Eclat en pièces détachées [Citations]

Cette phrase de Franz Kafka, que tu as cité Franzette, est absolument superbe. Et tellement vraie. J'en publie une autre histoire de justifier mon intervention.... disons... Du Giraudoux puisque j'ai son Electre à portée de main.

Une petite remarque liminaire pour ne pas que vous soyez perdus. Electre, comme Antigone, sont des figures mythologiques associées à la transgression. Antigone brave la cité pour enterrer son frère, Electre assassine la reine - sa mère - ainsi que le roi - le nouvel amant de cette dernière - pour venger le meurtre de son père. Que ce soit chez les Anciens (Sophocle, Eshyle, Euripide) ou chez les Modernes (Anouilh, Giraudoux, qui écriven au XXe siècle) on retrouve toujours cette idée que le personnage tragique (Electre, Antigone) incarne un ordre divin, celui de la vertu, du surmoi, de la poésie et du destin venant se fracasser contre un ordre terrestre, banal, un ordre du quotidien incarné ici par le roi Egisthe, un ordre marqué par le hasard et la réversibilité des choses. Toute l'ampleur tragique vient de la friction entre ces deux mondes, le monde connu et le monde fantasmé. Sidérant de constater combien nos leader politiques actuels me font penser à Egisthe, dont je rapporte ici le propos:

"Il n'est pas deux façons de faire signe, président: c'est se séparer de la troupe, monter sur une éminence et agiter sa lanterne ou son drapeau. On trahit la terre comme on trahit une place assiégée, par des signaux. Le philosophe les fait, de sa terrasse, le poète ou le désespéré les fait, de son balcon ou de son plongeoir. Si les dieux, depuis dix ans, n'arrivent point à se mêler de notre vie, c'est que j'ai veillé à ce que les promontoires soient vides et les champs de foire combles, c'est que j'ai ordonné le mariage des rêveurs, des peintres et des chimistes; cest que, pour éviter de créer entre nos citoyeux ces différences de race morale qui ne peuvent manquer de colorer différemment les hommes aux yeux des dieux, j'ai toujours feint d'attribuer une importance énorme aux délits et dérisoire aux crimes. Rien n'entretient mieux la fixité divine que la même atmosphère égale autour des assassinats et des vols de pain. Je dois reconnaître que sur ce point la justice des tribunaux m'a abondamment secondé. Et toutes les fois où j'ai été obligé de sévir, de là-haut on ne l'a point vu. Aucune de mes sanctions n'a été assez voyante pour permettre aux dieux l'ajustement de leur vengance. Pas d'exil. Je tue. L'exilé a la même tendance à grimper les chemins escarpés que la coccinelle. Et je ne monte pas mes supplices en évidence. Alors que nos pauvres villes voisines se trahissent elles-mêmes en érigeant leurs gibets au faîte des collines, moi je crucifie au fond des vallées."

Citation :

Cette phrase de Franz Kafka, que tu as cité Franzette, est absolument superbe. Et tellement vraie.

Oui, tellement. Dans la correspondance Lettre à Milena, Franz est dans tous ses états : la tristesse, la joie, l'amour niais...
Il dit des choses comme : "Je m'abîme dans tes yeux quand je me penche sur toi." et je cite une phrase semblable à celle que j'ai citée auparavant : "De même quand je dis que tu es ce que j'aime le plus, ce n'est peut-être pas de l'amour à proprement parler; l'amour c'est le couteau que je retourne dans ma plaie."


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"Mon verre s'est brisé comme un éclat de rire"

Alcools, d'Apollinaire


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"Quand m'apparaît le lugubre tableau de cette nuit qui fut l'agonie de ma vie à Rome, quand je songe à cette nuit où je quittai tant d'objets si chers, maintenant encore des larmes s'échappent de mes yeux."

Les tristes, d'Ovide

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"J'aurai cette femme ; je l'enlèverai au mari qui la profane : j'oserai la ravir au Dieu même qu'elle adore. Quel délice d'être tour à tour l'objet et le vainqueur de ses remords ! Loin de moi l'idée de détruire les préjugés qui l'assiègent ! ils ajouteront à mon bonheur et à ma gloire. Qu'elle croie à la vertu, mais qu'elle me la sacrifie : que ses fautes l'épouvantent sans pouvoir l'arrêter ; et qu'agitée de mille terreurs, elle ne puisse les oublier, les vaincre que dans mes bras. Qu'alors, j'y consens, elle me dise :"je t'adore" ; elle seule, entre toutes les femmes, sera digne de prononcer ce mot. Je serai vraiment le Dieu qu'elle aura préféré."

Les liaisons dangereuses de Laclos.


J'arrête pour aujourd'hui !

"Si ma vie ne fut qu'un mess, par là j'entends un désordre permanent mais inconsciemment ordonné par moi-même, certainement je peux dire que c'était un mess d'officiers supérieurs, filles à soldats passées illicitement une nuit comme ça, tirer un coup, aux arrêts sans aucune rigueur et rejetées dans la seconde qui suivait celui-ci, éclectisme de la queue, prescience de l'abjection et conscience de l'abject. L'indélébile est auxiliaire mais hélas imparable. Par contre, indispensable est l'oubli. On y retrouve tous les flagrants mensonges du rêve et les vertiges du mirifique. C'est le goudron des cantonniers, lave fumeuse et satanique dans laquelle j'aimais m'enliser en surface et emprunter mes pas adolescents avec cet espoir innocent d'y laisser quelque trace de mon éphémère trajectoire. Avoir une seule idée en tête implique que l'on en a plusieurs, pas des idées n'est-ce pas, je veux bien dire par là des têtes, tête de nœud, tête de lard, de mule, d'intello, de métallo. De gorgone quoi. Tout abruti constant est un gorgonien qui se sait. Cela entendu que nul ne s'ignore. Les miroirs sont là, toujours présents hélas jamais futurs, parfois sans tain pour les moins cons, souvent brisés pour suicidaires, sorcières pour mateurs ou amateurs du fish-eye. Celui de l'âme, le plus nocif, se loue à l'heure à la journée ou à vie c'est selon, hors de prix pour le fauchman fortuné, prohibitif pour le yachtman sans-un.
S'il est ici ou là question de moi, sans-un j'étais, sans-un je suis, sans-un j'aimerais être. Encore qu'être ou ne pas naître. La solitude sans être un problème en soi est une solution juteuse. Je hais la facilité, ayant conscience que la mienne est factice, faite de l'approche et la maîtrise de quelques disciplines et implications directionnelles. Je hais, je hais les disciplines autant que les recteurs, les censeurs et les mâles baisés. Délits furtifs, vérités par omission, insécurité en béton du moi et du je. Au coin les mains sur la tête, traumatisme crânien."

Gainsbourg. Extraordinaire.

"Le vice ressemble à une courbure de l'âme" - Henri Bergson, le rire.

"Pourquoi les gens naissent-ils ? Pourquoi meurent-ils ? Et pourquoi cherchent-ils dans l'intervalle à porter le plus souvent possible une montre à quartz numérique ?"

"La science a certes quelques magnifiques réussites à son actif mais à tout prendre, je préfère de loin être heureux plutôt qu'avoir raison."

Douglas Adams.

Un peu de nostalgie devant ce monument, mon maître d'un temps.
C'était quand même quelqu'un

"Lucius - Comment as-tu su que j'étais là ?
Ivy - Je t'ai vu par la fenêtre. Non, je ne te dirais pas quelle est ta couleur. Arrête de poser la question. Quand nous serons mariés, tu danseras avec moi ? J'aime danser, je trouve ça très agréable. Pourquoi ne dis-tu jamais ce que tu as dans la tête ?
Lucius - Pourquoi faut-il toujours que tu dises ce qu'il y a dans la tienne ? Pourquoi tu décides quand je voudrais décider ? Si j'ai envie de danser, c'est moi qui t'inviterais à danser... Si j'ai envie de parler, c'est moi qui ouvrirais la bouche et qui parlerais...Il faut toujours que tout le monde me presse pour que je parle plus ! Pourquoi faut-il que je te dise que tu occupes mes pensées dés que je me léve le matin ou qu'il y a des moments où je suis incapable de réflechir ou de bien faire mon travail ? A quoi est-ce que ça nous avançerait que je te dise que les seules fois où j'ai peur comme tout le monde, c'est quand je pense que l'on pourrait te faire du mal... Et c'est pour ça que tu m'as trouvé assis sur ces marches. J'ai peur pour toi avant d'avoir peur pour tous les autres... Et oui... Je t'inviterais à danser le soir de nos noces." Le village


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"Comme le poête anglais, je crois qu'un moment de beauté s'organise selon des lois de composition bien plus fortes que tout ce que l'esprit humain aurait pu concevoir. Mais j'ai déjà dit que j'ai du mal à définir la beauté. Chaque instant est unique, chaque jour je devrais considérer l'univers comme s'il m'était offert pour la première fois.
Je retiens cette minute de grâce, figée dans ma mémoire, où tout se mêlait mystérieusement, le vent léger venu des montagnes qui faisait danser les feuilles des magnolias, un envol de cignes, le frémissement d'une troupe de canards sur l'eau que le soleil teintait d'émeraude, le mouvement lent du vieux bateau à vapeur, et, debout sur un banc, le petit personnage qui m'envoyait je ne sais quel message d'amour et dont la gracile figure, perdue dans cet ensemble, était , en réalité, le point exact de rencontre avec la beauté." Franz et Clara - Phillipe Labro.

"Mon verre s'est brisé comme un éclat de rire"

Ce "verre" est à la fois très beau, et très triste. C'est un sourire mouillé de larmes. Un vers comme j'aimerais en lire plus souvent.

Le trash de Bukowski et ses récits dégénérés comme Les contes de la folie ordinaire. Selon son approche, on peut trouver ça très vulgaire ou comme moi, assez drôle !
Je mets quand même ça en spoiler hein ^^

Spoiler:

"Je l'ai serrée dans le trésor de mon coeur. Je l'y garde comme une dette secrète que je suis heureux de penser que je ne pourrai jamais payer. Elle est embaumée et rafraîchie par la myrrhe et les aromates de maintes larmes. Quand la sagesse ne me fut d'aucun profit, quand la philosophie demeura stérile, quand les proverbes et les phrases de ceux qui cherchèrent à me consoler furent comme de la poussière et de la cendre dans ma bouche, le souvenir de ce petit geste d'amour, adorable et silencieux, a descellé pour moi tous les puits de la pitié. Il a fait fleurir le désert comme une rose, il m'a arraché à l'amertume solitaire de l'exil pour me mettre en harmonie avec le grand coeur blessé et brisé du monde. "

De Profundis - Oscar Wilde

"Ecrire c'est vivre la plume, même si elle s'égare dans des sommets fantasques, ou dans des idées qui ne sont déjà plus nôtres. Ecrire n'est pas un processus complexe qui viserait à "structurer" selon des principes axiomatiques. C'est aussi une réflexion sur les mots et les phrases, leur tournure, leur impact. La qualité "productive" en somme." - Tr0n.

"Trop la classe je suis entre Oscar Wilde et Baudelaire" - Tr0n

Je m'avance peut-être, mais celle-ci risque de plaire à Goldmund. Du coup, je la mets pour lui.


"Je suis toutes ces journées que tu as choisi d'ignorer." - All I need de RH



Sinon :

"On ne devient pas vieux pour avoir vécu un certain nombre d'années, on devient vieux parce qu'on a déserté son idéal. Les années rident la peau ; renoncer à son idéal ride l'âme" - Douglas MacArthur

Matisse :

"Regarder c'est déjà créer."

"Il y a une sorte de plaisir pour l'orgueil, à se moquer des défauts qu'on n'a point, et ces jouissances-là sont si douces à l'homme et particulièrement aux imbéciles, qu'il est très rare de les y voir renoncer... Ça établit des méchancetés d'ailleurs, de froids bons mots, de plats calembours, et pour la société, c'est-à-dire pour une collection d'êtres que l'ennui rassemble et que la stupidité modifie, il est si doux de parler deux ou trois heures sans avoir rien dit, si délicieux de briller aux dépens des autres et d'annoncer en blâmant un vice qu'on est bien éloigné de l'avoir... c'est une espèce d'éloge qu'on prononce tacitement sur soi-même; à ce prix-là on consent même à s'unir aux autres, à faire cabale pour écraser l'individu dont le grand tort est de ne pas penser comme le commun des mortels, et l'on se retire chez soi tout gonflé de l'esprit qu'on a eu, quand on n'a foncièrement prouvé par une telle conduite que du pédantisme et de la bêtise."

Augustine Villebranche, Sade

"Une toile n'est pas faite pour être accrochée à un simple mur"

P. Picasso