Vous n'êtes pas exceptionnels.

L'aiguille est bloquée au cran d'arrêt du compteur. La voiture roule, file, vole au dessus de la route. Puis il lâche le volant. Silence absolu.

Et là, le crash.

La voiture prend un ralentisseur à toute vitesse, fait un vol plané et pars en vrille comme une bête folle. Je sens une douleur effroyable, comme si je recevais en quelques instants des centaines de coups de poing. Je ne sais plus si la voiture glisse, fait des tonneaux, ou exécute n'importe quelle expression de cet art brute. Je sais seulement que mon corps les reproduit harmonieusement. Je suis balancé d'un bord à l'autre de mon siège, contre le plafond de la voiture et le tableau de bord, qui m'ouvre une large plaie à l'arcade. Finalement, après d'interminables cabrioles, la voiture se calme, comme épuisée par cette démonstration d'acrobaties.

Toutes mes facultés sensorielles sont occultées désormais, mais j'entends son rire. Il rit aux éclats. Je ris spontanément, brièvement aussi car ma mâchoire me lance péniblement. La douleur sature mon corps, et c'est par épuisement que je ne hurle pas lorsque je sens ses mains agripper mes bras et me tirer hors de la voiture. J'essaye sans succès d'ouvrir les yeux, réalisant que mes deux arcades sont crevées. Il m'ébouriffe affectueusement les cheveux, en tout indifférence pour ma nuque qui rugit dans le fond de mon crâne. Il rit encore, moi aussi. Cette légèreté atténue le mal. Il me parle sans que je comprenne vraiment ce qu'il me dit, mais j'entends au son de sa voix qu'il est de bonne humeur, qu'il est excité. Je reprends conscience peu à peu. Ca ira. Ca ira...

On est vraiment peu de chose, maintenant je l'ai compris.

HASARD !


Juste quand j'ouvre ce texte pour le lire, les enceintes sont en train de cracher "My Friend Dario" dans toute la rue.

Autant dire que j'étais dans de bonnes dispositions pour lire ce texte.

Et pourtant je reste un peu sur ma faim. Non pas parce que c'est terriblement court (curieusement le format se suffit parfaitement à lui même), mais parce qu'il y a la promesse d'une révélation qui n'est au final pas au rendez-vous. Les " il " a répétition intrigue de par leur présence plus qu'envahissante; mais à la fin on ne sait rien de " lui ". Les quelques pistes de lectures sont plutôt vagues à vrai dire, ou au contraire trop concrètes. Y a t-il un sens plus profond que la prise de conscience brutale de la valeur de la vie et de sa fragilité suite à un accident de voiture ? A vrai dire la forme me laissait entendre que oui... ou alors je suis passé à côté !

Je suis déçu un peu/beaucoup/passionnément/à la folie/pas du tout.

J'aime beaucoup Palahniuk, vraiment. Et j'aime beaucoup "Fight Club", vraiment.

Et j'ai envie de dire que "j'aime ça". Mais en fait... J'ai l'impression qu'il manque un peu de soude à ce récit. (je pars du principe que tu reprends la version cinématographique de la scène)

J'ai cette impression que finalement c'est un crash à la morphine que tu écris là. Un peu comme si le narrateur était complètement stone, drogué à l'aspartame, et que, finalement, il observait son pauvre petit corps se faire trimballer d'un côté à l'autre de cette voiture tout en sirotant un cherry coca (light, pour l'aspartame).

Il n'y a finalement que peu de références au crash et à ses répercussions sur le narrateur et sur son corps dans le premier paragraphe, tandis que c'est la voiture qui en prend plein la gueule. Et ça me laisse un peu sur ma faim. J'adorerais savoir quelle sensation il ressent au moment de s'écraser comme une merde contre le plafond ou lorsqu'il s'ouvre l'arcade. Quelle sensation lui laisse cette fraction de contact du tableau de bord.

De même, le second paragraphe manque encore de quelques détails inutiles (donc indispensables) pour moi. Pourquoi de l'épuisement ? Sent-il son sang qui tourne ou bouillonne, jaillit par ses arcades ?

Je rejoins également Dvb; les "il" à répétition sont presque envahissants et j'ai le sentiment qu'on aurait gagné en fluidité à en éliminer quelques uns.

Mais finalement, j'aime bien ce fait que le narrateur ne soit jamais réellement celui dont on parle le plus.

J'aime ça.

Haven a écrit:

J'ai cette impression que finalement c'est un crash à la morphine que tu écris là. Un peu comme si le narrateur était complètement stone, drogué à l'aspartame, et que, finalement, il observait son pauvre petit corps se faire trimballer d'un côté à l'autre de cette voiture tout en sirotant un cherry coca (light, pour l'aspartame).

Pour te répondre aussi froidement que certaines explications du bouquin (par exemple sur les manières de fabriquer du napalm), dans les grandes douleurs, le cerveau expédie de l'endomorphine dans le corps pour calmer la douleur (d'ailleurs, les chinois capturent des biches, leur cassent une patte, et récupère l'endorphine envoyée par le cerveau. Quand les os commencent à se ressouder, ils brisent à nouveau la patte. L'opération peut être répétée indéfiniment. L'endorphine récupérée est réduite à l'état de poudre, et vendue comme aphrodisiaque, sympathique, non ? ). C'est ainsi que cette sorte de calme et de recul succède à la douleur.

Citation :

Pourquoi de l'épuisement ? Sent-il son sang qui tourne ou bouillonne, jaillit par ses arcades ?

Quand on a mal partout, on se sent épuisé, incapable de se mouvoir, non ?


En tout cas merci du commentaire, j'ai écrit de texte assez rapidement sous le coup de l'inspiration, et sans le retravailler. Mais je compte le faire, donc je tiendrais compte des remarques.

Bon, étant anglophobe, j'ai jamais lu ce bouquin. ^^ Enfin, pas vraiment anglophobe : ce n'est pas moi qui n'aime pas l'anglais, c'est l'anglais qui ne m'aime pas ! xD

Bref..; Alors !! Deux petites fautes d'ortho, qui se cachent vicieusement !

Sinon, j'ai beaucoup aimé. Un agréable "coup de coeur". Ca se lit bien, c'est imagé, et le moment ou "il" apparait...


Mais la vache, c'est frustrant quoi !!!! Moi aussi jeuveuçavoirkicé "lui".

Citation :

les chinois capturent des biches, leur cassent une patte, et récupère l'endorphine envoyée par le cerveau

ils font ça les chinois ?

Pourquoi ils masticotent pas des glandes surrénales humaines comme tout le monde ?

Grendelor met quand même de sacrées baffes parfois !

Ce n'est point un reproche !

Plutôt un éloge à ta force de frap... Heu, de caractère et d'honnêteté.