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 [Bouquin] Time's Arrow / La flèche du Temps.

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Franz

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MessageSujet: [Bouquin] Time's Arrow / La flèche du Temps.   [Bouquin] Time's Arrow / La flèche du Temps. Icon_minitimeMer 25 Avr - 15:34

[Bouquin] Time's Arrow / La flèche du Temps. Timesarrow

Time's Arrow / La Flèche du Temps est un livre d'anthologie écrit par Martin Amis et publié en 1991. Martin Amis est un auteur britannique, fils de Kingsley Amis, lui-même auteur du livre Lucky Jim (1954) que je qualifierai de satire. Martin Amis est un amoureux de la littérature Américaine mais a un point de vue extrêmement péjoratif de la société américaine. Time's Arrow est un livre que j'ai dévoré pendant trois jours. Son message est unique et très fort. Le livre évoque les horreurs de la Shoah à travers le personnage de Tod Friendly dans une ambiance américaine caricaturale des sixties.

S'il ne s'agissait que de ça.

Le livre est raconté à l'envers. C'est un roman d'apprentissage à l'envers, on appelle ça en anglais "A reserval Bildungroman". On commence le livre lorsque Tod meurt aux Etats-Unis et on le termine lorsqu'il né en Allemagne. Manger revient dans ce monde renversé à vomir dans son assiette, reconstituer le plat, le refroidir au micro-ondes, le ranger dans son emballage, aller au Supermarché, être payé par la caissière pour le remettre en rayon. Donner, c'est reprendre, reprendre c'est voler. Je me rappelle d'un passage dans le livre où Tod prend des mains d'un enfant des bonbons et qu'il va les revendre à l'épicerie. Les gens deviennent jeunes, les gens marchent à l'envers, les gens se parlent à l'envers - ce qui force le lecteur a lire une conversation de la fin jusqu'au début. Aller aux toilettes consiste à tirer la chasse d'eau pour que les excréments resurgissent et patati, patata, ai-je besoin d'expliquer la suite des choses ?

Le principe de causalité est inversé, ce qui inverse la valeur morale. Donc, de ce point de vue-là, la Shoah serait une bonne chose. Quand on lit pour la première fois les dialogues à l'envers, on essaie tout de suite de remettre les choses dans l'ordre. Et on commence ce processus tout le long du livre pour pouvoir à la fin mettre de l'ordre dans le chaos que représente Auschwitz. Dans cet ordre inversé, on découvre qu'Auschwitz a une logique et c'est grâce à cet effet inverse qu'on peut trouver du sens à la Shoah.
Dans le livre, les juifs sont sauvés.

Tod Friendly est la quatrième identité du personnage. A chaque fois qu'il quitte un pays, il change de nom pour ne pas être retrouvé et condamné pour crime contre l'humanité. Il meurt aux Etats-Unis sous le nom de Tod Friendly (Tod signifie "la mort" en Allemand) mais né sous le nom de Odilo Unverdorben (Unverdorben signifie "pur" en allemand, ou "innocent"). A la fin du livre, on apprend comment il est devenu médecin, comment il a été recruté par les forces SS pour s'occuper de l'infirmerie d'Auschwitz. C'est important de savoir ça, cela implique qu'à Auschwitz, il sauve des juifs des chambres à gaz, qu'il soigne les femmes lorsqu'il leur injecte des toxines dans le corps. Lorsque Tod fume, il commence par les cendres, qui se transforment en cigarette. (Un personnage secondaire médecin d'Auschwitz est influencé de Josef Mengele).
A l'inverse, en temps que médecin post-guerre, il blesse ses patients : les bébés repartent en pleurant de douleur, les prostituées repartent avec des bleus et le nez cassé, elles sont en sécurité dans la rue plutôt qu'à l'hôpital. Il s'agit de trouver de la logique dans le désordre absolue. La médecine a un sens ambigu : ce qui peut te sauver peut te tuer également. C'est un peu comme le mythe de Méduse : la première goutte de son sang peut sauver alors que la seconde peut tuer.

Le narrateur du livre est particulier à décrire. C'est à la fois Tod sans l'être. C'est un narrateur homodiégétique mais de focalisation externe, c'est-à-dire qu'il fait parti de l'histoire mais est incapable d'expliquer pour quelle raison Tod agit de telle ou telle manière. Il a accès à ses rêves et ses cauchemars. C'est un peu comme si il était une seconde voix, celle qui accompagne le lecteur et qui se pose les mêmes questions que le lecteur. Et cette seconde voix est touchante : il ne sait rien mais a une âme. Il reconnaît que ce monde est invraisemblable et subit les horreurs que sont manger ou aller aux toilettes. Il ne comprend pas pourquoi personne n'est choqué de retrouver sa jeunesse et ses forces. Il ne comprend pas pour quelle raison il rêve en allemand. C'est grâce à lui que le lecteur a conscience que l'on se trouve à l'opposé du réalisme. Tout comme l'image du corps est totalement déformé. Tod a une fascination morbide pour les corps déformés, car il est lui-même déformé. Ça me faisait pensé au Portrait de Dorian Grey d'Oscar Wilde, le tableau de Dorian devient hideux parce que son âme est hideuse. Tod est incapable de se regarder dans un miroir comme Dorian est incapable d'affronter son portrait. Le narrateur ne comprend qu'à la fin du roman pour quelle raison Tod a peur de se voir. Parce qu'il a honte.
Le narrateur est désorienté, cette seconde voix est un concept de psychanalyse. C'est un peu comme si le lecteur était un psychanalyste essayant de découvrir le traumatisme caché. On cherche avec le narrateur a identifié cette chose secrète, celle qui ne veut pas sortir de l'ombre. Lorsqu'elle se révèle, on est incapable de l'expliquer, mais on a la sensation de "déjà-vu". Le travail de psy consiste donc à essayer de relever les symptômes : Tod a peur du noir, aime l'horreur, il rêve de bébés (les bébés bombes : les bébés qui pleurent lors des fouilles SS et qui révèlent la présence de juifs), il aime la foule et s'y perdre parce qu'il a peur de sa propre identité. Il cache sa langue maternelle qui lui devient alors étrangère. C'est un concept très bien analysé par Freud - L'inquiétante étrangeté (Das Unheimliche en allemand).



L'idée implicite est qu'Amis remet en cause le Progrès et le sens de l'Histoire. L'Histoire a un sens clair, les historiens se contentent d'énoncer les faits, cherchent à les expliquer. Amis cherche à expliquer le progrès. Celui qui amène la destruction et le Mal. La médecine qui finit par détruire tout comme le fait la technologie. Le Mal apporte la séparation quand le Bien réunit. A la fin du livre, Tod (qui représente le Mal) et le narrateur (le bien) se retrouvent, se réunissent. Ils fusionnent dans le pire endroit possible : Auschwitz. La plupart des gens ont une vision cyclique du temps : de poussière à poussière. Le quotidien représente une succession des mêmes activités selon le mouvement des saisons. Et, quelque part, la fin du temps est rassurante : il y a la rédemption. Tod essaie d'expier ses péchés en faisant le bien à Auchwitz. Donc, le monde à la fin n'est pas justifié, l'Histoire n'a pas de sens.



On rit au début et on est de marbre à la fin.
A lire, plutôt deux fois qu'une.
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