hématome irisé de bleu

Hématome irisé de bleu

Apprendre à vivre avec soi même
Sans oublier la part qui ne plait pas
Sans rejeter les troubles et les regards bas



Vouloir se contempler en agrippant les plaies vives qui circulent dans la bile froide de ses veillées sans feu, alors qu’on sent en soi le gamin. Et s’il s’élance dans le sable et construit des châteaux merveilleux, c’est pour ne pas avoir peur du désert qui s’étend devant lui.
Se vautrer dans l’or fin en pensant que la pluie ne sera jamais pour demain, mais s’inonder de larmes de se voir grise et pâle comme un cheveu tombé, qui traîne sur une épaule mais qu’on voudrait frotter.
Se tenir au sommet d’une houle mauvaise, jeter sa face vers le ciel pour maudire et hurler alors que sous sa main vient se placer l’enfant, et sa tête dorée, qu’il veut voir protégée.



C’est un chemin sans voix qui porte
Une semelle de plomb dans l’ogre de la nuit
Un pied de vigne que l’on boit déjà

Après relecture j'arrive voir la beauté et la force de chacune de ces phrases prises séparément.

Par contre je n'arrive toujours pas à m'émouvoir du texte en lui-même.

Soit il manque quelque chose, soit je suis tout simplement insensible (mais c'est peut être un truc de fille qui m'échappe, va savoir).


J'aime moi aussi l'image du château de sable et du désert, ainsi que celle du pied de vigne.

Je commencerai par dire que l'encadrement de la prose par les deux courtes strophes qui respectivement ouvre et ferme le poème est assez intéressant ; la construction imite, il me semble, le repli du locuteur. Le corps qui énonce ces mots a le pouvoir (et cela grâce à l'écriture) de se recroqueviller et pour ainsi dire se pénétrer lui-même : les bouts de fantasmes et les bouts de corps fusionnent puis engendrent des monstres de l'esprit, couchés sur le papier. Ici, on boit "un pied de vigne" (il faut imaginer un vrai pied) et "le chemin porte une semelle" ; il ne faut pas comprendre : "des gens marchaient sur ce chemin" c'est belle et bien cette image de chemin qui devient un pied, il devient matière vivante.

L'idée d'auto-pénétration pour signifier la recherche de soi, la compréhension de soi, n'est pas originale, c'est ton traitement du sujet qui est très intéressant. Le corps se mange et se digère en poésie, en fantasme et rêverie ; à présent dans l'estomac de "l'ogre de la nuit". Estomac dans lequel on se dévore encore et toujours, on se mâche sans cesse, pour élaguer "les troubles et les regards bas" (même si il est dit qu'on ne veut pas les rejeter) et finalement remplacer les membres manquants par des souvenirs invoqués (l'idée d'invocation est soutenue par ces verbes pronominaux qui sont comme des injonctions).

(Ajout : Le ton de la première strophe est un peu bateau, trop cutané. Comme l'a soulevé Hérisson, il faut revoir la longueur des phrases ainsi que leur enchaînement : on trébuche quelquefois. La strophe qui ferme le poème est superbe.)