La recherche de la fécalité

Parce que nous avons de la poésie une idée bien vague, parce que la poésie ne s'est pas arrêtée à Baudelaire ou à Lamartine, voici une petite initiation à une écriture beaucoup plus contemporaine.


La recherche de la fécalité


Là où ça sent la merde
ça sent l'être.
L'homme aurait très bien pu ne pas chier,
ne pas ouvrir la poche anale,
mais il a choisi de chier
comme il aurait choisi de vivre
au lieu de consentir à vivre mort.

C'est que pour ne pas faire caca,
il lui aurait fallu consentir
à ne pas être,
mais il n'a pas pu se résoudre à perdre l'être
c'est-à-dire à mourir vivant.

Il y a dans l'être
quelque chose de particulièrement tentant pour l'homme
et ce quelque chose est justement

LE CACA.
(Ici rugissement.)

[...]

"La recherche de la fécalité" (extrait choisi) in Pour en finir avec le jugement de dieu, Antonin Artaud.

Etre, étron, êtrons... futur improbable de l'homme !

Ce texte est-il écrit par toi Goldmund ou est-il, comme annoncé, un extrait que tu aurais pu mettre dans l'anthologie poétique ?

Comme je l'ai indiqué, non seulement ce texte n'est pas de moi, mais il est de la main de l'un de nos plus célèbres penseurs de la modernité, Antonin Artaud, écrivain qui se rapporche plus ou moins de la veine surréaliste, et qui est notamment l'auteur d'un ouvrage critique sur le théâtre absolument incontournable: le Théâtre et son double. Je suis tombé sur ce recueil poétique, je l'ai trouvé amusant, le titre accrocheur, je vous en ai donc fait partager un petit bout.

Et encore, là c'est compréhensible. L'introduction sous forme de borborygmes de Pour en Finir avec le Jugement de Dieu déplairait sans doute en section poésie.

Ceci dit, "quaquaquaqua" dans l'attente d'un Godot est pour le moins surprenant de même. Ritournelle...

Il faut que tout
Soit rangé
A un poil près
Dans un ordre
Fulminant.

L'introduction est géniale.

Je trouve ça brillant. La première phrase est d'une force incroyable (et ce n'est pas la seule).
Merci.

C'est...inhabituel
En brisant les normes, on attise la réflexion.
Merci d'avoir repoussé mon horizon.

Citation :

Quand on a lu Artaud, on ne s'en remet pas.

dans la préface d'Alain Jouffroy pour L'Ombilic des Limbes suivi de Le Pèse-nerfs et autres textes, NRF Gallimard, collection Poésie, Paris, 2006. Je ne peux être que totalement d'accord.

Citation :

Ce qu'il dit, il le dit non par sa vie même (ce serait trop simple), mais par l'ébranlement de ce qui l'appelle hors de la vie ordinaire.

Maurice Blanchot