[Unique]La Grande Encylopédie des Nuisibles [Hauts-Fourneaux à l'honneur]

La Grande Encyclopédie des Nuisibles.

Si ma plume trace ces lignes aujourd'hui, c'est pour mieux servir l'Unique et ses enfants. Depuis mon arrivée sur Ter Aelis, je n'ai cessé de contempler à quel point ce continent pouvait être corrompu et la source d'autant d'hérésies.

Du sommet de Belthil aux tréfonds d'Atalantë, en passant par la pointe des monts d'Echoriath, la corruption n'a de cesse de se nicher dans les cœurs. Elle grandit sous l'œil bienveillant des autorités locales. On compatit devant la misère d'abominations non humaines, on s'extasie devant les prouesses de thaumaturges... Le mysticisme nous environne de toutes parts...

Heureusement, dans sa sagesse, le Conclave a dépêché de pieux serviteurs de l'Unique pour purger Ter Aelis des horreurs qui peuplent ce continent.

C'est pour cela que votre humble serviteur, le grand archiviste Teclis, met à votre disposition, filles et fils de l'Unique, cette encyclopédie des nuisibles. Vous pourrez vous y référer chaque fois que vous désirerez mettre à jour vos connaissances sur une ou plusieurs espèces peuplant cette étendue de terre. Ici sont recensées de très nombreuses aberrations, quelques théories sur leur naissance et la manière de les mettre à mort promptement.

Cependant, n'oubliez pas que c'est votre courage et votre foi qui vous permettront de venir à bout des horreurs que vous devrez combattre. Qui plus est, priez l'Unique et récitez les dix serments avant de lire les lignes qui suivent : malgré toute ma science, je ne puis garantir que l'hérésie ne suinte à travers les histoires ci-dessous.

Voici un index des thèmes abordés par la Grande encyclopédie :

La confrère du Sang, dite des Impurs Manipulés

Les Âmes Damnées, dites du Duo Infernal

Le Collège des Arts Graphiques, dit de la Babel Nauséabonde

Ikea, dite des Cutéreux Dégénérés

Les Musicien(ne)s, dit(e)s des Discordants Dissonants Détestables

Le Canard à Hélice, dit du Laqué Démoniaque

Quelques Figures Connues, les cancrelats pullulent !

Le Cercle du Zénith, dit des perfides meurtriers, amoureux du secret.

Archive du journal personnel du Primat De Vaanne, concernant une activité ectoplasmique ou démoniaque inhabituelle.

Les Hauts-Fourneaux, dits des Gueules du diable aux mille talents maléfiques.

Que l'Unique vous garde.

Chapitre 1 : La Confrérie du Sang.

Les archives de Ter Aelis font remonter la naissance de la Confrérie du Sang à une période de grave crise. Certains textes anciens mentionnent une immense guerre civile où la populace se retourna contre l'aristocratie aéliséenne. C'est des cendres de cette élite que naquit cette confrérie, dont les membres combattaient à dos de dragons.

Néanmoins, il apparaît que cette manière de guerroyer est plus ancienne que l'ordre en lui-même. Quoi qu'il en soit, La Confrérie du Sang incarne parfaitement la corruption qui peut toucher la noblesse d'un continent.

Tout d'abord, les membres de cette... organisation s'intronisent par une cérémonie qui ressemble fortement à un adoubement. Cependant, les rares sources que j'ai pu trouver concernant ce sombre rituel parlent d'une dualité d'existence. Apparemment, au nom d'un Dieu, ces dragonniers jurent fidélité à une quelconque manière d'exister. C'est très confus et obscur, comme tous les rites hérétiques.

Le lecteur doit juste savoir que ces débauchés réalisent cette intronisation dans un sanctuaire à l'architecture fastueuse. S'y incarnent le péché et la luxure. On ne peut tolérer l'existence d'un tel bâtiment, aussi grandiose, hormis pour rendre gloire à la puissance de l'Unique.

Cependant, la plus grande hérésie de la Confrérie du Sang réside dans le fait qu'ils usent de dragons au combat. Ces créatures ne sont que, comme chaque croyant le sait, des incarnations démoniaques. D'immondes représentations du chaos, qui vivent de mort et de cendres depuis la nuit des temps. Ces monstres ont ravagé de nombreuses terres ; ils ne sont rien de moins qu'un ennemi héréditaire du genre humain. Comment donc envisager de s'en servir comme montures ?

Il est indéniable que pour réprimer la voix populaire, ces aristocrates déchus n'ont vu d'autres solutions que de se lier avec de telles immondices. Par cet acte, ils se sont damnés éternellement aux yeux de l'Unique. Il est de notre devoir de les purifier par les flammes du bûcher.

Toutefois, je crains que la vérité ne soit encore plus lugubre que ce qu'il apparaît. Il est à n'en pas douter que l'esprit plein de malice des dragons ait pris le pas sur la volonté de leur cavalier. En effet, de par leur essence perverse, les dragons peuvent soumettre l'âme des créatures qui les côtoient. Déjà affaiblis par leur manque de foi en l'Unique, les dragonniers ne sont plus que des pantins animés par les abominations qu'ils chevauchent.

Il faudra donc abattre le dragon -l'arbalète restant un excellent moyen- pour libérer le noble de cette influence néfaste. Naturellement, une fois sa conscience revenue, il faudra brûler le dragonnier. Son crime impie ne peut trouver aucun pardon.

Chapitre 11 : Les Âmes Damnées.

Malgré le nombre de cités présentes sur le continent, elles ont finalement été unifiées, ou à défaut, conciliées. Cette prouesse est due à deux êtres à la nature incertaine. Ramrod et Dounette, désignées sous le terme « d'Âmes Damnées ». Il est déjà douteux, de prime abord, de revendiquer le statut de « damnées » car cela équivaut à se maudire éternellement. Qui plus est, cette dénomination ne peut être octroyée seulement que par l'Unique ou ses serviteurs. Pour qui se prend ce duo d'esprits à s'emparer de titres délivrés par le saint ordre ?

A n'en pas douter, il faut se méfier de la malice de ces créatures qui apparaissent sous la forme d'êtres humains. Je n'ai trouvé aucun indice dans les archives qui pourrait indiquer la véritable nature de ces Âmes Damnées mais il est certain qu'elles ne sont que partiellement -voire pas du tout- humaines. Ce qui est sûr, c'est que ces deux esprits sont dépendants l'un de l'autre, et qu'ils possèdent une incroyable puissance s'ils se potentialisent. Dans le cas où les enfants de l'Unique désireraient un jour les supprimer, sachez qu'il serait judicieux de les attaquer séparément, bien que même isolés, ils restent dangereux.

Pour l'heure, toutefois, nous n'avons pu rassembler aucune preuve de leur forfaiture, ou d'une quelconque possession démoniaque. Leur seul crime, qui n'est pas des moindres, est le laxisme religieux et racial dont ils font preuve !

Au lieu de rassembler Ter Aelis sous la tutelle bienveillante de l'Unique, les Âmes Damnées ont préféré laisser libres les citoyens quant au choix de leur(s) divinité(s). Pire encore, des orques, des nains, des elfes et autres abominations sont protégés par des édits, leurs accordant des droits similaires aux humains. Autrement plus grave qu'un blasphème, cet état de fait constitue un crime étatique sûpreme, passible d'écartèlement et de crémation.

Je suggère de garder un œil sur les agissements de ce Ramrod et de cette Dounette. Leur rôle politique et central dans la pérennité de ce continent en font des individus majeurs et bien protégés. Il sera toujours temps de les purifier s'ils s'opposent à notre sainte mission contre les impurs.

Chapitre 111 : Le Collège des Arts Graphiques

Sires, comme vous le savez, Ter Aelis regorge d'institutions et de monuments plus anciens les uns que les autres. Coutume très étrange, et hérésie manifeste, on y favorise le développement des arts. Ainsi, de jeunes talents prometteurs peuvent trouver logement et enseignement dans des structures disséminées aux quatre coins du continent.. L'une d'entre elles, et certainement la pire, se situe en Atalantë. Ce bâtiment porte le nom de Collège des Arts Graphiques.

J'ai envoyé quelques initiés là-bas, pour avoir un aperçu des inepties qu'on y pratique : sachez que par l'Unique, les nouvelles qui m'ont été rapportées auraient suffi à faire pâlir les plus valeureux de nos répurgateurs. Suit une liste des crimes de démonologie, d'irrespect, de haute trahison, de sorcellerie, de luxure, de vanité, de mysticisme, d'hybridologie -entre autres- que l'on peut trouver là-bas.

Crime N°1 : Au lieu de représenter l'Unique sous les six cents quarante sept aspects approuvés par le Conclave, ou encore les faits d'armes de notre très saint et grand inquisiteur De Vaanne, les peintres élèves et enseignants s'adonnent à la représentation du paysage marin, des songes corrompus qui émanent de leur subconscient pervers, d'animaux ou d'eux-mêmes. Comme juste châtiment pour ces péchés, je propose de les faire bouillir dans l'huile et la gouache qui leur servent à déformer la réalité si hideusement.

Crime N°11 : Ne reconnaissant pas la juste loi de l'Unique et sa miséricorde, ces dépravés ne se contentent pas de rester à la place que le Seigneur leur a assignée. En effet, figurez-vous que ce ramassis d'immondes cancrelats apprend à lire, à écrire et surtout à grapher. Les mentors graphiques se permettent de répandre la semence intellectuelle de l'Unique à qui désire la recevoir ! Alors que nous savons tous que le cadeau du savoir et de la connaissance est généreusement distillé par sa Grandeur à une petite catégorie d'individus. Quelle idée saugrenue et vile que de partager la lumière avec le bas peuple. Rendez-vous compte le nombre d'hérétiques, de non-humains et de polythéistes qui ont pu accéder à la culture ! C'est répugnant. Huit cent coups de fouet pour chacun d'entre eux me paraît une mesure appropriée à la gravité de ce péché.

Crime N°111 : Le Malin a sans doute pu étendre à ce point son influence dans cette fourmilière de par sa position géographique. Le Collège des Arts Graphiques se situe exactement sur les ruines d'une ancienne civilisation pré-aéliséenne, et pire que tout : non-humaine. Au lieu de raser jusqu'à la dernière pierre de cet édifice, les graphistes ont préféré s'y installer. Pas étonnant donc qu'aujourd'hui, ce lieu d'instruction ne soit qu'un taudis regroupant une bande de fanatiques des arcanes de la peinture. Ils sont au moins aussi corrompus que ces dégénérés et leur cité volante de Wilwarin. Croyez bien en tout cas que j'ai demandé à notre marine de revenir au plus vite ici dès la fin des guerres avec les royaumes souverains de Talhaab pour que nos fiers navires purifient l'océan de cette excroissance rocailleuse difforme.

Crime N°1V : Enfin, le plus grand des crimes du Collège des Arts Graphiques, est de ne pas se soumettre à l'Unique en lui-même. Je leurs ai envoyé un ultimatum par estafette : s'ils se convertissent avant la prochaine lune, seulement la moitié d'entre eux sera brûlée. Les autres n'auront qu'à subir quelques menus supplices : amputations, marquages au fer rouge... Cependant, s'ils refusent la sainte parole, alors je promets que toute la peinture pourpre qu'ils pourront trouver ne suffira pas à représenter l'étendue du carnage que les Enfants opèreront en Atalantë.

Votre très pieux et dévoué, le grand archiviste Teclis.

Chapitre 1V : Ikea

S'il y a bien quelque chose qu'on ne peut tolérer, hormis les démons, les esprits, les hybrides, les abominations non-humaines et les épinards non sanctifiés : c'est bien les mutants. D'abjectes créatures, parodies de ce qu'elles furent autrefois, sans foi ni loi. Naturellement, un nain ou un elfe ne peut pas voir sa condition physique ou spirituelle empirer ; leur mutation n'est donc pas un mal en soi. Néanmoins, imaginer que de braves enfants de l'Unique, autrefois pieux, puissent devenir de redoutables créatures paraît impensable.

Malheureusement, la science nous révèle que cela est bien possible. En effet, une maladie venue du royaume de Souède a envahi Ter Aelis, touchant une petite partie de la population. Cette lèpre est pire que la peste car les personnes infectées restent assez longtemps en vie pour la transmettre à d'autres brebis. Plus détestable encore, elle permet au porteur de se greffer les organes et membres d'autres individus pour survivre ! Ainsi, on aurait vu des humains arborer des bras d'ogre et des nez d'orque. Un tel mélange raciale n'est pas tolérable. L'épidémie doit être enrayée au plus vite...

D'ailleurs, au lieu de brûler les immondices qui se sont rassemblées sur les flancs d'un mont de la chaîne d'Echoriath, les autorités locales ont préféré passer un pacte avec elles. Une relative stabilité s'est installée là-bas.

J'ai questionné un capitaine de garnison pour comprendre ce qui avait poussé le pouvoir étatique à laisser ce fléau libre de contaminer la population. D'après lui, on craignait de faire intervenir l'armée à cause d'un risque d'infection à grande échelle des effectifs militaires. J'ai répondu à cet officier que l'Unique les préserverait de ces maux de Satan si lui et ses soldats croyaient en notre père divin. Il pâlit et bafouilla une réponse à peine croyable : « Vous savez, même sans le risque d'contamination, ces choses là, faut pas s'y frotter. Une seule d'entre elles est forte comme dix hommes, et rusée comme cent femmes ! Qu'elles restent à s'entredévorer dans leur trou d'pouilleux ! »

Indubitablement, leur manque de foi attirera la perte des aéliséens.

J'ai aussi appris que non contentes de bafouer l'ordre naturel par leur existence, ces choses abjectes encourageaient le vol entre elles. Certains éléments organiques possèderaient même des significations ésotériques, ou plus vraisemblablement politiques. Si nous parvenions à détruire une de leurs... « reliques », peut-être qu'elles tomberaient dans une anomie destructrice et s'entredéchireraient jusqu'à ce que mort s'en suive... mais c'est là encore une fin trop douce pour ces êtres répugnants.

Chapitre V : Les Musicien(ne)s.

Depuis le moment où j'ai débuté la rédaction de cette sainte œuvre, j'ai pu écouter avec bonheur les illustres notes de l'orgue de la cathédrale résonner avec puissance. D'ailleurs, le majestueux instrument est en train, à l'instant, de faire vibrer mon âme au son d'une complainte métallique m'évoquant avec nostalgie le cri d'un condamné à mort sur le bûcher.
Un si grand lyrisme, soulevé dans nos cœurs par l'émission d'une poignée d'octaves ne peut être que le fait de l'Unique.

Or, imaginez-vous que sur Ter Aelis, on blasphème encore ! Cette vile engeance continentale n'a pas son pareil pour créer, étendre, embellir l'hérésie sous toutes ses formes. J'ai du mal à tenir le cahier des charges de l'ensemble de leurs crimes : il me faudra bientôt une troisième bibliothèque pour tout archiver soigneusement. Bref, parmi les monstruosités dont je voulais vous entretenir, c'est celle concernant la musique qui attire notre vénérable attention aujourd'hui.
La musique sur Ter Aelis ne tient pas une place prépondérante même si ces temps derniers, l'intervention de deux sorcières paraît changer la donne. Cette paire de femelles, largement appuyées par d'autres dévots, massacrent la beauté des hymnes à la gloire de l'Unique. Au lieu d'écrire en son nom, et dans les formes, elles répandent un trop plein de cacophonies impies, d'éructations vocales dépourvues de sens.

J'ai pu relever notamment :

L'introduction dans les mœurs du Rock'n'Roll. C'est immonde, frénétique, incompréhensible : une vraie bouillie sonore. Qui plus est, les paroles proviennent d'une langue inconnue, aux intonations atroces.
Le libre accès totale à la musique pour la population. Ces crétins consanguins se précipitent pour écouter les « dernières sorties » sans comprendre qu'ils se damnent et s'abêtissent lorsque cette soupe sonore atteint leur conduit auditif.
Le duo de sorcières qui encourage l'art musical détient des postes haut-placés de Gardiennes. Première véritable manifestation de la corruption du haut-fonctionnariat aéliséen, c'est une avancée majeure pour nous. D'ici peu, nous aurons de bonnes raisons de brûler les trois quarts de leur classe politique.
La démocratisation de l'accès à des séances de « blind-test » (décidément, ce nouveau langage me laisse de marbre) qui consistent à ce que la populace puisse vérifier sa connaissance des partitions infernales.

Pauvres de nous, nos oreilles ne sont plus à l'abri nulle part ! Réfugions nous dans les échos divins de nos chœurs d'initiés et les vibrations de notre saint orgue. Ce qu'ils appellent progrès musical, je nomme ça dégénérescence de notre patrimoine harmonique.

Chapitre V1 : Le Canard à Hélice.

Mon Dieu ! Seigneur ! Aide-nous et entends mes prières ! Que ton divin courroux s'abatte sur Ter Aelis. Depuis maintenant une quinzaine de mois, on y a proclamé... La Liberté de la Presse ! Que mon âme soit préservée d'une telle hérésie ! C'est une première parmi tous les continents que j'ai visités : des médias libres et éclairés, non contraints par la mainmise des pouvoirs publics. Et pourquoi ne pas abolir la peine de mort pendant que les Âmes Damnées y sont ?! L'encre ne me permet pas de tracer toute la sainte fureur qui emplit mon être. Je m'arrangerai pour qu'on fasse distiller le sang des journalistes en vue d'en faire une pleine réserve pour les soirées mondaines ; entretemps, on les éventrera et on les pendra avec leurs propres viscères. J'ai interrogé le répurgateur Exodus et l'inquisiteur De Vaanne qui sont tout disposés à lancer sur le champ une campagne pour rétablir la vérité et la justice : une presse censurée et contrôlée, pour le bien de l'humanité évidemment.

Comment donc est-il possible d'imaginer que laisser le loisir à des scribouillards d'écrire ce qu'ils veulent est une bonne chose ? Nous sommes bien en face d'un abandon des pouvoirs régaliens de l'Etat à des institutions extra-étatiques, disposant d'une administration propre. La Liberté de la Presse... Sûrement le pire fléau après la Liberté de Culte et les épinards non sanctifiés, ou les hymnes communistes chantés par Chikoun. Ainsi donc, lorsqu'on n'encadre pas un minimum les journaux (censures, désinformation, exécutions, répressions, manipulation...) on aboutit au Canard à Hélice. Une feuille de chou imprimée sur un papier même pas manuscrit, aux gravures à peine travaillées et au contenu abject. Pire encore, c'est dans cette liberté totale d'expression que réside la plus grande perfidie. En laissant les gens penser ce qu'ils veulent et se construire eux-mêmes leur opinion sur des sujets donnés, on leur fait croire qu'ils sont autonomes, alors qu'en vérité, ils sont esclaves de cette liberté.

Mes sœurs et mes frères, vous qui avez la foi et lisez ces lignes, vous savez au fond de vous que l'aveuglement dans les préceptes de l'Unique est la seule porte de sortie vers le salut. La Liberté de Culte, la Liberté de la Presse, la Liberté d'Expression : de simples chimères, des plaies qui suppurent le chemin qui mène à la voie. Que se passera t-il si nous continuons sur de tels sentiers ? Dans dix ans, le peuple élira ses dirigeants ? Dans vingt, le clergé n'aura plus le contrôle de l'Etat et sera dissocié des affaires de ce dernier ? Et dans trente, mes enfants, l'Apocalypse ! La fin des fins ! Puisse l'Unique nous préserver de cette sinistre tentatrice : Liberté.

Chapitre V11 : Quelques Figures Connues.

Je me permets un bref répit dans ma quête d'extermination de l'impur pour vous renseigner sur quelques grandes têtes de proue de Ter Aelis. Attention, les individus qui suivent sont au mieux dangereux, au pire d'énormes blasphémateurs passibles des mille et un supplices. Je ne consacre qu'une poignée de lignes à chacun, ils n'en valent même pas la peine !

Ramrod : Voir ut supra.

Dounette : Voir ut supra.

Cassiopée : La dragonnière est à la tête des Impurs Manipulés, ces borgnes de la Confrérie du Sang. Il faudra s'en méfier, elle allie des talents de chasseresse peu égalés à la ruse d'un serpent. De plus, son influence politique n'est pas négligeable, étant une Maudite Compère.

Grendelor : Les Enfants ont déjà eu à traiter avec elle. Puissante sorcière investie de pouvoirs mystiques. Elle a pactisé avec le démon : bonne à être exterminée.

Chikoun : Étrange créature hybride entre le pinson à l'âme guillerette, le corbeau à la verve aiguisée et le mouton et son esprit collectiviste. Dangereux agitateur politique, le Moustique aurait pu faire un brillant allié pour instiller des pensées séditieuses dans les cœurs.

Smirtnoff : Vampire pervers possédant un talent non négligeable dans les arts graphiques. Il occupe une fonction de Maudit Compère et dirige le Collège des Arts Graphiques. Autant dire que c'est une créature sanguinaire et dangereuse, dont le cerveau déréglé n'a d'égal que son désir de combler un manque constant d'hémoglobine. De plus, c'est un vilain.

Dvb : Etrange petit personnage aux mimiques agaçantes, très retord. Il a des prédispositions aux farces narquoises, à l'impertinence et sa petite-langue-bien-pendue-de-trois-pouces est plus fourchue que celle d'un crapaud. Naturellement, le concept de l'Unique lui est aussi étranger que celui d'ordre et de piété : à pendre après écartèlement.

Juliet : Des demi-pouces, je me refuse à dire mot.

Aspharoth : Un membre bavard. Très bavard. Cependant, c'est un des rares à ne pas avoir commis d'hérésie majeure.

Aillas : Le second grand vilain, il occupe un poste de Maudit Compère : le nom lui va parfaitement. Il espère pouvoir tenir dans ses doigts crochus le trophée Tolkien éternellement. Pour le lui arracher, cela ne dérangera point les Enfants d'emporter quelques phalanges avec la coupe si convoitée.

Idrial : Elfette aux grands talents graphiques. Hérétique possédée par le démon, elle est certaine d'être une tomate. Le recours à la question sera nécessaire si l'on veut qu'elle échappe à l'emprise du malin.

Teysa : Connu pour faire partie de l'Effronterie Lunaire, ce noir personnage est surtout notable pour sa tendance à la crépophagie. Puissant manipulateur des songes, donc des esprits faibles. Les Enfants sont trop pragmatiques pour se laisser berner par quelques rêveries sans intérêt.

Walker : Bestiole étrange parcourant les souterrains des grandes cités aéliséennes. On murmure qu'une immondice enlève les jeunes femmes pour s'en repaître et qu'elle porterait un chapeau pour dissimuler ses traits : malheureusement pour elle, les trois bouts de nez et six oreilles que l'on voit dépasser des ombres de son visage ne trompent personne...

Sephiroth : Il en faut bien une poignée qui soit épargnée. Je ne dirais pas que c'est un saint, je préciserais qu'il est moins abject que les autres !

Astriel : Hérétique cracheur de boules de poils, Blasphémateur-miauleur, Démon joueur de pompon, Vilain félin, Vil chat débile, Terroriste des gouttières, Sans amie-souris... Bref, la liste est encore longue. Pas besoin de me demander son crime.

Sephi 4*4 : Personnage glauque se dissimulant derrière une bonne humeur contagieuse. La gaieté est une maladie dangereuse et cet hybride en est très certainement le plus grand vecteur. A éradiquer.

Green Partizan : Un rat de bibliothèque qui joue à l'aviateur, ou un aviateur qui joue au rat de bibliothèque ?

Tr0n : Un candidat parfait pour alimenter le feu sacré de notre nouvelle machine de pénitence : de toute façon, plus c'est vieux, plus c'est aigri, plus ça mord.

Goldmund : Très certainement le plus distingué de tous les détracteurs sur Ter Aelis. Sa plume n'est pourtant pas plus acérée que nos épées. Que Antienne tranche dans le vif, et mette fin aux agissements d'un libertin impie !

Plumo : Les athées existent sur Ter Aelis. Encore une ignominie contre nature que nous réservait ce continent. Cet emplumé de Plumo sera pendu haut et court (surtout o).

Franz : Elle a refusé de revenir dans la lumière, malgré la rédemption qu'il lui fut proposée. On n'émet pas de refus à une demande de l'Unique. Ne reste donc plus qu'à l'enchainer sur un poteau pour lui faire écouter du Sting en boucle.

Cordelia Melicerte : Une femelle dans les airs de Sephi 4*4. A brûler au plus vite, c'est un avatar de l'ambition sérieuse et de la folie aimable, de la bonne humeur et de la gaieté.

Taranis : Comme je l'ai déjà dit, et ça me navre, on ne peut pas exterminer toute la population de Ter Aelis. Une chance pour Taranis d'échapper au supplice.

Aligby : Espèce de pigiste révolutionnaire et idéaliste. Sûrement l'un des plus dangereux penseurs que l'on puisse trouver. Au bûcher ! Au bûcher ! Au bûcher ! Et que soit frit le canard !

Overdead : On dit toujours que l'on garde les meilleurs pour la fin. Je peux pourtant vous dire que le dicton n'est pas aux trois quarts vrai.

Howak' : Allons, à votre âge inquisiteur, vous ne croyez tout de même pas aux fantômes ?

Kyara : Un drôle d'oiseau-kyu.

Egorann : Je dois malheureusement constater que la pureté de la jeunesse peut être entachée par l'influence d'une tentatrice corruption. Dommage qu'un talent si prometteur dusse finir brûlé pour sa fraternisation avec nos grands ennemis.

Unfresh Fish : Hahaaaaa ! Tu as beau avoir changé de nom, nous te retrouverons toujours ! L'odeur âcre et salée que tu laisses dans ton sillage nous permettra de te capturer un jour ou l'autre, espèce de morue !

Rumulus : Encore un étranger ! Sans être xénophobe, celui-ci parle bizarrement. La dernière fois, il a tenté de nous empoisonner avec ses poutines. Du genre à être coulé dans le béton des fondation de notre belle cathédrale.

Innomable : Un nom qui sied bien à cette créature de l'enfer très farfelue !

Cette liste est non-exhaustive : le péché se terre partout en Ter Aelis. La suite du recueil en contiendra une seconde. Je m'en vais maintenant prier pour l'intégrité de mon âme. Il est difficile d'être au contact de tant de vermine sans que celle-ci n'entache notre pureté.

Chapitre V111 : Le Cercle du Zenith.

Qu'y a t-il de pire que l'hérésie ? Tout croyant peut aisément répondre à cette question : l'hérésie camouflée, changeante, fourbe et perfide... La plus dangereuse, la plus insidieuse. Celle qui se terre et se tapit dans l'ombre. Qui se saisit des âmes perdues pour les enrôler.
Personne n'a le droit d'aimer autant le secret car qui n'a rien à se reprocher n'a rien à cacher.

Or, sachez que j'ai appris l'existence d'une mystérieuse secte. Beaucoup de frères et de sœurs sont morts pour rapporter la poignée d'informations que je lâche dans ce manuscrit. Puissent-ils trôner aux cotés de l'Unique la tête haute ; leur vie n'a pas été perdue en vain.
D'après ce que m'ont dit nos infiltrés, une guilde d'assassins extrêmement secrète sévit en Ter Aelis. Ils ne sont que très difficilement repérables. On ne peut les contacter. Ils choisissent et sélectionnent les individus "intéressants" pour leur sordide besogne : le meurtre organisé.

Apparemment, ils filtrent en cercles de confiance les gens auxquels ils peuvent ou non se fier. Pour l'heure, nos taupes n'ont jamais pu aller bien loin avant d'être démasquées et tuées. Toutefois, le plus important réside dan le fait que nous ayons conscience de la menace.

Cette confrérie m'évoque une araignée nuisible qui tisse sa toile pour prendre au piège les pauvres insectes qui grouillent dans les airs. Ces meurtriers se déplacent aussi furtivement que les pires des couards, possédant une fourberie hors norme. Nous devons employer ou éradiquer cet "outil" que représente ce Cercle du Zénith, et vite.
Je tiens à ma gorge, la prochaine fois que j'irai fouiller les bazars de Sul-Nar.

Extrait du Journal du Primat De Vaanne, de la Commanderie des Enfants de l'Unique en Ter Aelis

Je crois, non, je suis certain, que j'aurais mieux fait de torturer à l'envie cet abominable diacre plutôt que d'écouter ma bonté et de ne le condamner qu'à la crémation. Son hérésie est encore plus terrible que je ne le pensais, car non content d'être laxiste et tolérant, il a laissé les Puissances Sombres prendre pied en la Sainte Cathédrale de Belthil !

Voilà plusieurs jours que mon sommeil et celui de plusieurs autres dans les quartiers de la cathédrale sont inquiétés par l'apparition d'un poltergeist d'un genre nouveau, dont la manifestation n'est point constituée d'explosions et de bruits en tous genres, mais d'un couinement abominable, que je n'entends qu'avec la plus vive répulsion et dont le simple souvenir me glace l'échine. Je frémis à l'idée de coucher son cri sur le papier, mais il doit être recensé, pour être mieux combattu.

Ce "Pwik Pwik" est insupportable, et malgré mes innombrables recherches nocturnes, jamais je n'ai pu localiser la manifestation qui produit ce son. Attention donc : ce démon est intelligent, agile, rusé. Et surtout, il est assez fou pour jouer avec mes nerfs.

Je jure sur mon épée de mettre fin à ses agissements, fût-ce au prix de la démolition pierre par pierre de la cathédrale pour en extraire de force la corruption qui se tapit dans ses coins sombres.
Cependant, même si le diacre était un abruti et un incompétent fini, jamais un démon n'aurait pu s'introduire dans un lieu saint sans une aide intérieure. mon enquête finira bien par la localiser.

Et alors, il n'y aura pas de mot pour qualifier ma vengeance.

Chapitre 1X : les Hauts-Fourneaux.

Votre très humble et dévoué serviteur, le beau, l'intelligent et modeste Teclis, travaille comme vous le savez en tant qu'archiviste à Belthil et dans le culte.
Je fabrique et invente de nombreux objets, notamment des armes, qui nous seront d'un grand secours dans notre lutte perpétuelle contre les abominations.

Néanmoins, je ne peux que déplorer l'immense puissance que possèdent nos ennemis du sang. En effet, au-delà d'ateliers, c'est une industrie complète qui les sert jours et nuits, en activité. Fabriquant sans relâche des armures, des épées et artefacts d'une très grande qualité, mes faibles capacités de production sont surpassées. Sur nos terres, le culte construit des forges à n'en plus savoir que faire, mais ici, sur Ter Aelis, je dois me contenter des bâtiments qui me sont alloués par le Primat et d'un petit laboratoire secret perdu dans les déserts de Sûl-Nar. Qu'à cela ne tienne, j'ai demandé l'envoi d'une équipe d'archivistes assistants pour intensifier mes recherches et la production.

Néanmoins, si j'écris ici, c'est pour dénoncer l'abjecte capacité des Hauts Fourneaux -c'est comme ça que les usurpateurs nomment leur forge- à vomir sans arrêt un flot continu d'engins de guerre. Grâce à cette gueule du diable, dirigée par Airet Syl, un hérétique à l'imagination détestable fort prolixe, la Confrérie du Sang et ses alliés sont équipés pour les combats d'un matériel de qualité, voire exceptionnel pour les plus "nobles" d'entre eux.
En effet, non-contents de bénéficier des atouts organiques des dragons dans la confection d'armes et d'armures, leurs mages et meilleurs spécialistes peuvent faire appel à la gravure de sorte de runes sur les objets forgés. C'est un peu l'équivalent de nos sanctifications rituelles, si ce n'est évidemment que ces manifestations d'énergie impure sont bien plus dangereuses et suintent la corruption du sang. Si je parviens à mettre la main sur un de ces artisans, croyez bien que je le passerais à la question durant maint jours avant de disséquer sont cerveau minutieusement, afin de comprendre comment un tel don de création a pu se transmettre à pareilles crapules.

Toutefois, nous savons bien que le Mal, pour séduire les honnêtes gens, sait se montrer inventif. Il est donc naturel que ses rejetons puissent hériter de la capacité à armer au mieux leurs champions. Tous mes ateliers vont être mis à contribution pour créer des équipements surpassant ceux de nos adversaires, et ce pour la plus grande gloire de l'Unique.
Je termine pas l'article 67-1 du code des archivistes :

"Seul l'Unique est créateur, et en tant que tel, lui seul offre le don de création. Toute invention qui sort de l'esprit torturé d'un païen ou d'un athée se devra d'être détruite et son créateur, expier ses fautes dans une pénitence de 987 ans au service du culte. Une fois cette dette acquittée, l'hérétique aura la grande joie d'être mis à mort par écartèlement sur une roue préalablement sanctifiée par un Prélat, un Primat ou un Archiviste. Ses os auront l'honneur de nourrir les flammes des forges visant à créer les "armes de la haine" tueuses et pourfendeuses d'immondices."

Que l'Unique vous garde.

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