Arrivée de la sombre âme errante

Cela faisait longtemps que Kayae errait, sans but précis, dans cette direction qu'elle n'aurait su nommer. La tête pleine de sombres pensées, le coeur vide de toute joie, elle avançait simplement, vers "là-bas", sans savoir pourquoi.
Ou plutôt si : elle sentait, quelque part en elle, que l'espoir se renouvellerait "là-bas". Oui, le renouveau, la renaissance car elle était comme morte depuis sa perte...

Son instinct ne l'avait pas trompée; rapidement, elle aperçut de grandes tours trônant sur le monde ici-bas. Erigées vers le ciel divin, elles semblaient appeler à croire à nouveau en la vie.

"La vie... sombre baliverne, tromperie.", songea Kayae, décidément négative.

Elle pénétra dans la tour principale, arrivant dans la ville. Un sextant lui faisait face, qu'elle parcourut rapidement des yeux.

"Je vois...", murmura-t-elle simplement.

Elle reprit son chemin, sa cape noire traînant derrière elle, la capuche masquant sa tête au peuple et laissant juste entrevoir ses fines lèvres désespérément pointées vers le bas.

"Bel endroit pour un renouveau... mais où aller à présent ?"

Lorsque nous sommes habitants de ces terres prodigieuses de Ter Aelis, il n'existe pas toujours de raisons logiques à nos déplacements. Suivant nos instincts et vadrouillant sans cesse entre les villes pour effectuer divers travaux, on en arrive souvent à passer de ville en ville avec régularité. C'est pourquoi Aillas arriva devant le sextant de Belthil, son travail de Gardien l'amenait souvent ici pour assister aux Conseils. Aujourd'hui il était inoccupé et profitait donc de son repos pour se pencher sur les problèmes actuels et jeter un oeil au reste. Au sextant, entre autres.

Il vit alors une femme toute encapuchonnée et de noir vêtue qui s'était arrêtée, elle aussi devant le sextant. Avec son air intéressée mais sans plus et sa façon de reprendre son chemin sans avoir de réel but, Aillas se permit de supposer que la femme était nouvelle en ces lieux, il s'approcha donc d'elle. Comme il arrivait par derrière, en la suivant, il dû lui mettre la main sur l'épaule en l'interpellant doucement pour se faire entendre et attirer l'attention.

- Excusez ma présomption, demoiselle, mais j'ai comme l'impression que vous êtes nouvelle ici. Il fit une sourire chaleureux. Si c'est le cas, je serais ravi de vous donner une aide. Si ce n'est pas le cas, je serais ravi de vous emmener boire une coupe pour vous enlever cet air maussade et désespéré qui défigure votre beauté.

Kayae repoussa machinalement mais sans méchanceté ni froideur la main de l'étranger, comme pour lui signifier qu'on n'usait pas de ces familiarités avec elle.
Puis sans soulever sa capuche ni faire attention à son "air maussade et désespéré", elle répondit, d'une voix assez assurée à travers laquelle on sentait une grande lassitude générale, un spleen dominant et imbattable :

"Vous ne vous trompez pas, je suis nouvelle en ces lieux. Il est vrai que je ne les connais pas, et une visite guidée ne serait pas de refus mais..."

Elle leva une main pâle aux ongles noirs et longs tels des griffes devant l'inconnu.

"...mais je ne compte pas enlever cet "air maussade et désespéré" de ma figure, et s'il vous gêne tant je me verrai contrainte de décliner à grand peine votre offre, car il est vrai que je suis bien seule depuis..."

Elle marqua une longue pause et sembla faire un grand effort pour reprendre :

"...depuis un certain temps."

Tàranis était à Belthil par hasard, comme elle aurait été au milieu d'une plaine. Les yeux dans le ciel, elle ne regardait pas devant elle, mais avançait dans la rue. Soudain, un choc violent la fit tomber sur les fesses et la ramena sur terre à une vitesse fulgurante. A tel point qu'elle dû regarder autours une bonne minute pour retrouver où elle se trouvait. Elle finit enfin par voir la jeune fille qui lui faisait face.

Ah, j'ai dû me cogner à elle tiens.

Elle lui adressa un grand sourire et se releva d'un bond, avant d'apercevoir Aillas à ses côtés. Elle le salua rapidement

Bonjour! Vous êtes nouvelle ici?

Elle s'inclina brièvement, tout en se présentant.

Je m'appelle Tàranis Linwëlin, et si vous avez le moindre soucis, demandez, je répondrais!

Puis, jetant un regard au gardien, elle ajouta:

Et lui aussi, sans doute, se fera un plaisir de vous guider.

Un grand sourire sur les lèvres, elle se demandait bien ce qui assombrissait l'inconnue. Tout était tellement beau, ici!

La jeune fille s'assombrit encore plus. Elle ne supportait pas le bonheur quand elle-même était plongée dans le désespoir le plus sombre, néanmoins elle fit un effort pour paraître un peu moins sombre, effort invisible mais présent pourtant.

"Bonjour... décidément on accueille les gens bien étrangement ici ! Ma foi, c'est assez... drôle."

Elle esquissa un léger sourire, chose rare mais tellement belle chez cette créature de l'ombre.

"Comme je le disais tout à l'heure, charmante mademoiselle, une visite guidée ne me ferait pas de mal, je pense... ou quelques explications, car je ne sais guère où me diriger maitenant ! Quelle nouvelle vie pourrais-je construire ici ? Pour... oublier... ?"

- Super.

Aillas mit sa main devant sa bouche d'un air embarrassé.

-Heum, je ne voulais pas dire "Super" dans le sens "Vous êtes seule, génial", je voulais dire "Ici on va s'occuper de vous, vous pouvez pas mieux tomber". Et je le pense sincèrement, que vous vouliez garder cet air découragé ou pas. Après tout, vous êtes mignonne aussi ainsi. Il sourit largement.

-Vous venez d'où alors? Pour atterrir ici, j'imagine que vous avez dû pas mal voyager... Aillas eut une hésitation. On ne s'est même pas présenté, je me nomme Aillas, je suis Gardien de ces terres. Bien que je sois davantage à Echoriath, la cité dans les montagnes ou à Wilwarin la cité volante pour mon travail. Et vous êtes?

"Je suis... je me prénomme Kayae. Mon passé ne vous regarde pas, tout ce que vous devez savoir c'est que je compte oublier mon ancienne vie et en commencer une nouvelle ici."

Elle détourna le regard un moment, ne sachant quelle attitude adopter ni que dire.

"Hormis ces vains compliments... puis-je sans indiscrétion savoir quel est votre travail en ces lieux ? Et vous avez parlé de cité volante... cela me paraît impossible, pouvez-vous m'expliquer cette appellation ? Elle m'intrigue je l'avoue..."

Et tandis qu'elle prononçait ces paroles, ces yeux dévoraient l'inconnu, bien qu'il ne pût s'en apercevoir car sa capuche couvrait son regard, exprès.

Voyant que majgré son mutisme affiché, la jeune femme se laissait aller à quelques écarts de politesse et de soif d'apprendre, Aillas eut un sourire léger et apaisé. Il prit donc à coeur que de lui expliquer certains fondements de Ter Aelis et, pourquoi pas, un peu de lui même. Taranis était là aussi et, malgré qu'elle eut bousculé Kayae, commençait à discuter avec elle.

- Je suis Mentor à l'Académie de littérature à Wilwarin. La Cité qui vole justement. Alors pour faire simple, et dans mes maigres connaissances dans le domaine purement scientifique, la ville est dotée de quantité phénoménale de générateur à anti-gravité. Ces moteurs la maintienne donc constamment en l'air. Il haussa les épaules d'un air de ne pas en savoir beaucoup plus. Sinon je suis Maître du hasard à Adalerin, je mène sans cesse des Aventures pour couvrir les diverses missions que l'on me confie.

Il s'arrêta dans son explication.

-Mais toi, Kayae, quels sont tes talents, où es-tu douée?

*Décidément, les gens sont incapables d'organiser des trucs *
L'elfe était renfrogné, venue pour rien à belthil, au lieux de continuer de se pencher sur ses tableaux.

Passant par hasard devant le sextant, il y vit Aillas et Taranis ainsi qu'une nouvelle arrivante semblait-il.
Il pourrait toujours aller saluer les gens. Après tout il était gardien aussi.
S'approchant, la mine toujours quelques peu énervé, il se força d'afficher son plus beau sourire.
Il était juste assez près pour avoir entendus les dernières paroles de son confrère.

-Mais toi, Kayae, quels sont tes talents, où es-tu douée?

Saluant l'entourage, se présentant quelques peu rapidement, avant qu'elle n'est le temps de répondre, saluant Aillas et Taranis.

Désoler de vous dérangez, mais ayant vu que nous avions une nouvelle arrivante en passant par hasard par ici.
Je me suis dit que vous souhaitez la bienvenue serait une bonne chose. Sephi, Gardien également, bien que je passe mon temps entre Sûl Nar et Atalantë. Si jamais vous avez une question sur ces lieux.

Les lèvres de Kayae se déformèrent légèrement.

"On se fait vite repérer ici quand on est nouveau, on dirait !", dit-elle, agacée.

Puis elle se tourna vers Aillas. Les mots "Mentor à l'Académie de Littérature" avaient fait bondir son coeur.

"Justement, monsieur, le seul talent acceptable que je possède est d'écrire. C'est une passion depuis toujours, et j'en use pour me libérer de mes nombreuses souffrances, car ma vie n'est pas facile... de toute façon je suis venue ici pour en changer. Dites-m'en plus, je vous en prie, puis-je faire partie de cette académie ?"

[HRP] au passage, j'ai posté une candidature dans ladite académie [/HRP]

Le visage d'Aillas s'éclaira en entendant la nouvelle se confier de sa passion pour les arts écrits et de son engouement à ce sujet. Voilà qui lui faisait bien plaisir, de nouvelles têtes pensantes qui éprouvent, c'est toujours un plus non négligeable pour la communauté des écrivains.

- Si tu peux? Bien sûr que tu peux faire partie de l'Académie, les bancs des écoliers n'attendent que toi pour commencer ton instruction. Foi de mentor. Laisse moi vous parler de cette Académie justement, la notre, mais la tienne surement bientôt aussi.

Il prit une inspiration et se lança dans la description de l'organisation de la structure.

- Au début, il suffit de remplir un formulaire pour demander à se faire intégrer dans les rangs des élèves. Selon le règlement, un mentor devrait venir te voir pour t'annoncer qu'il te prend en charge. Si un mentor ne te prend pas en charge immédiatement, tu as tout de même accès à une banque de devoirs à faire pour t'entraîner et ne pas perdre la main. Ces devoirs seront corrigé par un ou plusieurs mentors. Autrement, il y a aussi les cours magistraux qui coupent et recoupent les divers travers des élèves et tentent d'y remédier en expliquant les principes d'écriture ou en offrant quelques idées de fonctionnement. Il écarta les mains avec un air d'évidence. Par contre, si tu ne remplis pas tes charges d'élève, il se peut que ton mentor t'abandonne pour d'autres plus studieux. Il sourit pour tempérer son propos. Mais on te fait confiance, hein.

A la grande surprise des personnes présentes, Kayae partit d'un doux rire cristallin.

"Hahaha ! Allons bon, l'écriture, ma seule libération, enfermée dans tant de règles immondes... la pensée, emprisonnée dans les chaînes des obligations !..."

Elle reprit son souffle afin de se calmer, et ne perdant pas son léger sourire outrancier :

"Enfin, je vous comprends. Sans règles, rien n'est possible, pas même la liberté... Ainsi soit-il, je vais m'inscrire et nous verrons ! Je tâcherai d'être studieuse et appliquée, c'est après tout la seule chose qu'il me reste dans ma vie... non, c'est la base de ma nouvelle vie, je dois la préserver au mieux !"

Elle s'inclina devant le mentor.

"Je vous remercie. J'espère même secrètement vous avoir comme mentor ! Vous me plaisez bien..."

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