Haven - Devoirs [Airet Syl]

Rien de tel qu'un peu de surprise pour égayer cet univers cité. Et un message d'accueil pour introduire une entente, passée entre l'élève Haven (que nous qualifierons de collègue) et Airet Syl.

En guise de départ, tu vas présenter tes lectures, récentes ou non, et les domaines que tu préférerais exploiter ; quelques écrits aussi (des quotes ou des liens).

Pour la cadence des devoirs, nous avions tacitement évoqué l'accomplissement d'un devoir toutes les 3/4 semaines, vaut mieux prévoir large et proposer des résultats, des pistes. A la rigueur poster tes tentatives.

Nous finaliserons d'abord les préparatifs avant de lancer un premier devoir. Qu'en pense tu?

Voila voila

Commençons donc... Comme je te l'ai expliqué je n'ai malheureusement aucun texte publié à te présenter ici, et j'en suis désolé. Je passerai donc directement aux lectures (plus ou moins chronologiquement)

- J.R.R Tolkien

Je ne pourrais citer un texte en particulier, du fait que j'ai lu l'immense majorité de ses écrits. Ma préférence revient toutefois au Silmarion qui nous entraine à travers la genèse de son univers et aux pourquoi du comment quant à la trilogie. Ce qui m'a particulièrement fasciné chez cet auteur, c'est sa capacité à créer de toutes pièces (Ou presque) un univers cohérent (arbres généalogiques hobbits), allant même jusqu'à créer des langages entiers (Dictionnaires elfiques avec 4 dialectes, ainsi que leurs grammaires) pour se rendre compte du travail qu'il a du produire pour fournir à ses oeuvres la profondeur qu'elles possèdent. Alors, en dépit des (trop) longues descriptions sur plusieurs pages (Avis personnel), Il n'est pas moins que le premier auteur à m'avoir vraiment passionné.

Malgré cela, la fantasy n'est pas mon thème de prédilection, cela pour une raison qui m'échappe quelque peu (mais je soupçonne le fait qu'avoir lu des auteurs plus caricaturaux, m'en ait un peu dégouté)...

- Frank Herbert - Le cycle de Dune

Là encore, je ne pourrai pas citer un texte particulier. J'ai découvert ici aussi un univers passionnant, plus engagé à travers certains thèmes comme les religions, notamment. La fin du cycle m'a toutefois laissé une moins bonne impression que les premiers tomes, étant plus axée sur la philosophie, mais il me parait logique que la philosophie soit un des chevaux de bataille de ce genre, penser au futur et aux conséquences du présent restant l'une des préoccupations majeure de l'espèce humaine...

Je reste mitigé face à la science-fiction et à son écriture. J'ai du trop lire de rapport de batailles d'Ogame...

- Haruki Murakami
- Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil
- Les chroniques de l'oiseau à ressort
- Le passage de la nuit
Je ne sais pas si c'est à cause du japonais (et ce malgré les traductions), mais je trouve aux textes de Murakami une terrible précision. Ses descriptions et récits semblent tellement vrais que c'en est presque hallucinant. Son écriture très fluide amène les éléments de l'intrigue à chaque fois avec une facilité déconcertante et, bien que je lui trouve quelques défauts quant aux personnages (Les personnages principaux des "Chroniques" et de "Au sud de la frontière" se ressemble presque trop à mon goût), ainsi qu'à cette manie de laisser beaucoup de questions (secondaires, certes mais importantes) en suspens j'aime beaucoup cet auteur...

- Chuck Palahniuk
- Fight Club
- A l'estomac
J'ai commencé à lire Palahniuk par hasard, en découvrant que Fight Club était tiré d'un livre. Ça été une sorte de choc pour moi. Là ou le film peut sembler sombre, il gardait un aspect souple et lisse en cela que la narration était clair. Le livre se passe ce de côté. On plonge dans un univers certes aussi sombre, mais avec une couche de saleté de dureté supplémentaire. Une grande claque... A l'estomac reprend le même genre et va encore plus loin dans la noirceur. Le point commun de ces deux livres, c'est leur narration si fluide et agréable. Beaucoup de phrases courtes qui s'enchainent et finissent par former un patchwork qui donne un aperçu des personnages et des scènes assez étrange.

C'est ce type d'écriture, entre Murakami et Palahniuk que j'aimerais acquérir. Entres nouvelles et romans, pouvoir poser des émotions avec le plus de justesse possible, imbriqué à des psychologies intéressantes et un tant soit peu logiques...

Voila... Je crois que j'ai fini de te donner les lectures plus ou moins récentes qui m'ont le plus influencer.

Par rapport à la cadence, comme convenu, entre 3 semaines et 1 moins me convient parfaitement...

Voila... Si tu as besoin de données supplémentaires, n'hésite pas

De biens bonnes réponses, qui à mon goût permettront de trouver un cadre d'écriture pour que tu puisses emprunter une voie plus personnelle.

Concernant la fantasy, j'avoue n'avoir retenu qu'une dizaine d'auteurs (Eddings - Cook en qui j'ai le plus de reconnaissance). Et j'ai conscience que le marché est encombré de textes arrachés et traduits à la va-vite pour se glisser dans un créneau saturé. Et je préfère quand le 'magique' sait rester discret ou lorsqu'une pointe de romantisme explore l'univers (Moorcock, Leiber).

Pour le côté science-fiction, nous laisserons de côté tout le space opéra pour oeuvrer vers des coins tout aussi sombres et fantastiques. Puisque Palahniuk ou encore Murakami (très bon, l'oiseau à ressort).

C'est donc dans cet esprit que je te propose ce premier sujet :

Devoir #1 : Folie Générique

Citation :

Le récit se passe dans une société contemporaine, sous l'autorité cependant d'une démocratie juste, mais paranoïaque. Pour l'assurance d'une tranquillité à toute épreuve, l'état procède à un prélèvement d'une fraction cérébrale censée 'conditionner' le devenir de l'individu. Lors de sa 5è année (le cerveau est alors pleinement fonctionnel), chaque enfant subit le contrôle d'état ; si le résultat ne convient pas, il est alors supprimé.
Et aujourd'hui, un agent du gouvernement confie un verdict dramatique à une famille. 'Criminel'.
Tisser un récit autour du père de l'enfant ; longueur libre.

Et voila le premier devoir:

Citation :

Dans le jardin, on entend "Un, deux, trois... Soleil !"

Je suis en équilibre, immobile durant un instant. Non, je vacille, m'assieds.

Dans le jardin, on entend "Retourne au poulailler !"

Ce silence lourd, qui m'oppresse et me coupe le souffle; c'est insupportable. Je suis tiraillé entre le souhait de parler, de contester et l'attente d'un retournement de situation:

- Oh ! Attendez ! Je me trompe de dossier.

Cela n'arrive pas. Toujours silencieux, je me tâte la joue, essaie d'y trouver une autre réalité; un univers parallèle coincé dans un pore cutané.

Dans le jardin, on entend «C'est pas vrai ! J'ai pas bougé !»

L'homme en face de moi semble superficiellement désolé. Le fonctionnaire en face de moi semble complètement détaché. Une respiration plus tard, il passe du statut de simple étranger à celui de l'ennemi numéro un. Mon esprit chauffe, fond et refroidit. Cette grosse plaque solide n'est soudain plus apte qu'à ressentir de la colère. Elle vient en spasmes, agitant mes membres, retournant mon estomac. Je me relève, me rassieds. La raison ou le manque de tripes m'empêchent de faire quoi que ce soit. Mentalement, j'érige une muraille sous la forme d'une liste d'arguments vaguement valables qui finit par me convaincre que ça ne vaut pas la peine d'essayer. Ce n'est simplement pas de sa faute; il ne fait que son boulot; peut-être pourrais-je le convaincre de ne pas emmener ma fille; peut-être qu'il comprendra et m'aidera; peut-être qu'il n'aura pas le courage de mener un autre enfant à l'abattoir, comme il l'a fait pour les dix, les cents précédents... On admire la muraille de Chine et on oublie qu'il suffit de trois secondes aux gens pour dresser une forteresse imprenable à la forme étrange d'une excuse. Dans ma propre prison mentale, je me demande si c'est de ma faute, si j'ai aussi un problème, si...?

Dans le jardin, on entend "S'il te plait, me fais pas reculer jusqu'au poulailler."

Je finis par ouvrir la bouche, inspire.

- Et... heu... Vous êtes sûr qu'il n'y a aucun autre moyen? On ne peut pas la placer dans un institut ? Peut-être retirer ce qui ne vas pas ?

Je marchande la vie de ma fille comme on marchande un kilo de riz. Tant pis si je ne peux pas avoir tout le kilo, j'aurais au moins la livre. Le fonctionnaire ne répond pas et se contente de me lancer un regard qui mêle compréhension, dégout et dédain à la fois. On a du lui demander plus d'une fois s'il y avait moyen de garder des bouts d'enfants, des ersatz de vie familiale.

Dans le jardin on entend "Bon... je retourne au poulailler."

Je sens des larmes perler aux coins des yeux. Je me demande ce que je fais. Je renifle doucement, réprime un hoquet, ravale mes larmes. On ne pleure pas devant un inconnu. Ma volonté se désagrège lentement, tombe en poussière. Je suis affalé sur le canapé. Je fixe un point qui doit se trouver quelque part derrière le fonctionnaire pour faire semblant d' être toujours présent. Ce silence lourd, présent depuis le début, m'a écrasé les poumons, m'a brisé les reins. J'entends vaguement le fonctionnaire réclamer:

- Je vais devoir vous demander de bien vouloir faire venir votre fille. Nous devons l'emmener aujourd'hui même, afin que vous ne soyez pas tentés de faire quelque chose de stupide. Ce serait malheureux.

Il déclare ça d'une voix sans timbre, mais on sent la menace, les sanctions derrière. Je ne suis plus qu'une marionnette désarticulée, qui obéit en sursautant aux ordres intimés par les fils accrochés à mes membres. Je me lève, m'approche de la porte-fenêtre et appelle.

- Diane? Viens s'il te plait.

Dans le jardin, on entend "Un, deux, trois... Soleil! Éliminée !"

Edit: Désolé pour le retard, mais comme je te l'avais dit j'avais un IRL chargé =/
edit2: Je me rends déjà compte, après relecture et concertations que j'ai considéré la donnée comme acquise au lecteur... ça commence bien.

Il y avait mille et une façons de traiter le sujet, et il me semble que se focaliser sur les pensées du père était judicieux.

Tout d'abord, la qualité du texte : il y a eu de la relecture (tu le dis toi-même après le récit). je n'ai noté qu'une seule faute à dégoût (le û).
Une maladresse de concordance en fin de texte ; "m'écrase les poumons, me brise les reins" sonnerait mieux.

Le thème du sujet est bien traité, on sent tous les états du père, face à la réalité, qui comprend que même dans sa société, la colère face à l'injustice le déshumanise, le renvoie à des instincts primaires. Tu soulignes le côté punitif avec les sanctions et le 'ce serait malheureux' qui suggère tant.

On sent que le thème a été tout de même réfléchi, (c'était le but), et qu'il t'a amené à prendre quelques considérations sur les conditions humaines au sein d'un mécanisme bien huilé ; la marionettisation des citoyens, et l'indifférence des fonctionnaires devant les familles brisées (la négociation d'une vie).
Finalement, le 'retourne au poulailler' est assez équivoque, cette phrase enfantine s'adresse également au père qui tente de s'éloigner de la prison dans laquelle il demeure enfermé. On lui demande de se taire et de rentrer dans le rang.

Et la chute, que j'ai trouvée superbe : éliminée!

C'est prometteur, je trouve. Pas besoin de longueur pour traiter efficacement le devoir. Maintenant, je voudrais que tu t'orientes vers un style plus propre, qui te ressemble vraiment (on verra ça avec le prochain sujet).

Tu obtiens un .PA.

Bien, continuons l'exercice avec un sujet dérangeant qui devrait t'asticoter pour dévoiler les surprises que tu renfermes.

Devoir #2

Citation :

Dans un récit loufoque et empreint d'une dérision plus que nécessaire (voir Pratchett, Blaylock...), raconter l'"Invraisemblable Histoire d'Amour d'un Coussin et d'une Aubergine"
Longueur libre. Aucune allusion au cannibalisme n'est nécessaire.