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| [Auteur] John Keats | |
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Melaka Chromatique
Nombre de messages : 4771 Age : 34 Localisation : Dans le bureau des Sordides Assistantes ! Date d'inscription : 30/10/2010
Personnages RP Pseudo: Melaka Pseudo : Inayat Pseudo :
| Sujet: [Auteur] John Keats Sam 24 Déc - 20:43 | |
| J'avais envie de vous faire partager les écrits de John Keats (1795-1821), un poète romantique anglais que j'avais découvert au lycée et qui me plaît beaucoup. Ode à un rossignol
Mon cœur souffre et la douleur engourdit Mes sens, comme si j’avais bu d’un trait La ciguë ou quelque liquide opiacé Et coulé, en un instant, au fond du Léthé : Ce n’est pas que j’envie ton heureux sort, Mais plutôt que je me réjouis trop de ton bonheur, Quand tu chantes, Dryade des bois aux ailes Légères, dans la mélodie d’un bosquet De hêtres verts et d’ombres infinies, L’été dans l’aise de ta gorge déployée.
Oh, une gorgée de ce vin ! Rafraîchi dans les profondeurs de la terre, Ce vin au goût de Flore, de verte campagne, De danse, de chant provençal et de joie solaire ! Oh, une coupe pleine du Sud brûlant, Pleine de la vraie Hippocrène, si rougissante, Où brillent les perles des bulles au bord Des lèvres empourprées ; Oh, que je boive et que je quitte le monde en secret, Pour disparaître avec toi dans la forêt obscure :
Disparaître loin, m’évanouir, me dissoudre et oublier Ce que toi, ami des feuilles, tu n’a jamais connu, Le souci, la fièvre, le tourment d’être Parmi les humains qui s’écoutent gémir. Tandis que la paralysie n’agite que les derniers cheveux, Tandis que la jeunesse pâlit, spectrale, et meurt ; Tandis que la pensée ne rencontre que le chagrin Et les larmes du désespoir, Tandis que la Beauté perd son œil lustral, Et que l’amour nouveau languit en vain.
Fuir ! Fuir ! m’envoler vers toi, Non dans le char aux léopards de Bacchus, Mais sur les ailes invisibles de la Poésie, Même si le lourd cerveau hésite : Je suis déjà avec toi ! Tendre est la nuit, Et peut-être la Lune-Reine sur son trône, S’entoure-t-elle déjà d’une ruche de Fées, les étoiles ; Mais je ne vois ici aucune lueur, Sinon ce qui surgit dans les brises du Ciel à travers les ombres verdoyantes et les mousses éparses.
Je ne peux voir quelles fleurs sont à mes pieds, Ni quel doux parfum flotte sur les rameaux, Mais dans l’obscurité embaumée, je devine Chaque senteur que ce mois printanier offre à l’herbe, au fourré, aux fruits sauvages ; à la blanche aubépine, à la pastorale églantine ; Aux violettes vite fanées sous les feuilles ; Et à la fille aînée de Mai, La rose musquée qui annonce, ivre de rosée, Le murmure des mouches des soirs d’été. Dans le noir, j’écoute ; oui, plus d’une fois J’ai été presque amoureux de la Mort, Et dans mes poèmes je lui ai donné de doux noms, Pour qu’elle emporte dans l’air mon souffle apaisé ; à présent, plus que jamais, mourir semble une joie, Oh, cesser d’être - sans souffrir - à Minuit, Au moment où tu répands ton âme Dans la même extase ! Et tu continuerais à chanter à mes oreilles vaines Ton haut Requiem à ma poussière.
Immortel rossignol, tu n’es pas un être pour la mort ! Les générations avides n’ont pas foulé ton souvenir ; La voix que j’entends dans la nuit fugace Fut entendue de tout temps par l’empereur et le rustre : Le même chant peut-être s’était frayé un chemin Jusqu’au cœur triste de Ruth, exilée, Languissante, en larmes au pays étranger ; Le même chant a souvent ouvert, Par magie, une fenêtre sur l’écume De mers périlleuses, au pays perdu des Fées.
Perdu ! Ce mot sonne un glas Qui m’arrache de toi et me rend à la solitude ! Adieu ! L’imagination ne peut nous tromper Complètement, comme on le dit - ô elfe subtil ! Adieu ! Adieu ! Ta plaintive mélodie s’enfuit, Traverse les prés voisins, franchit le calme ruisseau, Remonte le flanc de la colline et s’enterre Dans les clairières du vallon : était-ce une illusion, un songe éveillé ? La musique a disparu : ai-je dormi, suis-je réveillé ? Traduit par Alain Suied | |
| | | Melow Coordonnateur Rôliste
Nombre de messages : 699 Age : 30 Date d'inscription : 17/07/2011
Personnages RP Pseudo: Vasariah Pseudo : Lirsha Pseudo :
| Sujet: Re: [Auteur] John Keats Sam 24 Déc - 21:06 | |
| Si je puis me permettre d'apporter un complément : sa courte vie a été adaptée au cinéma, il y a deux ans. Le film s'appelle Bright star et dans mes souvenirs, il est pas mal du tout | |
| | | Franz
Nombre de messages : 3379 Age : 33 Localisation : Les Biscuits Roses Date d'inscription : 03/07/2008
| Sujet: Re: [Auteur] John Keats Lun 26 Déc - 0:36 | |
| Un de mes poètes favoris. Ma signature vient de lui : "A thing of Beauty is a joy for ever." J'ai lu sa correspondance avec Fanny Brawne : quelques lettres sont superbes. J'en ai posté une (et sa traduction) dans les Eclat en pièces détachées. - Franz a écrit:
"The morning is the only proper time for me to write to a beautiful Girl whom I love so much: for at night, when the lonely day has closed, and the lonely, silent, unmusical Chamber is waiting to receive me as into a Sepulchre, then believe me my passion gets entirely the sway, then I would not have you see those Rhapsodies which I once thought it impossible I should ever give way to, and which I have often laughed at in another, for fear you should [think me] either too unhappy or perhaps a little mad. I am now at a very pleasant Cottage window, looking onto a beautiful hilly country, with a glimpse of the sea; the morning is very fine. I do not know how elastic my spirit might be, what pleasure I might have in living here and breathing and wandering as free as a stag about this beautiful Coast if the remembrance of you did not weigh so upon me I have never known any unalloy'd Happiness for many days together: the death or sickness of some one has always spoilt my hours—and now when none such troubles oppress me, it is you must confess very hard that another sort of pain should haunt me. Ask yourself my love whether you are not very cruel to have so entrammelled me, so destroyed my freedom. Will you confess this in the Letter you must write immediately, and do all you can to console me in it—make it rich as a draught of poppies to intoxicate me—write the softest words and kiss them that I may at least touch my lips where yours have been. For myself I know not how to express my devotion to so fair a form: I want a brighter word than bright, a fairer word than fair. I almost wish we were butterflies and liv'd but three summer days—three such days with you I could fill with more delight than fifty common years could ever contain."
Je fais suivre également une traduction :
"Le matin est le seul moment qui me soit propice pour écrire à une belle et si chère jeune fille : car la nuit, quand ma solitaire journée s'est écoulée, et que ma chambre, non moins solitaire, silencieuse et sans harmonie, s'ouvre comme un sépulcre pour me recevoir, alors, croyez-moi, la passion se donne libre cours, et, je ne voudrais pas - dans la crainte que vous me croyiez malheureux ou peut-être un peu fou - que vous fussiez initiée à ces déclamations auxquelles j'avais cru jadis impossible de m'adonner jamais, et dont les auteurs m'avaient si souvent prêté à rire. Je suis, pour l'instant, à une jolie fenêtre de cottage, donnant sur une vue de collines, avec une échappée sur la mer ; la matinée est ravissante. Je ne sais quelle élasticité mon esprit atteindrait, ni quel plaisir je pourrais avoir à vivre ici, à respirer, à errer, libre comme un cerf, le long de ce rivage magnifique, si votre souvenir ne pesait ainsi sur moi ! Je n'ai jamais eu de joie sans alliage longtemps de suite : toujours la mort ou la maladie de quelqu'un a empoisonné mes jours ; - et maintenant, quand aucun chagrin de ce genre ne m'oppresse, convenez qu'il est dur qu'une autre sorte de peine me poursuive. Interrogez-vous, ma bien-aimée, et voyez si vous ne vous trouvez pas très cruelle de m'avoir envoûté ainsi et dépouillé de toute liberté ? Voulez-vous me le confesser dans la lettre qu'il vous faut m'écrire immédiatement, et dans laquelle il faut faire tout votre possible pour me consoler ; rendez-la enivrante comme une liqueur de pavots pour me griser - écrivez les mots les plus doux et les baisez afin que mes lèvres puissent au moins se poser là où se seront posées les vôtres. Pour moi, je ne sais comment exprimer ma dévotion à une créature aussi belle : il me faut un mot plus beau que "Beauté". Je rêve toujours que nous soyions des papillons qui n'ayions à vivre que trois brèves journées d'été - et ces trois journées, s'il m'était donné de les vivre avec vous, contiendraient pour moi plus de félicité que cinquante années de vie ordinaire."
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| | | Melaka Chromatique
Nombre de messages : 4771 Age : 34 Localisation : Dans le bureau des Sordides Assistantes ! Date d'inscription : 30/10/2010
Personnages RP Pseudo: Melaka Pseudo : Inayat Pseudo :
| Sujet: Re: [Auteur] John Keats Sam 31 Déc - 17:32 | |
| Merci pour vos commentaires les filles. J'avais effectivement entendu parlé du film réalisé en hommage à l'auteur, mais je ne l'ai pas vu. Il a l'air pas mal. Et je suis contente de savoir que c'est un de tes poètes préférés Franz, je n'avais pas vu ton article. Je vous en reposte un autre par la même occasion. Ode sur la mélancolie
Non, non, ne va pas boire au Léthé, ne va pas boire Le vin empoisonné de l’aconit aux rudes racines ; N’accepte pas que ton front pâle reçoive le baiser De la belladone, vermeil raisin de Proserpine ; Ne fais pas ton rosaire des grains de l’if ; Ne laisse pas le scarabée, ni la phalène devenir Ta Psyché de deuil, ni le hibou duveteux Le compagnon des mystères de la Mélancolie ; Car l’ombre rejoindrait la torpeur des ombres Et noierait l’angoisse vigilante de l’âme.
Mais quand s’abattra la Mélancolie, Soudaine messagère des Cieux, nuage de larmes, Qui abreuve les fleurs aux têtes tombantes, Et cache la verte colline sous un linceul d’Avril; Alors gave ta peine d’une rose matinale, Ou de l’arc-en-ciel entre vague et rivage, Ou de l’abondance des globes de pivoines ; Ou si ta maîtresse montre une riche colère, Emprisonne sa douce main dans la tienne, laisse-la Se déchaîner et bois son regard sans pareil.
Sa demeure est dans la Beauté - mortelle condition ; Et dans la Joie, dont la main esquisse à ses lèvres Un éternel adieu ; et dans le douloureux Plaisir, Qui se change en poison tandis que la bouche, abeille, L’aspire : oui, au temple même de la Félicité, La Mélancolie voilée trouve un sanctuaire souverain Que seul sait voir celui qui peut, d’une langue vive, Faire éclater les raisins de la Joie contre son fin palais ; Son âme goûtera le triste pouvoir de la Déesse Et deviendra l’un de ses trophées de nuages. Traduit par Alain Suied | |
| | | Mike001 Coordonnateur Littéraire
Nombre de messages : 2662 Age : 23 Localisation : West Coast ; Phare Ouest Date d'inscription : 26/09/2010
Personnages RP Pseudo: Mike le Fremen Pseudo : Hannibal Smith Pseudo : Davy et Mickey
| Sujet: Re: [Auteur] John Keats Lun 2 Jan - 20:48 | |
| John Keats apparaît (sous une forme particulière ceci dit, mais je ne spoilerai pas) comme l'un des personnages principaux du roman La Chute d'Hypérion (second tome des Cantos d'Hypérion, l'un des meilleurs cycles de SF qui existe) de Dan Simmons si cela vous intéresse. | |
| | | Melaka Chromatique
Nombre de messages : 4771 Age : 34 Localisation : Dans le bureau des Sordides Assistantes ! Date d'inscription : 30/10/2010
Personnages RP Pseudo: Melaka Pseudo : Inayat Pseudo :
| Sujet: Re: [Auteur] John Keats Mar 17 Jan - 13:55 | |
| Merci pour les infos Mike La Vigile de la Sainte-Agnès
Pareils à des fantômes, ils se glissent dans la vaste salle; Pareils à des fantômes, ils se glissent jusqu'au portail de fer: Là gît le Portier, dans une posture incommode; Une énorme bouteille vide à ses côtés: Le dogue attentif se relève, secoue son poil Mais son œil avisé reconnaît une forme familière ; L'un après l'autre, les verrous se détachent, Les chaînes sont posées sans bruit sur les dalles usées; La clé tourne et la porte gémit sur ses gonds.
[...]
Et ils s'enfuient. Aïe! Dans les temps anciens Ces amants s'enfuirent dans la tempête. Cette nuit-là, le Baron rêva mille malheurs, Et tous ses hôtes-guerriers connurent des cauchemars De formes et d'ombres de sorcières et de démons Et de vers avides dans des cercueils. La vieille Angela Mourut secouée par une attaque, son maigre visage révulsé; Le diseur de chapelets, ayant égrené mille Avé, Pour toujours oublié, s'endormit parmi les cendres froides. Traduit par Alain Suied | |
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| Sujet: Re: [Auteur] John Keats | |
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