouille. Pris de panique, Bill ferma la serre à double tour et s'enferma chez lui, ne sachant que faire. Il regarda l'emballage contenant les graines, à la recherche d'un indice sur ce qu'il convenait de faire: il ne pouvait décemment pas avertir les autorités, sans risque de perdre à jamais la bonne réputation qu'il désirait se faire. Il lut sur l'étiquette qu'il fallait bien nourrir la plante sans quoi le fermier pouvait encourir de graves problèmes. Bill préféra penser que ces problèmes pouvaient être que sa terre perdrait de sa richesse. Il alla chercher ses tomates bonnes à jeter et en emporta une brouette pleine dans sa serre. Il garderait cette citrouille secrète jusqu'à Halloween, "l'engraissant" jusqu'à ce jour pour espérer remporter le concours de la citrouille la plus effrayante. De cette manière, il sauverait les apparences et se bâtirait une réputation de fermier hors pair...

C'était ça, Ter Aelis: une terre pleine de magie, mais aussi riche en technologies permettant à tout un chacun de trouver un équilibre, s'il le désirait.
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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeJeu 1 Nov - 19:14

Moi, Yllien de Nazathul, forgeron et bretteur réputé, fils de Ther de Nazathul, de toute ma vie n’ait jamais vu une telle chose. Certains m’avaient pourtant bien mis en garde : Ter Aelis était célèbre pour ses contrées étranges et sa magie improbable, mais jamais, je dis bien JAMAIS je n’ai vu ailleurs qu’ici une citrouille aussi titanesquement affamée.

Aussi incongrue soit la situation, je me retrouvais, au tournant d’une rue crasseuse, presque nez à nez avec un légume orangeâtre et baveux d’environ 35 mètres de haut. Au vu de ses triples mâchoires, ainsi que de ses ramifications biscornues et roncières, m’est avis que la pauvre créature avait été quelque peu délaissée par son jardinier. Me sentant l’âme d’un héros , je fuyais à toute jambes vers l’atelier de mon père, priant pour que la soupe sur pattes ne me rattrape pas avant que je mette mon valeureux postérieur à l’abri. Etonné par tout ce vacarme, mon père, tout de sueur couvert, me demanda à mon arrivée :

— Mais ils foutent quoi dehors, tous ces cons ? Y’a quoi ? Encore une de ces saloperies de carnaval ?

J’expliquais rapidement à mon paternel que l’académie des mages organisait certainement un concours de Quouidiche un peu musclé. Priant pour qu’il ne jette pas un œil par la fenêtre de la forge. Mais ma sécurité toute relative fut bien vite estompée par le bras poilu (à la limite du portugais) de mon géniteur. Il me tendait une petite marmite en fonte qu’il venait tout juste de forger :

— Tiens, envois ça à madame Perkins, je la lui dois depuis la semaine dernière, alors grouille-toi !
— Mais… Papa…Y’a un…
— Tournoi de Porridge, je sais. Et ben quoi ? T’as peur de te prendre des fillettes en robe dans le croupion ? Allez, file, et que j’te revois pas avant que ce soit livré !

Saisissant mon colis, je ressortais dehors, la mort dans l’âme. Alors que des centaines de citoyens se faisaient dévorer par le monstre géant, moi, le plus grand héros de toute la famille, allait devoir traverser la ville pour livre un bout de ferraille à une vieille grabataire sournoise.

Mais le monstre avait bien plus avancé que prévu, et il n’eut qu’à faire trois « petits » pas pour se dresser de toute sa hauteur devant moi. Criant pour ma vie alors que son immense main allait s’emparer de moi, je tentais d’abattre mon courroux en frappant le vide avec ma marmite. Sans doute était-ce une crainte millénaire, mais la citrouille géante s’effraya devant mon humble récipient à soupe. Terrifiée par ma relique mortifère pour son peuple, elle se mit à geindre et à reculer face à mon immense pouvoir. Utilisant sa crainte contre elle, je me mis à hurler une fausse malédiction à base de « pot-au-feu », « ratatouille » et autres « bouillon ». Le sort funèste fit rapidement effet, car le monstre fit demi-tour sur-le-champ et s’enfuit hors de la ville, et dit-on même de Ter Aelis. Je pus la suivre avec mon arme jusqu’aux portes de la ville, mais jamais plus on ne revit cet étrange animal. Bien sûr, madame Perkins n’en sut jamais rien, trop occupée à répandre de basses rumeurs sur le fait qu’elle m’ait eut dans son lit (fait que je démens totalement d’ailleurs !), mais cela n’empêcha pas que soit érigé une statue à mon effigie, brandissant fièrement une imposante marmite en fonte, gravée au nom de la famille, qui fit la fierté de mon père, et lança ma longue carrière totalement inventée de bretteur héroïque.
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MessageSujet: Re: Mémoires Aélissiennes [Recueil]   Mémoires Aélissiennes [Recueil] Icon_minitimeSam 15 Nov - 22:48

En triant les sujets afin de rendre opérationnel l'accueil des rôlistes en Echoriath, nous avons sorti ce merveilleux sujet qui est un excellent atelier d'écriture.
J'espère qu'il vous donnera envie d'y participer.
Profitez bien des textes déjà écrits, certains valent leur pesant de cacahuètes !



Edit Ch'M'ik : on déplace en section nouvelles. On doute que quelqu'un écrive quoique ce soit dessus, et un sujet dont la dernière participation date de 2012 en mémo, ca fait tâche. Mais ça mérite de rester visible dans les bibliothèques.
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